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Décisions

Cass. com., 2 octobre 2024, n° 22-23.554

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Selarl Frédéric Blanc MJO (ès qual.), Dawaq (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigneau

Rapporteur :

Mme Brahic-Lambrey

Avocat général :

M. de Monteynard

Avocats :

SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SARL Corlay

Poitiers, du 20 sept. 2022

20 septembre 2022

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 20 septembre 2022), le 16 février 2018, la SAS Dawaq ayant pour actionnaire unique et président M. [B], a été mise en liquidation judiciaire, la société Frédéric Blanc MJO mandataires judiciaires (la société MJO) étant désignée liquidateur. La société MJO a recherché les responsabilité pour insuffisance d'actif et faillite personnelle du dirigeant.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, le troisième et le quatrième moyens

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. M. [B] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de nullité de l'assignation et, en conséquence, de dire qu'il a commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société Dawaq, de le condamner à payer à la société Frédéric Blanc, en qualité de liquidateur de la société Dawaq, la somme de 80 000 euros au titre de la responsabilité pour insuffisance d'actif et de prononcer à son encontre une faillite personnelle pour une durée de 10 ans, alors « que la nullité d'une assignation peut être prononcée lorsque le vice de forme qui l'entache a causé un grief à celui qui l'invoque ; que le grief ainsi visé n'est pas réductible à la seule privation des garanties auxquelles un procès équitable donne droit ; que la croyance erronée en la nécessité de se faire représenter par un avocat constitue un grief ; qu'en l'espèce, l'assignation mentionnait à tort que M. [B] était tenu de constituer avocat pour être représenté devant le tribunal de commerce dans le cadre d'une procédure en responsabilité pour insuffisance d'actif ; qu'en excluant le grief causé par ce vice de forme aux prétextes que le recours à un avocat, même s'il a un coût, ne peut s'analyser en une privation des garanties auxquelles un procès équitable donne droit et que M. [B] n'avait pas été empêché de se défendre, la cour d'appel a violé les articles 56 et 114 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article 114 du code de procédure civile, aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

5. Après avoir relevé que l'assignation délivrée à M. [B] mentionne à tort qu'il est tenu de constituer avocat pour être représenté par le tribunal, l'arrêt retient souverainement que cette irrégularité, qui n'a pas perturbé le procès ni désorganisé sa défense, le coût invoqué du recours à un avocat ne pouvant s'analyser en une privation des garanties d'un procès équitable, ne lui a causé aucun grief.

6. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

7. M. [B] fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, de dire qu'il a commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société Dawaq, de le condamner à payer à la société Frédéric Blanc, en qualité de liquidateur de la société Dawaq, la somme de 80 000 euros au titre de la responsabilité pour insuffisance d'actif et de prononcer à son encontre une faillite personnelle pour une durée de 10 ans, alors « que lorsque le ministère public est partie principale à l'instance et qu'il adresse des conclusions écrites à la juridiction, celle-ci ne peut statuer sans s'assurer que celles-ci ont été régulièrement communiquées aux parties et que celles-ci ont été mises en mesure d'y répondre ; qu'en l'espèce, il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le ministère public, appelant à titre principal, avait déposé le 16 septembre 2021 des conclusions écrites ; qu'en s'abstenant de constater que les parties avaient eu communication des conclusions du ministère public et qu'elles avaient été mises en mesure d'y répondre, la cour d'appel a violé les articles 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 16, 422 et 423 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 16 et 422 du code de procédure civile :

8. Il résulte de ces textes que lorsque le ministère public est partie principale, ses conclusions écrites doivent être notifiées aux autres parties à l'instance.

9. Pour condamner M. [B] au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif et prononcer sa faillite personnelle, l'arrêt se réfère aux conclusions du 16 septembre 2021 du parquet général qui avait fait appel.

10. En se déterminant ainsi, sans préciser si M. [B] avait reçu notification des conclusions écrites du ministère public, appelant partie principale, et avait pu y répondre utilement, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.