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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 4-2, 4 octobre 2024, n° 19/09936

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 19/09936

4 octobre 2024

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2

ARRÊT AU FOND

DU 04 OCTOBRE 2024

N°2024/175

Rôle N° RG 19/09936 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEOV5

[E] [P]

C/

[H] [W]

Association UNEDIC-AGS CGEA IDF OUEST

Copie exécutoire délivrée

le : 04 Octobre 2024

à :

Me Pierre-Yves IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vest 357)

Me Joseph MAGNAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vest 351)

Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vest 149)

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 27 Mai 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 18/00572.

APPELANT

Maître [E] [P] ès qualités de Mandataire Liquidateur

de la SARL MODULAIRE SYSTEME SERVICE (MSS), demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Rachid CHENIGUER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur [H] [W], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Joseph MAGNAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Association UNEDIC-AGS CGEA IDF OUEST, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Mai 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marianne FEBVRE, Présidente de chambre suppléante, et Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre

Mme Marianne FEBVRE, Présidente de chambre suppléante

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Septembre 2024, délibéré prorogé au 04 octobre 2024

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 octobre 2024.

Signé par Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre et Mme Cyrielle GOUNAUD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'arrêt mixte en date du 5 mai 2023 auquel il convient de se reporter pour plus ample exposé des faits et de la procédure

Par conclusions déposées et notifiées le 28 novembre 2023 M [W] demande à la cour de

JUGER l'appel incident formé par Monsieur [W] régulier en la forme et bien fondé.

CONFIRMER le jugement rendu le 27/05/2019 par le Conseil des Prud'hommes de MARTIGUES en ce qu'il a fait droit aux demandes du salarié en leur principe et le REFORMER sur le quantum des sommes allouées en ce qu'il a débouté Monsieur [W] du surplus de ses demandes.

CONFIRMER le jugement rendu en ce qu'il a fait droit en leur principe aux demandes suivantes du salarié, à savoir : au titre de salaires des mois d'août et septembre 2016, au titre de compléments de salaire de décembre 2015 à juillet 2016, au titre de rappel d'indemnité de repas, à titre de rappel de salaires de juin 2014 à septembre 2016, au titre d'indemnité de congés payés années 2014/2016, au titre de la prime ALGECO de 30 mois non payés, au titre de l'indemnité de préavis, au titre de l'incidence congés payés sur préavis, au titre des dommages et intérêts pour licenciement illégitime, au titre de l'indemnité pour procédure irrégulière.

REFORMER le jugement de première instance sur le montant des sommes allouées et en ce qu'il a débouté Monsieur [W] du surplus de ses demandes.

DEBOUTER Maître [P], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société MSS MODULAIRE SYSTEME de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, particulièrement injustes et infondées.

Statuant à nouveau :

CONSTATER que l'employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement sur salarié.

CONSTATER que le licenciement pour inaptitude dont a été victime Monsieur [W] est irrégulier, abusif et infondé, et sans cause réelle et sérieuse.

FIXER en conséquence comme suit les créances de Monsieur [W] sur la liquidation judiciaire de la société MSS MODULAIRE SYSTEME dont Me [P] a été désigné es qualité de mandataire liquidateur et lui allouer les sommes suivantes, avant intérêts au taux légal à compter de la demande en justice :

- 12 486 € au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 2 840 euros à titre de rappel d'indemnités repas non versés ;

- 4 800 euros au titre de la prime ALGECO non versée ;

- 2 081 euros à titre d'indemnités de congés payés non versées pour la période allant du mois de juin 2014 à septembre 2016 ;

- 2 081,84 € à titre de dommages et intérêts pour procédure de licenciement irrégulière ;

- 4 162 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 416,20 euros à titre de congés payés sur préavis ;

- 16 110,60 euros à titre de complément de salaire non versé pour la période allant du mois de juin 2014 à septembre 2016 ;

- 4 162 euros à titre de à titre de complément de salaire non versé pour la période allant du mois d'août et septembre 2016 ;

Compte tenu de la liquidation judiciaire de la société MSS MODULAIRE SYSTEME, CONDAMNER Me [P] au paiement desdites sommes, ès qualité de liquidateur judiciaire de ladite société.

JUGER que Me [P] devra établir le bordereau de créances aux fins de garantie par les AGS.

JUGER que le CGEA devra régler les créances fixées à Monsieur [W].

DECLARER l'arrêt à intervenir commun et opposable à Maître [P], liquidateur judiciaire et au CGEA, et les condamner au paiement des sommes légitimement sollicitées par le concluant et ci-dessus rappelées.

CONDAMNER Me [P], ès qualité de liquidateur de judiciaire de la Société MSS MODULAIRE SYSTEME, au paiement la somme de 3 000 € par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

CONDAMNER Me [P], ès qualité de liquidateur de judiciaire de la Société MSS MODULAIRE SYSTEME en tous les dépens.

Il fait valoir en substance :

' Que la procédure de licenciement fixée par l'article L 1232-2 du code du travail n'a pas été respectée

' Que sur le fondement de l'article L 1226-14 du code du travail il peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis compte tenu de l'origine professionnelle de son inaptitude en lien avec l'accident du travail du 28 janvier 2015.

'Que le complément de salaire réclamé correspond en l'espèce

- au rappel sur salaire minimum conventionnel de juin 2014 à septembre 2016 pour un montant de 5526 euros

- à la différence entre la somme perçue entre l'avis d'inaptitude et la date du licenciement et le salaire dû par l'employeur un mois après l'avis d'inaptitude jusqu'au licenciement pour un montant de 10 584 euros

' Que l'employeur n'a pas versé les salaires d'aout et septembre 2016 soit 4162 euros

' Que les congés payés sont acquis pendant les périodes d'absence pour accident du travail de sorte que l'employeur doit les régler et qu'il reste devoir en l'espèce une somme de 2081 euros.

' Que la prime ALGECO est due au titre d'un usage en vigueur dans l'entreprise

' Que la convention collective prévoit le versements d'indemnités de repas qui n'ont pas été versées de décembre 2015 à Septembre 2016 ce qui justifie sa demande à ce titre

' Qu'ayant été licencié en septembre 2016 il peut prétendre à une indemnité de licenciement d'un minimum de 6 mois de salaire

Par conclusions déposées et notifiées le 21 février 2024 LA SELARL MMJ prise en la personne de Maitre [P] es qualité de mandataire liquidateur de la sarl MSS demande à la cour de

REFORMER le Jugement rendu en section commerce par le Conseil des Prud'hommes de MARTIGUES le 27 mai 2019,

FIXER à la somme de 2.062,95 €uros la rémunération brute mensuelle moyenne de Monsieur [H] [W],

ET, STATUANT, A NOUVEAU :

DEBOUTER Monsieur [H] [W] de ses demandes au titre de :

o L'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement,

o L'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents,

o L'indemnité de congés payés de juin 2014 à septembre 2016,

o Du rappel de salaire des mois d'août et septembre 2016,

o Du complément de salaire sur la période de juin 2014 à septembre 2016,

o Du rappel d'indemnités repas,

o De la prime ALGECO

o Du financement de la formation FCO

DIRE ET JUGER que l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse due à Monsieur [H] [W] au titre de l'article L1235-3 du Code du travail, ne saurait excéder la somme de 6.188,85 euros,

DIRE ET JUGER commun et opposable à l'AGS ILE DE FRANCE EST l'arrêt à intervenir, dans la limite de sa garantie légale,

En tout état de cause :

DEBOUTER Monsieur [H] [W] de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNER Monsieur [H] [W] à verser à la SELARL MMJ, prise en la personne de Maître [E] [P], ès qualité de Mandataire judiciaire de la société MODULAIRE SYSTEME SERVICE, la somme d'un euro symbolique sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux éventuels entiers dépens.

Elle fait valoir en substance que

' M [W] se contente de soulever l'irrégularité de la procédure de licenciement sans détailler l'irragularité alléguée , qu'en toute hypothèse le licenciement étant déclaré sans cause réelle et sérieuse aucune somme ne peut lui être due en application de l'article L1235-5 du code du travail

' Que la demande au titre des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est trop élevée au vu du barème de m'article L 1235-3 du code du travail et d'un salaire moyen de 2062,95 euros.

' Que la demande fondée sur l'article L1226-14 du code du travail est nouvelle en cause d'appel et doit être déclarée irrecevable, qu'en outre l'indemnité prévue par l'article L 1226-14 du code du travail n'ouvre pas droit à congés payés

' Que la demande au titre des congés payés n'est pas fondée dès lors que le salarié a toujours bénéficié de ses congés et a perçu une indemnité compensatrice pour les congés non pris à la date du licenciement.

' Qu'aucun somme n'était due par l'employeur pour le moi d'aout 2016, que la somme due pour le mois de septembre 2016 a été payée.

' Que la demande de complément de salaire est injustifiée au vu du taux horaire conventionnel fixé par l'accord du 19 décembre 2012 prévoyant un minimum de :

9,53 € à l'embauche,

9,7206 € auprès deux ans d'ancienneté,

9,9112 € après 5 ans d'ancienneté.

Que le rappel de salaire fondé sur les disposition de l'article L1226-4 du code du travail court à compter du 21 aout 2016 de sorte que, le licenciement étant intervenu le 21 septembre 2016, aucune somme n'est due de ce chef

' Que M [W] qui n'effectuait pas de découché et se trouvait absent depuis le 28 janvier 2015 ne peut prétendre à l'indemnité de repas fixée par l'article 8 du protocole du 30 avril 1974 relatif aux frais de déplacement des ouvriers

' Que M [W] qui ne démontre pas que la prime Algeco relève d'un usage dans l'entreprise, ne travaillait pas 50% de son temps pour le client Algeco et ne peut prétendre au versement de la prime du même nom en outre subordonnée à la présence effective dans l'entreprise.

Par conclusions déposées et notifiée par RPVA le 28 février 2024 l'AGS CGEA Ile de France EST intervenant volontairement à l'instance en lieu et place de l'Unedic -AGS CGEA IDF Est demande à la cour de

1) Entériner l'intervention de l'AGS - CGEA ILE DE France Est au lieu et place de l'UNEDIC Délégation AGS CGEA ILE DE France EST:

Vu l'article L. 1226-14 du code du travail ;

2) Confirmer le jugement du 27 mai 2019 en ce qu'il a fixé une indemnité compensatrice de préavis et une indemnité de licenciement ;

Pour le surplus ;

3) Infirmer intégralement le Jugement rendu en section commerce par le Conseil des Prud'hommes de MARTIGUES le 27 mai 2019.

Vu les articles L.1471-1 et L. 3245-1 du code du travail dans leur rédaction applicable aux faits de la cause ;

Vu la requête introductive d'instance du 19 septembre 2018,

4) Débouter Monsieur [W] de toute demande prescrite au :

- 19 septembre 2017 au titre de la rupture.

- 19 septembre 2015 au titre des rappels de salaires et accessoires de salaires.

5) Le débouter de ses demandes de rappels de salaire d'août et septembre 2016 et des compléments de salaires qui ne sont pas justifiées ;

6) Le débouter de sa demande de rappels de salaires de juin 2014 à septembre 2016 qui n'est nullement explicitée ni précisée au titre du quantum ;

7) Le débouter de la demande d'indemnité de repas et de la demande de prime ALGECO qui ne sont nullement précisées tant au titre de la période concernée qu'au titre du quantum ;

8) Débouter Monsieur [W] ne justifie pas de l'existence d'un reliquat dès lors qu'aucune explication n'est donnée par Monsieur [W] sur la demande d'indemnité de congés payés et qu'il résulte en outre des éléments versés au débat qu'il a perçu une indemnitécompensatrice au moment de la rupture de son contrat de travail et

9) Débouter M. [W] dès lors qu'en l'état de la suspension de son contrat de travail au moment du renouvellement de la formation FCOS, la société MODULAIR SYSTEME SERVICE n'était pas en mesure d'inscrire Monsieur [W] à celle-ci ;

Vu les articles L. 1232-1 et suivants du code du travail ;

10) Le débouter de l'ensemble de ses demandes dès lors que Monsieur [W] ne justifie d'aucune irrégularité et que la société MODULAIRE SYSTEME SERVICE a respecté l'ensemble de ses obligations au titre du licenciement ; repose sur une cause réelle et sérieuse et qu'il est régulier en la forme.

A titre subsidiaire

Vu les articles L. 622-21 et suivants du code de commerce ;

11) Constater et fixer les créances de Monsieur [H] [W] en fonction des justificatifs produits ; à défaut débouter Monsieur [H] [W] de ses demandes ;

12) Fixer en tant que de besoin l'indemnité compensatrice de préavis (L. 1234-1 et L.1234-5 C.TRAV.) ;

13) Débouter Monsieur [W] dès lors qu'il a été rempli de ses droits au titre de l'indemnité de licenciement ;

14) Réduire le montant des dommages et intérêts dans de notables proportion en fonction du strict préjudice justifié par le salarié, dès lors que les dommages et intérêts ne pourront s'apprécier en l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement, que dans le cadre des articles L. 1235-3 ou L. 1235-5 du Code du travail dans leur rédaction applicable aux faits de la cause ;

Vu les articles L. 3253-6 et suivants du code du travail,

15) Débouter M. [W] de toute demande de paiement directement formulée contre l'AGS dès lors que l'obligation de l'AGS (CGEA ILE DE France EST) de faire l'avance de montanttotal des créances définies aux articles L. 3253-6 et suivants du Code du travail, ne peut s'exécuter que :

- Que dans les limites du plafond applicable prévu par les articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du même code, qui limitent la garantie à toutes sommes et créances avancées confondues, à un ou des montants déterminés par décret en référence au plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions du régime d'assurance chômage, et inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale, ou d'origine conventionnelle imposées par la loi ;

- Et Sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire judiciaire, conformément aux articles L. 3253-19 et suivants du Code du travail ;

16) Débouter M. [W] de toutes demandes au titre des frais irrépétibles visés à l'article 700du CPC, des dépens, de l'astreinte, des cotisations patronales ou résultant d'une action en responsabilité, dès lors qu'elles n'entrent pas dans le cadre de la garantie de l'AGS (CGEA DE [Localité 4]) ;

17) Débouter M. [W] de toute demande accessoire au titre des intérêts dès lors que le jugement d'ouverture de la procédure collective opère arrêt des intérêts légaux et conventionnels (art. L. 622-28 C.COM) ;

18) Débouter Monsieur [H] [W] de toute demande contraire et le condamner aux dépens.

L'ordonnance de clôture et en date du 30 avril 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

I Sur la prescription

L'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa version applicable à la date du licenciement, dispose que toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

A la date la rupture le 21 septembre 2016, Monsieur [W], qui sollicite des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de préavis et une indemnité pour procédure irrégulière disosait donc d'un délai de deux années pour saisir la juridiction, soit jusqu'au 21 seprembre 2018.

Cependant, l'article 6 de l'ordonnance nº 2017-1387 du 22 septembre 2017 a réduit le délai de prescription d'une action en justice relative à la rupture du contrat de travail à douze mois à compter de la notification de la rupture.

Le II° de l'article 40 de la même ordonnance précise que les dispositions prévues aux articles 5 et 6 s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de publication de la présente ordonnance, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

L'ordonnance du 22 septembre 2017 étant entrée en vigueur le 23 septembre 2017, le délai de prescription de l'action à la rupture du contrat de travail de Monsieur [W] , qui était toujours en cours à cette date, s'est donc trouvé réduit à un délai d'une année à compter de la publication de l'ordonnance.

Il en résulte que l'action en contestation de la rupture était recevable à condition d'intervenir avant l'expiration d'un délai de 12 mois suivant l'entrée en vigueur l'ordonnance du 22 septembre 2017, soit avant le 24 septembre 2018 (le 23 septembre 2018 étant un dimanche).

En l'espèce l'action ayant été introduite le 19 septembre 2018 les demandes consécutives à la rupture du contrat de travail sont recevables.

S'agissant des demandes de rappels de salaires l'AGS CGEA soulève la prescrition de l'article L 3245-1 du code du travail Au terme de l'article L. 3245-1 du code du travail entré en vigueur depuis le 17 juin 2013,

l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

Le salarié ayant saisi le conseil de prud'hommes le 19 septembre 2018, la prescription étant triennale, la demande qui a pour objet un rappel de rémunération au titre du minimum conventionnel antérieurement au 19 septembre 2015 est irrecevable.

II Sur les demandes consécutives à la rupture du contrat de travail

A/ Sur la demande pour procédure irrégulière

L'ancienneté du salarié était en l'espèce supérieure à deux ans à la date de son licenciement.

En application de l'article L1235-2 dans sa version en vigueur à la date du licenciement.

Si le licenciement d'un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l'employeur d'accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.

Il s'en déduit que lorsque le licenciement est déclaré sans cause réelle et sérieuse, le salarié ne peut prétendre au cumul des dommages intérêts pour licenciement sans cause rélle et sérieuse avec une indemnité pour non respect de la procédure de licenciement.

Le jugement est donc infirmé de ce chef et M [W] est débouté de sa demande à ce titre

B/ Sur la demande de dommages intérêts pour licienciement sans cause réelle et sérieuse

Il résulte des articles L.1235-3 et L.1235-5 du code du travail dans leur version applicable au litige que lorsque le licenciement intervient dans une entreprise comptant au moment du licenciement un effectif habituel d'au moins onze salariés et que le salarié licencié justifiait à la date de la rupture de son contrat de travail d'une ancienneté d'au moins deux ans dans l'entreprise, il peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure aux salaires bruts des six derniers mois.

En l'absence de justification de la situation financière et personnelle de M [W] postérieurement à son licenciement la cour limite l'indemnité accordée au minimum fixé par la loi.

En l'espèce le salaire brut des six derniers mois de travail antérieurs à l'arrêt maladie est chiffré par la cour à la somme de 10 925,88 euros au vu des bulletins de salaires produits au débats, le jugement est donc infirmé sur le quantum des dommages intérêts alloués.

C/ Sur la demande au titre de l'indemnité du préavis et des congés payés afférents .

En l'espèce l'origine professionnelle de l'inaptitude n'est pas contestée. La cour considère que la demande au titre de l'indemnité fondée sur l'article L 1226-14 du code du travail se rattache par un lien suffisant à la demande antérieurement formée au titre du préavis, elle est donc recevable.

Il est constant que cettte indemnité qui n'a pas la nature d'une indemnité de préavis n'ouvre pas droit à congés payés.

En l'espèce au vu des trois derniers bulletins de salaires antérieurs à l'arrêt de travail, seuls versés aux débats, la cour chiffre le montant de l'indemnité à la somme de 3641,96 euros et déboute M [W] de sa demande à titre d'incidence congés payés sur l'indemnité sus visée, le jugement est infirmé en ce sens.

III Sur les demandes portant sur l'exécution du contrat de travail

A/ Demande au titre du salaire non versé du mois de septembre 2015 au mois de septembre 2016

1/ Demande de rappel de salaire au titre du minimum conventionnel

En l'espèce M [W] qui a été embauché le 3 juin 2014 (et non 1994 comme indiqué par erreur dans l'arrêt mixte) au Groupe 6 de l'annexe ouvier de la convention collective disposait d'une anciennté de moins de deux ans jusqu'au 3 juin 2016 et de plus de deux ans à compter de cette date.

En conséquence il pouvait prétendre percevoir un salaire minimum horaire de 9 ,61 euros jusqu'en janvier 2016, de 9 ,73 euros à compter de janvier 2016 et de 9,92 euros à compter de juin 2016.

Les bulletins de salaires produits au débats démontrent que l'employeur a fait une exacte application du salaire minimum horaire jusqu'au mois de juin 2016, qu'en revanche à compter de cette date le salaire horaire est resté de 9,73 euros alors qu'il devait être porté à 9,92 euros. En conséquence M [W] peut prétendre au titre des mois de juin, juillet, aout et septembre 2016 à une somme de 140,23 euros au titre du rappel de salaire sur minimum conventionnel.

2/ Rappel de salaire pour non reprise du versement du salaire un mois après l'avis d'inaptitude

En vertu de l'article L. 1226-4 du code du travail, lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.

Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail.

En l'espèce M. [W] a été déclaré inapte par le médecin du travail le 22 décembre 2015. Dès lors, à compter de l'expiration du délai d'un mois suivant cette date, soit le 22 janvier 2016 l'employeur devait reprendre le paiement des salaires.

En l'espèce la cour constate que l'employeur s'est conformé à son obligation jusqu'au mois de mars 2016 inclus mais que passé cette date il a opéré une retenue mensuelle de 1941,14 euros au titre de l'absence maladie.

En conséquence l'employeur reste devoir à son salairé à ce titre la somme de 11 646,84 euros.

Au vu de la demande de rappel de salaire chiffrée globalement à la somme de 16 110 euros, la cour fixe la somme due par l'employeur à la somme de 1 1787 euros comprenant les sommes dues au titre des salaires d'aout et septembre 2016, le jugement est infirmé en ce sens.

B/ Indemnités de repas

Selon les dispositions de l'article 7 du Protocole 1974-04-30 en vigueur le 6 mai 1974 étendu par arrêté du 17 décembre 1974 JONC 5 janvier 1975 :

Le personnel ouvrier dont l'amplitude de la journée de travail couvre entièrement la période comprise soit entre 11 heures et 14 h 30, soit entre 18 h 30 et 22 heures perçoit une indemnité spéciale, sous réserve de ne pas disposer d'une coupure d'au moins 1 heure entre les limites horaires fixées ci-dessus.

Selon les dispositions de l'article 8

1° Le personnel qui se trouve, en raison d'un déplacement impliqué par le service, obligé de prendre un repas hors de son lieu de travail perçoit une indemnité de repas unique, dont le taux est fixé par le tableau joint au présent protocole, sauf taux plus élevé résultant des usages.

Toutefois, lorsque le personnel n'a pas été averti au moins la veille et au plus tard à midi d'un déplacement effectué en dehors de ses conditions habituelles de travail, l'indemnité de repas unique qui lui est allouée est égale au montant de l'indemnité de repas, dont le taux est également fixé par le tableau joint au présent protocole.

Enfin, dans le cas où, par suite d'un dépassement de l'horaire régulier, la fin de service se situe après 21 h 30, le personnel intéressé reçoit pour son repas du soir une indemnité de repas.

2° Ne peut prétendre à l'indemnité de repas unique :

a) Le personnel dont l'amplitude de la journée de travail ne couvre pas entièrement la période comprise soit entre 11 heures et 14 h 30, soit entre 18 h 30 et 22 heures ;

b) Le personnel qui dispose à son lieu de travail d'une coupure ou d'une fraction de coupure, d'une durée ininterrompue d'au moins 1 heure, soit entre 11 heures et 14 h 30, soit entre 18 h 30 et 22 heures.

Toutefois, si le personnel dispose à son lieu de travail d'une coupure d'une durée ininterrompue d'au moins 1'heure et dont une fraction au moins égale à 30 minutes est comprise soit entre 11 heures et 14 h 30, soit entre 18 h 30 et 22 heures, une indemnité spéciale, dont le taux est fixé par le tableau joint au présent protocole, lui est attribuée.

Pour prétendre au bénéfice des indenmités susvisées le salarié doit donc être effectivement présent dans l'entreprise. En l'espèce M [W] absent depuis le mois de décembre 2015 ne peut prétendre au paiement des indemnité de repas, le jugement est donc infirmé de ce chef.

C/ Indemnité de congés payés

Aux termes de l'article L. 3141-3 du code du travail alors applicable, le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. La durée totale du congé exigible ne peut excéder trente jours ouvrables.

Le point de départ de la période prise en compte pour le calcul du droit au congé est fixé au 1er juin de chaque année.

Au vu des bulletins de salaires produits au débats la cour peut vérifier que M [W] a continueré à acquérir des droits à congés pendant son arrêt maladie jusqu'en septembre 2015 inclus.

Fin septembre 2015, il disposait de 16 jours de congés non pris au titre de la période de juin 2014 à mai 2015 et de 10 jours acquis au titre de l'année 2015 dont 2,5 jours au titre du mois de septembre 2015.

Au delà de la période susvisée, la cour constate que les bulletins de salaires de l'interessé ne mentionnent plus l'aquisition de jours de congés.

Or par deux décisions du 13 septembre 2023, la Cour de cassation a décidé :

- D'écarter partiellement l'application des dispositions de l'article L. 3141-3 du code du travail en ce qu'elles subordonnent à l'exécution d'un travail effectif l'acquisition de droits à congé payé par un salarié dont le contrat de travail est suspendu par l'effet d'un arrêt de travail pour cause de maladie non professionnelle (Soc ., 13 septembre 2023, n° 22-17.340, publié)

- D'écarter partiellement l'application des dispositions de l'article L. 3141-5 en ce qu'elles limitent à un an l'assimilation des périodes d' arrêt de travail pour maladie professionnelle ou accident du travail à du temps de travail effectif (Soc ., 13 septembre 2023, n° 22-17.638, publié).

Les salariés acquièrent donc des congés payés pendant la durée de la suspension du contrat de travail pour maladie, quelle qu'en soit l'origine.

Il en résulte que pour la période de octobre 2015 à la fin de son contrat de travail le 21 septembre 2016 M [W] a acquis 27,5 jours de congés payés.

Il appartient à l'employeur, débiteur de l'obligation de paiement de l'intégralité de l'indemnité due au titre des jours de congés payés, d'établir qu'il a exécuté son obligation. (Soc., 1 mars 2023, pourvoi n° 21-19.497)

En l'espèce force est de constater que l'employeur ne produit aucune pièces aux débats.

Au vu des bulletins de salaire versés par M [W], la cour considère que la somme de 1 194,55 euros figurant sur le solde de tout compte au titre des congés payés correspond au 26 jours dûs au 30 septembre 2015 ; en conséquence elle confirme le jugement.

D/ Prime ALGECO

C'est au salarié qui invoque un usage d'apporter par tous moyens la preuve tant de son existence que de son étendue (Cass. soc., 22 juin 1988, n° 85-45.010 ; Cass. soc., 3 mars 1994, n° 89-40.801).

Mais en présence d'un avantage présentant les critères de la constance et de la fixité, c'est à l'employeur qu'il appartient d'établir qu'il ne présente pas les caractères de généralité pour ne pas être versé à l'ensemble du personnel ou à une catégorie déterminée, étant seul en possession des éléments permettant de rapporter cette preuve (Cass. soc., 26 févr. 2002, n° 00-40.843).

En l'espèce la cour constate que si les bulletins de salaire versés aux débats par M [W] mentionnent une prime contrat ALGECO de juin 2014 à octobre 2014, aucune pièce n'est produite pour la période de novembre 2014 à février 2015.

Dans ces conditions la preuve de la constance de la prime n'est pas rapportée, sa fixité n'est pas plus démontrée les montants accordés variant sensiblement d'un mois sur l'autre.

En conséquence le jugement est infirmé et M [W] débouté de sa demande à ce titre.

Chacune des parties succombant partiellement dans ses prétentions, il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en l'espèce.

Les dépens sont fixés en frais de liquidation judiciaire.

PAR CES MOTIFS

LA COUR STATUANT CONTRADICTOIREMENT

Déclare recevable l'intervention judicaire de L'AGS CGEA d'Ile de France Est ;

Déclare recevables les demandes portant sur la rupture du contrat de travail ;

Déclare irrecevables commes prescrites les demandes en rappels de salaires antérieures au 19 septembre 2015 ;

Infirme le jugement en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Modulaire Système Service :

- 4162 euros au titre des salaires des mois d'aout et septembre 2016

- 2 840 euros au titre des indemnité de repas non versées

- 4 800 euros au titre de la prime ALGECO non payées

- 416,20 euros au titre des congés payés sur préavis

- 2 081 euros à titre d'indemnité pour procédure de licenciement irrégulière

Statuant à nouveau de ces chefs

Déboute M [W] de ses demandes

Emende le jugement sur le montant des dommages intérêts pour cause réelle et sérieuse, le montant de l'indemnité compensatrice due en application de l'article L 1226-14 du code du travail et le montant des rappels de salaire dus et en conséquence :

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société Modulaire Système Service les sommes de :

- 10 925,88 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 3 641,96 euros à titre d'indemnité compensatrice de l'article L 1226-14 du code du travail

- 11 787 euros à titre de rappel de salaires de janvier à septembre 2016 (comprenant le rappel sur salaire minimal conventionnel et le rappels pour salaires non versés)

Confirme le jugement sur le montant de l'indemnité de congés payés inscrite au passif de la liquidation judiciaire ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déclare le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA d'Ile de France Est ;

Dit que l'AGS devra garantir, par application des dispositions de l'article L 3253-8 du code du travail, le paiement de la totalité des sommes fixées dans la limite du plafond applicable aux faits de la cause prévu aux articles L 3253-17 et D 3253-5 du même code sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles pour procéder au paiement.

Dit que les dépens d'appel seront inscrits en frais de liquidation judiciaire.

Le greffier Le président