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Décisions

CA Riom, 1re ch., 8 octobre 2024, n° 23/00070

RIOM

Arrêt

Autre

CA Riom n° 23/00070

8 octobre 2024

COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 08 octobre 2024

N° RG 23/00070 - N° Portalis DBVU-V-B7H-F6AJ

- DA- Arrêt n°

S.C.I. DLP / SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRE DE LA RESIDENCE LE LAC

Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CUSSET, décision attaquée en date du 09 Janvier 2023, enregistrée sous le n° 21/01031

Arrêt rendu le MARDI HUIT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Clémence CIROTTE, Conseiller

En présence de :

Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

S.C.I. DLP

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Maître Jérôme LANGLAIS de la SCP LANGLAIS BRUSTEL LEDOUX & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

APPELANTE

ET :

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRE DE LA RESIDENCE LE LAC pris en la personne de son syndic la société SQUARE HABITAT CREDIT AGRICOLE CENTRE FRANCE ([Adresse 2])

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Maître Arthur MARTEL, avocat au barreau de CUSSET/VICHY

Timbre fiscal acquitté

INTIMEE

DÉBATS :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 juillet 2024, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. VALLEIX et M. ACQUARONE, rapporteurs.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 08 octobre 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

I. Procédure

La SCI DLP est propriétaire dans la copropriété [Adresse 6] à Vichy d'un appartement situé au 13e étage Nord du bâtiment C, disposant d'une terrasse, partie commune correspondant au toit terrasse de l'immeuble.

La terrasse étant affectée de problèmes d'infiltrations d'eau, la copropriété avait envisagé de procéder à sa réfection.

M. [S] [L], gérant de la SCI DLP, a procédé à ses frais aux travaux d'étanchéité de la terrasse dont il a confié la réalisation à la société [Z].

Lors d'une assemblée générale extraordinaire qui s'est tenue le 30 juillet 2021, les copropriétaires de la [Adresse 6] ont refusé de valider les travaux de réfection du toit terrasse engagés par la SCI DLP, et par conséquent de prendre en charge leur financement.

Considérant ce refus comme abusif, la SCI DLP a donc fait assigner le syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] devant le tribunal judiciaire de Cusset le 29 septembre 2021, afin de voir prononcer la nullité des résolutions numéros 2 et 3 de l'assemblée générale du 30 juillet 2021, et condamner le syndicat des copropriétaires à lui rembourser la somme de 96 089,41 EUR au titre des travaux réalisés, avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2021, outre dommages-intérêts (10 000 EUR), article 700 du code de procédure civile (5000 EUR) et les dépens.

Le syndicat des copropriétaires s'opposait à toutes les demandes de la SCI DLP.

Par jugement du 9 janvier 2023 le tribunal judiciaire de Cusset a rendu la décision suivante :

« Le Tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire et en premier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE recevable la SCI DLP (RCS PARIS 879 145 373) en ses demandes ;

DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande de nullité de la résolution nº 2 de rassemblée générale extraordinaire du syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] du 30 juillet 2021 ;

DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande relative à l'aveu judiciaire du syndicat des copropriétaires de la [Adresse 6] du 30 juillet 2021 ;

DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande relative aux aménagements paysagers de la terrasse du 13eme étage ;

DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande de condamnation du syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] à lui payer et porter la somme de quatre vingt seize mille quatre-vingt-neuf euros et quarante et un centimes (96089,41 euros) avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2021 ;

DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande relative à la gestion d'affaires et à l'enrichissement sans cause ;

DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande de condamnation du syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] à lui payer et porter la somme de dix mille euros (10 000 euros) à titre de dommages et intérêts ;

DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande subsidiaire de désignation d'un expert judiciaire ;

DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande de perception d'une provision de cinquante mille euros (50000 euros) ;

CONDAMNE la SCI DLP (RCS PARIS 879 145 373) aux dépens ;

DEBOUTE la SCI DLP de sa demande au titre des dépens ;

CONDAMNE la SCI DLP (RCS PARIS 879 145 373) à payer et porter au titre de l'article 700 du code de procédure civile la somme de QUATRE MILLE EUROS (4000,00 euros) au syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] représenté par son syndic ;

DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire du présent jugement en toutes ses dispositions est de droit. »

Dans les motifs de sa décision le tribunal judiciaire a jugé qu'aucun abus de majorité ne pouvait être retenu à la charge de la copropriété, à qui il appartenait de décider seule des travaux à réaliser ; que dès lors elle pouvait, sans abus, voter dans un premier temps le principe de l'exécution des travaux, puis décider plus tard de leurs modalités d'exécution ; qu'aucune urgence n'était démontrée par la SCI DLP ; celle-ci était dépourvue de toute qualité lui permettant de se substituer unilatéralement et sans autorisation régulière à la copropriété pour faire réaliser des travaux. Le tribunal a également considéré que contrairement à ce que soutenait la SCI DLP, la question de l'étanchéité de la terrasse n'avait pas été négligée par le syndicat des copropriétaires, ainsi que cela résultait des comptes rendus du conseil syndical.

***

La SCI DLP a fait appel de cette décision le 11 janvier 2023, précisant :

« Nature : Au fond Date de la décision : 09/01/2023 Décision gracieuse : Non

Objet/Portée de l'appel : La présente déclaration d'appel a pour objet de voir prononcer l'annulation du jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de CUSSET et, en tout état de cause, l'infirmation, sinon la critique des chefs de jugement ci-après exposés. L'appelante précise que son appel est formé à l'appui de l'intégralité des pièces produites en première instance ainsi que sur les pièces qui pourraient être produites en cause d'appel. L'appelante défère donc à la Cour la connaissance des chefs de jugement suivants, qu'elle critique expressément et ainsi que ceux qui en dépendent : - DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande de nullité de la résolution nº 2 de l'assemblée générale extraordinaire du syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] du 30 juillet 2021 ; - DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande relative à l'aveu judiciaire du syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] du 30 juillet 2021 ; - DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande relative aux aménagements paysagers de la terrasse du 13ème étage ; - DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande de condamnation du syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] à lui payer et porter la somme de quatre-vingt-seize mille quatre-vingt-neuf euros et quarante et un centimes (96 089,41 euros) avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2021 ; - DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande relative à la gestion d'affaires et à l'enrichissement sans cause ; - DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande de condamnation du syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] à lui payer et porter la somme de dix mille euros (10 000 euros) à titre de dommages et intérêts ; - DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande subsidiaire de désignation d'un expert judiciaire ; - DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande de perception d'une provision de cinquante mille euros (50 000 euros) ; - CONDAMNE la SCI DLP (RCS PARIS 879 145 373) aux dépens : - DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande au titre des dépens - CONDAMNE la SCI DLP (RCS PARIS 879 145 373) à payer et porter au titre de l'article 700 du code de procédure civile la somme de QUATRE MILLE EUROS (4000,00 euros) au syndicat des copropriétaires de la [Adresse 6] représenté par son syndic ; - DÉBOUTE la SCI DLP de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; - RAPPELLE que l'exécution provisoire du présent jugement en toutes ses dispositions est de droit. »

Dans ses conclusions nº 2 ensuite du 10 juillet 2023, la SCI DLP demande à la cour de :

« Pour les causes sus-énoncées,

Vu les articles 430 et suivants du Code de Procédure Civile,

Vu les articles 447 et suivants du même Code,

Vu les articles 14, 24, 26 et 42 de la Loi du 10 JUILLET 1965 sur la Copropriété,

Vu l'article 1300 et suivants du Code Civil,

I) À TITRE PRINCIPAL

Prononcer la nullité du jugement rendu le 09 JANVIER 2023 par le Tribunal Judiciaire de CUSSET.

Sur le fond.

Prononcer la nullité de la délibération ayant rejeté la résolution nº 2 de l'Assemblée Générale Extraordinaire du 30 JUILLET 2021.

Condamner le Syndicat des Copropriétaires de la [Localité 7] à payer et porter à la SCI DLP la somme de 96 089,41 € au titre des travaux réalisés, somme qui sera assortie des intérêts légaux à compter du 30 juillet 2021

Condamner le même Syndicat des Copropriétaires de la [Localité 7] à payer et porter à la SCI DLP une indemnité de 10 000 € à titre de Dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.

Si mieux aime la Cour,

Faire application de la théorie du paiement de l'indu, sinon de la gestion d'affaires, à tout le moins de l'enrichissement sans cause.

Condamner le Syndicat des Copropriétaires de la [Localité 7] à payer et porter à la SCI DLP la somme de 96 089,41 € au titre des travaux réalisés, somme qui sera assortie des intérêts légaux à compter du 30 JUILLET 2021.

En tant que de besoin et avant dire droit,

Désigner tel Expert qu'il lui plaira à la Cour avec notamment pour mission de se prononcer sur la conformité des travaux réalisés et donner à la Cour toutes informations utiles sur le montant desdits travaux, notamment si ces derniers correspondent au prix du marché.

Condamner le SDC de la [Adresse 6] à payer et porter à la SCI DLP une provision de 50 000 € à valoir sur l'indemnisation définitive du préjudice devant revenir à la SCI DLP.

II) À titre subsidiaire et si la Cour ne devait pas prononcer la nullité du jugement rendu

Reformer le jugement rendu le 09 JANVIER 2023 par le Tribunal Judiciaire de CUSSET en tous ses chefs de jugement critiqués.

Prononcer la nullité de la délibération ayant rejeté la résolution nº 2 de l'Assemblée Générale Extraordinaire du 30 JUILLET 2021.

Condamner le Syndicat des Copropriétaires de la [Localité 7] à payer et porter à la SCI DLP la somme de 96 089,41 € au titre des travaux réalisés, somme qui sera assortie des intérêts légaux à compter du 30 juillet 2021

Si mieux aime la Cour,

Faire application de la théorie du paiement de l'indu, sinon de la gestion d'affaires, à tout le moins de l'enrichissement sans cause.

Condamner le Syndicat des Copropriétaires de la [Localité 7] à payer et porter à la SCI DLP la somme de 96 089,41 € au titre des travaux réalisés, somme qui sera assortie des intérêts légaux à compter du 30 JUILLET 2021.

Condamner le Syndicat des Copropriétaires de la [Localité 7] à payer et porter à la SCI DLP une indemnité de 10 000 € à titre de Dommages-Intérêts en réparation du préjudice subi.

En tant que de besoin et avant dire droit.

Désigner tel Expert qu'il lui plaira à la Cour avec notamment pour mission de se prononcer sur la conformité des travaux réalisés et donner à la Cour toutes informations utiles sur le montant desdits travaux, notamment si ces derniers correspondent au prix du marché.

Condamner le SDC de la [Adresse 6] à payer et porter à la SCI DLP une provision de 50 000 € à valoir sur l'indemnisation définitive du préjudice devant revenir à la SCI DLP.

III) À titre infiniment subsidiaire

Condamner le Syndicat des Copropriétaires de la [Localité 7] à payer et porter à la SCI DLP une indemnité de 54 433,55 €

IV) En tout état de cause

Débouter le Syndicat des Copropriétaires de sa demande d'infirmation et rejeter l'ensemble des demandes indemnitaires présentées par lui.

Condamner le Syndicat des Copropriétaires de la [Localité 7] à payer et porter à la SCI DLP une indemnité de 5 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamner la même aux entiers dépens d'instance et d'appel. »

***

En défense, dans des écritures du 12 juillet 2023, le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 6] demande à la cour de :

« Statuer ce que de droit sur la demande de nullité du jugement du 09/01/2023 soulevée par la SCI DLP ;

Sur le fond :

Voir confirmer le jugement du Tribunal Judiciaire de CUSSET du 09/01/2023 en ce qu'il :

- Déboute la SCI DLP de sa demande de nullité de la résolution nº 2 de l'AGE du 30/07/2021 ;

- Déboute la SCI DLP de sa demande relative à l'aveu judiciaire du syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] du 30/07/2021 ;

- Déboute la SCI DLP de sa demande relative aux aménagements paysagers de la terrasse du 13ème étage ;

- Déboute la SCI DLP de sa demande de condamnation du syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] à lui payer et porter la somme de 96 089.41 euros avec intérêts au taux légal à compter du 30/07/2021 ;

- Déboute la SCI DLP de sa demande relative à la gestion d'affaires et à l'enrichissement sans cause ;

- Déboute la SCI DLP de sa demande de condamnation du syndicat des copropriétaires de la [Localité 7] à lui payer et porter la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- Déboute la SCI DLP de sa demande subsidiaire de désignation d'un expert judiciaire ;

- Déboute la SCI DLP de sa demande de perception d'une provision de 50 000 € ainsi qu'aux entiers dépens ;

- Condamne la SCI DLP à verser la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux dépens ;

Néanmoins, voir infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la SCI DLP recevable en son action à l'encontre de la délibération du 30/07/2021 ;

Statuant à nouveau :

Voir juger irrecevable la SCI DLP en ses demandes, faute d'avoir contesté le procès-verbal d'assemblée générale du 03/12/2020 en ses résolutions nº 2 et 3 ;

Voir infirmer le jugement en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 10 000 € (dix mille euros) sur le fondement de l'article 1240 du Code Civil ;

Statuant à nouveau :

Voir condamner la SCI DLP à verser la somme de 10 000 € (dix mille euros) à titre de dommages et intérêts pour comportement abusif et injustifié ;

En tout état de cause :

Voir débouter la SCI DLP de toutes ses demandes et notamment de voir prononcer la nullité de la délibération et rejeter la résolution nº 2 de l'AGE du 30/07/2021, de voir condamner le syndicat de la copropriété à verser la somme de 96 089.41 € et de 10 000 € à titre de dommages et intérêts ainsi que de voir éventuellement désigner un consultant ou un homme de l'art pour se prononcer sur la conformité des travaux réalisés outre l'octroi d'une provision de 50 000 €, et de voir condamner le syndicat à la somme de 54 433.55 € ainsi qu'à la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel ;

Voir juger irrecevable et en tout cas mal fondée la SCI DLP en ses fondements juridiques de la théorie du paiement de l'indu, de la gestion de l'affaire ou de l'enrichissement sans cause et de tous autres moyens excipés ;

Voir condamner la SCI DLP à verser la somme de 10 000 € (dix mille euros) au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens d'appel. »

***

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fait ici expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées, étant précisé que le litige se présente céans de la même manière qu'en première instance.

Une ordonnance du 16 mai 2024 clôture la procédure.

II. Motifs

À titre principal dans le dispositif de ses écritures, la SCI DLP demande à la cour de « Prononcer la nullité du jugement rendu le 09 JANVIER 2023 par le Tribunal Judiciaire de CUSSET. » Dans le corps de ses écritures, page 6, elle soutient que la première page du jugement est erronée, en ce qu'un seul magistrat assistait à l'audience, au lieu des trois mentionnés sur l'acte.

La SCI DLP ne rapporte cependant aucune preuve de ce qu'elle soutient ; elle ne justifie pas avoir interrogé la juridiction sur cette supposée anomalie, ni sollicité des explications après avoir reçu une copie de la décision, alors que les mentions figurant sur le jugement sont certifiées par la signature du greffier.

En conséquence sa demande d'annulation du jugement ne peut pas prospérer, et il convient d'aborder le fond du dossier.

Il résulte des pièces produites par les deux parties que la réfection des terrasses de la copropriété [Adresse 6] était envisagée déjà depuis l'année 2006, puisque le syndic avait sollicité à cet effet l'entreprise [Z] qui avait produit un devis le 26 octobre 2006 pour la somme de 121 761,41 EUR TTC. Dans la foulée, lors d'une assemblée générale du 17 novembre 2006, au cours de laquelle deux autres devis avaient été présentés, le syndic a demandé aux copropriétaires « de bien vouloir voter sur le principe d'exécution de ces travaux ». Les copropriétaires avaient répondu favorablement à cette demande et la résolution avait été adoptée. Il était précisé que les copropriétaires donnent pouvoir au conseil syndical pour choisir l'entreprise, la société [Z] ayant toutefois leur préférence. Il était encore mentionné « qu'une fois l'entreprise retenue, un appel de fonds sera adressé ; appel à régler par tiers » et qu'il faudra souscrire une assurance dommages ouvrage une fois l'entreprise retenue.

Apparemment, cette solution n'avait pas donné satisfaction et donc une nouvelle proposition a été présentée aux copropriétaires lors d'une assemblée générale le 27 novembre 2019, pour des montants toutefois moindres proposés par l'entreprise Étanchéité Bourbonnaise. Il est prévu le suivi des travaux par un cabinet d'architecte, et après délibération l'assemblée générale décide de consulter « un expert technique aux fins d'examen et de définition des travaux à chiffrer ». Il est précisé qu'à réception de ce rapport des devis seront redemandés et présentés au vote des copropriétaires dans le cadre d'une assemblée générale extraordinaire devant se tenir fin février début mars 2020. Tous les copropriétaires présents lors de cette assemblée générale ont approuvé cette résolution (cf. page 20).

Le conseil syndical, qui avait reçu pouvoir concernant le choix de l'entreprise à qui les travaux devaient être confiés (cf. assemblée générale du 17 novembre 2016), s'est donc emparé de la question et a produit un compte rendu le 31 janvier 2020, auquel est joint un rapport de M. [K] [T], expert consulté sur la question de l'étanchéité des terrasses.

Dans son rapport daté du 5 février 2020, M. [T] explique que les terrasses du 13e étage, où se situe l'appartement de M. [L] (SCI DLP), « sont affectées de désordres qui sont dus à des passages d'eaux pluviales au travers de l'étanchéité qui est vétuste ». L'expert considère qu'il est « indispensable de refaire l'étanchéité de ces terrasses et de remplacer l'isolant qui est gorgé d'eau ». Il propose également de « supprimer la zone traitée en espaces verts de l'appartement de M. [L] ». Un rapport de l'entreprise HYDROTECH le 9 mars 2020 confirme que les logements situés au 12e étage, c'est-à-dire sous les terrasses fuyardes du 13e étage, subissent des dégradations particulièrement visibles sur les plafonds.

Le conseil syndical s'est encore réuni le 19 juin 2020, ayant pris connaissance du rapport HYDROTECH. Dans son compte rendu du même jour il est indiqué qu'après de nouveaux échanges avec M. [L] « il a été mis en lumière la nécessité d'une reprise complète de l'étanchéité de sa terrasse ». En conséquence, le conseil syndical propose de solliciter une maîtrise d''uvre afin d'éditer un cahier des charges en particulier pour la réfection de cette terrasse du 13e étage.

Lors d'une réunion suivante le 11 septembre 2020 le conseil syndical, après avoir rappelé les « impératifs liés à la crise sanitaire », précise qu'un cabinet d'architecture « doit confirmer au syndic la teneur des travaux envisagés, leur descriptif technique et le nom de l'entreprise intervenante, afin qu'il puisse être demandé une réactualisation des propositions de missions d'architecte complètes à soumettre au vote des copropriétaires des Bâtiments CDE, ainsi que l'intégration de ces travaux dans l'enveloppe budgétaire afférente. » Il est précisé qu'il « sera donc demandé à nouveau des propositions de maîtrise d''uvre pour édition d'un cahier des charges avec ces trois points à traiter », notamment la réfection de la terrasse du 13e étage de M. [L]. Il est encore indiqué que les propositions de maîtrise d''uvre « seront soumises au vote des copropriétaires dans le cadre d'une assemblée générale extraordinaire par correspondance ».

À ce stade des opérations, on comprend sans peine que la réfection des terrasses de la [Adresse 6], en particulier celle de l'appartement de M. [L] au 13e étage, était en bonne voie, malgré la période de crise sanitaire qui avait nécessairement ralenti quelque peu les opérations et l'activité des entreprises et architectes. Le compte rendu du conseil syndical du 11 septembre 2020 montre en effet la détermination de la copropriété à procéder à ces travaux, sous la réserve toutefois, ce qui est normal, d'en connaître le prix et de bénéficier d'une maîtrise d''uvre. De manière tout à fait normale également, ces éléments devaient être soumis au vote des copropriétaires, ce que le compte rendu du 11 septembre 2020 prévoit expressément.

Or, alors que les choses allaient bon train en cette fin d'année 2020, M. [L] a pris l'initiative, en dehors de toute consultation de la copropriété, de mettre en 'uvre lui-même les travaux, dont il a confié la réalisation à l'entreprise [Z]. La facture de celle-ci n'est pas produite, cependant M. [L] justifie, par un document de sa banque, avoir réglé à cette entreprise 31 017,09 EUR et 23 417,46 EUR en deux prélèvements le 9 novembre 2020. D'autres prélèvements auront lieu le 21 décembre 2020, le 11 février 2021 et le 11 mai 2021, pour la somme totale de 96 089,41 EUR. Curieusement, c'est ce même montant que l'on trouve sur un document édité par l'entreprise [Z] le 21 décembre 2020, intitulé « devis », à destination de l'Immobilière de Gestion qui est le syndic de la copropriété [Adresse 6], alors qu'il n'est pas démontré que celui-ci avait sollicité un tel devis, en outre édité à un moment où les travaux étaient déjà sérieusement engagés'

Les travaux ayant été ainsi effectués, ou étant en cours de réalisation à cette date, le syndic a convoqué une assemblée générale le 3 décembre 2020 en proposant aux copropriétaires dans une résolution nº 2, ni plus ni moins que de valider les travaux de réfection de l'étanchéité de la terrasse du 13e étage concernant l'appartement de M. [L], étant précisé que ces travaux ont été « initiés en urgence au vu de l'état de cette terrasse, occasionnant des infiltrations dans les lots du 12e étage », réalisés par l'entreprise [Z] en lien avec le cabinet ALVERGNAT « agissant pour le compte de M. [L] ». Il était proposé aux copropriétaires de valider les travaux pour 71 472,74 EUR en deux appels de fonds le 31 décembre 2020 et le 31 janvier 2021. Cette résolution a été refusée par les copropriétaires à la majorité simple des voix.

Une nouvelle demande pour « régulariser le financement de ces travaux » sur la terrasse du 13e étage, a été présentée aux copropriétaires lors d'une assemblée générale du 30 juillet 2021, mais elle a également été rejetée.

En l'état de ces éléments, il apparaît que M. [L], pour une raison qu'il est difficile d'expliquer au vu des pièces produites, a pris seul l'initiative d'engager des travaux qui ne relevaient que de la compétence de l'assemblée générale des copropriétaires, laquelle était disposée à les réaliser sous la réserve bien naturelle de quelques garanties quant au financement et à la maîtrise d''uvre. Cette singulière manière de procéder n'est évidemment pas compatible avec les règles de droit régissant le fonctionnement d'une copropriété, en particulier la réalisation de travaux sur les parties communes.

L'argument de l'urgence n'est pas recevable dans la mesure où il n'est nullement démontré que l'appartement de M. [L] était directement affecté par les désordres de la terrasse du 13e étage. En réalité, le rapport HYDROTECH mentionne l'existence de désordres uniquement dans les appartements situés au 12e étage, sous cette terrasse. Dans ces conditions, il appartenait d'autant plus à la copropriété, et à elle seule, de pourvoir aux travaux nécessaires.

L'hypothèse d'une gestion d'affaires que M. [L] aurait engagée dans l'intérêt de la copropriété, n'est pas mieux démontrée dans la mesure où il n'est pas possible de gérer les affaires de celui qui s'en occupe déjà. Il n'y a pas lieu non plus à répétition de l'indu, alors que les conditions d'application des article 1302 et 1302-1 du code civil, au vu des éléments ci-dessus développés ne sont nullement réunies ; il est impossible en effet de soutenir que la copropriété a reçu par erreur ou sciemment les travaux dont il est question. L'hypothèse d'un enrichissement sans cause ne saurait mieux prospérer, alors que M. [L] avait manifestement intérêt à refaire la terrasse qui agrémente son appartement, tirant ainsi un profit personnel de l'opération.

Au demeurant, quel que soit le fondement juridique envisagé, l'action précipitée de M. [L], aboutissant in fine à mettre la copropriété devant un fait accompli, alors qu'elle avait engagé de son côté toutes les démarches nécessaires pour faire réaliser les travaux dans le cadre légal régissant son fonctionnement, ne saurait conduire à imposer à celle-ci la charge d'une dette qu'elle n'avait pas décidée. Il n'est pas inutile de rappeler ici que lors de sa décision de travaux, la copropriété procède généralement à la consultation de diverses entreprises, ce qu'elle a d'ailleurs fait ici, afin de choisir celle qui propose le meilleur rapport qualité-prix.

En considération des éléments ci-dessus développés, il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise et le jugement sera confirmé.

Il n'y a pas lieu à dommages-intérêts au bénéfice du syndicat des copropriétaires de la [Adresse 6], sur le fondement de l'article 1240 du code civil, alors qu'il n'est pas démontré que dans son action la SCI DLP a commis une faute ; ce d'autant moins que le procès qu'elle engagé a donné lieu à un débat juridique qui ne saurait être considéré comme déplacé ou abusif.

Étant donné la somme très importante (4000 EUR) déjà allouée par le premier juge au syndicat des copropriétaires en application de l'article 700 du code de procédure civile, la cour lui octroie sur le même fondement la somme de 2000 EUR.

La SCI DLP supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Rejette la demande d'annulation du jugement ;

Confirme le jugement ;

Condamne la SCI DLP à payer au syndicat des copropriétaires de la [Adresse 6] la somme de 2000 EUR en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SCI DLP aux dépens d'appel ;

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Le greffier Le président