CA Grenoble, 1re ch., 8 octobre 2024, n° 23/00590
GRENOBLE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Arcade Foncier (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Clerc
Conseillers :
Mme Blatry, Mme Lamoine
Avocats :
Me Le Mat, Me Fiat, Me Harel
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Selon promesse de vente conclue en la forme notariée le 2 août 2019, M. [F] [T] s'est engagé à vendre à la SARL Arcade Foncier une parcelle située sur la commune de [Localité 7], au prix de 360.000€, avec un terme fixé au 2 juin 2020 et sous conditions suspensives de droit commun et particulières.
En plus d'une indemnité d'immobilisation de 36.000€, il était stipulé une pénalité d'un même montant dans le cas où, toutes les conditions suspensives étant remplies, l'une des parties ne régulariserait pas l'acte authentique.
Par courrier du 11 mai 2020, faisant réponse au courrier de M. [T] du 4 mai 2020 la mettant en demeure de justifier du dépôt d'une demande de permis d'aménager, la société Arcade Foncier a dit ne pas lever l'option d'achat au motif que son projet se trouvera soumis à une participation au titre de l'assainissement collectif, de sorte que la condition tenant à l'absence d'assujettissement à une autre taxe que la TLE et la PVR était défaillie.
Selon courrier recommandé avec AR du 6 août 2020, M. [T] a vainement mis en demeure la société Arcade Foncier d'avoir à lui verser la pénalité de 36.000€ ainsi que l'indemnité d'immobilisation de même montant.
Par acte d'huissier du 20 juillet 2021, M. [T] a assigné la société Arcade Foncier devant le tribunal judiciaire de Grenoble en paiement de l'indemnité d'immobilisation et de la pénalité contractuelle.
Par jugement contradictoire du 26 janvier 2023, le tribunal précité a':
condamné la société Arcade Foncier à payer à M. [T]':
la somme de 36.000€ au titre de l'indemnité d'immobilisation,
la somme de 1€ au titre de la clause pénale,
la somme de 2.500€ sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile.
débouté la société Arcade Foncier de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
condamné la société Arcade Foncier aux entiers dépens.
Par déclaration déposée le 6 février 2023, la société Arcade Foncier a relevé appel.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 3 octobre 2023 sur le fondement des articles 1103 et suivants, 1221, 1231-1, 1304-3, 1353 du code civil, et des articles 699 et 700 du code de procédure civile la société Arcade Foncier demande à la cour de':
à titre principal, infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré
et statuant à nouveau,
à titre principal,
débouter M. [T]'de l'ensemble de ses demandes, fins et moyens et de son appel incident,
constater la défaillance de l'une au moins des conditions suspensives insérées dans la promesse de vente signée le 2 août 2019, en dehors de toute responsabilité et/ou carence de sa part,
déclarer la clause pénale stipulée en pages 25 et 26 de la promesse unilatérale de vente, conclue par acte authentique le 2 août 2019 entre elle et M. [T], inapplicable en l'espèce en l'absence de toute levée d'option, et donc d'engagement d'acheter, qui aurait rendu ladite promesse synallagmatique,
ordonner la restitution de la somme de 36.000€ à son bénéfice par M. [T], montant de l'indemnité d'immobilisation qui a été versé à ce premier par cette deuxième au titre de l'exécution provisoire du jugement déféré,
ordonner la restitution de la somme de 1 euro à son bénéfice par M. [T], montant de l'indemnité relative à la clause pénale qui a été versé à ce premier par cette deuxième au titre de l'exécution provisoire du jugement déféré,
à titre subsidiaire,
déclarer la(les) clause(s) pénales prévue(s) à la promesse comme manifestement excessive(s) en l'absence de tout préjudice subi par monsieur M. [T] en raison de l'immobilisation de son bien pendant neuf mois,
prononcer en conséquence l'anéantissement, ou à tout le moins la minoration à hauteur de l'euro symbolique, de la(les) clause(s) pénales prévue(s) à la promesse,
en tout état de cause,
condamner M. [T]'à lui payer la somme de 10.000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner M. [T]'aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel et autoriser Me Le Mat, avocat, sur son affirmation de droit qu'elle en a fait l'avance, à les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.
Dans ses dernières conclusions déposées le 7 mai 2024 au visa des articles 1103 et 1124 du code civil, M. [T] entend voir la cour':
débouter la société Arcade Foncier de son appel principal,
confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
par la voie de l'appel incident, infirmer le jugement déféré en ce qu'il a'condamné la société Arcade Foncier à lui payer la somme de 1 euro au titre de la clause pénale,
constater le comportement fautif de la société Arcade Foncier,
constater la man'uvre frauduleuse de la société Arcade Foncier,
par conséquent,
condamner la société Arcade Foncier à lui payer la somme de 36.000€ correspondant au montant de la clause pénale, soit un montant total de 72.000€,
condamner la société Arcade Foncier à lui payer la somme de 3.500€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner la société Arcade Foncier aux entiers dépens de première instance et d'appel.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 mai 2024.
Il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens en fait et en droit.
MOTIFS
Il est rappelé en tant que de besoin que la cour n'est pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendent inopérantes.
Sur le contenu de la promesse de vente notariée (indemnité, conditions suspensives et pénalité)
Le jugement déféré est d'ores et déjà confirmé en ce qu'il a, par d'exacts motifs adoptés par la cour, exclu du débat sur la réalisation des conditions suspensives et l'exigibilité de l'indemnité et de la pénalité litigieuses, le droit de préemption visé en page 11 de la promesse de vente notariée, ayant relevé à bon droit qu'il s'agissait d'une réserve et non pas d'une condition suspensive.
Il convient de reproduire littéralement les clauses de la promesse de vente notariée qui sont en litige, afin d'en avoir une lecture objective.
Ainsi, cette promesse de vente contient en page 11 un paragraphe ainsi libellé'(les soulignements figurent dans l'acte) :
Indemnité d'immobilisation-dispense de versement immédiat
Les parties conviennent de fixer le montant de l'indemnité d'immobilisation à la somme forfaitaire de trente-six mille euros (36.000eur).
De convention expresse entre elles, le bénéficiaire est dispensé du versement immédiat de cette somme.
Toutefois, dans le cas où toutes les conditions suspensives ayant été réalisées, et faute pour le bénéficiaire ou ses substitués d'avoir réalisé l'acquisition dans les délais et conditions ci-dessus, ce dernier s'oblige irrévocablement au versement de celle-ci, à première demande du promettant et à titre d'indemnité forfaitaire pour l'immobilisation entre ses mains du bien pendant la durée des présentes.
La promesse de vente notariée mentionne'également en pages 11, 12, 13 et 14 (les soulignements figurent dans l'acte) :
des conditions suspensives de droit commun «'stipulées en faveur du bénéficiaire qui sera seul à pouvoir s'en prévaloir'» ainsi libellées':
«'- Les titres de propriété antérieurs, les pièces d'urbanisme ou autres, ne doivent pas révéler de servitudes et charges, ni de vices non indiqués aux présentes pouvant grever l'immeuble et en diminuer sensiblement la valeur ou le rendre impropre à la destination que le bénéficiaire entend donner,
Le promettant devra justifier d'une origine de propriété régulière remontant à un titre translatif d'au moins trente ans,
L'état hypothécaire ne doit pas révéler de saisies ou d'inscriptions dont le solde de créances inscrites augmenté du coût des radiations à effectuer serait supérieur au prix disponible.'»
des conditions suspensives particulières
1° ) l'obtention du permis d'aménager un lotissement
(') Le bénéficiaire devra obtenir de l'autorité compétente un permis d'aménager non soumis à un recours contentieux ni retrait administratif permettant la division du terrain en six lots de terrains à bâtir, exempts de logements sociaux ou aidés
Le promettant habilite le bénéficiaire à effectuer une telle demande.
Il est précisé que le bénéficiaire devra, pour se prévaloir de la présente condition suspensive, justifier auprès du promettant du dépôt de la demande d'autorisation d'aménager un lotissement et ce dans le délai de quatre mois à compter de ce jour, au moyen d'un récépissé délivré par l'autorité compétente.
A défaut, la condition sera réputée réalisée pour l'application de la stipulation de pénalité ci-après, et le promettant pourra reprendre sa pleine et entière liberté.
La présente condition vaut autorisation immédiate pour le bénéficiaire':
de déposer à ses frais la demande de permis d'aménager conformément aux dispositions d'urbanisme applicables,
de réaliser également à ses frais et sous sa responsabilité tous sondages, études de sol, de sous-sol, tous prélèvements, toutes analyses afin de vérifier que les aménagements ne nécessiteront pas, au regard du projet du bénéficiaire tel qu'il est défini ci-dessus un investissement dépassant le coût normal de tels travaux
A défaut, les présentes seront caduques et non avenues sans indemnité de part et d'autre.
Étant observé qu'en cas de non-réalisation des présentes pour quelque cause que ce soit, le bénéficiaire devra supprimer à ses frais toutes les traces d'études de sol effectuées.
(suivent des développements sur les délais de recours et l'énoncé du texte de l'article L.332-15 du code de l'urbanisme')
Si ce permis n'a pas fait l'objet ni d'un recours ni d'un retrait dans les délais sus-indiqués la condition suspensive sera réputée réalisée.'
Conditions du permis délivré
Autres conditions suspensives':
que la nature du sous-sol ne comporte pas de sujétions particulières nécessitant des fondations spéciales (pieux, radiers') ni des ouvrages de protection contre l'eau (cuvelage) et ne révèle pas de pollution particulière
qu'aucune investigation, ni participation financière ne soit imposée au titre de fouilles archéologiques,
qu'aucune participation autre que la TLE (Taxe Locale d'Equipement) et la PVR (Participation pour Voieries et Réseaux) ne soit demandée à l'acquéreur.
2°) Obtention d'une garantie d'achèvement
En garantie de l'exécution des travaux constituant la partie du prix payable à terme, le bénéficiaire s'engage à fournir une garantie extrinsèque d'achèvement au plus tard lors de la réalisation des présentes par acte authentique.
3°) Absence de condition suspensive d'obtention d'un prêt
Le bénéficiaire déclare ne recourir à aucun prêt pour le financement de l'acquisition.
En pages 25 et 26 de l'acte notarié, figure une stipulation de pénalité ainsi libellée':
«'Dans le cas où toutes les conditions relatives à l'exécution des présents étant remplies, l'une ou l'autre des parties ne régulariserait pas l'acte authentique et ne satisferait pas ainsi aux obligations alors exigibles, elle devra verser à l'autre partie la somme de trente-six mille euros(36.000 eur) à titre de dommages et intérêts conformément aux dispositions de l'article 1231-5 du code civil (suit l'énoncé de ce texte).
Sur la réalisation des conditions suspensives
Aux termes de l'article 1304-3 alinéa 1er du code civil, la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement.
Sans plus ample discussion, le jugement déféré est d'ores et déjà confirmé en ce qu'il a, par d'exacts motifs adoptés par la cour, exclu du débat sur la réalisation des conditions suspensives et l'exigibilité de l'indemnité et de la pénalité litigieuses, le droit de préemption visé en page 11 de la promesse de vente notariée, ayant relevé à bon droit qu'il s'agissait d'une réserve et non pas d'une condition suspensive.
Pour soutenir fonder ses demandes en restitution de l'indemnité et de la pénalité mises à sa charge,
la société Arcade Foncier conteste en premier lieu que la condition d'obtention du permis d'aménager soit un préalable à l'obtention des autres conditions suspensives insérées en page 14 (dont celle relative à l'absence d'autres participations que celles de la TEL et la PVR), disant que ces dernières sont des conditions suspensives autonomes.
Elle soutient en conséquence que quand bien même elle aurait déposé une demande de permis d'aménager, la condition suspensive ( relatives à la TLE et la PVR) ne se serait pas réalisée dès lors que le certificat d'urbanisme du 17 février 2020 mentionnait l'existence de «'participations'préalablement instaurées par délibérations': participation pour le financement de l'assainissement collectif (article L.331-7 du code de la santé publique)'» (PFAC) , ajoutant que c'est «'la raison pour laquelle elle s'est légitimement abstenue de formaliser pareille demande'» de permis d'aménager.
Elle soutient ainsi que la condition suspensive relative à l'obtention d'un permis d'aménager n'a pas défailli du fait de sa carence et que la condition suspensive relative aux participations complémentaires est de plus fort défaillie par le fait que la PFAC ne constitue pas la seule participation complémentaire dès lors que le raccordement du terrain aux réseaux publics d'adduction et d'évacuation impliquait des servitudes sur les parcelles voisines.
M. [T] réplique en substance que la société Arcade Foncier, bénéficiaire de la condition suspensive d'obtention du permis d'aménager, devait tout mettre en 'uvre pour obtenir la levée de cette condition suspensive stipulée dans son intérêt exclusif et rapporter la preuve des diligences effectuées à cet effet.
Il conteste que la condition suspensive liée aux taxes et participations supplémentaires soit une condition suspensive autonome de celle d'obtenir la délivrance du permis d'aménager qui aurait autorisé cette société à ne pas déposer une demande d'un tel permis dès lors que le certificat d'urbanisme mentionnait l'existence d'une autre participation, opposant à cette fin que la condition suspensive relative à la TLE et la PVR ne pouvait s'appliquer que si le permis d'aménager avait été délivré et ce conformément au texte de la promesse de vente, non sans ajouter que la participation litigieuse (PFAC) n'était pas due de manière certaine en l'état des dispositions du certificat d'urbanisme dont il résulte que seul la délivrance du permis litigieux pouvait renseigner ce point en ce que cette PFAC serait mentionnée dans l'arrêté de permis.
Ce qui doit être retenu.
Il est indiscutable, sauf à dénaturer les termes de la promesse de vente non équivoques (Conditions du permis délivré- Autres conditions suspensives'») que la condition relative aux participations complémentaires autres que la TLE et la PVR ne pouvait être vérifiée dans sa réalisation qu'une fois le permis d'aménager délivré, ce qui impliquait donc que la société Arcade Foncier ait demandé la délivrance de ce permis.
Cette analyse est confortée par le certificat d'urbanisme du 17 février 2020 qui énonce':
«'les participations ci-dessous (dont la PFAC) pourront être exigées à l'occasion d'un permis ou d'une décision de non opposition à une déclaration préalable. Si tel est le cas, elles seront mentionnées dans l'arrêté de permis ou dans un arrêté pris dans les deux mois suivant la date du permis tacite ou de la décision de non opposition à une déclaration préalable'».
Il en résulte que la société Arcade Foncier ne peut pas sérieusement exciper de l'existence de cette PFAC pour s'émanciper de son obligation de solliciter la délivrance d'un permis d'aménager, alors que l'obtention de ce permis était la condition préalable à satisfaire avant de pouvoir ensuite se prévaloir du bénéfice de la condition suspensive relative à l'absence d'autres participations complémentaires, pour le cas où la mention de la PFAC aurait été portée dans ledit permis', aucune certitude sur ce point ne pouvant être acquise dès lors que l'instauration de cette PFCA était soumise à une procédure de délibération préalable, ce qui prive d'autant plus de pertinence l'affirmation de la société Arcade Foncier quant au fait qu'elle allait être soumise à cette nouvelle participation, étant relevé en tout état de cause qu'elle ne peut pas assimiler à l'existence de cette participation d'urbanisme, les servitudes liées au raccordement du terrain aux réseaux publics d'adduction et d'évacuation.
Dès lors, cette condition suspensive d'obtention de permis d'aménager est réputée accomplie, la société Arcade n'ayant pas accompli la diligence mise à sa charge par la promesse de vente de sorte que la non-réalisation de cette condition suspensive lui est imputable.
Le jugement déféré est confirmé en ce sens.
En second lieu, la société Arcade Foncier soutient la défaillance de la condition suspensive relative aux servitudes en faisant valoir que le certificat d'urbanisme a révélé que le terrain promis à vente ne bénéficiait pas des servitudes nécessaires à son raccordement aux réseaux publics d'eaux (potable et usées) et que les raccordements devraient s'effectuer sur le réseau public ([Adresse 8] et [Adresse 5]), la faisabilité de ces raccordements étant conditionnée par la création d'une servitude de passage sur la/les parcelles voisines.
M. [T] oppose qu'aucune condition suspensive d'obtention d'une servitude de passage de réseau n'a été stipulée dans la promesse de vente, précise que la [Adresse 8] borde le terrain en cause s'agissant de l'autre dénomination de la voie communale de l'Echaillon qui est dite, dans la promesse de vente, desservir directement ce terrain de telle sorte qu'aucune servitude d'accès n'est à constituer, et ajoute que l'[Adresse 5] borde la parcelle [Cadastre 1] dont il s'est réservé la propriété et que le passage pour le raccordement au réseau d'assainissement peut tout à fait avoir lieu via cette parcelle.
Il ajoute que la société Arcade Foncier ne précise pas les propriétés sur lesquelles elle devrait solliciter ces servitudes de passage, ne chiffre pas le coût de la constitution éventuelle de servitudes de réseaux pour établir que la constitution de telles servitudes aurait diminué sensiblement la valeur du terrain' et enfin que la nécessité de tels raccordements eu égard à son projet de création d'un lotissement était connue de celle-ci, en tant que professionnelle de l'immobilier.
Ce qui doit être retenu.
En effet, outre que la condition suspensive générale relatives aux servitudes figurant à la promesse de vente doit s'entendre de l'existence de servitudes préexistantes au jour de la vente et non pas des servitudes dont la constitution ou l'existence n'est pas certaine ni acquise, ainsi qu'en atteste son libellé « les titres de propriété antérieurs, les pièces d'urbanisme ou autres, ne doivent pas révéler de servitudes et charges, ni de vices non indiqués aux présentes'», le premier juge a écarté à bon droit, par d'exacts et pertinents motifs adoptés par la cour, la thèse soutenue par la société Arcade Foncier 'sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation, les moyens soutenus par les parties ne faisant que réitérer, sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connu.
En troisième lieu, la société Arcade Foncier soutient que les conditions suspensives relatives à la justification par le promettant de l'origine de propriété régulière remontant à un titre translatif d'au moins trente ans et l'existence d'un état hypothécaire ne révélant pas de saisies ou d'inscriptions dont le solde des créances inscrites augmenté du coût des radiations à effectuer serait supérieur au prix disponible sont automatiquement défaillies dès lors que M. [T] était seul débiteur de ces conditions suspensives et qu'il s'est abstenu de justifier auprès d'elle de leur exécution, sans qu'elle soit tenue de solliciter auprès de lui le versement de ces documents
M. [T] réplique en substance que la société Arcade Foncier n'a pas excipé de la non réalisation de ces conditions suspensives de droit commun lorsqu'elle a notifié dans son courrier du 11 mai 2020 son intention de renoncer à son projet d'acquisition et de ne pas lever d'option, et ce avant l'expiration du délai de validité de la promesse au 2 juin 2020, et que ces conditions doivent être réputées accomplies en l'absence de toute difficulté signalée par les notaires instrumentaires en charge de la régularisation de la vente de rassembler tous les documents nécessaires et qui avaient reçu pouvoirs à cette fin.
Ce qui doit être retenu.
En effet, ces conditions suspensives «'stipulées en faveur du bénéficiaire qui sera seul à pouvoir s'en prévaloir'» se rapportent à la production de documents obligatoires en matière de toute vente immobilière (origine de propriété, état hypothécaire) dont la levée incombe au notaire du vendeur sur mandat de son client'; or, il est démontré en page 24 de la promesse de vente litigieuse que tout clerc de l'office notarial rédacteur de cette promesse ou le cas échéant le notaire en participation ou en concours, avec faculté d'agir ensemble ou séparément, avaient reçu tous pouvoirs nécessaires notamment pour signer toutes demandes de pièces, demandes de renseignements et lettres de purge de droit de préemption préalables à la vente'; au surplus et de plus fort, figure dans cette promesse de vente un paragraphe en page 24 «'communication des pièces et documents'» stipulant que «'le bénéficiaire' pourra prendre connaissance de toutes les pièces et documents ci-dessus mentionnés directement en l'office notarial dénommé en tête des présentes, sans que ce dernier ait l'obligation de les lui adresse à mesure de leur réception, sauf avis écrit de sa part ou nécessité de l'informer de sujétions particulières révélées par ces pièces et documents'»
Ainsi que l'a relevé pertinemment le premier juge, si M. [T], promettant, était tenu de justifier d'une propriété régulière depuis trente ans, le bénéficiaire n'a pas dénoncé dans son courrier du 11 mais 2020 la non production de ce justificatif ni dénoncé comme insuffisantes les indications portées au paragraphe «'effet relatif'» de la promesse de vente concernant une attestation de propriété établie le 3 octobre 2018 et un acte de partage de succession reçu le même jour.
Or, il est rappelé que les conditions suspensives de droit commun sont «'stipulées en faveur du bénéficiaire qui sera seul à pouvoir s'en prévaloir'».'
Il n'est donc pas démontré que cette condition suspensive a défailli.
En définitive, il résulte de l'ensemble de ces constatations et considérations qu'il n'est pas établi que les conditions suspensives prévues à la promesse de vente auraient été défaillies si la société Arcade Foncier avait demandé la délivrance du permis d'aménager en exécutant cette condition suspensive particulière.
Il en résulte que les conditions suspensives de droit commun et particulières sont réputées accomplies.
Sur les demandes en paiement de M. [T]
La société Arcade Foncier soutient que l'indemnité d'immobilisation et la pénalité ne peuvent pas s'appliquer de façon cumulative sans toutefois reprendre cette prétention au dispositif de ses dernières conclusions, de sorte que la cour n'en est pas saisie conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile selon lequel la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.
Le jugement déféré ne peut être en conséquence que confirmé en ce qu'il a admis l'application cumulative des deux clauses instituant cette indemnité et cette pénalité.
sur l'indemnité d'immobilisation
M. [T] est fondé à réclamer à la société Arcade Foncier le versement de l'indemnité d'immobilisation de 36.000€ en réparation de l'immobilisation de son bien durant près de six mois, conformément aux dispositions de la promesse de vente selon lesquelles «'toutes les conditions suspensives ayant été réalisées, et faute pour le bénéficiaire ou ses substitués d'avoir réalisé l'acquisition dans les délais et conditions ci-dessus, ce dernier s'oblige irrévocablement au versement de celle-ci, à première demande du promettant et à titre d'indemnité forfaitaire pour l'immobilisation entre ses mains du bien pendant la durée des présentes.
La société Arcade Foncier entend voir modérer le montant de cette indemnité d'immobilisation comme étant manifestement excessive au motif qu'elle peut être assimilée à une pénalité.
Ce qui ne peut être admis, le premier juge a rappelé à bon droit que cette indemnité représentait le prix de l'indisponibilité du bien promis à la vente, entre la signature de la promesse et la constatation de l'échec de la vente, tandis que la pénalité était destinée à indemniser les conséquences de l'inexécution contractuelle imputable à l'une ou l'autre des parties, la cour ajoutant que cette indemnité n'est pas une clause pénale et qu'aucune minoration ni suppression ne peuvent être envisagées.
Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a fait application de l'indemnité d'immobilisation.
sur la pénalité
La société Arcade Foncier soutient qu'elle ne peut pas être condamnée au paiement de la pénalité de 36.000€ prévue à titre de dommages et intérêts conformément aux dispositions de l'article 1231-5 du code civil (en pages 25 et 26 de la promesse de vente) dès lors qu'elle n'a pas levé l'option d'achat et que M. [T] ne peut donc pas lui reprocher de ne pas régulariser l'acte authentique de vente, s'agissant d'une promesse unilatérale de vente qui ne devient synallagmatique, valant engagement de vendre et d'acheter, qu'à compter de la levée de cette option d'achat.
Elle demande par ailleurs sa suppression ou à tout le moins sa minoration à l'euro symbolique en la disant manifestement excessive au motif que M. [T] échoue à démontrer l'existence d'un quelconque préjudice.
Il sera répondu sur le premier point que la levée d'option n'était pas un préalable exclusif à la réalisation de la vente ainsi qu'en atteste le paragraphe «'réalisation'» de la promesse de vente qui énonce que la réalisation de la promesse aura lieu «'soit par la signature de l'acte authentique'» constatant le caractère définitif de la vente, accompagnée du paiement du prix, et des accessoires, «'soit par la levée d'option par le bénéficiaire'» à l'intérieur du délai fixé au 2 juin 2020.
De plus, il est clairement énoncé dans le cadre des dispositions relatives à la condition suspensive particulière d'obtention d'un permis d'aménager qu' à défaut pour le bénéficiaire de satisfaire aux obligations mises à sa charge, «'la condition sera réputée réalisée pour l'application de la stipulation de pénalité ci-après, et le promettant pourra reprendre sa pleine et entière liberté'», ce dont il se déduit que cette pénalité est due automatiquement quand bien même la levée d'option par le bénéficiaire ne serait pas effectuée.
Sur le second point, la pénalité de 36.000€ relève des dispositions de l'article 1231-5 du code civil qui autorise le juge, même d'office, à modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Or, si M. [T] a subi un préjudice du fait de la non réalisation de la vente du fait des diligences qu'il a entrepris pour proposer son bien à la vente et définir les conditions de la promesse de vente, le montant de cette pénalité fixé à 36.000€ s'avère être manifestement excessif, M. [T] ne démontrant pas l'existence d'un préjudice à due concurrence, les man'uvres frauduleuses dénoncées par ce dernier à l'encontre de la société Arcade Foncier procédant d'une analyse subjective et personnelle.
Infirmant sur ce point le jugement déféré, cette pénalité sera réduite à la somme de 10.000€, le montant arrêté à 1 euro étant manifestement dérisoire.
Sur les mesures accessoires
Succombant dans l'essentiel de son recours, la société Arcade Foncier est condamnée aux dépens d'appel et conserve la charge de ses frais irrépétibles exposés devant la cour'; elle est condamnée à verser une indemnité de procédure pour l'instance d'appel à M. [T] dont l'appel incident est partiellement accueilli.
Les mesures accessoires de première instance sont par ailleurs confirmées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré sauf sur le montant de la pénalité prévue en pages 25-26 de la promesse de vente notariée signée le 2 août 2019,
Statuant à nouveau sur ce point et ajoutant,
Condamne la SARL Arcade Foncier à payer à M. [F] [T] une somme de 10.000€ au titre de la pénalité prévue en pages 25-26 de la promesse de vente notariée signée le 2 août 2019,
Condamne la SARL Arcade Foncier à payer à M. [F] [T] la somme de 3.500€ à titre d'indemnité de procédure pour l'instance d'appel,
Déboute la SARL Arcade Immobilier de sa demande présentée en appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL Arcade Foncier aux dépens d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de la procédure civile,
Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.