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Décisions

CA Besançon, 1re ch., 1 octobre 2024, n° 23/00212

BESANÇON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Époux

Défendeur :

BNP Paribas Personal Finance (SA), Moyse 3D (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Wachter

Conseillers :

M. Saunier, M. Maurel

Avocats :

Me Alves, Me Giacomoni, Me Goncalves, Me Maurin

TJ Besançon, du 13 déc. 2022, n° 21/0036…

13 décembre 2022

Faits, procédure et prétentions des parties

M. [G] [C] et Mme [W] [K] ont commandé le 26 août 2010 la fourniture et pose d'une centrale photovoltaïque auprès de la SARL Bremas, à laquelle la SAS Société Anonyme d'Exploitation Bâtiments et Travaux Publics Moyse (société Moyse) vient aux droits suite à une opération de fusion intervenue le 16 mars 2017.

Le prix de 19 362 euros, réglé le 23 décembre 2010, a été intégralement financé par un crédit à la consommation souscrit le 21 septembre 2010 auprès de la SA Banque Solfea aux droits de laquelle vient la SA BNP Paribas Personal Finance.

Par actes signifiés le 12 mai 2021, M. [C] et Mme [K] ont assigné leur vendeur et la banque devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Besançon aux fins d'obtenir, sur les fondement du dol et de la violation du code de la consommation, la nullité des contrats susvisés avec privation de la banque de son droit à restitution du capital emprunté, outre l'indemnisation de leur préjudice moral.

La banque soulevait en première instance la prescription de l'action et sollicitait le rejet des demandes formées à son encontre, subsidiairement la condamnation des emprunteurs à lui restituer le capital restant dû et à défaut à leur régler une indemnisation égale au montant de celui-ci.

La société Moyse invoquait l'incompétence du juge du contentieux de la protection ainsi que la prescription.

Par jugement rendu le 13 décembre 2022, le juge des contentieux de la protection :

- a débouté la société Moyse de son exception d'incompétence matérielle ;

- a déclaré irrecevable, comme étant prescrite, l'action en nullité du contrat de louage d'ouvrage et celle du contrat de crédit affecté diligentée par M. [C] et Mme [K] ;

- les a déboutés de leur demande formée au titre des frais irrépétibles ;

- les a condamnés in solidum à payer à la société Moyse et à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 2000 euros chacun au titre des frais irrépétibles ;

- a laissé les dépens à charge de M. [C] et Mme [K] et au besoin les y a condamnés in solidum ;

- a dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du jugement.

Pour parvenir à cette décision, le juge de première instance a considéré :

Concernant l'exception d'incompétence matérielle :

- au visa de l'article L. 213-4-5 du code de l'organisation judiciaire, que le contrat principal et le contrat de crédit affecté sont interdépendants et forment une opération commerciale unique ;

- que le litige relève donc de la compétence du juge des contentieux de la protection ;

Concernant la prescription :

- qu'en application de l'article 2224 du code civil, le délai de prescription de cinq ans court à compter du jour auquel le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ;

- que la pose des panneaux photovoltaïque a été réalisée le 20 décembre 2010 et la facture a été acquittée le 23 décembre 2010 ;

- concernant le dol, que M. [C] et Mme [K], auxquels il incombe d'établir la date de la révélation du rendement moindre de l'installation constituant le point de départ du délai de prescription, ne produisent aucun élément de sorte que la date de réception et de paiement de la facture, soit le 23 décembre 2010, doit être retenue ;

- concernant la violation du code de la consommation, que les irrégularités du contrat invoquées par les demandeurs, à les supposer avérées, étaient visibles dès la date de sa conclusion ;

- que l'action, introduite par une assignation délivrée le 12 mai 2021, est donc prescrite tant sur le fondement du dol que sur celui de la violation des dispositions du code de la consommation.

Par déclaration du 15 février 2023, M. [C] et Mme [K] ont interjeté appel de ce jugement sauf en ce qu'il a débouté la société Moyse de son exception d'incompétence matérielle et, selon leurs dernières conclusions transmises le 25 mai 2024, ils concluent à son infirmation et demandent à la cour de :

- déclarer leurs demandes recevables et bien fondées ;

- prononcer la nullité du contrat de vente conclu avec la société Moyse ;

- prononcer en conséquence la nullité du contrat de prêt affecté ;

- 'condamner à procéder au remboursement' de l'ensemble des sommes qu'ils ont versées au titre de l'exécution du contrat de prêt, à savoir les sommes de 19 362 euros correspondant au prix de vente et de 9 345 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés ;

- condamner solidairement les sociétés Moyse et BNP Paribas Personal Finance à leur verser les sommes de 5 000 euros au titre de l'indemnisation de leur préjudice moral et de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les débouter de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions contraires ;

- les condamner à supporter les dépens de l'instance.

Ils font valoir :

Concernant la prescription :

- que leur dommage ayant consisté dans le fait d'avoir été engagés dans une opération désavantageuse sur la base de fausses promesses, l'appréciation de la rentabilité de leur installation ne peut s'effectuer que sur plusieurs années ;

- que leur connaissance de la faute de la banque du fait de son manquement à son devoir d'information et d'alerte supposait la connaissance des faits sur lesquels la banque devait les alerter, alors que leur attention n'a été attirée sur ce point que lorsqu'ils ont saisi un avocat ;

- que par ailleurs, s'agissant d'une irrégularité résultant d'une mention obligatoire absente d'un document contractuel, on ne peut sérieusement considérer que le consommateur serait en faute de ne pas l'avoir détectée dès l'instant même de sa signature, puisque cela nécessite une analyse approfondie de l'acte qui relève d'un professionnel ou d'un sachant ;

- que dès lors l'identification du défaut de mentions obligatoires suppose le recours à un sachant, étant rappelé que le point de départ de la prescription ne peut être fixé à la date de l'acceptation de l'offre par l'emprunteur consommateur de crédit que si, cumulativement, celui-ci était en mesure de déceler par lui-même l'irrégularité et que cette dernière ressort de la seule lecture de l'acte sans devoir procéder à des calculs ou des analyses ;

- que la reproduction des dispositions applicables dans le contrat de vente n'est pas de nature à caractériser une connaissance, par le consommateur profane, des irrégularités l'affectant ;

Concernant la nullité des contrats :

- au visa de l'ancien article 1116 du code civil, que la société Moyse s'est livrée à des manoeuvres dolosives lors de la conclusion du contrat principal, à savoir :

. une réticence dolosive, en omettant de préciser sur le bon de commande les caractéristiques de l'installation, les délais et modalités d'exécution du contrat, les modalités de financement ainsi que les informations relatives au délai de rétractation ;

. des promesses de réalisation d'économies substantielles sur la base de documents publicitaires ne leur ayant pas été laissés à disposition, sciemment ;

. une promesse de rentabilité procédant de la nature même du contrat ;

. l'absence de présentation des éléments de productivité relatifs à l'installation, en l'absence de simulation et d'étude de rentabilité, alors même que la moyenne des gains s'élève à 145,53 euros par mois entre les années 2011 et 2019 tandis que leur mensualité de crédit est de 340,72 euros durant quarante-cinq mois ;

- au visa de l'article L. 121-23 du code de la consommation en vigueur à la date de formation du contrat :

. qu'aucun bon de commande ne leur a été remis, seul un devis leur ayant été communiqué, ce manquement ne pouvant être décelé par des consommateurs profanes;

. que ce document ne comporte pas de description précise des caractéristiques de l'installation ;

. que les mentions relatives au prix sont indigentes, en ce qu'elles ne fixent qu'un prix global de l'installation, sans préciser le tarif de chacun de ses composants ;

. qu'aucune date ou aucun délai, même prévisible, de livraison du bien ou d'exécution de la prestation de service ne sont précisés ;

. qu'ils n'ont pu, en l'absence de bon de commande, procéder aux vérifications ni même opérer confirmation du contrat à défaut de connaissance des vices l'affectant et d'une manifestation de volonté expresse de le réparer, étant observé que le devis ne contient aucune reproduction des dispositions du code de la consommation ;

- qu'en application de l'article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, la nullité du contrat de vente entraîne de plein droit la nullité du contrat de crédit accessoire ;

Concernant la faute de la banque :

- que cette dernière est soumise à une obligation de résultat concernant la validité des contrats de prêt, mais aussi à un devoir d'information, de conseil et, le cas échéant, d'alerte à l'égard de ses clients emprunteurs concernant la régularité des opérations qu'elle finance ;

- qu'elle devait ainsi, avant de libérer les fonds, vérifier la régularité de la vente et l'existence d'un bon de commande, dont un exemplaire remis au client ce qu'elle n'a pas fait ;

- que l'attestation de fin de travaux n'est qu'un document pré-imprimé par l'installateur et qui ne comporte aucun espace permettant au client de formaliser une remarque ou une réserve ;

- qu'en l'asbsence de bon de commande, la vérification de la complète exécution des prestations était en tout état de cause impossible ;

- qu'elle se trouve donc privée de la créance de restitution du capital qui résulterait normalement de l'effet rétroactif attaché à la nullité du contrat de prêt ;

Concernant leurs préjudices :

- qu'ils subissent en premier lieu un préjudice tiré du défaut d'information concernant les caractéristiques du matériel et de la nullité du bon de commande en découlant, dont il est résulté qu'ils se sont trouvés obligés dans une opération contractuelle sans avoir pu bénéficier de la protection de l'organisme bancaire, qui aurait pu leur éviter les tracas du remboursement d'un emprunt ruineux ;

- qu'ils subissent en second lieu un préjudice tiré de la restitution du matériel, de sorte que la restitution du capital emprunté constituerait pour la banque une somme indûment perçue.

La société Société Anonyme d'Exploitation Bâtiments et Travaux Publics Moyse a, aux côtés de la SAS Moyse 3D, relevé appel incident par conclusions transmises le 03 août 2023 et a répliqué en dernier lieu par conclusions transmises le 24 mai 2024 pour demander à la cour d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de son exception d'incompétence matérielle, de déclarer le juge des contentieux de la protection incompétent au profit du tribunal judiciaire de Besançon, subsidiairement de débouter les appelants de leurs demandes et de les condamner à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de son conseil.

Elle expose :

Sur la compétence,

- que si le juge des contentieux de la protection est compétent concernant le contentieux relatif au crédit à la consommation, il ne l'est pas concernant la demande principale tendant à la nullité du contrat de louage d'ouvrage régi par les articles 1779 et suivants du code civil ;

Sur la forclusion,

- que la réception ayant été prononcée en 2010, les appelants sont forclos en leur action exercée sur le fondement décennal ou sur la responsabilité au titre des vices intermédiaires ;

Sur la prescription de l'action fondée sur le dol,

- qu'en application de l'article 1144 du code civil, le délai de l'action en nullité débute au jour où le dol a été découvert ;

- qu'à supposer que la rentabilité de l'installation ait été incluse dans le champ contractuel, ce qui n'est pas établi, les appelants prétendent n'avoir découvert le dol que onze années après la mise en service de l'installation, alors même qu'il produisent un document recensant leurs gains annuels depuis le mois de février 2011 et faisant état de résultats stables chaque année ;

Sur la prescription de l'action fondée sur la violation du code de la consommation,

- que nul ne pouvant ignorer la loi, les appelants auraient dû connaître, dès la signature du contrat, les irrégularités invoquées ;

Sur l'action en nullité fondée sur le dol,

- qu'aucune réticence dolosive procédant d'une absence d'information concernant les caractéristiques de l'installation n'est caractérisée, en ce que d'une part les exigences prévues par l'article L. 111-1 du code de la consommation en vigueur à la date du contrat étaient respectées dans le bon de commande et d'autre part que le caractère intentionnel du manque d'information dans le but de tromper ses co-contractants n'est pas établi ;

- que M. [C] et Mme [K] ne produisent aucun élément de nature à établir que la rentabilité économique de l'opération a constitué une caractéristique essentielle du contrat, ni même un élément de comparaison par rapport à la rentabilité annoncée ;

- qu'au surplus, l'installation est rentable compte tenu du crédit d'impôt de 8 000 euros perçu par les appelants et du fait qu'ils ont perçu chaque année près de 2 000 euros ;

Sur l'action en nullité fondée sur la violation des dispositions du code de la consommation,

- qu'aucun démarchage à domicile n'est intervenu, ainsi qu'il résulte du fait que l'offre de prêt n'a pas été émise le même jour que le bon de commande et de l'acceptation le 26 août 2010 du bon de commande émis le 29 juin précédent ;

- que dès lors M. [C] et Mme [K] ne peuvent invoquer valablement les dispositions de l'article L. 121-23 ancien du code de la consommation ;

- que par ailleurs le bon de commande est conforme aux caractéristiques imposées par l'article L. 111-1 du code de la consommation dans sa version en vigueur à la date du contrat concernant les caractéristiques essentielles de l'installation, le prix et la date de livraison.

La société BNP Paribas Personal Finance a répliqué en premier et dernier lieu par conclusions transmises le 1er août 2023 pour demander à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de débouter M. [C] et Mme [K] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

Subsidiairement, elle sollicite leur condamnation à lui rembourser le capital restant dû et à titre infiniment subsidiaire à les indemniser à hauteur de celui-ci, ainsi que la condamnation de la société Moyse à lui payer la même somme, outre la condamnation solidaire des appelants à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle expose :

- que le délai de prescription quinquennal de l'action a débuté au jour de la signature du bon de commande ;

- qu'aucune manoeuvre dolosive n'est établie, les considérations relatives à la rentabilité relevant en réalité d'une erreur sur celle-ci, laquelle ne constitue pas un vice du consentement ;

- qu'aucune intention de tromper n'est caractérisée ;

- que les demandeurs n'ont pas fait usage de leur droit de rétractation et ont au contraire signé une attestation de fin de travaux sans formuler ni grief ni réserve, ordonné à la banque de débloquer les fonds pour financer l'opération et remboursé régulièrement leurs mensualités pendant plusieurs années, de sorte qu'ils ont volontairement exécuté les contrats litigieux ;

- subsidiairement, que la nullité des contrats entraîne les restitutions réciproques, alors même qu'elle n'a commis aucune faute en ce qu'il ne lui appartenait pas d'être en possession et de vérifier le bon de commande, qu'en tout état de cause la signature de l'attestation de fin de travaux et la demande de paiement manifestait l'intention de couvrir l'éventuelle nullité et qu'enfin elle était fondée à procéder au déblocage des fonds sur la base de l'attestation de fin de travaux ;

- que les clients ayant réceptionné les biens sans réserve, aucun lien de causalité entre une éventuelle faute de sa part et un éventuel préjudice de ceux-ci n'est établi, alors même que l'installation est fonctionnelle ;

- que le préjudice invoqué résulte tout au plus de la perte d'une chance de ne pas contracter et ne peut donc jamais donner lieu à la réparation intégrale du préjudice ;

- à titre infiniment subsidiaire et sur le fondement de l'article 1241 du code civil, que les emprunteurs ont agi de mauvaise foi alors que la société venderesse 'est en liquidation judiciaire ou n'existe plus' de sorte que le prêteur ne peut plus solliciter la restitution des sommes versées au vendeur ce qui caractérise une perte de chance et lui cause un préjudice certain, tandis qu'ils n'auront eux-mêmes pas à restituer le matériel tout en percevant les fruits générés par l'installation, ces éléments fondant sa demande indemnitaire.

Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 04 juin 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 25 juin suivant et mise en délibéré au 1er octobre 2024.

En application de l'article 467 du code de procédure civile, le présent arrêt est contradictoire.

Motifs de la décision

- Sur la compétence,

Etant rappelé, en réponse aux écritures transmises au soutien des intérêts de la société Moyse, que le juge des contentieux de la protection est compétent à la fois concernant le contentieux relatif au crédit à la consommation et sur la nullité du contrat principal fondée sur la violation du code de la consommation, le juge de première instance a, par d'exacts motifs toujours d'actualité, considéré au visa de l'article L. 213-4-5 du code de l'organisation judiciaire que le contrat principal et le contrat de crédit à la consommation affecté sont en tout état de cause interdépendants et forment une opération commerciale unique de sorte que le litige relève de la compétence du juge des contentieux de la protection.

Le jugement critiqué sera donc confirmé sur ce point.

- Sur la prescription de l'action en nullité des contrats de vente et de crédit affecté au motif de la violation des dispositions du code de la consommation,

A titre liminaire, la cour observe que les développements de la société Moyse relatifs à la forclusion de l'action exercée sur les fondements de la garantie décennale ou de la responsabilité au titre des vices intermédiaires sont dépourvus de pertinence à défaut de toute action exercée sur l'un de ces fondements.

En application de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix et la chose jugée.

L'article 2224 du code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il en résulte que l'action fondée sur la nullité d'un contrat conclu hors établissement au motif de la violation des dispositions du code de la consommation se prescrit par cinq ans à compter de la date à laquelle le consommateur a eu connaissance des irrégularités viciant ledit contrat, tandis que le point de départ du délai de prescription de l'action fondée sur le vice du consentement doit être fixé au jour de la découverte du vice.

Etant rappelé qu'il appartient à la partie qui invoque la prescription de l'établir, la cour observe que ni la société Moyse ni la banque n'établissent le point de départ du délai quinquennal susvisé.

Il ne peut être considéré dans ces conditions que les irrégularités formelles du contrat invoquées étaient nécessairement visibles dès la date de sa conclusion.

Dès lors, la prescription de l'action n'est pas établie et le jugement dont appel sera infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action en nullité des contrats de vente et de crédit affecté au motif de la violation des dispositions du code de la consommation.

Cette action sera donc déclarée recevable.

- Sur la prescription de l'action en nullité des contrats de vente et de crédit affecté au motif d'un vice du consentement,

En application des dispositions ci-avant rappelées, le point de départ du délai de prescription de l'action fondée sur le dol doit être fixé au jour où les appelants ont pu comparer le rendement économique effectif au rendement leur ayant été annoncé.

En l'espèce, le document intitulé 'expertise sur investissement' établi le 19 juin 2019 par M. [L] [H] conclut à un défaut d'autofinancement de l'opération sur la base de recettes annuelles de revente d'électricité chiffrées à la somme de 1 835 euros en considération de la puissance de l'installation ainsi que de son rendement compte tenu de la situation géographique de l'immeuble.

Cette estimation est corroborée par les factures de revente d'électricité produites aux débats par M. [C] et Mme [K], dont il résulte des recettes annuelles comprises entre 1 020,37 euros et 2 072,92 euros pour une moyenne de 1 746,35 euros.

La rentabilité de l'installation pouvait donc être appréciée dès l'issue de la première année de fonctionnement, M. [C] et Mme [K] ayant eu connaissance dès la facture d'achat d'électricité annuelle d'un montant de 2 072,92 euros leur ayant été transmise le 02 février 2012 des faits qu'ils invoquent au soutien de leur demande et leur permettant donc d'exercer leur action en nullité des contrats de vente et de crédit affecté au motif d'un vice du consentement.

Le jugement dont appel sera donc confirmé en ce qu'il a déclarée leur action exercée sur ce fondement irrecevable comme étant prescrite.

- Sur l'action en nullité des contrats de vente et de crédit affecté au motif de la violation des dispositions du code de la consommation,

L'article L. 121-21 du code de la consommation, dans sa version en vigueur à la date de conclusion des contrats, définit le démarchage soumis à la réglementation spécifique du même code comme le fait de proposer l'achat, la vente, la location, la location-vente ou la location avec option d'achat de biens ou la fourniture de services :

- soit au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail, même à sa demande ;

- soit dans les lieux non destinés à la commercialisation du bien ou du service proposé et notamment l'organisation par un commerçant ou à son profit de réunions ou d'excursions afin de réaliser lesdites opérations.

En application de l'article L. 121-23 du code précité, les opérations de démarchage doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

- les noms du fournisseur et du démarcheur ;

- l'adresse du fournisseur ;

- l'adresse du lieu de conclusion du contrat ;

- la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

- les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ;

- le prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ;

- la faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26.

Etant rappelé qu'il appartient à M. [C] et Mme [K], qui invoquent une violation des dispositions du code de la consommation, de rapporter la preuve de la réunion des conditions d'application de celles-ci, ni le devis du 29 juin 2010, ni la demande de crédit du 21 septembre 2010, ni l'offre de crédit accepté éditée le 06 octobre 2010, ni encore la facture du 20 décembre 2010 ne mentionnent que le contrat a été conclu dans le cadre d'une opération de démarcharge.

M. [C] et Mme [K] se limitent à affirmer que la réglementation susvisée est applicable en l'espèce, sans produire aucun élément de nature à le corroborer et alors même que la chronologie des divers documents susvisés tend à établir au contraire que le projet d'achat de l'installation photovoltaïque n'a pas été contractualisé dans un bref délai, étant observé notamment que le devis établi le 29 juin 2010 n'a été accepté que le 26 août suivant par les clients qui n'ont ensuite sollicité leur crédit bancaire qu'un mois plus tard et signé celui-ci le 11 octobre suivant.

A défaut d'établissement, par M. [C] et Mme [K], du fait que l'opération de vente en cause a été conclue dans le cadre d'un démarchage, leur demande tendant à la nullité des contrats de vente et de crédit affecté au motif de la violation des dispositions du code de la consommation sera rejetée.

Par voie de conséquence et à défaut de prononcé de la nullité des contrats, il en sera de même concernant leur demande tendant à la condamnation à procéder au remboursement de l'ensemble des sommes qu'ils ont versées au titre de l'exécution normale du contrat de prêt litigieux, à savoir les sommes de 19 362 euros correspondant à l'intégralité du prix de vente de l'installation et de 9 345 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés.

- Sur la demande indemnitaire formée par M. [C] et Mme [K],

En application de l'article 1147 du code civil applicable au litige devenu l'article 1231-1 du même code, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

En l'espèce, la demande principale formée par M. [C] et Mme [K] ayant été rejetée, ces derniers n'établissent aucun défaut d'information ni aucun préjudice lié à la contractualisation de l'opération en cause.

Ils seront donc déboutés de leur demande indemnitaire.

Par ces motifs,

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :

Confirme, dans les limites de l'appel, le jugement rendu entre les parties le 13 décembre 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Besançon, sauf en qu'il a déclaré irrecevable l'action engagée par M. [G] [C] et Mme [W] [K] en nullité des contrats de vente et de crédit affecté au motif de la violation des dispositions du code de la consommation ;

Statuant sur ce chef infirmé et y ajoutant :

Déclare recevable l'action engagée par M. [G] [C] et Mme [W] [K] tendant à la nullité des contrats de vente et de crédit affecté au motif de la violation des dispositions du code de la consommation ;

Les déboute de leur demande tendant à la nullité des contrats de vente et de crédit affecté au motif de la violation des dispositions du code de la consommation ;

Les déboute de leur demande tendant à la condamnation à procéder au remboursement de l'ensemble des sommes qu'ils ont versées au titre de l'exécution normale du contrat de prêt litigieux, à savoir les sommes de 19 362 euros correspondant à l'intégralité du prix de vente de l'installation et de 9 345 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés ;

Les déboute de leur demande de dommages-intérêts ;

Les condamne aux dépens d'appel ;

Accorde aux avocats de la cause qui l'ont sollicité, le droit de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Et, vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute M. [G] [C] et Mme [W] [K] de leur demande et les condamne à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance d'une part et à la SAS Société Anonyme d'Exploitation Bâtiments et Travaux Publics Moyse d'autre part la somme de 1 000 euros chacune, avec rejet des demande de ces dernières pour le surplus.