CA Pau, 1re ch., 8 octobre 2024, n° 23/00643
PAU
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Époux
Défendeur :
Fortain Bourdales (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Faure
Conseillers :
Mme Blanchard, Mme De Framond
Avocats :
Me Del Regno, Me Labes
EXPOSE DU LITIGE
Par acte authentique du 19 octobre 2017, Monsieur [F] [R] et son épouse, Madame [B] [W], ont acquis de la SARL Fortain Bourdales une maison d'habitation située à [Localité 5] (64), par l'intermédiaire de la SARL Cofim [Localité 5] Béarn.
Du fait de la survenance d'infiltrations affectant la chambre nord du premier étage et d'une humidité importante affectant l'appartement du rez-de-chaussée, les époux [R] ont interrompu les travaux de rénovation qu'ils avaient entrepris et on initié, par l'intermédiaire de leur assurance, une expertise amiable contradictoire.
Suivant procès-verbal de constat d'huissier de justice du 11 juin 2018, les époux [R] ont fait constater que le plâtre du rez-de-chaussée était humide et salpêtré sur tout le soubassement, générant d'importantes remontées d'humidité, et que les planchers avaient été posés sur une fine couche de chape béton de six centimètres d'épaisseur directement sur la terre, laquelle était humide et se désagrégeait.
Par ordonnance du 03 octobre 2018, le juge des référés du tribunal judiciaire de Pau, faisant droit à la demande des époux [R], a ordonné une mesure d'expertise judiciaire, confiée à M. [P].
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 11 mai 2020.
Par actes des 21 et 25 août 2020, les époux [R] ont fait assigner la SARL Fortain Bourdales et la SARL Cofim Pau Béarn devant le tribunal judiciaire de Pau aux fins d'obtenir leur condamnation au paiement du coût des travaux de reprise des désordres sur le fondement des articles 1217 et 1643 du code civil, outre l'indemnisation de leurs préjudices.
Suivant jugement contradictoire du 10 janvier 2023 (RG n°20/01356), le tribunal a :
- prononcé la mise hors de cause de la SARL Cofim [Localité 5] Béarn,
- dit et jugé que la SARL Fortain Bourdales est intervenue en qualité de professionnel de l'immobilier dans le cadre de cette vente,
- constaté que la maison des époux [R] est affectée de vices cachés rendant impropre leur habitation,
- condamné la SARL Fortain Bourdales à payer aux époux [R] la somme de 17.127,73 euros au titre des réparations,
- débouté les époux [R] de leur demande au titre de la location d'un box,
- condamné la SARL Fortain Bourdales à payer aux époux [R] la somme de 3.000 euros au titre du préjudice de jouissance,
- condamné la SARL Fortain Bourdales à payer aux époux [R] la somme de 1.500 euros au titre du préjudice moral et psychologique,
- débouté la SARL Cofim [Localité 5] Béarn de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté les autres demandes,
- condamné la SARL Fortain Bourdales à payer aux époux [R] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SARL Fortain Bourdales aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.
Pour motiver sa décision, le tribunal a retenu, sur le fondement des articles 1641 et 1643 du code civil, que les désordres affectant le rez-de-chaussée rendent cette partie de l'immeuble impropre à l'usage auquel il est normalement destiné, et que les travaux de réparation ont été chiffrés par l'expert à la somme de 15.822,40 euros TTC.
Le désordre de défaut d'entourage de la cheminée au 1er étage a été réparé à la demande du vendeur et n'existe plus. Cependant, les travaux préconisés dans le cadre de l'expertise n'ont pas été réalisés par la SARL Fortain Bourdales, l'entourage de la cheminée étant percé au niveau du zinc. Les travaux réparatoires ont été chiffrés par l'expertise amiable à la somme de 1.305,33 euros TTC.
Le tribunal a retenu la qualité de vendeur professionnel et donc la responsabilité de la SARL Fortain Bourdales, estimant qu'elle se livrait à une activité de vente de biens immobiliers régulière, et qu'elle était donc réputée connaître les vices dont était affecté le bien immobilier vendu.
Les époux [R] ne sauraient cependant faire supporter à la SARL Fortain Bourdales l'ensemble des travaux de rénovation de l'immeuble dans lequel ils avaient prévu d'effectuer d'importants travaux de rénovation.
La SARL Cofim [Localité 5] Béarn est quant à elle intervenue en qualité d'intermédiaire dans le cadre de la vente et non en qualité de vendeur, et qu'il n'est pas démontré qu'elle aurait commis une faute ou aurait eu connaissance des désordres avant la vente.
Les époux [R] ne produisent aucun élément au titre de leur demande de paiement des frais de location de box destiné à stocker leurs meubles pendant les travaux. Il est établi qu'ils ont dû vivre dans un espace restreint du fait des désordres, caractérisant un préjudice de jouissance. Ces désagréments ont eu des conséquences psychologiques pour Mme [R], qui en justifie par la production de pièces médicales, caractérisant un préjudice moral.
Par déclaration du 28 février 2023 (RG n°23/00643), M. [F] [R] et Mme [B] [W] ont relevé appel, intimant la SARL Fortain Bourdales, et critiquant le jugement en ce qu'il a condamné la SARL Fortain Bourdales à payer à M. Et Mme [R] la somme de 17.127,73 € au titre des réparations et débouté M. Et Mme [R] de leur demande au titre de la location d'un box.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 22 décembre 2023, M. [F] [R] et Mme [B] [W], appelants, entendent voir la cour:
- les déclarer recevables et bien fondés en leurs conclusions d'appelants, fins et prétentions,
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
- condamné la SARL Fortain Bourdales à payer aux époux [R] la somme de 17.127,73 euros au titre des réparations,
- débouté les époux [R] de leur demande au titre de la location d'un box,
- le confirmer pour le surplus,
Et, statuant à nouveau :
- condamner la SARL Fortain Bourdales à leur payer la somme de
50. 836,44 euros au titre de la reprise des désordres,
- condamner la SARL Fortain Bourdales à leur payer la somme de
2. 270,69 euros au titre de la location des deux box,
- condamner la SARL Fortain Bourdales à leur payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
- condamner la SARL Fortain Bourdales aux entiers dépens de l'instance d'appel.
Au soutien de leurs prétentions, ils font valoir, au visa des articles 1217, 1240 et 1643 du code civil :
- que la SARL Fortain Bourdales est intervenue comme professionnel de l'immobilier dans le cadre de la vente dès lors que son activité principale est celle de marchand de biens, qu'elle réalise de multiples achats et ventes de biens immobiliers, justifiés par les relevés d'états hypothécaires, de sorte qu'elle est réputée connaître les vices attachés au bien vendu,
- qu'elle était informée que la maison était empreinte de désordres tenant à l'humidité dès lors que l'agence immobilière, qui avait reçu mandat de la SARL Fortain Bourdales, avait fait traiter les sols du rez-de-chaussée, et que l'expert a retenu que les murs avaient été doublés pour cacher les problèmes liés à l'humidité,
- que l'expert a retenu un coût de reprise des désordres de 15.822,40 euros, mais que ce devis ne comprend pas la chape souple d'étanchéité anti-racines et les essais et le passage caméra avant mise en service, pourtant indispensables à la reprise des désordres, chiffrés à 10.062,80 euros TTC,
- que le chiffrage de l'expert ne comprend pas le décapage et l'évacuation des terres, la mise en place de cailloux roulé à la brouette, la pose d'un film polyane sous dallage 150 micron, un coulage de la dalle en béton contrôlé armé épaisseur 12 cm, la pompe à béton pour coulage de la dalle, la pose d'un isolant au sol, et la pose d'une chape de ravoirage de finition, qui sont des travaux rendus nécessaires par les désordres constatés par l'expert et ne constituent pas des travaux d'amélioration ou d'embellissement,
- que pour l'étage, les travaux de plâtre, de ponçage de la chambre à la suite de l'infiltration sous toiture, de peinture du plafond, de la salle de bain et des wc, de réparations provisoires en toiture, et de suppression définitive de la cheminée, évalués à la somme de 3.798,35 euros sont la conséquence des désordres constatés par l'expert judiciaire,
- que le coût total des travaux induits par les désordres s'élève à la somme de 50.836,44 euros selon les factures qu'ils produisent, et dont ils ont isolé les seuls postes de travaux visant à réparer les désordres, ceux facturés au titre des travaux originellement prévus au titre de la rénovation du logement n'ayant pas été pris en compte,
- qu'ils ont décidé de faire retirer la cheminée afin de prévenir les infiltrations et éviter des réparations davantage onéreuses,
- que Mme [R] a été contrainte à un suivi médical régulier,
- qu'ils ont dû louer deux box pour y entreposer leurs affaires personnelles qui devaient être installées au rez-de-chaussée de leur maison, et ont versé le contrat de location de ces box en cours d'expertise.
Par conclusions notifiées le 1er août 2023, la SARL Fortain Bourdales, intimée et appelante incident, demande à la cour de :
- juger irrecevable et à tout le moins infondé l'appel inscrit par les époux [R] à l'encontre du jugement,
- débouter les époux [R] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions présentées devant la cour à son encontre,
Faisant droit à sa demande à titre reconventionnel,
- réformer le jugement en ce qu'il a jugé qu'elle est intervenue à la vente en qualité de professionnel de l'immobilier à titre principal,
- condamner les époux [R] à lui rembourser la somme de 23.336,01 euros qu'elle leur a versée en exécution du jugement,
- condamner les époux [R] à lui payer une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel et dire que ces derniers pourront être recouvrés par la SELARL ABL Associés au titre de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, elle fait valoir :
- que l'expert judiciaire a constaté l'absence de désordre au 1er étage suite aux réparations effectuées sur l'entourage de cheminée en toiture, et ne prévoit pas de travaux réparatoires ; que les acquéreurs ont été informés dans le cadre de la promesse de vente du 20 juillet 2017 qui précisait que des travaux devaient être réalisés pour mettre un terme à une fuite affectant la cheminée, et que l'acte de vente complétait cette information en joignant les factures des entreprises mandatées par l'agence immobilière, de sorte que l'information des acquéreurs était parfaite, et que le prix de vente a été fixé en connaissance de ce sinistre, et qu'en conséquence aucun vice caché n'existait concernant la réparation de cette cheminée au moment de la vente,
- qu'il a été établi pendant l'expertise qu'elle ne pouvait avoir connaissance du fait que la réparation réalisée ne serait pas durable de sorte que sa responsabilité ne peut être engagée au regard de la clause d'exclusion des vices cachés incluse dans l'acte de vente,
- que cette clause trouve à s'appliquer dès lors qu'elle n'est pas un professionnel de l'immobilier et exerce une activité de commerce de gros de cuirs et de peaux ; que le fait qu'elle ait été amenée à acquérir divers biens immobiliers ou qu'elle dispose d'un patrimoine immobilier important ne lui confère pas la qualité de professionnel de l'immobilier, d'autant qu'elle a eu recours aux services d'un professionnel de l'immobilier, la SARL Cofim [Localité 5] Béarn, pour gérer et vendre son bien,
- qu'elle n'avait pas connaissance des désordres dénoncés en rez-de-chaussée, l'expert ayant constaté que la présence d'humidité était cachée au moment de la vente et n'était pas perceptible sans démontage, ayant rappelé que les acquéreurs ont pu visiter le bien à plusieurs reprises en présence d'artisans qui n'ont pas identifié l'humidité anormale, et l'humidité ayant été constatée seulement lorsque les revêtements du sol du rez-de-chaussée ont été déposés, plus d'un an après la vente,
- les demandes des époux [R] à hauteur de 49.493,28 euros en cause d'appel sont démesurées et tendent à obtenir la prise en charge de l'intégralité des travaux de réfection de l'immeuble, alors que les travaux réparatoires ne sauraient concerner que l'étanchéité en pied de mur et la reprise des canalisations d'eaux usées, ce qui est l'objet du devis de l'entreprise [O], d'un montant de 15.822,40 euros,
- qu'elle ne saurait être condamnée à verser aux époux [R] des dommages et intérêts correspondant au coût de la location de leurs box dès lors qu'elle n'avait pas connaissance des vices affectant l'immeuble avant la vente.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 03 juillet 2024.
MOTIFS
Sur la garantie des vices cachés :
L'article 1641 du code civil prévoit que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on le destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
L'article 1643 du code civil prévoit que le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.
Il convient au préalable de vérifier si les désordres allégués qui portent sur l'infiltration provenant de la cheminée et son impact au premier étage, ainsi que l'humidité du rez-de-chaussée sont des vices cachés au sens de l'article 1641 du code civil.
Sur l'existence de vices cachés :
Pour le dégât des eaux provenant de la cheminée, il convient d'observer que le compromis de vente du 20 juillet 2017 comporte les mentions suivantes :
'Le promettant déclare avoir mis en oeuvre l'assurance du bien souscrite auprès de la société Alianz pour la cause suivante : dégât des eaux sur une cheminée . Le dossier est au stade suivant : deux rapports d'expertises ont été rendus, le second annulant le premier. Une copie de ces deux rapports est demeurée ci-annexée après mention. L'acquéreur déclare en avoir parfaite connaissance pour en avoir reçu copie dès avant ce jour.
Le promettant s'engage à faire réaliser, par tout homme de l'art, les travaux de remise en état du bien objet des présents, au plus tard le jour de la signature de l'acte authentique de vente. La somme à recevoir de la compagnie d'assurance en réparation du sinistre sera donc versée au promettant.
Précision étant faite que le prix exprimé aux présentes a été déterminé en tenant compte de cette situation et des rapports sus-visés, ainsi déclaré.'
L'acte authentique de réitération de la vente du 19 octobre 2017 mentionne les termes suivants :
' le vendeur déclare avoir fait réalisé les travaux de remise en état du bien , objet des présentes, depuis la régularisation de l'avant contrat sus-visé, ainsi que l'acquéreur a pu le constater en effectuant une nouvelle visite du bien, dès avant ce jour.
Le vendeur déclare avoir perçu de la compagnie d'assurance, la somme due en réparation de ce sinistre, ainsi que le tout avait été convenu aux termes de l'avant-contrat conclu entre les parties.
Une copie de la facture relative aux travaux dont s'agit est ci-annexée après mention.
Précision étant faite que le prix exprimé aux présentes a été déterminé entre les parties en tenant compte du sinistre intervenu, des rapports d'expertise sus-visés et de la somme allouée à titre de réparation au propriétaire, ainsi déclaré.
L'acquéreur ayant constaté la réalisation des travaux sus-visés, il requiert le notaire soussigné de régulariser le présent acte.'
Il résulte de ces termes que l'infiltration provenant de la cheminée a été portée à la connaissance de l'acquéreur et qui, après avoir constaté les travaux de réfection pour lesquels les rapports d'expertise et la facture annexés à l'acte de vente ne sont pas produits, a requis la vente, sans aucune réserve sur la qualité des travaux entrepris et pour lesquels en l'absence des éléments annexés à l'acte, il ne peut être vérifié qu'ils n'étaient pas conformes aux prescriptions des rapports d'assurance.
Cette information circonstanciée auprès de l'acquéreur sur l'infiltration provoquée par un désordre de la cheminée conduit à déclarer que le vice était apparent lors de la vente et qu'il ne peut donc faire l'objet d'une garantie des vices cachés, sans qu'il ne soit besoin d'examiner si la clause d'exclusion de la garantie doit être mise en oeuvre.
Aucune demande de réparation ne peut donc prospérer à cet égard et le jugement sera infirmé en ce qu'il a alloué des sommes à ce titre.
Sur la présence d'humidité du rez-de-chaussée, il convient de relever que le compromis de vente fait état de 'commentaires divers : indices d'infestation des autres agents de dégradaton biologique du bois, des lames de parquet sont dégradées en profondeur. Les parties situées derrière les doublages des murs et plafonds n'ont pu être vérifiés faute d'accès. Le bénéficiaire déclare en avoir parfaite connaissance et vouloir en faire son affaire personnelle.'
Cette clause a été reprise à l'identique dans l'acte de vente. Cependant, cette clause était mentionnée dans les deux actes à la rubrique 'termites' et les acquéreurs ne pouvaient en déduire que la dégradation des lames de parquet provenait de l'humidité du rez-de-chaussée alors que les commentaires laissaient croire qu'il pouvait s'agir d'autres insectes xylophages que les termites.
L'expert judiciaire M. [P] a précisé que l'humidité au niveau des sols carrelés et des parquets n'est apparue qu'après la dépose des sols et de leurs supports.
Aussi, il y a lieu de retenir que cette humidité n'était pas apparente lors de la vente.
L'expert a conclu que cette humidité provenait d'infiltrations en pied de murs et que les façades n'étaient donc pas étanches. Il a déclaré que cela rendait l'immeuble impropre à sa destination pour la partie rez-de-chaussée.
L'expert judiciaire a identifié une deuxième cause de l'humidité résultant de la vétusté des réseaux d'évacuation des eaux usées, vannes et pluviales et que les regards de celles-ci n'ont été mis à jour qu'après la vente.
Il convient donc de retenir que l'humidité du rez-de chaussée n'était pas visible lors de la vente et ne pouvait être connue des acquéreurs.
Sur la mise en oeuvre de la garantie du vendeur :
L'acte de vente a prévu une clause ainsi libellée :
'L'acquéreur prend le bien dans l'état où il se trouve au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le vendeur pour quelque cause que ce soit notamment en raison des vices apparents, des vices cachés.
S'agissant des vices cachés, il est précisé que cette exonération de garantie ne s'pplique pas si le vendeur a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction, ou s'il est réputé ou s'est comporté comme tel; si le vendeur , bien que non professionnel, a réalisé lui-même les travaux, s'il est prouvé par l'acquéreur, dans les délais légaux , que les vices cachés étaient en réalité connus du vendeur'.
La société Fortain Bourdales ne peut valablement prétendre qu'elle n'est pas un professionnel de l'immobilier dès lors que s'il est avéré que son activité principale sur le répertoire Sirene est le commerce de cuirs et de peaux, il résulte de l'examen de ses différents comptes qu'elle achète des immeubles en nombre (5 en 2018) et que sa production de services résulte de locations d'immeuble (8 : compte de résultat 2018) ; que les soldes intermédiaires de gestion de 2022 font apparaître une activité mixte et que le chiffre d'affaires de 2022 n'a porté que sur de la location d'immeubles. Aussi, la société Fortain Bourdales doit être considérée comme une professionnelle de l'immobilier et elle ne peut se prévaloir de la clause d'exclusion de la garantie des vices cachés.
L'acte de vente du 19 octobre 2017 comporte la clause suivante dans la rubrique assainissement :
le vendeur déclare :
- que l'immeuble est raccordé au réseau d'assainissement, ainsi constaté par une lettre délivrée le 03 août 2017 par le service d'assainissement communal, dont l'original est annexé,
- ne rencontrer aucune difficulté particulière avec cette installation,
- qu'il n'a reçu des services compétents de mise en demeure de mettre l'installation en conformité avec les normes existantes,
- que le raccordement à l'installation d'assainissement n'a fait l'objet d'aucun contrôle de conformité par le service public de l'assainissement depuis qu'il est propriétaire.
L'acquéreur fera son affaire personnelle de la réalisation des travaux qui pourraient être nécessaires aux fins d'obtention de la conformité dans la mesure où le raccordement pourrait s'avérer non conforme.
Les travaux dont les acquéreurs sollicitent la prise en charge par la société Fortain Bordales ne sont pas des travaux dus à une non-conformité mais à des désordres les affectant puisqu'il a constaté que les connexions du réseau eaux usées et de la descente d'eau pluviale étaient détériorées et qu'une connexion aux pluviales était bouchée et qu'il existait plusieurs défauts de raccordement des réseaux eaux pluviales.
Aussi, l'humidité du rez-de-chaussée constitue un vice caché quelque soit son origine qui doit être garanti par la venderesse.
Sur les travaux de reprise :
L'expert judiciaire a estimé le coût des travaux de reprise à la somme de 15.822,40 € portant sur la création d'une tranchée drainante en périphérie de la maison, la reprise des eaux pluviales, la mise en place d'un hydrofuge liquide de type goudron en périphérie des murs extérieurs et mise en place d'un plastique drainant outre un enduit extérieur du soubassement,, la pose d'un solin en périphérie et d'un drain etc.
L'expert judiciaire a estimé ce devis de M. [O] du 03 juin 2019 satisfaisant.
Les époux [R] ont, pour aboutir à un montant de 47.038,09 € correspondant au désordre de l'humidité du rez-de-chaussée, comptabilisé à deux reprises les travaux de M. [O] par la somme de 15.823,50 € qui correspond au devis de juin 2019 facturé le 11 octobre 2020 et la somme de 10.062,80 € qui correspond à une 2e facture du 11 octobre 2020 acquittée et qui porte sur le décapage et évacuation des terres, la mise en place de cailloux roulé à la brouette sur 19 m², la pose d'un film polyane sous dallage 150 micron, le coulage de la dalle de béton contrôlé armé épaisseur 12 cm, la pompe à béton pour coulage de la dalle, la pose d'un isolant au sol épaisseur 8 cm, la pose d'une chape de ravoirage de finition et la mise en place d'une petite benne. Même si ces travaux n'ont pas été soumis à l'expert qui aurait dû les préconiser en ayant une approche globale des travaux réparatoires, ils ne peuvent être considérés comme inutiles à la prestation totale de reprise en sous oeuvre des sols et ils doivent donc être inclus dans le préjudice subi par les époux [R].
Par ailleurs, les époux [R] ont recouru à d'autres artisans pour la rénovation de leur immeuble qu'ils avaient prévu initialement mais il convient de limiter strictement les travaux uniquement nécessaires pour la reprise des désordres. Cependant, alors qu'il s'agissait de rendre étanche le bas des murs de l'immeuble, les époux [R] ne peuvent réclamer le coût de l'isolation de ces façades qui est une prestation supplémentaire à une simple étanchéité. La reprise des doublages inadaptés ne peut donc être prise en considération comme tous les travaux d'isolation des murs et cloisons.
À cela, il y a lieu d'ajouter que les travaux d'électricité et de peinture ne peuvent être mises à la charge de la venderesse, seule concernée par l'humidité du sol. La moisissure des murs si elle est liée au défaut d'étanchéité des murs, était apparente lors de la vente et a été acceptée par les acquéreurs. Aussi, la remise en peinture des pièces du rez-de-chaussée ne peut être imputée à la venderesse. Il n'est pas démontré que la reprise de l'installation de l'électricité soit rendue nécessaire par la reprise des sols du rez-de chaussée, ni la reprise des carrelages muraux.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la somme de 15.823,50 € retenue par l'expert doit être validée outre la somme de 10.062,80 €. Il faut y ajouter également la reprise des carrelages et des parquets rendus nécessaires par la démolition des sols. Il est constant qu'avant de découvrir les désordres invoqués puis de procéder aux travaux de reprise, il a fallu rechercher les fuites et procéder au démontage des éléments de plancher. En outre, la réfection des planchers et du carrelage du sol ont été nécessaires puisque l'humidité était en sous oeuvre et qu'il a fallu tout démolir et tout reprendre les sols.
Aussi, doivent être ajoutées les sommes suivantes :
- facture Lourenço Piters 750,20 € pour le démontage des pièces humides avant casse des sols,
- facture Bibat (2018): recherche de fuite 134,20 €
- facture terrassier Borges : recherche fuites sur réseau EP+EV : 558 €
- facture Perry : dépose des radiateurs et des éléments de la salle de bains, et vidange du réseau chauffage au RDC : 274,89 €
- facture Da Nave : démontage plancher pour sondage pour expertise : 165 €
- facture Da Nave partielle 25/10/21 : reprise planchers : 4.652,27 € (sur un total de 7.280,87 €)
- facture Bati Luy : 3.709,24 € enlèvement chape émiettée
La facture Bahurlet d'un montant de 731,76 € est du 22 octobre 2020 et porte le numéro FA00008117 et non FA00004683. Elle comporte la réfection du carrelage du sol mais aussi celle des murs, seul le carrelage du sol doit être pris en considération soit les sommes de 110,42 € , 164,60 € et 147,23 € HT soit 506,70 € TTC; les autres factures Bahurlet ne concernent pas le sol.
Il n'est pas produit de facture Atout Travaux 64 n° 210603 du 3 juin 2021 d'un montant de 817,95 € pour le remplacement des carreaux du sol comme indiqué mais une facture à cette date 210603 d'un montant de 372,42 € qui correspond à des travaux de menuiserie et qui sera donc écartée. Les autres factures de Atout Travaux ne correspondant pas à des travaux de carrelage sols des sanitaires seront donc écartées.
Aux factures, il convient également d'ajouter le coût du constat d'huissier qui a permis d'obtenir une expertise judiciaire après constat des désordres soit une somme de 216,09 € TTC.
Le total des travaux de reprise des désordres de l'humidité du rez-de-chaussée doit donc être évalué à la somme de 36.852,89 € TTC.
Le jugement sera donc infirmé sur ce point.
Sur la location des box :
Il est réclamé la somme de 2.270,69 € par les époux [R] correspondant aux sommes acquittées jusqu'en novembre 2021.
Il convient de relever que les annexes du rapport d'expertise judiciaire n'ont pas été produits aux débats par les parties et que les époux [R] ne peuvent affirmer que le contrat de réservation des box était à la disposition du tribunal.
Ce contrat est produit en cause d'appel et a été souscrit le 25 juillet 2018 pour un montant de 31,04 € TTC par mois.
Cependant, la totalité de la location ne peut être imputée intégralement à l'indisponibilité de l'immeuble du fait des désordres alors que les époux [R] avaient prévu la rénovation de l'immeuble acquis en octobre 2017.
Aussi, seule la moitié de la location sera imputée au désordre retenu soit la somme de 1.135,34 €.
La société Fortain Bourdales considérée comme un professionnel de l'immobilier, voit sa garantie engagée même si elle ne connaissait pas le vice de l'humidité et sera tenue au paiement de dommages-intérêts en application de l'article 1645 du code civil.
Le jugement sera donc infirmé sur ce point.
L'équité commande d'allouer seulement aux époux [R] une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement en ce qu'il a :
- condamné la SARL Fortain Bourdales à payer aux époux [R] la somme de 17.127,73 euros au titre des réparations,
- débouté les époux [R] de leur demande au titre de la location d'un box,
statuant à nouveau sur ces points :
CONDAMNE la SARL Fortain Bourdales à payer à M. [F] [R] et Mme [B] [W] épouse [R] la somme de 36.852,89 € TTC au titre des réparations, et la somme de 1.135,34 € au titre de la location de box,
CONFIRME le jugement pour le surplus des dispositions à la cour,
y ajoutant :
CONDAMNE la SARL Fortain Bourdales à payer à M. [F] [R] et Mme [B] [W] épouse [R] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la SARL Fortain Bourdales aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Mme FAURE, Présidente, et par M. CHARRASSIER-CAHOURS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.