Décisions
CA Bordeaux, 4e ch. com., 8 octobre 2024, n° 24/02242
BORDEAUX
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL DE BORDEAUX
QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 08 OCTOBRE 2024
N° RG 24/02242 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-NYQC
SAS CELIO FRANCE
SCP PATRICE BRIGNIER
SCP BTSG
SELARL ASTEREN
c/
S.A. EUROBAIL
Nature de la décision : IRRECEVABILITE DE L'APPEL
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 22 mai 2023 (R.G. 21/08093) par le Juge de la mise en état du tribunal judiciaire de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 13 mai 2024
APPELANTES :
SAS CELIO FRANCE, immatriculée au RCS de BOBIGNY sous le n° 313 334 856, agissant en la personne de son représentant légal domiciliée en cette qualité au siège social [Adresse 5]
SCP Patrice BRIGNIER, immatriculée au RCS de BOBIGNY sous le n° 347 464 752, agissant en la personne de son représentant légal, prise en sa qualité de co-commissaire à l'exécution du plan de la Société CELIO FRANCE, dont le siège social est [Adresse 1]
SCP BTSG, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 434 122 511, agissant en la personne de Maître [D] [I], prise en sa qualité de co-mandataire judiciaire de la Société CELIO FRANCE, dont le siège social est [Adresse 2]
SELARL ASTEREN, immatriculée au RCS de DIJON sous le n° 808 344 071, agissant en la personne de Maître [U] [P], prise en son établissement [Adresse 1], prise en sa qualité de co-mandataire judiciaire et de co-commissaire à l'exécution du plan de la Société CELIO FRANCE, dont le siège social est [Adresse 3]
Représentées par Maître Claire LE BARAZER de la SELARL AUSONE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistées de Maître Mathieu CHAUVEL de la SAS DELCADE avocat au barreau de LILLE
INTIMÉE :
S.A. EUROBAIL, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège siège social sis [Adresse 6]
Représentée par Maître Mathilde CHASSANY, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistée par Maître Audrey KANDALA, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 septembre 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,
Madame Sophie MASSON, Conseiller,
Madame Anne-Sophie JARNEVIC,Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
* * *
EXPOSEDU LITIGE:
Par acte du 15 janvier 2010, la SA Eurobail a donné en location à la SAS Celio France un local commercial de 1200 m² situé au [Adresse 4] à [Localité 7], pour une durée de 9 ans à compter du 15 janvier 2010 jusqu'au 14 janvier 2019, contre paiement d'un loyer annuel initial de 187 089,20 euros HT/HC indexé.
Du 15 mars au 10 mai 2020, la société Celio France a fermé son établissement en exécution de l'arrêté du 15 mars 2020 complétant l'arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus du Covid-19, imposant la fermeture de l'ensemble des commerces 'non-essentiels' sur le territoire national. Le magasin a pu rouvrir le 11 mai 2020 mais a dû à nouveau fermer à compter du 30 octobre 2020 par application du décret du 29 octobre 2020 interdisant l'accueil du public aux magasins de vente, hormis pour leur activité de livraison et de retrait de commandes. Le magasin a pu rouvrir le 28 novembre 2020. Du 4 avril 2021 au 18 mai 2021, Celio France a dû fermer de nouveau par l'effet d'une modification de l'article 37 du décret du 29 octobre 2020.
La société Celio France n'a pas honoré les échéances mensuelles ainsi que les charges pour les périodes de fermeture.
Par jugement du 22 juin 2020, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert sur sa demande une procédure de sauvegarde de la société Celio France.
La SELARL Fhb a été désignée en qualité d'administrateur judiciaire, et la SCP Patrice Brignier ainsi que la SELAFA Mja et SCP BTSG ont été désignées en qualité de mandataires judiciaires.
Le 15 septembre 2021, le bailleur a adressé un commandement de payer au preneur visant la clause résolutoire, pour le paiement d'un arriéré des loyers et charges de 56 920,08 euros correspondant aux périodes de fermeture administrative.
Le 13 octobre 2021, la société Celio France, en présence de ses administrateurs et mandataires judiciaires, a fait assigner la société Eurobail en nullité du commandement devant le tribunal judiciaire de Bordeaux, au motif que les créances mentionnées à cet acte n'étaient pas des créances éligibles au traitement préférentiel de l'article L. 622-17 du code de commerce, et que les loyers n'étaient pas dus pendant les périodes de fermeture, de sorte que la résiliation de plein droit du bail n'était pas encourue, et subsidiairement de suspendre les effets de la clause résolutoire.
Par jugement du 14 octobre 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a arrêté le plan de sauvegarde de la société Celio France, mettant fin à la période d'observation et à la mission des administrateurs judiciaires et nommant des commissaires à l'exécution du plan.
Par acte du 20 janvier 2022, la SA Eurobail, bailleur, a assigné la société Celio France devant le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins de juger que les loyers échus pendant la période d'interdiction d'ouverture du public du 16 mars au 11 mai 2020 étaient dus, et que sa créance devait être fixée à titre privilégiée à la somme de 68 663.19 euros.
Les deux instances ont été jointes le 24 mars 2022 par le juge de la mise en état.
Les administrateurs ont été mis hors de cause et le juge de la mise en état a déclaré recevable l'intervention volontaire de la société MJA et de la SCP Patrice Brignier en leur qualité de commissaires à l'exécution du plan.
Le bailleur a sollicité à titre reconventionnel de prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail ; d'ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer ; d'ordonner l'expulsion de la société Celio France ainsi que de tout occupant ; d'ordonner le transport et la séquestration des biens ; de condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 56 920,08 euros en application de l'article L622-17 I du code de commerce ; de condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 64.106,84 euros TTC par trimestre à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à libération complète des locaux.
Par conclusions du 31 janvier 2023, la société Celio France a saisi le juge de la mise en état afin qu'il statue sur l'irrecevabilité alléguée des demandes formulées par le bailleur, comme se heurtant à l'interdiction légale des poursuites et des paiements.
Par ordonnance du 22 mai 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux a :
- Dit que l'ensemble des incidents soulevés par les parties ne relève pas des pouvoirs du juge de la mise en état mais du juge du fond,
Dit que chaque partie conservera à sa charge les frais engagés non compris dans les dépens,
Renvoyé l'affaire à la mise en état continue du 13 septembre 2023, en invitant les demandeurs à conclure définitivement pour un renvoi devant la juridiction du fond,
- Réservé les dépens.
Par déclaration au greffe du 13 mai 2024, la SAS Celio France, la SCP Patrice Brignier ainsi que la SCP BTSG ont relevé appel de l'ordonnance aux chefs expressément critiqués, affaire enrôlée sous le n° RG 24/02242.
Par ordonnance du président de chambre délégué prise le 16 mai 2024, les appelantes ont été autorisées, sur leur requête, à assigner à jour fixe la société Eurobail pour l'audience du 3 septembre 2024. L'assignation délivrée a été enrôlée sous le n° RG 24/02472.
Le 7 juin 2024, a été prononcée la jonction de l'affaire n° RG 24/02472 au dossier n° RG 24/02242.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:
Par conclusions déposées en dernier lieu le 14 août 2024, auxquelles il convient de se reporter pour le détail des moyens et arguments, la SAS Celio France, la SCP Patrice Brignier, la SELARL Asteren ainsi que la SCP BTSG demandent à la cour de :
Vu les articles L.622-1 et suivants et specialement L.622-7 et L.622-21 du code de commerce,
Vu les articles 32, 83 à 85, 122 à 124, 561, 562, 568, 789, 795 et 905 à 905-2 du code de procédure civile,
Vu les arrêts de la cour de cassation des 11 juillet 2019 et 2 juillet 2020,
- déclarer l'appel recevable,
Subsidiairement, pour le cas où il serait juge que le présent appel est soumis à une procédure à bref délai,
- déclarer irrecevables les conclusions d'intimé notifiées par la SA Eurobail le 1er août 2024 et les 60 pièces communiquées à l'appui de ces conclusions, ainsi que toutes éventuelles conclusions et pièces postérieures ;
- infirmer l'ordonnance dont appel du 22 mai 2023 en ce que le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux a :
' Dit que l'ensemble des incidents soulevés par les parties ne relève pas des pouvoirs du juge de la mise en état mais du juge du fond,
' Dit que chaque partie conservera a sa charge les frais engages non compris dans les depens, .
' Renvoie l'affaire a la mise en etat continue du 13 septembre 2023, en invitant les demandeurs a conclure definitivement pour un renvoi devant la juridiction du fond.
' Réserve les depens .
Statuant à nouveau et y ajoutant :
- déclarer compétent le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux pour statuer sur les fins de non-recevoir invoquées par la société Celio France ainsi formulées :
' Prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail et visée au commandement du 15 septembre 2021
' Ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer délivré le 15 septembre 2021
' Ordonner l'expulsion de la société Celio France ainsi que de tout occupant de son chef à compter de la décision à intervenir, si besoin est avec le concours de la force publique et d'un serrurier, à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 1.000,00 euros par jour de retard,
' Ordonner le transport et la séquestration des biens, objets et mobiliers, garnissant les lieux dans un garde-meubles ou tel autre lieu au choix du bailleur, et ce, en garantie de toute somme qui pourrait lui être due,
' Condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 56 920,08 euros en application de l'article L622-17 I du code de commerce,
' Condamner la societe Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 64 106,84 euros TTC par trimestre à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à libération complète des locaux ;
- déclarer irrecevables les demandes de la SA Eurobail tendant à :
' Prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail et visée au commandement du 15 septembre 2021,
' Ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer délivré le 15 septembre 2021,
' Ordonner l'expulsion de la société Celio France ainsi que de tout occupant de son chef à compter de la décision à intervenir, si besoin est avec le concours de la force publique et d'un serrurier, à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 1.000,00 euros par jour de retard,
' Ordonner le transport et la séquestration des biens, objets et mobiliers, garnissant les lieux dans un garde-meubles ou tel autre lieu au choix du bailleur, et ce, en garantie de toute somme qui pourrait lui être due,
' Condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 56 920,08 euros en application de l'article L622-17 I du code de commerce,
' Condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 64 106,84 euros TTC par trimestre à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à libération complète des locaux ;
- rejeter toutes demandes plus amples ou contraires,
- condamner la SA Eurobail à payer à la société Celio FRANCE la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procedure civile,
- condamner la SA Eurobail aux dépens de l'incident de première instance et de l'appel.
Par conclusions déposées en dernier lieu le 30 août 2024, auxquelles il convient de se reporter pour le détail des moyens et arguments, la société Eurobail demande à la cour de :
In limine litis:
- juger que l'ordonnance du juge de la mise en état près du tribunal judiciaire de Bordeaux du 22 mai 2023 ne constitue pas une décision portant sur la compétence de la juridiction saisie,
- juger que l'ordonnance du juge de la mise en état près du tribunal judiciaire de Bordeaux du 22 mai 2023 n'est pas susceptible d'appel indépendamment du jugement sur le fond du litige,
- juger que les conclusions de la société Eurobail sont recevables,
En conséquence,
- juger que l'appel formé par la société Celio France, ses commissaires à l'exécution du plan et ses mandataires judiciaires à l'encontre de l'ordonnance du juge de la mise en état près du tribunal judiciaire de Bordeaux du 22 mai 2023 est irrecevable,
Au fond
A titre principal,
- confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état près du tribunal judiciaire de Bordeaux du 22 mai 2023 dans toutes ses dispositions
- juger qu'il ne relève pas des pouvoirs du juge de la mise en état de statuer sur les demandes de la société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire, mais du juge du fond, car ces demandes ne constituent pas des fins de non-recevoir et qu'elles ont été formées dès l'acte introductif d'instance avant la désignation du juge de la mise en état,
Y ajoutant,
- condamner la Société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire, en application de l'article 123 du code de procédure civile à payer à la société Eurobail la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour n'avoir pas soulevé plus tôt les prétendues fins de non-recevoir visées dans leurs conclusions du 31 janvier 2023 et reprises en appel,
A titre subsidiaire,
- rejeter toutes les demandes de la société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire, tendant à déclarer irrecevable la société Eurobail en ses demandes de :
- prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail et visée au commandement du 15 septembre 2021
- ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer délivré le 15 septembre 2021
- ordonner l'expulsion de la société Celio France ainsi que de tout occupant de son chef à compter de la décision à intervenir, si besoin est avec le concours de la force publique et d'un serrurier, à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 1.000,00 euros par jour de retard,
- ordonner le transport et la séquestration des biens, objets et mobiliers, garnissant les lieux dans un garde-meubles ou tel autre lieu au choix du bailleur, et ce, en garantie de toute somme qui pourrait lui être due,
- condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 56 920,08 euros en application de l'article L622-17 I du code de commerce,
- condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 64 106,84 euros TTC par trimestre à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à libération complète des locaux ;
- juger que les demandes de la société Eurobail relatives à ses créances postérieures à l'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société Celio France ne sont pas soumises aux interdictions des paiements et des poursuites prévues aux articles L622-7 et L622-21 du code de commerce,
- juger que les créances de la société Eurobail postérieures à l'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société Celio France bénéficient du traitement préférentiel de l'article L622-7, I du code de commerce
- juger que la société Eurobail est recevable en ces demandes tendant à :
Prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail et visée au commandement du 15 septembre 2021
Ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer délivré le 15 septembre 2021
Ordonner l'expulsion de la société Celio France ainsi que de tout occupant de son chef à compter de la décision à intervenir, si besoin est avec le concours de la force publique et d'un serrurier, à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 1.000,00 euros par jour de retard,
Ordonner le transport et la séquestration des biens, objets et mobiliers, garnissant les lieux dans un garde-meubles ou tel autre lieu au choix du bailleur, et ce, en garantie de toute somme qui pourrait lui être due,
Condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 56 920,08 euros en application de l'article L622-17 I du code de commerce,
Condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 64 106,84 euros TTC par trimestre à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à libération complète des locaux ;
En tout état de cause,
Débouter la Société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
Condamner la Société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire à verser à la société Eurobail la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamner la Société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire aux entiers dépens de l'incident.
MOTIFS DE LA DECISION:
Sur la recevablité de l'appel:
1- La société Eurobail fait valoir que la décision entreprise n'est pas une décision statuant sur la compétence et que le juge de la mise en état a seulement jugé que les demandes présentées comme des fins de non-recevoir étaient en réalité des questions de fond relevant des pouvoirs, et non de la compétence, du juge du fond.
Elle en déduit que l'ordonnance du 22 mai 2024 n'était pas susceptible d'appel, conformément à l'article 795 al. 2 du code de procédure civile, mais seulement avec le jugement de fond ; que les demandes des appelants ne constituent pas des fins de non-recevoir.
Elle souligne, subsidiairement, que les organes de la procédure collective n'ont pas interjeté appel selon les formes prescrites par l'article 905 du code de procédure civile.
2- La société Celio réplique que l'appel-compétence est immédiatement recevable ; que conformément à l'article 789 du code de procédure civile, le juge de la mise en état est seul compétent pour, notamment, statuer sur les fins de non-recevoir ; qu'en l'espèce, sans l'écrire expressément, le juge de la mise en état a bien jugé qu'il était incompétent pour statuer sur les demandes, au profit du tribunal statuant au fond.
Subsidiairement, elle ajoute que si le présent appel n'était pas un appel compétence soumis à la procédure à jour fixe, ce serait alors nécessairement la procédure d'appel à bref délai qui s'appliquerait.
Sur ce:
3- La situation du litige opposant les parties est la suivante :
4- Le 13 octobre 2021, la société Celio France et les organes de la procédure ont assigné le bailleur devant le tribunal judiciaire de Bordeaux, en nullité de son commandement de payer visant la clause résolution, au motif que les créances mentionnées à cet acte n'étaient pas des créances éligibles au traitement préférentiel de l'article L. 622-17 du code de commerce, et que les loyers n'étaient pas dus pendant les périodes de fermeture, de sorte que la résiliation de plein droit du bail n'était pas encourue, et subsidiairement de suspendre les effets de la clause résolutoire.
5- Le 20 janvier 2022, la SA Eurobail, bailleur, a assigné la société Celio France devant le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins de juger que les loyers échus pendant la période d'interdiction d'ouverture du public du 16 mars au 11 mai 2020 étaient dus, et que sa créance devait être fixée à titre privilégiée à la somme de 68 663.19 euros.
Les deux affaires ont été jointes.
6- Le bailleur a sollicité à titre reconventionnel de prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail ; d'ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer ; d'ordonner l'expulsion de la société Celio France et de la condamner à payer 56 920,08 euros en application de l'article L. 622-17 I du code de commerce, outre une indemnité d'occupation.
7- Ainsi, le tribunal judiciaire est saisi de l'ensemble du litige entre la société en sauvegarde et son bailleur sur le non-paiement de loyers et la résiliation en conséquence du bail.
8- La société Celio France a saisi le juge de la mise en état d'une irrecevabilité alléguée des demandes formulées par le bailleur, comme se heurtant à l'interdiction légale des poursuites et des paiements.
9- Le juge de la mise en état a considéré que les demandes des parties relevaient de la juridiction du fond, par une ordonnance du 22 mai 2023 dont appel.
10- C'est de manière erronée que la société Celio France et les organes de la procédure soutiennent que l'ordonnance du juge de la mise en état aurait statué sur la compétence.
11- Le bailleur observe à juste titre que le juge de la mise en état n'a pas eu à trancher sur la compétence, alors même qu'il n'était nullement saisi d'une exception d'incompétence de la juridiction, mais d'une simple irrecevabilité. Le premier juge n'a pas dit qu'il n'était pas compétent, mais seulement que les demandes dont il était saisi excédaient ses pouvoirs.
12- Il n'est en effet nullement discuté qu'il résulte des dispositions de l'article 789 6° du code de procédure civile qu'il entre dans les attributions du juge de la mise en état de statuer sur les fins de non-recevoir.
13- Il apparaît donc plus exactement que le juge de la mise en état a reçu les demandes de la société Celio France, et les a examinées, pour en conclure qu'il ne s'agissait pas de fins de non-recevoir mais de questions de fond relevant des pouvoirs du tribunal.
14- Or, il résulte des dispositions de l'article 795 alinéa 2 du code de procédure civile que les ordonnances du juge de la mise en état ne sont, sauf exception, susceptibles d'appel qu'avec le jugement statuant sur le fond.
15- Parmi ces exceptions figurent les décisions sur la compétence, ce qui, comme analysé ci-dessus, n'est pas le cas en l'espèce, ou les décisions statuant sur une fin de non-recevoir, ce qui est également exclu ici.
16- Il résulte en effet des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir sont limitativement énumérées, et il n'apparaît pas qu'un de ces cas de fin de non-recevoir soit présent en l'espèce. Notamment, le droit d'agir, la qualité ou l'intérêt à agir de la société Eurobail sont incontestables, s'agissant d'un litige portant sur le non-paiement de loyers prévus par un bail liant les parties, quelque puisse être le mérite au fond de ses prétentions ou la discussion sur la soumission des créances litigieuses à l'interdiction légale des poursuites. La demande devant le juge de la mise en état ne portait pas non plus sur l'acquisition d'un délai préfix, sur la prescription ou sur l'autorité de la chose jugée.
17-Il en résulte que la décision du juge de la mise en état constatant qu'une demande qui lui était faite relevait en réalité du tribunal statuant au fond n'est pas susceptible d'appel immédiat, mais seulement avec le jugement statuant sur le fond.
18- L'appel du 13 mai 2024 interjeté par la SAS Celio France, la SCP Patrice Brignier et la SCP BTSG est en conséquence irrecevable.
19-Partie tenue aux dépens d'appel, la société Celio France sera redevable envers la société Eurobail d'une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
20- Ces frais irrépétibles et les dépens d'appel de la présente instance, nés pour les besoins du déroulement de la procédure au sens de l'article L. 622-17 du code de commerce comme initiés par la société en sauvegarde et les organes de la procédure, seront employés en frais privilégiés de la procédure collective de la société Celio France.
PAR CES MOTIFS:
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclare irrecevable l'appel formé le 13 mai 2024 interjeté par la SAS Celio France, la SCP Patrice Brignier et la SCP BTSG à l'encontre de l'ordonnance rendue entre les parties le 22 mai 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux,
Dit que la société Celio France sera tenue envers la société Eurobail à une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, et qu'elle supportera les dépens d'appel,
Dit que ces frais irrépétibles et les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective de la société Celio France.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président
QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 08 OCTOBRE 2024
N° RG 24/02242 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-NYQC
SAS CELIO FRANCE
SCP PATRICE BRIGNIER
SCP BTSG
SELARL ASTEREN
c/
S.A. EUROBAIL
Nature de la décision : IRRECEVABILITE DE L'APPEL
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 22 mai 2023 (R.G. 21/08093) par le Juge de la mise en état du tribunal judiciaire de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 13 mai 2024
APPELANTES :
SAS CELIO FRANCE, immatriculée au RCS de BOBIGNY sous le n° 313 334 856, agissant en la personne de son représentant légal domiciliée en cette qualité au siège social [Adresse 5]
SCP Patrice BRIGNIER, immatriculée au RCS de BOBIGNY sous le n° 347 464 752, agissant en la personne de son représentant légal, prise en sa qualité de co-commissaire à l'exécution du plan de la Société CELIO FRANCE, dont le siège social est [Adresse 1]
SCP BTSG, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 434 122 511, agissant en la personne de Maître [D] [I], prise en sa qualité de co-mandataire judiciaire de la Société CELIO FRANCE, dont le siège social est [Adresse 2]
SELARL ASTEREN, immatriculée au RCS de DIJON sous le n° 808 344 071, agissant en la personne de Maître [U] [P], prise en son établissement [Adresse 1], prise en sa qualité de co-mandataire judiciaire et de co-commissaire à l'exécution du plan de la Société CELIO FRANCE, dont le siège social est [Adresse 3]
Représentées par Maître Claire LE BARAZER de la SELARL AUSONE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistées de Maître Mathieu CHAUVEL de la SAS DELCADE avocat au barreau de LILLE
INTIMÉE :
S.A. EUROBAIL, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège siège social sis [Adresse 6]
Représentée par Maître Mathilde CHASSANY, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistée par Maître Audrey KANDALA, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 septembre 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,
Madame Sophie MASSON, Conseiller,
Madame Anne-Sophie JARNEVIC,Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
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EXPOSEDU LITIGE:
Par acte du 15 janvier 2010, la SA Eurobail a donné en location à la SAS Celio France un local commercial de 1200 m² situé au [Adresse 4] à [Localité 7], pour une durée de 9 ans à compter du 15 janvier 2010 jusqu'au 14 janvier 2019, contre paiement d'un loyer annuel initial de 187 089,20 euros HT/HC indexé.
Du 15 mars au 10 mai 2020, la société Celio France a fermé son établissement en exécution de l'arrêté du 15 mars 2020 complétant l'arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus du Covid-19, imposant la fermeture de l'ensemble des commerces 'non-essentiels' sur le territoire national. Le magasin a pu rouvrir le 11 mai 2020 mais a dû à nouveau fermer à compter du 30 octobre 2020 par application du décret du 29 octobre 2020 interdisant l'accueil du public aux magasins de vente, hormis pour leur activité de livraison et de retrait de commandes. Le magasin a pu rouvrir le 28 novembre 2020. Du 4 avril 2021 au 18 mai 2021, Celio France a dû fermer de nouveau par l'effet d'une modification de l'article 37 du décret du 29 octobre 2020.
La société Celio France n'a pas honoré les échéances mensuelles ainsi que les charges pour les périodes de fermeture.
Par jugement du 22 juin 2020, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert sur sa demande une procédure de sauvegarde de la société Celio France.
La SELARL Fhb a été désignée en qualité d'administrateur judiciaire, et la SCP Patrice Brignier ainsi que la SELAFA Mja et SCP BTSG ont été désignées en qualité de mandataires judiciaires.
Le 15 septembre 2021, le bailleur a adressé un commandement de payer au preneur visant la clause résolutoire, pour le paiement d'un arriéré des loyers et charges de 56 920,08 euros correspondant aux périodes de fermeture administrative.
Le 13 octobre 2021, la société Celio France, en présence de ses administrateurs et mandataires judiciaires, a fait assigner la société Eurobail en nullité du commandement devant le tribunal judiciaire de Bordeaux, au motif que les créances mentionnées à cet acte n'étaient pas des créances éligibles au traitement préférentiel de l'article L. 622-17 du code de commerce, et que les loyers n'étaient pas dus pendant les périodes de fermeture, de sorte que la résiliation de plein droit du bail n'était pas encourue, et subsidiairement de suspendre les effets de la clause résolutoire.
Par jugement du 14 octobre 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a arrêté le plan de sauvegarde de la société Celio France, mettant fin à la période d'observation et à la mission des administrateurs judiciaires et nommant des commissaires à l'exécution du plan.
Par acte du 20 janvier 2022, la SA Eurobail, bailleur, a assigné la société Celio France devant le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins de juger que les loyers échus pendant la période d'interdiction d'ouverture du public du 16 mars au 11 mai 2020 étaient dus, et que sa créance devait être fixée à titre privilégiée à la somme de 68 663.19 euros.
Les deux instances ont été jointes le 24 mars 2022 par le juge de la mise en état.
Les administrateurs ont été mis hors de cause et le juge de la mise en état a déclaré recevable l'intervention volontaire de la société MJA et de la SCP Patrice Brignier en leur qualité de commissaires à l'exécution du plan.
Le bailleur a sollicité à titre reconventionnel de prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail ; d'ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer ; d'ordonner l'expulsion de la société Celio France ainsi que de tout occupant ; d'ordonner le transport et la séquestration des biens ; de condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 56 920,08 euros en application de l'article L622-17 I du code de commerce ; de condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 64.106,84 euros TTC par trimestre à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à libération complète des locaux.
Par conclusions du 31 janvier 2023, la société Celio France a saisi le juge de la mise en état afin qu'il statue sur l'irrecevabilité alléguée des demandes formulées par le bailleur, comme se heurtant à l'interdiction légale des poursuites et des paiements.
Par ordonnance du 22 mai 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux a :
- Dit que l'ensemble des incidents soulevés par les parties ne relève pas des pouvoirs du juge de la mise en état mais du juge du fond,
Dit que chaque partie conservera à sa charge les frais engagés non compris dans les dépens,
Renvoyé l'affaire à la mise en état continue du 13 septembre 2023, en invitant les demandeurs à conclure définitivement pour un renvoi devant la juridiction du fond,
- Réservé les dépens.
Par déclaration au greffe du 13 mai 2024, la SAS Celio France, la SCP Patrice Brignier ainsi que la SCP BTSG ont relevé appel de l'ordonnance aux chefs expressément critiqués, affaire enrôlée sous le n° RG 24/02242.
Par ordonnance du président de chambre délégué prise le 16 mai 2024, les appelantes ont été autorisées, sur leur requête, à assigner à jour fixe la société Eurobail pour l'audience du 3 septembre 2024. L'assignation délivrée a été enrôlée sous le n° RG 24/02472.
Le 7 juin 2024, a été prononcée la jonction de l'affaire n° RG 24/02472 au dossier n° RG 24/02242.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:
Par conclusions déposées en dernier lieu le 14 août 2024, auxquelles il convient de se reporter pour le détail des moyens et arguments, la SAS Celio France, la SCP Patrice Brignier, la SELARL Asteren ainsi que la SCP BTSG demandent à la cour de :
Vu les articles L.622-1 et suivants et specialement L.622-7 et L.622-21 du code de commerce,
Vu les articles 32, 83 à 85, 122 à 124, 561, 562, 568, 789, 795 et 905 à 905-2 du code de procédure civile,
Vu les arrêts de la cour de cassation des 11 juillet 2019 et 2 juillet 2020,
- déclarer l'appel recevable,
Subsidiairement, pour le cas où il serait juge que le présent appel est soumis à une procédure à bref délai,
- déclarer irrecevables les conclusions d'intimé notifiées par la SA Eurobail le 1er août 2024 et les 60 pièces communiquées à l'appui de ces conclusions, ainsi que toutes éventuelles conclusions et pièces postérieures ;
- infirmer l'ordonnance dont appel du 22 mai 2023 en ce que le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux a :
' Dit que l'ensemble des incidents soulevés par les parties ne relève pas des pouvoirs du juge de la mise en état mais du juge du fond,
' Dit que chaque partie conservera a sa charge les frais engages non compris dans les depens, .
' Renvoie l'affaire a la mise en etat continue du 13 septembre 2023, en invitant les demandeurs a conclure definitivement pour un renvoi devant la juridiction du fond.
' Réserve les depens .
Statuant à nouveau et y ajoutant :
- déclarer compétent le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux pour statuer sur les fins de non-recevoir invoquées par la société Celio France ainsi formulées :
' Prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail et visée au commandement du 15 septembre 2021
' Ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer délivré le 15 septembre 2021
' Ordonner l'expulsion de la société Celio France ainsi que de tout occupant de son chef à compter de la décision à intervenir, si besoin est avec le concours de la force publique et d'un serrurier, à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 1.000,00 euros par jour de retard,
' Ordonner le transport et la séquestration des biens, objets et mobiliers, garnissant les lieux dans un garde-meubles ou tel autre lieu au choix du bailleur, et ce, en garantie de toute somme qui pourrait lui être due,
' Condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 56 920,08 euros en application de l'article L622-17 I du code de commerce,
' Condamner la societe Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 64 106,84 euros TTC par trimestre à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à libération complète des locaux ;
- déclarer irrecevables les demandes de la SA Eurobail tendant à :
' Prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail et visée au commandement du 15 septembre 2021,
' Ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer délivré le 15 septembre 2021,
' Ordonner l'expulsion de la société Celio France ainsi que de tout occupant de son chef à compter de la décision à intervenir, si besoin est avec le concours de la force publique et d'un serrurier, à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 1.000,00 euros par jour de retard,
' Ordonner le transport et la séquestration des biens, objets et mobiliers, garnissant les lieux dans un garde-meubles ou tel autre lieu au choix du bailleur, et ce, en garantie de toute somme qui pourrait lui être due,
' Condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 56 920,08 euros en application de l'article L622-17 I du code de commerce,
' Condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 64 106,84 euros TTC par trimestre à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à libération complète des locaux ;
- rejeter toutes demandes plus amples ou contraires,
- condamner la SA Eurobail à payer à la société Celio FRANCE la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procedure civile,
- condamner la SA Eurobail aux dépens de l'incident de première instance et de l'appel.
Par conclusions déposées en dernier lieu le 30 août 2024, auxquelles il convient de se reporter pour le détail des moyens et arguments, la société Eurobail demande à la cour de :
In limine litis:
- juger que l'ordonnance du juge de la mise en état près du tribunal judiciaire de Bordeaux du 22 mai 2023 ne constitue pas une décision portant sur la compétence de la juridiction saisie,
- juger que l'ordonnance du juge de la mise en état près du tribunal judiciaire de Bordeaux du 22 mai 2023 n'est pas susceptible d'appel indépendamment du jugement sur le fond du litige,
- juger que les conclusions de la société Eurobail sont recevables,
En conséquence,
- juger que l'appel formé par la société Celio France, ses commissaires à l'exécution du plan et ses mandataires judiciaires à l'encontre de l'ordonnance du juge de la mise en état près du tribunal judiciaire de Bordeaux du 22 mai 2023 est irrecevable,
Au fond
A titre principal,
- confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état près du tribunal judiciaire de Bordeaux du 22 mai 2023 dans toutes ses dispositions
- juger qu'il ne relève pas des pouvoirs du juge de la mise en état de statuer sur les demandes de la société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire, mais du juge du fond, car ces demandes ne constituent pas des fins de non-recevoir et qu'elles ont été formées dès l'acte introductif d'instance avant la désignation du juge de la mise en état,
Y ajoutant,
- condamner la Société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire, en application de l'article 123 du code de procédure civile à payer à la société Eurobail la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour n'avoir pas soulevé plus tôt les prétendues fins de non-recevoir visées dans leurs conclusions du 31 janvier 2023 et reprises en appel,
A titre subsidiaire,
- rejeter toutes les demandes de la société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire, tendant à déclarer irrecevable la société Eurobail en ses demandes de :
- prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail et visée au commandement du 15 septembre 2021
- ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer délivré le 15 septembre 2021
- ordonner l'expulsion de la société Celio France ainsi que de tout occupant de son chef à compter de la décision à intervenir, si besoin est avec le concours de la force publique et d'un serrurier, à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 1.000,00 euros par jour de retard,
- ordonner le transport et la séquestration des biens, objets et mobiliers, garnissant les lieux dans un garde-meubles ou tel autre lieu au choix du bailleur, et ce, en garantie de toute somme qui pourrait lui être due,
- condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 56 920,08 euros en application de l'article L622-17 I du code de commerce,
- condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 64 106,84 euros TTC par trimestre à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à libération complète des locaux ;
- juger que les demandes de la société Eurobail relatives à ses créances postérieures à l'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société Celio France ne sont pas soumises aux interdictions des paiements et des poursuites prévues aux articles L622-7 et L622-21 du code de commerce,
- juger que les créances de la société Eurobail postérieures à l'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société Celio France bénéficient du traitement préférentiel de l'article L622-7, I du code de commerce
- juger que la société Eurobail est recevable en ces demandes tendant à :
Prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail et visée au commandement du 15 septembre 2021
Ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer délivré le 15 septembre 2021
Ordonner l'expulsion de la société Celio France ainsi que de tout occupant de son chef à compter de la décision à intervenir, si besoin est avec le concours de la force publique et d'un serrurier, à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 1.000,00 euros par jour de retard,
Ordonner le transport et la séquestration des biens, objets et mobiliers, garnissant les lieux dans un garde-meubles ou tel autre lieu au choix du bailleur, et ce, en garantie de toute somme qui pourrait lui être due,
Condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 56 920,08 euros en application de l'article L622-17 I du code de commerce,
Condamner la société Celio France à payer à la société Eurobail la somme de 64 106,84 euros TTC par trimestre à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à libération complète des locaux ;
En tout état de cause,
Débouter la Société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
Condamner la Société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire à verser à la société Eurobail la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamner la Société Celio France, la SCP Brignier en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan, et la SCP BTSG en qualité de co-mandataire judiciaires et la SELARL Asteren en qualité de co-commissaire à l'exécution du plan et en qualité de co-mandataire judiciaire aux entiers dépens de l'incident.
MOTIFS DE LA DECISION:
Sur la recevablité de l'appel:
1- La société Eurobail fait valoir que la décision entreprise n'est pas une décision statuant sur la compétence et que le juge de la mise en état a seulement jugé que les demandes présentées comme des fins de non-recevoir étaient en réalité des questions de fond relevant des pouvoirs, et non de la compétence, du juge du fond.
Elle en déduit que l'ordonnance du 22 mai 2024 n'était pas susceptible d'appel, conformément à l'article 795 al. 2 du code de procédure civile, mais seulement avec le jugement de fond ; que les demandes des appelants ne constituent pas des fins de non-recevoir.
Elle souligne, subsidiairement, que les organes de la procédure collective n'ont pas interjeté appel selon les formes prescrites par l'article 905 du code de procédure civile.
2- La société Celio réplique que l'appel-compétence est immédiatement recevable ; que conformément à l'article 789 du code de procédure civile, le juge de la mise en état est seul compétent pour, notamment, statuer sur les fins de non-recevoir ; qu'en l'espèce, sans l'écrire expressément, le juge de la mise en état a bien jugé qu'il était incompétent pour statuer sur les demandes, au profit du tribunal statuant au fond.
Subsidiairement, elle ajoute que si le présent appel n'était pas un appel compétence soumis à la procédure à jour fixe, ce serait alors nécessairement la procédure d'appel à bref délai qui s'appliquerait.
Sur ce:
3- La situation du litige opposant les parties est la suivante :
4- Le 13 octobre 2021, la société Celio France et les organes de la procédure ont assigné le bailleur devant le tribunal judiciaire de Bordeaux, en nullité de son commandement de payer visant la clause résolution, au motif que les créances mentionnées à cet acte n'étaient pas des créances éligibles au traitement préférentiel de l'article L. 622-17 du code de commerce, et que les loyers n'étaient pas dus pendant les périodes de fermeture, de sorte que la résiliation de plein droit du bail n'était pas encourue, et subsidiairement de suspendre les effets de la clause résolutoire.
5- Le 20 janvier 2022, la SA Eurobail, bailleur, a assigné la société Celio France devant le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins de juger que les loyers échus pendant la période d'interdiction d'ouverture du public du 16 mars au 11 mai 2020 étaient dus, et que sa créance devait être fixée à titre privilégiée à la somme de 68 663.19 euros.
Les deux affaires ont été jointes.
6- Le bailleur a sollicité à titre reconventionnel de prononcer l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail ; d'ordonner la résiliation de plein droit du bail en raison de l'inexécution du commandement de payer ; d'ordonner l'expulsion de la société Celio France et de la condamner à payer 56 920,08 euros en application de l'article L. 622-17 I du code de commerce, outre une indemnité d'occupation.
7- Ainsi, le tribunal judiciaire est saisi de l'ensemble du litige entre la société en sauvegarde et son bailleur sur le non-paiement de loyers et la résiliation en conséquence du bail.
8- La société Celio France a saisi le juge de la mise en état d'une irrecevabilité alléguée des demandes formulées par le bailleur, comme se heurtant à l'interdiction légale des poursuites et des paiements.
9- Le juge de la mise en état a considéré que les demandes des parties relevaient de la juridiction du fond, par une ordonnance du 22 mai 2023 dont appel.
10- C'est de manière erronée que la société Celio France et les organes de la procédure soutiennent que l'ordonnance du juge de la mise en état aurait statué sur la compétence.
11- Le bailleur observe à juste titre que le juge de la mise en état n'a pas eu à trancher sur la compétence, alors même qu'il n'était nullement saisi d'une exception d'incompétence de la juridiction, mais d'une simple irrecevabilité. Le premier juge n'a pas dit qu'il n'était pas compétent, mais seulement que les demandes dont il était saisi excédaient ses pouvoirs.
12- Il n'est en effet nullement discuté qu'il résulte des dispositions de l'article 789 6° du code de procédure civile qu'il entre dans les attributions du juge de la mise en état de statuer sur les fins de non-recevoir.
13- Il apparaît donc plus exactement que le juge de la mise en état a reçu les demandes de la société Celio France, et les a examinées, pour en conclure qu'il ne s'agissait pas de fins de non-recevoir mais de questions de fond relevant des pouvoirs du tribunal.
14- Or, il résulte des dispositions de l'article 795 alinéa 2 du code de procédure civile que les ordonnances du juge de la mise en état ne sont, sauf exception, susceptibles d'appel qu'avec le jugement statuant sur le fond.
15- Parmi ces exceptions figurent les décisions sur la compétence, ce qui, comme analysé ci-dessus, n'est pas le cas en l'espèce, ou les décisions statuant sur une fin de non-recevoir, ce qui est également exclu ici.
16- Il résulte en effet des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir sont limitativement énumérées, et il n'apparaît pas qu'un de ces cas de fin de non-recevoir soit présent en l'espèce. Notamment, le droit d'agir, la qualité ou l'intérêt à agir de la société Eurobail sont incontestables, s'agissant d'un litige portant sur le non-paiement de loyers prévus par un bail liant les parties, quelque puisse être le mérite au fond de ses prétentions ou la discussion sur la soumission des créances litigieuses à l'interdiction légale des poursuites. La demande devant le juge de la mise en état ne portait pas non plus sur l'acquisition d'un délai préfix, sur la prescription ou sur l'autorité de la chose jugée.
17-Il en résulte que la décision du juge de la mise en état constatant qu'une demande qui lui était faite relevait en réalité du tribunal statuant au fond n'est pas susceptible d'appel immédiat, mais seulement avec le jugement statuant sur le fond.
18- L'appel du 13 mai 2024 interjeté par la SAS Celio France, la SCP Patrice Brignier et la SCP BTSG est en conséquence irrecevable.
19-Partie tenue aux dépens d'appel, la société Celio France sera redevable envers la société Eurobail d'une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
20- Ces frais irrépétibles et les dépens d'appel de la présente instance, nés pour les besoins du déroulement de la procédure au sens de l'article L. 622-17 du code de commerce comme initiés par la société en sauvegarde et les organes de la procédure, seront employés en frais privilégiés de la procédure collective de la société Celio France.
PAR CES MOTIFS:
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclare irrecevable l'appel formé le 13 mai 2024 interjeté par la SAS Celio France, la SCP Patrice Brignier et la SCP BTSG à l'encontre de l'ordonnance rendue entre les parties le 22 mai 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux,
Dit que la société Celio France sera tenue envers la société Eurobail à une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, et qu'elle supportera les dépens d'appel,
Dit que ces frais irrépétibles et les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective de la société Celio France.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président