Livv
Décisions

CA Versailles, ch. civ. 1-2, 8 octobre 2024, n° 23/03489

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

BNP Paribas Personal Finance (SA)

Défendeur :

Ecorenove (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Javelas

Conseiller :

Mme Thivellier

Avocats :

Me Karm, Me Mendes Gil, Me Guepin

TJ Chartres, du 14 mars 2023, n° 22/0017…

14 mars 2023

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 4 septembre 2018, Mme [Z] [G] et M. [W] [G] ont signé un bon de commande auprès de la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR aux fins d'installation de panneaux photovoltaïques pour un montant de 19 200 euros TTC. Cette commande a été financée par un crédit affecté souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance exerçant sous l'enseigne Cetelem le même jour d'un montant en capital de 19 200 euros.

Une attestation de conformité a été établie le 12 octobre 2018.

Par jugement en date du 3 mars 2020, la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR a été placée en liquidation judiciaire.

Suivant acte d'huissier de justice en date du 21 décembre 2021, M. et Mme [G] ont assigné la Selarl [D] [E] en qualité de liquidateur de la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR et la société BNP Paribas Personal Finance aux fins d'obtenir :

- à titre principal, la nullité du contrat conclu avec la première société, et subsidiairement la résolution dudit contrat, la nullité du contrat de crédit, la suspension avant-dire droit des échéances du crédit, la condamnation de la Selarl [D] [E] à reprendre, contre le remboursement du prix de vente de 19 200 euros, le matériel et remettre en état l'immeuble sous astreinte de 100 euros par jour de retard, la condamnation de la société BNP Paribas Personal Finance à rembourser les échéances échues avec intérêts au taux légal à compter du premier prélèvement, outre la capitalisation des intérêts,

- en tout état de cause, que la Selarl [D] [E] ès qualités de liquidateur de la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR les garantisse de toute condamnation prononcée au profit de la société BNP Paribas Personal Finance, la condamnation solidaire des deux sociétés à leur verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre leur condamnation aux dépens,

- que soit fixée au passif de la société Ecorenove la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 14 mars 2023, le juge des contentieux et de la protection du tribunal judiciaire de Chartres a :

- prononcé la nullité du contrat conclu le 4 septembre 2018 entre la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR et M. et Mme [G],

- prononcé la nullité du contrat de crédit affecté conclu le 4 septembre 2018 entre la société BNP Paribas Personal Finance, d'une part, et M. et Mme [G], d'autre part,

- condamné la société BNP Paribas Personal Finance à restituer à M. et Mme [G] les mensualités, intérêts, frais et pénalités perçus au titre du contrat de crédit signé le 4 septembre 2018,

- débouté M. et Mme [G] de leur demande de remise en état de l'immeuble sous astreinte,

- débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande en restitution du capital emprunté,

- débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande en réduction de la réparation du préjudice des emprunteurs,

- débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande de restitution du matériel,

- débouté M. et Mme [G] de leur demande en garantie à l'encontre de la Selarl [D] [E] ès qualités de liquidateur de la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR,

- débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande en indemnisation,

- condamné la société BNP Paribas Personal Finance au paiement de la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- fixé au passif de la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR la créance d'un montant de 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens,

- rappelé que le jugement bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire.

Par déclaration déposée au greffe le 26 mai 2023, la société BNP Paribas Personal Finance a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 29 mai 2024, la société BNP Paribas Personal Finance, appelante, demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chartres le 14 mars 2023 en ce qu'il :

* a prononcé la nullité du contrat conclu le 4 septembre 2018 entre la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR et M. et Mme [G],

* a prononcé la nullité du contrat de crédit affecté qu'elle a conclu le 4 septembre 2018 avec M. et Mme [G],

* l'a condamnée à restituer à M. et Mme [G] les mensualités, intérêts, frais et pénalités perçus au titre du contrat de crédit signé le 4 septembre 2018,

* l'a déboutée de sa demande en restitution du capital emprunté;

* l'a déboutée de sa demande en réduction de la réparation du préjudice des emprunteurs,

* l'a déboutée de sa demande de restitution du matériel;

* l'a déboutée de sa demande en indemnisation,

* l'a condamnée au paiement de la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* a fixé au passif de la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR la créance d'un montant de 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* l'a déboutée de l'intégralité de ses prétentions et demandes, en ce compris sa demande subsidiaire en cas de nullité des contrats en condamnation in solidum de M. et Mme [G] à lui payer la somme de 19 200 euros en restitution du capital prêté, sa demande plus subsidiaire de condamnation in solidum de M. et Mme [G] à lui payer la somme de 19 200 euros à titre de dommages et intérêts, sa demande subsidiaire en condamnation de M. et Mme [G] à restituer à leurs frais l'installation à Me [E], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ecorenove, sa demande subsidiaire de compensation des créances réciproques à due concurrence, sa demande de condamnation in solidum de M. et Mme [G] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

* l'a condamnée aux dépens,

Statuant à nouveau sur les chefs critiqués,

A titre principal,

- déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [G] en nullité et résolution du contrat conclu avec la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR,

- déclarer, par voie de conséquence, irrecevable la demande des époux [G] en nullité et résolution du contrat de crédit qu'elle a conclu avec eux,

- dire et juger à tout le moins que les demandes de nullité et de résolution des contrats ne sont pas fondées,

- débouter M. et Mme [G] de leur demande en nullité et résolution du contrat conclu avec la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR, ainsi que de leur demande en nullité et résolution du contrat de crédit et de leur demande en restitution des mensualités réglées,

En tout état de cause,

- constater que M. et Mme [G] sont défaillants dans le remboursement du crédit,

- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 7 juin 2023,

- condamner M. et Mme [G] solidairement à lui payer la somme de 19 977,23 euros avec les intérêts au taux contractuel de 4,41 % l'an à compter du 7 juin 2023 sur la somme de 18 497,44 euros et au taux légal pour le surplus, outre la restitution des sommes versées à M. et Mme [G] en exécution du jugement au titre des mensualités précédemment réglées, soit la somme de 8 258,56 euros,

- les condamner solidairement, en tant que de besoin, à lui restituer cette somme de 8 258,56 euros,

- subsidiairement, les condamner solidairement à lui régler les mensualités échues impayées au jour où la cour statue et lui enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme,

Subsidiairement, en cas de nullité ou résolution des contrats,

- déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [G] visant à la décharge de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins les en débouter,

- condamner, en conséquence, in solidum M. et Mme [G] à lui régler la somme de 19 200 euros au titre de la restitution du capital prêté,

En tout état de cause,

- déclarer irrecevables les demandes de M. et Mme [G] visant à la privation de sa créance,

- dire et juger à tout le moins qu'elles ne sont pas fondées,

- débouter M. et Mme [G] de leur demande,

Très subsidiairement,

- limiter la réparation qui serait due par elle eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteur à charge pour lui de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice,

- limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour M. et Mme [G] d'en justifier,

A titre infiniment subsidiaire, en cas de privation de créance de la banque,

- condamner in solidum M. et Mme [G] à lui payer la somme de 19 200 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable,

- enjoindre à M. et Mme [G] de restituer, à leurs frais, le matériel installé chez eux à la Selarl [D] [E], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, et dire et juger qu'à défaut de restitution, ils resteront tenus de la restitution ou du remboursement du capital prêté,

- subsidiairement, priver M. et Mme [G] de leur créance en restitution des sommes réglées du fait de leur légèreté blâmable,

- débouter M. et Mme [G] de leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, de leur demande formée au titre des dépens, ainsi que de l'ensemble de leurs autres demandes,

- ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

En tout état de cause,

- condamner in solidum M. et Mme [G] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner in solidum aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes-Gil.

Aux termes de leurs conclusions signifiées le 7 novembre 2023, M. et Mme [G], intimés, demandent à la cour de :

- à titre principal, confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chartres le 14 mars 2023,

A titre subsidiaire, si par impossible la cour infirmait le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat et privé la société BNP Paribas Personal Finance :

- prononcer la résolution du contrat qu'ils ont conclu avec la société Ecorenove exerçant sous le nom commercial Habitat ENR,

- prononcer corrélativement l'annulation du contrat de crédit souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance exerçant sous l'enseigne Cetelem,

- priver a minima de sa créance la société BNP Paribas Personal Finance à hauteur de la moitié et la compenser avec les sommes qu'ils ont d'ores et déjà versées,

- condamner en tout état de cause la Selarl [D] [E] ès qualités de liquidateur de la société Ecorenove exerçant sous le nom commercial Habitat ENR à les garantir de toutes condamnations pouvant être prononcées à leur encontre au profit de la société BNP Paribas Personal Finance tendant au remboursement du prêt,

Y ajoutant,

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance, exerçant sous le nom Cetelem, à leur payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- fixer au passif de la société Ecorenove exerçant sous le nom commercial Habitat ENR, représentée par la Selarl [D] [E], la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance exerçant sous le nom Cetelem aux entiers dépens dont distraction au profit de la Selarl Gibier-Festivi- Rivierre-Guepin par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La Selarl [D] [E] ès qualités de liquidateur de la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR n'a pas constitué avocat. Par acte de commissaire de justice délivré le 21 juillet 2023, la déclaration d'appel lui a été signifiée à personne habilitée. Par acte de commissaire de justice du 15 septembre 2023, les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées selon les mêmes modalités. Par acte de commissaire de justice du 15 novembre 2023, les conclusions des intimés lui ont été signifiées à personne habilitée.

L'arrêt sera donc réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 alinéa 1 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 6 juin 2024.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d'annulation du contrat de vente et du contrat de crédit affecté

* Sur la recevabilité de la demande

La société BNP Paribas Personal Finance soutient que cette demande est irrecevable et à tout le moins non fondée au motif que si la nullité du contrat principal entraîne en principe celle du contrat de crédit affecté en application de l'article L. 312-55 du code de la consommation, cette règle ne peut être mise en oeuvre par les parties de mauvaise foi en violation de l'article 1103 du code civil. Or elle soutient qu'est de mauvaise foi la partie qui tend à détourner une cause de nullité de son objet ou de sa finalité à seule fin de remettre en cause le contrat tout en sachant qu'en réalité, elle conservera le bien acquis du fait de l'impossibilité matérielle pour l'autre de le récupérer.

M. et Mme [G] ne répondent pas sur ce point.

Sur ce,

L'article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Pour autant, la société BNP Paribas Personal Finance n'explique pas en quoi le non-respect de ces dispositions viendrait fonder une irrecevabilité des demandes formulées, étant ajouté que le seul fait de remettre en cause un contrat postérieurement à l'expiration du délai de rétractation ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi alléguée de M. et Mme [G], qui agissent également en raison de la rentabilité économique de leur installation qu'ils estiment insuffisante.

Aucune violation des dispositions de l'article 1103 du code civil n'étant, en l'espèce, établie, la fin de non-recevoir ne pourra donc être accueillie et la demande d'annulation des contrats de vente et de crédit affecté jugée recevable. De même, il n'y a pas lieu de débouter M. et Mme [G] de leur demande de nullité pour ce motif.

* Sur la nullité du contrat principal

M. et Mme [G] demandent l'annulation du contrat de vente en faisant valoir des irrégularités du bon de commande. Ils relèvent que :

- la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR ne leur a pas fourni un contrat faisant état des mentions obligatoires visées par l'article L. 221-5 du code de la consommation, en particulier sur le droit de rétractation, et qu'aucun autre document papier ne fait mention des informations visées par cet article comme l'exige pourtant l'article L. 221-8 du code de la consommation ;

- les indications relatives aux caractéristiques du bien dans le bon de commande sont sommaires; qu'ils ne disposent d'aucune information s'agissant des procédés de démontage de la toiture, d'intégration et de mise en oeuvre des panneaux; que la dimension, le poids, l'aspect des panneaux, et la performance des composants de l'installation ne sont pas indiqués; que de même, les conditions d'exécution du contrat sont imprécises notamment en ce qui concerne le délai de livraison et les modalités de la pose des matériels;

- le bon de commande ne mentionne pas le prix unitaire de chaque prestation et des biens proposés ce qui constitue pourtant un élément essentiel de l'information du client; qu'ils n'ont pas été en mesure de connaître réellement ce qui leur a été vendu et qu'ils n'ont pu effectuer de comparaison dans le délai légal de rétractation; que c'est ainsi qu'ils ont découvert, à réception de la facture, qu'un système de monitoring leur a été facturé 11 374,41 euros alors qu'il n'avait jamais été installé faute de comptabilité avec leur système de chauffage;

- aucun formulaire de rétractation tel qu'exigé par l'article L. 221-9 du code de la consommation ne leur a été fourni.

Ils ajoutent que la nullité du contrat n'est pas couverte par son exécution volontaire comme le soutient la société BNP Paribas Personal Finance en ce qu'il résulte de l'article 1182 du code civil que la confirmation d'un acte nul exige à la fois la connaissance du vice l'affectant et l'intention de le réparer, ce qui ne saurait résulter de la simple signature de la fiche de réception des travaux faite quelques mois après la signature du contrat principal alors que l'installation ne produisait pas encore d'électricité, ni du règlement des échéances du prêt auxquelles ils étaient tenus.

La société BNP Paribas Personal Finance poursuit l'infirmation du chef du jugement ayant prononcé la nullité du contrat de vente en faisant valoir que :

1) le bon de commande n'est entaché d'aucune irrégularité formelle au regard :

- de la désignation du matériel vendu puisque les mentions figurant sur le bon de commande permettaient à l'acquéreur de connaître la nature et les caractéristiques essentielles de ce qu'il achetait conformément aux dispositions de l'article L. 111-1 du code de la consommation qui n'exige pas la désignation exhaustive de toutes les caractéristiques du matériel mais une désignation des caractéristiques essentielles du bien permettant à l'acquéreur d'identifier précisément le matériel acquis afin d'éviter une incertitude ou une confusion sur le matériel acheté. Elle ajoute que l'imprécision des mentions ne peut être sanctionnée par la nullité du bon de commande à la différence de leur omission, mais seulement par une action en responsabilité liée au manque d'informations ;

- de la mention relative aux modalités d'exécution en ce qu'il comporte des stipulations relatives aux délais et modalités de livraison et d'exécution du contrat, ce qui exclut le prononcé d'une nullité, ajoutant que le texte n'impose pas un planning détaillé de la prestation, de sorte que le tribunal a jouté aux textes et qu'en tout état de cause, le délai indiqué a été respecté. Elle relève qu'à supposer établi que ces mentions ne seraient pas suffisamment détaillées, seule une action en responsabilité pourrait être engagée si l'acquéreur établissait le caractère tardif de celle-ci ou une mauvaise exécution, seule une omission pouvant entraîner la nullité sur le terrain de l'irrégularité formelle ;

- des modalités des paiement en ce que la Cour de cassation a expressément jugé que la mention du prix global était suffisant (Civ. 1ère, 17 juin 2020, n°17-26.398) ;

- du droit de rétractation en faisant valoir que M. et Mme [G] ne produisent pas le bon de commande dont ils détiennent l'original alors qu'ils soutiennent que celui-ci ne comporterait pas de bordereau de rétractation, ce qui ne lui permet pas d'assurer utilement sa défense alors que les parties sont tenues d'un principe de loyauté dans l'administration de la preuve. Elle ajoute qu'ils ne produisent que le recto du bon de commande et non le verso qui comporte vraisemblablement le bordereau de rétractation comme mentionné sur le bon de commande.

2) la nullité du bon de commande ne peut être ordonnée en l'absence de preuve d'un préjudice en résultant pour l'acquéreur comme il en résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation (civ. 1ère 20 mai 2020, n°19-14.477), et qu'en l'espèce, les acquéreurs ne justifient pas d'un préjudice résultant des irrégularités alléguées.

A titre subsidiaire, elle fait valoir que les irrégularités affectant le bon de commande, qui sont purement formelles, ont été couvertes par l'exécution volontaire du contrat par les acquéreurs qui ont laissé le vendeur installer les panneaux, réceptionné l'installation sans réserve et sollicité de la banque qu'elle verse les fonds, et ont utilisé l'installation pendant plusieurs années en connaissance de ses caractéristiques, et ce même après l'introduction de leur action. Elle soutient qu'en application du principe de l'estoppel, une partie ne peut avoir une attitude incompatible avec ses demandes dans la mesure où elle sollicite la nullité des contrats tout en poursuivant leur exécution.

Sur ce,

A titre liminaire, la cour constate que :

- le contrat de vente souscrit le 4 septembre 2018 est soumis aux dispositions du code de la consommation dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile et en leur version postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016,

- le contrat de crédit affecté conclu le même jour est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,

- il convient de faire application des dispositions du code civil en leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.

Les dispositions de l'article L. 221-9 du code de la consommation, prévues à peine de nullité du contrat en application de l'article L. 242-1 du même code, énoncent que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties.

Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.

(...)

Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5.

Aux termes des dispositions de l'article L. 221-5 du code de la consommation, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment les informations suivantes:

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat.

L'article L.111-1 du même code dispose qu'avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1. Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2. Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;

3. En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4. Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;

5. S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;

6. La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.

La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés à l'article R. 111-1 du même code.

En l'espèce, le bon de commande en litige signé par M. et Mme [G] porte sur un pack électrique comprenant :

- fourniture et pose de 10 panneaux photovoltaïques Bisol / Eurener. Garantie fabriquant 20 ans de production

- puissance totale: 3 Kwc d'énergie électrique, 10 micro-onduleurs Enphase M215/M250

- intégration ou surimposition de toiture GSE / K2 systems et coffret de protection électrique AC

- système de régulation centrale et de monitoring du chauffage

- demandes administratives à la charge de notre entreprise

- autoconsommation

- prix HT: 18 024,56 euros, TVA: 1 175,44 euros, prix TTC: 19 200 euros.

Par ailleurs, le bon de commande prévoit la date prévue d'installation : '4 à 12 semaines à compter de la prise de cotes par le technicien et l'encaissement de l'acompte ou l'accord définitif de la société de financement'.

Alors que le contrat conclu implique des opérations à la fois matérielles de livraison et d'installation du matériel commandé, mais également des démarches administratives et de raccordement, cette mention est insuffisante pour répondre aux exigences de l'article L. 111-1, 3°du code de la consommation, dès lors qu'il n'est pas distingué entre le délai de pose des modules et autres matériels et celui de réalisation des prestations à caractère administratif à la charge de la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR. Or, un tel délai global, dont au surplus le point de départ est soumis à une incertitude, ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aura exécuté ses différentes obligations, de sorte que la nullité du bon de commande est encourue de ce fait comme l'a jugé la Cour de cassation (Civ.1ère, 15 juin 2022, n°21-11.747, Civ. 1ère, 24 janvier 2024, n°21-20.693). Le fait que le délai aurait été respecté est, en tout état de cause, indifférent, de même qu'il n'y a pas lieu de rapporter la preuve d'un préjudice en résultant pour l'acquéreur afin que l'annulation du bon de commande soit ordonnée, ainsi qu'il en ressort des arrêts de la Cour de cassation susvisés.

Par ailleurs, c'est en vain que la société BNP Paribas Personal Finance prétend que les nullités entachant le bon de commande ont été couvertes par l'exécution volontaire du contrat par M. et Mme [G].

En effet, il est de règle que la nullité qui découle de l'irrégularité formelle du contrat au regard des dispositions régissant la vente hors établissement et dont la finalité est la protection du consommateur, est une nullité relative.

L'article 1182 du code civil énonce que la confirmation est l'acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l'objet de l'obligation et le vice affectant le contrat.

La confirmation ne peut intervenir qu'après la conclusion du contrat.

L'exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation. En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu'après que la violence a cessé.

La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers.

Il s'en déduit que la confirmation d'un acte nul impose, d'une part, la connaissance du vice l'ayant affecté et, d'autre part, l'intention de le réparer.

En l'espèce, il ressort du bon de commande produit par les acquéreurs qu'ils déclarent 'avoir pris connaissance des conditions de vente figurant au dessous de ce bon de commande et des articles L. 221-18 à L. 221-29 du code de la consommation', étant relevé que ces éléments ne figurent pas sur les deux pages du bon de commande versés aux débats par M. et Mme [G] qui affirment qu'il ne comporte aucune page supplémentaire sans pour autant produire l'original du bon de commande. Cependant, quand bien même le bon de commande remis à M. et Mme [G] contiendrait la reproduction de ces dispositions du code de la consommation dont il est fait état, il convient de relever qu'il ne s'agit pas des articles L. 221-5, L. 221-9 et L. 111-1 du code de la consommation relatifs au formalisme applicable au contrat litigieux et qu'en tout état de cause, cette seule reproduction serait insuffisante à révéler à l'acquéreur les vices affectant ce bon (Cass. 1ère civ., 24 janvier 2024, pourvoi n° 21-20.691).

En outre, le seul fait que M. et Mme [G] aient laissé le contrat s'exécuter en acceptant la livraison, en signant l'attestation de réception des travaux et la demande de déblocage des fonds, et en utilisant l'installation, ne peut s'analyser en une confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité, alors que ces faits ne démontrent pas qu'ils ont eu connaissance des irrégularités affectant le bon de commande en litige et l'intention de les réparer.

Enfin, le principe de l'estoppel sanctionne l'attitude procédurale d'une partie, au cours d'une même instance, consistant à adopter des positions procédurales contraires ou incompatibles entre elles dans des conditions de nature à induire en erreur son adversaire sur ses intentions, de sorte que le fait que M. et Mme [G] aient continué d'utiliser leur installation tout en demandant la nullité des contrats ne saurait entraîner l'irrecevabilité de leur action de ce fait.

Par suite, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a annulé le contrat de vente, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens de nullité soulevés par M. et Mme [G].

En conséquence, le contrat étant annulé, il convient de débouter la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande en résiliation du contrat de prêt et en paiement de la somme de 19 977,23 euros restant due à ce titre et de sa demande en reprise du paiement des mensualités du prêt, de même qu'en restitution des sommes versées en exécution du jugement déféré.

Aux termes de l'article L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit, lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

L'annulation du contrat de vente entraîne donc, ipso facto, celle du contrat de crédit affecté.

Le jugement déféré est confirmé de ce chef.

Sur la créance de restitution de la société BNP Paribas Personal Finance

L'annulation du prêt affecté a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu'elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d'autre.

M. et Mme [G] font valoir que les carences et irrégularités du bon de commande au regard des règles protectrices du droit de la consommation ne pouvaient manquer d'interpeller la société BNP Paribas Personal Finance, professionnelle du crédit. Ils soutiennent qu'en consentant et en délivrant les fonds alors que le contrat était affecté d'une cause de nullité, ce qu'elle ne pouvait ignorer en procédant à son examen même succinct, la société BNP Paribas Personal Finance a commis une faute la privant de sa créance de restitution.

Ils ajoutent que le prêteur devait s'assurer de l'exécution complète de la prestation avant de libérer le capital emprunté, ce qu'il n'a pas fait. Ils soulignent que l'attestation de travaux ne portait pas sur la réalisation des travaux de raccordement au réseau et l'obtention des autorisations administratives alors que ces prestations sont expressément prévues dans le bon de commande, de sorte qu'il existait un doute sur le bon achèvement de l'ensemble des prestations financées qui aurait dû conduire la société BNP Paribas Personal Finance à procéder à des vérifications complémentaires avant de débloquer les fonds, ce qu'elle n'a pas fait.

Ils soutiennent que cette faute leur a causé un préjudice équivalent au capital emprunté car ils ont perdu, du fait de la résiliation du contrat, la propriété de l'équipement dont l'acquisition était l'objet de la souscription du prêt, ce qui est d'autant plus préjudiciable que la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR a été placée en liquidation judiciaire. Ils ajoutent que la conclusion et l'exécution du contrat se sont révélées préjudiciables en raison des faibles performances de leur installation, sans rapport avec la simulation remise par le vendeur lors de la signature du bon de commande, et qu'ils se trouvent dans une situation financière désastreuse, devant payer le prix d'une installation qui n'assume pas sa fonction et sans perspective de se retourner contre leur vendeur en déconfiture.

A titre subsidiaire, ils font valoir qu'ils subissent à tout le moins un préjudice consistant en la perte d'une chance de ne pas conclure le contrat s'ils avaient été avertis de ses irrégularités, ce qui justifie que la société BNP Paribas Personal Finance soit privée de sa créance a minima à hauteur de la moitié.

Ils demandent enfin que soient déduites les sommes d'ores et déjà versées et qu'en tout état de cause, la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR soit condamnée à les garantir, en raison des différents manquements qu'elle a commis, de toutes condamnations pouvant être prononcées à leur encontre au profit de la société BNP Paribas Personal Finance tendant au remboursement du prêt.

La société BNP Paribas Personal Finance fait valoir que la demande des intimés visant à la privation de sa créance est irrecevable en ce qu'ils ont poursuivi l'exécution volontaire des contrats et les ont confirmés, renonçant ainsi à opposer tout moyen de contestation afférent à une irrégularité formelle du bon de commande ou à une faute dans le déblocage des fonds.

Au fond, elle conclut au rejet de cette demande en faisant valoir que M. et Mme [G] ne peuvent rechercher sa responsabilité que sur un fondement délictuel du fait que le contrat de crédit a été annulé et ne peuvent faire valoir l'inexécution d'une obligation contractuelle supposée n'avoir jamais existé, à savoir une faute contractuelle dans le déblocage des fonds.

Elle soutient qu'en tout état de cause, elle n'a commis aucune faute dans le déblocage des fonds prêtés liée à la vérification du bon de commande, affirmant que l'existence même d'une obligation de la banque de vérifier la régularité du contrat principal est contestable en ce qu'il n'existe aucun texte ni obligation légale en ce sens. Elle ajoute que les dispositions du code de la consommation en matière de crédit à la consommation résultent de la transposition de la directive 2008/48/CE qui ne prévoit nullement à la charge des établissements de crédit une obligation de vérification de la régularité du bon de commande du vendeur, de sorte que la jurisprudence ne peut créer une telle obligation en violation du principe d'harmonisation maximale de la directive.

Elle fait valoir qu'elle n'a également commis aucune faute dans la vérification de la prestation financée, relevant avoir versé les fonds au vu d'une attestation de l'emprunteur valant ordre de paiement, ce qui l'exonère de toute responsabilité dans le versement des fonds conformément aux règles du mandat, et au vu du certificat de réalisation de la prestation signé par l'emprunteur, ajoutant que le contrôle ne doit porter que sur les prestations à charge de la société et non sur les autorisations données par des organismes tiers ni sur la réalisation du raccordement réalisé ultérieurement par EDF.

Elle affirme qu'à supposer qu'elle ait commis une faute, sa responsabilité ne pourrait être engagée qu'en cas de preuve d'un préjudice et d'un lien de causalité, et ce que la société venderesse soit in bonis ou en procédure collective. Or, elle soutient que M. et Mme [G] ne justifient d'aucun préjudice qui serait en lien avec les fautes alléguées dans la mesure où leur installation est bien achevée et fonctionnelle et que si les acquéreurs font état de ce qu'elle n'est pas suffisamment rentable, ils ne justifient pas que les rendements ne seraient pas conformes à ceux réalisés par ce type d'installation, faute d'expertise produite.

Elle indique qu'en tout état de cause, M. et Mme [G] ne justifient pas d'une perte de chance de ne pas contracter en ce qu'ils ne justifient pas de la mention omise du bon de commande qui aurait pu les empêcher de poursuivre la relation contractuelle et donc empêcher le déblocage des fonds alors qu'ils avaient la faculté de confirmer le contrat et donc de passer outre les irrégularités formelles. Elle fait en outre valoir qu'ils bénéficient déjà de l'exonération du paiement des intérêts à hauteur de 7 557 euros.

Elle soutient que leur préjudice ne peut être constitué par l'impossibilité de récupérer le prix de vente versé au vendeur en liquidation judiciaire car le préjudice résulte alors de cette liquidation et de la situation du vendeur et non d'une faute de la banque, le lien de causalité direct faisant défaut, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge. Elle relève que le seul constat de l'existence d'une procédure collective ne permet pas d'en déduire nécessairement que l'acquéreur ne pourra obtenir restitution du prix de vente car il a un droit à participer aux répartitions effectuées dans ce cadre. Elle indique qu'en l'absence de comparution du liquidateur qui ne forme aucune demande de restitution du matériel, l'emprunteur va donc de fait rester en possession du matériel, ajoutant qu'en cas de liquidation, les obligations de faire ne peuvent se traduire que par l'inscription d'une créance de dommages et intérêts pour inexécution et que le liquidateur ne peut donc être condamné à exécuter une obligation de faire qui consisterait à venir récupérer le matériel. Elle en déduit que M. et Mme [G] vont donc nécessairement rester en possession de l'installation, qui est d'une valeur de 19 200 euros et fonctionnelle, ce qui limite d'autant leur préjudice, les prestations non restituées et conservées devant être évaluées, de même qu'en raison de l'absence de règlement des intérêts.

A titre subsidiaire, si la cour devait estimer qu'un préjudice a été subi et que le lien de causalité est caractérisé, elle demande de limiter sa condamnation en proportion du préjudice effectivement subi en lien de causalité avec la faute opérée, à savoir la part de la prestation qui n'a pas été achevée à charge pour l'acquéreur d'en justifier, la réparation du préjudice devant rester proportionnée au préjudice subi. Elle sollicite en outre la prise en considération la faute de l'emprunteur liée à la signature fautive de l'attestation et demande de versement des fonds.

Elle demande enfin à la cour de tenir compte de la valeur du matériel conservé par l'acquéreur dans le calcul des restitutions à opérer, soutenant que lorsqu'une prestation en nature ne peut être restituée, la valeur de cette prestation conservée doit être prise en compte dans le cadre des restitutions. Elle soutient donc que la valeur du matériel conservé par l'acquéreur vient en diminution du prix d'achat que l'entreprise devrait lui restituer et de la même façon que l'emprunteur doit restituer à la banque la valeur du matériel qu'elle conserve et qu'elle a financé. Elle soutient qu'il appartient donc à l'acquéreur de lui restituer la part du capital ayant financé le matériel posé qu'il conserve.

Sur ce,

* Sur la recevabilité de la demande

Comme indiqué ci-dessus, l'exécution volontaire des contrats ne peut s'analyser en une confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité et fonder une renonciation de leur part à opposer tout moyen de contestation afférent à une irrégularité formelle du bon de commande, dès lors qu'il n'est pas démontré que M. et Mme [G] aient eu connaissance des irrégularités affectant le bon de commande en litige et l'intention de les réparer.

Il convient en conséquence de déclarer la demande de M. et Mme [G] de privation de la créance de la banque recevable.

* Sur le fond

Suite à l'annulation du contrat de crédit, les parties à ce contrat sont rétablies dans leur état antérieur, ce qui impose en principe à l'emprunteur de restituer le capital emprunté, même lorsque les fonds ont été directement versés entre les mains du vendeur.

L'emprunteur peut toutefois échapper à une telle restitution s'il parvient à démontrer que le prêteur a commis une faute en libérant les fonds, laquelle lui permet d'obtenir des dommages-intérêts venant se compenser avec le capital emprunté.

Dans la logique de l'opération commerciale unique prévue par l'article L. 311-1 11° du code de la consommation et afin de protéger le consommateur, le prêteur est tenu de vérifier la régularité formelle du contrat principal et d'informer l'emprunteur d'une éventuelle irrégularité afin que celui-ci puisse confirmer le contrat ou y renoncer. A défaut, le prêteur commet une faute susceptible d'engager sa responsabilité comme le réaffirme de manière constante la Cour de cassation (notamment Civ. 1ère, 26 septembre 2018, n°17-14.951, Civ. 1ère, 11 mars 2020, n°18-26-189, Civ. 1ère, 22 septembre 2021 n°19-21.968), y compris lorsque le contrat de prêt a été annulé.

Ainsi, en ne vérifiant pas la régularité formelle du bon de commande au regard des dispositions impératives du code de la consommation dont les irrégularités relevées ci-dessus étaient manifestes et aisément identifiables par un professionnel comme la société BNP Paribas Personal Finance, et en finançant une opération accessoire à un contrat de vente nul, l'appelante a donc, et contrairement à ce qu'elle soutient, commis une faute.

M. et Mme [G] doivent, après avoir démontré l'existence de fautes commises par la banque, également rapporter la preuve qu'il en est résulté pour eux un préjudice en lien causal avec les fautes commises.

Il n'est pas justifié, ni même allégué, que l'installation ne fonctionne pas, étant relevé qu'ils produisent des relevés d'auto-consommation, de même que M. et Mme [G] ne justifient pas des rendements de leur installation et du manque d'efficacité de la centrale photovoltaïque, ni qu'ils seraient sans rapport avec la rentabilité attendue faute de justifier du caractère contractuel des documents produits (pièce 3 et 4) s'agissant de simples simulations non reprises dans le bon de commande. Ils n'établissent pas davantage qu'ils se trouveraient, de ce fait, dans une situation financière désastreuse.

En revanche, il ressort de la jurisprudence la plus récente de la Cour de cassation (Civ. 1ère, 10 juillet 2024, n°22-24.754) que si, en principe, à la suite de l'annulation de la vente, l'emprunteur obtient du vendeur la restitution du prix, de sorte que l'obligation de restituer le capital à la banque ne constitue pas, en soi, un préjudice réparable, il en va différemment lorsque le vendeur est en liquidation judiciaire.

En effet, dans une telle hypothèse, d'une part, compte tenu de l'annulation du contrat de vente, l'emprunteur n'est plus propriétaire de l'installation qu'il avait acquise, laquelle doit pouvoir être restituée au vendeur ou retirée pour éviter des frais d'entretien ou de réparation.

D'autre part, l'impossibilité pour l'emprunteur d'obtenir la restitution du prix est, selon le principe d'équivalence des conditions, une conséquence de la faute de la banque dans l'examen du contrat principal.

Par conséquent, il convient de retenir que lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, l'emprunteur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal.

Il s'en suit que les emprunteurs ont subi un préjudice, indépendamment de l'état de fonctionnement de l'installation, consistant à ne pas pouvoir obtenir, auprès d'un vendeur placé en liquidation judiciaire, la restitution du prix de vente d'un matériel dont ils ne sont plus propriétaires, préjudice qui n'aurait pas été subi sans la faute de la banque.

Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande de restitution de la somme de 19 200 euros correspondant au capital prêté et de sa demande subsidiaire en réduction du montant du préjudice dans la mesure où le matériel que les emprunteurs pourraient conserver malgré l'annulation des contrats, n'est plus leur propriété, de sorte qu'il n'y a pas lieu de tenir compte de sa valeur comme le demande la banque ni de subordonner la privation de la banque de la restitution du capital à la non restitution du matériel.

Sur la demande en restitution du matériel

Si elle devait être déchue de l'intégralité du capital versé, la société BNP Paribas Personal Finance demande d'enjoindre à M. et Mme [G] d'avoir à opérer la dépose du matériel et son transport à ses frais dans les locaux de la procédure collective afin d'empêcher toute situation d'enrichissement sans cause, outre la restitution des revenus perçus au titre de la revente d'électricité.

C'est par des motifs pertinents que les débats devant la cour n'ont pas altérés et qu'il convient d'adopter que le premier juge a débouté la société BNP Paribas Personal Finance de cette demande aux motifs qu'elle n'avait pas qualité pour demander la restitution du matériel dont elle n'est pas propriétaire.

Le jugement est en conséquence confirmé de ce chef.

Sur la demande en dommages et intérêts de la banque

La société BNP Paribas Personal Finance demande, en cas de privation de sa créance de restitution, la condamnation de M. et Mme [G] à lui payer des dommages et intérêts d'un montant de 19 200 euros en raison de leur faute commise dans la signature de l'attestation de fin de travaux et l'ordre de paiement donné, sans laquelle elle n'aurait jamais réglé les fonds à la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR. Elle soutient qu'ils ont ainsi fait preuve d'une légèreté blâmable qui lui causerait préjudice dans la mesure où elle ne pourrait obtenir restitution des fonds prêtés. A tout le moins, elle demande qu'ils soient privés de leur créance de restitution au titre des sommes déjà réglées.

M. et Mme [G] ne répondent pas sur ce point.

Sur ce,

En application de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

C'est également par des motifs pertinents que les débats devant la cour n'ont pas altérés et qu'il convient d'adopter que le premier juge a débouté la société BNP Paribas Personal Finance de ces demandes en relevant que si M. et Mme [G] ont signé l'attestation de fin de travaux et l'ordre de paiement, laquelle n'est au surplus pas versée aux débats, ils l'ont fait en qualité de consommateurs non avertis et ne pouvaient déceler la nullité du contrat principal alors même que les dispositions applicables du code de la consommation n'y étaient pas expressément mentionnées et que dès lors, la légèreté blâmable à leur encontre ne pouvait être caractérisée et ce d'autant plus que la nullité porte sur la régularité du bon de commande et non sur l'exécution du contrat principal.

Le jugement est en conséquence confirmé de ce chef.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La société BNP Paribas Personal Finance, qui succombe en son appel, est condamnée aux dépens d'appel, les dispositions du jugement relatives aux dépens étant par ailleurs confirmées.

Elle est condamnée à verser à M. et Mme [G] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions à l'encontre de la société Ecorenove exerçant sous l'enseigne Habitat ENR.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt réputé contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions dévolues à la cour ;

Y ajoutant,

Déclare recevables les demandes de M. et Mme [G] en nullité et en résolution des contrats de vente et de prêt ;

Déclare recevable la demande de M. et Mme [G] de privation de la créance de la banque ;

Déboute la société BNP Paribas Personal Finance de demandes en résiliation du contrat de prêt, en paiement de la somme de 19 977,23 euros restant due à ce titre et tendant à la reprise des mensualités du prêt ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à verser à Mme [Z] [G] et M. [W] [G] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par la Selarl Gibier-Festivi-Rivierre-Guepin en application de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame KOC, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.