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Décisions

CA Saint-Denis de la Réunion, ch. civ. tgi, 24 mai 2024, n° 23/00286

SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Cabinet Généalogique de l’Océan Indien (SARL)

Défendeur :

Petit Etang (SCCV)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chevrier

Conseillers :

Mme Police, M. Fravette

Avocats :

Me Duleroy, Me Ferdinand, Me Settama, Me Amode, Me Alquier

CA Saint-Denis de la Réunion n° 23/0028…

23 mai 2024

LA COUR

La SCCV Petit Etang (SCCV) a acquis des consorts [NW], par acte authentique passé devant Me [SD] et par l'intermédiaire de l'agence immobilière IMMO [Localité 24], un bien immobilier sis à [Localité 22] (La Réunion).

Par acte d'huissier en date du 20 novembre 2019, la SCCV a fait assigner M. [ZD] [UX], Mme [KP] [U] [NW], Mme [KP] [BS] [NW], Mme [HW] [UJ] [NW], M. [V] [CO] [NW], M. [A] [N] [NW], M. [NJ] [XX] [NW], M. [GC] [NW] et Me [JP] [SD] devant le tribunal de grande instance de Saint-Pierre de la Réunion aux fins de voir ordonner l'expulsion de M. [ZD] [UX] des parcelles cadastrés AV [Cadastre 7] et AV [Cadastre 16], de le condamner au paiement d'une indemnité d'occupation et d'une indemnité en réparation de son préjudice et, à titre subsidiaire, de prononcer la nullité de la vente, de condamner les vendeurs aux restitutions réciproques ainsi qu'à l'indemniser de son préjudice solidairement avec le notaire instrumentaire.

Le 1er juin 2021, la société Cabinet de Généalogie de l'Océan Indien (CGOI) est intervenue volontairement à l'instance par conclusions, en son nom propre ainsi qu'en qualité de mandataire spécial des Consorts [RJ], [IW], [VX], [LW], [DI], [WX], [MP], [PW], [C] et [VD] en leur qualité d'ayant-droit de Mme [X] [JC], sollicitant la nullité de l'attestation immobilière après décès établie le 3 août 20l7 et publiée le 7 septembre 2017 (volume 2017 P nº4275) au profit des consorts [NW], la nullité de l'acte de vente notarié du 21 septembre 2018, la restitution de la parcelle AV [Cadastre 16] située sur la commune de [Localité 22] à l'indivision successorale découlant du décès de Mme [JC], et, à titre subsidiaire la condamnation solidaire des consorts [NW] et de la SCP de notaires prise en la personne de Maître [JP] [SD] à lui verser en sa qualité de mandataire la somme de 100.000 euros en réparation du préjudice matériel et la somme de 15.000 euros en réparation du préjudice moral, outre l'expulsion de M. [UX] et la démolition du bien construit illégalement sur sa parcelle.

Par conclusions d'incident, Maître [SD] a saisi le juge de la mise en état aux fins de déclarer nulle l'intervention volontaire de la société CGOI, ou irrecevable en son nom propre et en sa qualité de mandataires des ayant-droit d'[PP] [LC] et de Madame [X] [JC].

Par ordonnance en date du 26 janvier 2023, puis d'une rectification d'erreur matérielle en date du 9 février 2023, le juge de la mise en état a statué en ces termes :

Prononce la nullité des conclusions en intervention volontaire communiquées par la SARL Cabinet de Généalogie de l'Océan Indien (CGOI) ès qualité de représentant des consorts [RJ], [IW], [VX], [LW], [DI], [WX], [MP], [PW], [C] et [VD] ;

Déclare la SARL Cabinet de Généalogie de l'Océan Indien (CGOI) irrecevable en ses demandes en ce qu'elles sont présentées en son nom propre ;

Condamne la SARL Cabinet de Généalogie de l'Océan Indien (CGOI) à payer à Me [JP] [SD], notaire associé, membre de la SCP RAGOT-SAY-[SD]-MACE-RAMBAUD-PATEL, la somme de 1.000,00 euro sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL CGOI a interjeté appel par déclaration remise au greffe de la cour par RPVA le 3 mars 2023 pour l'ordonnance du 26 janvier 2023.

L'affaire a été fixée à bref délai selon un avis adressé aux parties le 28 mars 2023.

L'appelante a fait signifier la déclaration d'appel et ses conclusions aux intimés entre le 31 mars et le 4 avril 2023.

L'appelante a remis ses premières conclusions par RPVA le 5 avril 2023.

Maître [SD] a constitué avocat le 7 avril 2023. Il a déposé ses premières conclusions d'intimé le 27 avril 2023.

Les Consorts [NW] ont constitué avocat le 13 avril 2023. Ils ont déposé leurs premières conclusions d'intimés le 14 avril 2023.

La SCCV PETIT ETANG a constitué avocat le 5 avril 2023. Elle a déposé ses premières conclusions d'intimée le 27 avril 2023.

Les conclusions de Monsieur [UX] ont été déclarées irrecevables par ordonnance du président de la chambre civile en date du 27 février 2024.

La clôture est intervenue le 27 février 2024. L'affaire a été examinée à l'audience du 19 mars 2024.

***

Aux termes de ses conclusions, déposées par RPVA le 18 août 2023, l'appelante demande à la cour de :

- INFIRMER en toutes ses dispositions l'ordonnance du Juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de SAINT PIERRE en date du 26 janvier 2023 ;

En conséquence

- DIRE régulières et recevables les conclusions d'intervention volontaire signifiées par la SARL CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN en sa qualité de représentant et mandataire successoral des consorts [RJ]-[IW]- [LW]-[DI]- [WX] -[MP]- [PW]-[C]-[VD], ayants droit de Mme [X] [JC], ainsi que des consorts [BG]-[FI], héritiers de Monsieur [PP] [LC],

- DECLARER la SARL CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN recevable en ses demandes en ce qu'elles sont présentées tant es qualités, qu'en son nom propre ;

- DEBOUTER la SCP MARIE JOSEPH RAGOT-SAMY, [JP] [SD] ET BERTRAND MACE, RAMBAUD STÉPHANE ET HAROUN PATEL, prise en la personne de Me [SD], de toutes ses demandes, fins et conclusions incidentes ;

En conséquence et statuant à nouveau,

- CONDAMNER la SCP MARIE JOSEPH RAGOT-SAMY, [JP] [SD] ET BERTRAND MACE, RAMBAUD STÉPHANE ET HAROUN PATEL à verser au CGOI, es qualité et en son nom propre, la somme de 3.000€ en vertu des dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu'en tous les dépens d'incident au titre de la première instance ;

Y a joutant

CONDAMNER la SCP MARIE JOSEPH RAGOT-SAMY, [JP] [SD] ET BERTRAND MACE, RAMBAUD STÉPHANE ET HAROUN PATEL à verser au CGOI, es qualité et en son nom propre, la somme de 3.000€ en vertu des dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu'en tous les dépens exposés en cause d'appel.

***

La SCCV PETIT ETANG, demande à la cour de :

. INFIRMER l'ordonnance (RG nº 20/00028) rendue le 26 janvier 2023 par le juge de la mise en état de Saint-Pierre rectifiée par l'ordonnance (RG nº 23/00306) rendue le 9 février 2023 par le juge de la mise en état de Saint-Pierre en ce qu'elle a :

-Prononcé la nullité des conclusions d'intervention volontaire en ce qu'elles ont été communiquées par la SARL Cabinet de Généalogie de l'Océan Indien ès qualité de représentant des consorts [RJ], [IW], [VX], [LW], [DI], [WX], [MP], [PW], [C] et [VD] en leur qualité d'ayant-droit de Mme [X] [JC];

-Déclaré la SARL Cabinet de Généalogie de l'Océan Indien irrecevable en ses demandes en ce qu'elles sont présentées en son nom propre.

-Condamné la SARL Cabinet de Généalogie de l'Océan Indien à payer à Me [JP] [SD], notaire associé, membre de la SCP Ragot-Say-[SD]-Mace-Rambaud-Patel, la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Et, statuant à nouveau :

. DECLARER l'action et les demandes de la SARL CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN recevables ;

. CONDAMNER Me [JP] [SD], notaire associé, membre de la SCP Ragot-Say-[SD]-Mace-Rambaud-Patel, à verser la somme de 1.000 € à la SCCV PETIT ETANG au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

***

Mme [NW] [KP] [BS], épouse [AX], Mme [NW] [HW] [UJ], M. [NW] [V] [CO], M. [NW] [NJ] [XX], Mme [NW] [KP] [U], épouse [EW], M. [NW] [A] [N] et M. [NW] [GC], demandent à la cour de :

Sur la forme :

PRONONCER la nullité de l'appel de la CGOI et consorts ;

Sur le fond :

CONFIRMER en tout point la décision ou les décisions querellées, dans l'hypothèse où la déclaration sera valable ;

Au titre de l'appel incident :

DECLARER l'appel incident des consorts [NW] recevable et bien fondé et statuer ce que de droit sur leurs demandes :

PRONONCER la mise hors de cause des consorts [NW] ;

CONDAMNER solidairement la SCCV PETIT ETANT, l'agence IMMO [Localité 26], et le cabinet de généalogie à payer à chacun des consorts [NW] la somme de 20 000 € pour préjudice résultant des fraudes dénoncées ;

CONDAMNER à titre reconventionnel, in solidum Maître [JP] [SD] et la SCCV PETIT ETANG à payer aux consorts [NW] la somme de 80 000 € indûment retenue correspondant au solde du prix de la vente de leur terrain ;

CONDAMNER les mêmes à payer aux consorts [NW] la somme de 4000 € au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens.

***

Maître [SD] demande à la cour de :

CONSTATER que CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN (CGOI) ne demande pas dans le dispositif de ses conclusions signifiées le 31.03.2023 l'infirmation de l'Ordonnance en rectification d'erreur matérielle du 09 Février 2023, RG nº 23/00306.

CONFIRME l'Ordonnance sur incident du Juge de la mise en état et l'Ordonnance en rectification d'erreur matérielle du Juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Saint-Pierre du 09 Février 2023 (RG nº 23/00306).

En tout état de cause,

REJETER l'ensemble des conclusions, fins et prétentions du CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN (CGOI), agissant en son nom propre et/ou es-qualité de mandataire successoral, formulé contre Me [JP] [SD], Notaire associé.

REJETER l'ensemble des conclusions, fins et prétentions de Madame [KP] [U] [NW], Madame [KP] [BS] [NW], Madame [HW] [UJ] [NW], Monsieur [V] [CO] [NW], Monsieur [A] [N] [NW], Monsieur [NJ] [XX] [NW], Monsieur [GC] [NW], formulé contre Me [JP] [SD], Notaire associé.

CONDAMNER le CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN (CGOI) , en son nom propre et es-qualité de mandataire successoral, à verser à Me [JP] [SD], Notaire associé, 5.000,00 € (cinq mille EURO) en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

CONDAMNER le CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN (CGOI), en son nom propre et es-qualité de mandataire successoral, aux entiers dépens d'appel.

***

Par un avis RPVA du 29 mars 2024, la cour a invité les parties à présenter leurs observations sous quinzaine sur la recevabilité des demandes de dommages et intérêts des Consorts [NW] dirigées contre la SCCV PETIT ETANG, l'agence IMMO [Localité 26], le Cabinet de généalogie, et Maître [JP] [SD], ces demandes semblant nouvelles en cause d'appel, au visa de l'article 564 du code de procédure civile.

Par message reçu le 1er avril 2024, le Conseil de Monsieur [UX] a indiqué que, selon lui, ces demandes sont irrecevables.

Par message reçu le 1er avril 2024, le Conseil de Maître [JP] [SD] a indiqué que, selon lui, ces demandes sont irrecevables

Par message du 5 avril 2024, le Conseil de la société CGOI a admis l'irrecevabilité de cette prétention.

Par message du 2 avril 2024, le Conseil de la SCCV PETIT ETANG a admis l'irrecevabilité de cette prétention.

***

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées, figurant au dossier de la procédure, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.

Elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de " constatations " ou de " dire et juger " lorsqu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

La cour observe que le tribunal judiciaire a déjà rendu sa décision au fond le 16 juin 2023, qui fait aussi l'objet d'un appel de Monsieur [UX], enregistré à la cour sous les références RG-23-1170, selon déclaration du 14 août 2023.

Sur la nullité de l'appel :

Les Consorts [NW] demandent à la cour de prononcer la nullité de l'appel de la CGOI et consorts en soutenant qu'elle a formé appel contre deux ordonnances en même temps, procédé non conforme aux prescriptions de l'article 901 du code de procédure civile qui rend irrégulière la déclaration d'appel.

Selon Maître [SD], le CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN (CGOI) ne demande pas dans le dispositif de ses conclusions signifiées le 31.03.2023 l'infirmation de l'Ordonnance en rectification d'erreur matérielle du 09 Février 2023, RG nº 23/00306.

L'appelante n'a pas répliqué à cette exception de nullité bien que ses conclusions aient été remises postérieurement à celles des Consorts [NW].

Sur ce,

Aux termes des articles 544 et 545 du même code, les jugements qui tranchent dans leur dispositif une partie du principal et ordonnent une mesure d'instruction ou une mesure provisoire peuvent être immédiatement frappés d'appel comme les jugements qui tranchent tout le principal.

Il en est de même lorsque le jugement qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident met fin à l'instance.

Les autres jugements ne peuvent être frappés d'appel indépendamment des jugements sur le fond que dans les cas spécifiés par la loi.

L'article 901 du code de procédure civile prévoit que la déclaration d'appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2º et 3º de l'article 54 et par le cinquième alinéa de l'article 57, et à peine de nullité :

1º La constitution de l'avocat de l'appelant ;

2º L'indication de la décision attaquée ;

3º L'indication de la cour devant laquelle l'appel est porté ;

4º Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Elle est signée par l'avocat constitué. Elle est accompagnée d'une copie de la décision. Elle est remise au greffe et vaut demande d'inscription au rôle.

Toutefois, l'article 462 du même code précise que la décision rectificative est mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement. Elle est notifiée comme le jugement.

Si la décision rectifiée est passée en force de chose jugée, la décision rectificative ne peut être attaquée que par la voie du recours en cassation.

En l'espèce, la rectification du jugement est intervenue par ordonnance en date du 9 février 2023, soit antérieurement à la déclaration d'appel du 3 mars 2023.

Ainsi, l'obligation faite de notifier la décision rectificative avec l'ordonnance rectifiée, imposait à la CGOI de viser les deux décisions dans sa déclaration d'appel et alors qu'aucune disposition ne l'interdit, d'autant moins qu'il n'est excipé d'aucun grief contre la décision rectificative qui s'est limitée à retirer la mention des mandants de l'appelante " en leur qualité d'ayant-droit de Madame [X] [JC]. "

A défaut, la rectification d'erreur matérielle affectant l'ordonnance attaquée n'aurait pas suivi le cours de la procédure d'appel alors que la décision rectificative, seule, ne peut faire l'objet d'un appel en vertu des textes susvisés.

En outre, l'appelante n'avait pas à solliciter l'infirmation de l'ordonnance de rectification d'erreur matérielle, faisant partie intégrante de l'ordonnance entreprise.

En conséquence, l'exception de nullité doit être écartée.

Sur la demande de mise hors de cause des Consorts [NW] :

Les Consorts [NW] demandent leur mise hors de cause en considérant qu'aucune demande n'est formée à leur encontre dans cette procédure d'appel.

Cependant, assignés comme défendeurs à l'action en nullité de la vente pour dol des parcelles litigieuses, régularisée en 2018, les Consorts [NW] sont directement concernés par la revendication résultant de l'intervention volontaire de la CGOI pour le compte de personnes physiques se prétendant héritiers et propriétaires de la chose vendue.

En conséquence, il importe de maintenir dans la cause les concluants, même si ceux-ci considèrent, à tort ou à raison, que l'intervention de la SARL CGOI ne les concerne pas.

En effet, il importe que les décisions à venir leur soient opposables.

La demande de mise hors de cause des Consorts [NW] sera rejetée.

Sur la recevabilité de l'intervention volontaire de la CGOI :

Pour annuler l'intervention volontaire de l'appelante, le juge de la mise en état a considéré que la CGOI ne dispose d'aucun mandat spécial pour agir au nom des parties qu'il prétend représenter, la privant ainsi de tout pouvoir d'ester en justice à ce titre.

S'agissant de son action personnelle, le premier juge a estimé que la CGOI ne justifie d'aucun intérêt direct et personnel à agir en nullité des actes qu'elle entend contester.

L'appelante plaide en substance qu'elle a intérêt à agir pour le compte des indivisaires successoraux l'ayant régulièrement mandatée. En effet, la société CGOI a été expressément mandatée par les ayants droit de Monsieur [JC] aux fins notamment de :

" Recueillir la succession de Monsieur [CL] [SD] [YX] [JC], époux de Madame [KP] [WD] [TX], et décédé le [Date décès 8] 1844 à [Localité 25] (La Réunion), accepter purement et simplement ladite succession, faire à cet effet toutes déclarations et affirmations, et liquider l'indivision qui en résulte.

Et le cas échéant, toute communauté ou indivision qui a pu exister entre le défunt et son conjoint ou toute autre personne. "

Elle a également été mandatée par les ayants droit de Monsieur [LC], dans les mêmes termes.

Selon l'appelante, point n'est besoin d'un acte de notoriété, étant rappelé qu'en application de l'article 730 du code civil, la preuve de la qualité d'héritier est rapportée par tout moyen. La dévolution de Madame [X] [JC], fille du de cujus décédé saisi de ses droits, établie par un généalogiste successoral professionnel, accessoirement expert près les tribunaux, constitue bien une justification probante du statut héréditaire des mandants du CGOI.

Il en est de même pour la succession de Monsieur [LC].

Invoquant les dispositions de l'article 815-3 du code civil, la CGOI soutient que ses mandants sont les indivisaires successoraux de Madame [JC] et de Monsieur [LC], représentant au moins deux tiers des droits indivis. Ils ont donc le pouvoir de donner un mandat général d'administration à un tiers, ce qui est le cas en l'espèce.

S'agissant de son intérêt personnel, la CGOI expose que son action judiciaire découle directement de la mise en oeuvre et la bonne fin de la mission confiée par les indivisaires successoraux contre rémunération calculée sur la consistance du patrimoine successoral recueilli outre les frais engagés.

Adoptant la même solution, la SCCV PETIT ETANG soutient que le CGOI dispose bien d'un mandat spécial lui conférant procuration aux fins d'agir en justice, ses dispositions lui conférant en son titre 7 le pouvoir de " représenter le constituant en justice tant en demandant qu'en défendant, constituer tout défenseur et auxiliaire de justice, effectuer ou requérir tout acte de procédure ou toute mesure d'exécution " (Pièce CGOI nº 11). Les héritiers de Monsieur [JC], revendiquant la propriété de la parcelle objet du litige, ont tout intérêt à voir annuler la vente intervenue au bénéfice de la SCCV PETIT ETANG.

Maître [SD] soutient que la double action en justice intentée par CGOI affecte de manière significative la structure du patrimoine des indivisions successorales [PP] [LC] et [X] [JC], nécessitant des mandats spéciaux en application des articles 1987 et 1988 du code civil. Or les procurations produites pour justifier de son mandat par CGOI sont rédigées en des termes généraux sans aucune référence à la. présente intervention volontaire dont les conséquences peuvent être particulièrement lourdes tant financièrement que foncièrement pour les cohéritiers concernées. Comme le juge de la mise en état l'a souligné, certaines des procurations dont se prévaut CGOI ne sont pas datées, d'autres sont postérieures à son intervention volontaire, d'autres encore présentent une date de légalisation de la signature distincte de celle de la date de signature, leur régularité prêtant ainsi à caution.

De plus, aucun acte de notoriété n'atteste la qualité d'héritiers de tous ceux qui ont mandaté CGOI pour agir en justice en tant qu'ayant-droit de Monsieur [PP] [LC] - pour la parcelle AV [Cadastre 10]- et [X] [JC] - pour la parcelle AV [Cadastre 16].

Les Consorts [NW] exposent que, par le dispositif de ses conclusions d'appelante, la société CGOI ne demande pas l'infirmation de la décision ou des décisions attaquées mais se limite à demander à la cour de statuer à nouveau.

Sur ce,

Sur la régularité des premières conclusions d'appel déposées le 5 avril 2024:

En premier lieu, il convient de souligner que, contrairement à ce que prétendent les Consorts [NW], les conclusions d'appelante remises le 30 mars 2023 par la société CGOI sont régulières au regard des prescriptions de l'article 954 du code de procédure civile puisque son dispositif, mentionne en page 14 :

" - INFIRMER en toutes ses dispositions l'ordonnance du Juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de SAINT PIERRE en date du 26 janvier 2023 ;

En conséquence,

- DIRE régulières et recevables les conclusions d'intervention volontaire signifiées par la SARL CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN en sa qualité de représentant et mandataire successoral des consorts [RJ]-[IW]- [LW]-[DI]- [WX]-[MP]-[PW]-[C]-[VD], ayants droit de Mme [X] [JC], ainsi que des consorts [BG]-[FI], héritiers de Monsieur [PP] [LC],

- DECLARER la SARL CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN recevable en ses demandes en ce qu'elles sont présentées tant es qualités, qu'en son nom propre ;

- DEBOUTER la SCP MARIE JOSEPH RAGOT-SAMY, [JP] [SD] ET BERTRAND MACE, RAMBAUD STÉPHANE ET HAROUN PATEL, prise en la personne de Me [SD], de toutes ses demandes, fins et conclusions incidentes ; "

Puis en page 15 :

" En conséquence et statuant à nouveau,

- CONDAMNER la SCP MARIE JOSEPH RAGOT-SAMY, [JP] [SD] ET BERTRAND MACE, RAMBAUD STÉPHANE ET HAROUN PATEL à verser au CGOI, es qualité et en son nom propre, la somme de 3.000€ en vertu des dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu'en tous les dépens d'incident au titre de la première instance ;

Y a joutant

CONDAMNER la SCP MARIE JOSEPH RAGOT-SAMY, [JP] [SD] ET BERTRAND MACE, RAMBAUD STÉPHANE ET HAROUNPATEL à verser au CGOI, es qualité et en son nom propre, la somme de 3.000€ en vertu des dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu'en tous les dépens exposés en cause d'appel. "

Sur le pouvoir d'agir et la qualité à agi de la CGOI au nom des héritiers allégués :

Aux termes des articles 31 et 32 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

Est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

En l'espèce, la SARL CGOI est intervenue par conclusions en précisant qu'elle agissait tant en son nom propre qu'en qualité de mandataire successoral des ayant-droit de Madame [X] [JC] et des ayant-droit de Monsieur [BI] [LC], s'associant à l'actien en nullité pour dol de la vente conclue entre la SCCV PETIT ETANG et les Consorts [NW] le 21 septembre 2018. La société CGOI fait valoir sa qualité de mandataire pour intervenir en revendication des deux parcelles cédées, cadastrées AV [Cadastre 10] et AV [Cadastre 16] sur la commune de [Localité 22].

A l'appui de son action en qualité de mandataire successoral, la SARL CGOI verse aux débats les procurations des mandants selon les successions considérées (Pièces N° 1/1 et 1/2), toutes rédigées selon un modèle identique.

Selon cet acte, le mandant constitue pour mandataire Monsieur [CI] [LJ], Madame [GI] [LJ], Monsieur [DO] [PD] et Monsieur [HC] [LP], représentant le cabinet généalogique de l'océan Indien, pour recueillir la succession de Monsieur [CL] [JC] (ou Monsieur [PP] [LC] selon les actes), accepter purement et simplement la dite succession, faire à cet effet toutes déclarations et affirmations, et liquider l'indivision qui en résulte.

En conséquence et à leurs sujets :

1) Prendre toutes mesures conservatoires : demander toutes mesures judiciaires tendant à la conservation des biens.

2) Prendre parti : établir toute attestation de propriété immobilière relative à ladite succession, ainsi qu'à celle qui en serait la suite ou la conséquence.

3) Gérer et administrer : représenter le constituant auprès de toutes administrations publiques et notamment auprès de l'administration fiscale. Souscrire à cet effet toutes déclarations, acquitter tous impôts et taxes, faire toutes réclamations et demandes gracieuses ou contentieuses. Obtenir tout délai de paiement, constitué toute garantie, consentir toutes inscriptions sur les registres fonciers ou hypothécaires.

4) Disposer : (')

5) Partager : (')

6) Expertises et conseils ; (..)

7) Agir en justice : représenter le constituant en justice tant en demandant qu'en défendant. Constitué tout défenseur et auxiliaire de justice. Effectuer ou requérir tout acte de procédure ou toute mesure d'exécution.

Compromettre et transiger.

(') "

D'une part, la lecture de ce mandat n'établit pas qu'il a été donné à la SARL CGOI directement mais plutôt à ses représentants.

Néanmoins, cette rédaction malencontreuse ne permet pas d'écarter la société CGOI comme partie à ces procurations.

Mais le paragraphe 7) stipulant le mandat pour agir en justice est rédigé de façon très général et ne vise pas particulièrement l'action en revendication introduite par l'intervention forcée litigieuse.

Or, selon les dispositions des articles 1987 et 1988 du code civil, (le mandat) est ou spécial et pour une affaire ou certaines affaires seulement, ou général et pour toutes les affaires du mandant.

Le mandat conçu en termes généraux n'embrasse que les actes d'administration.

En l'espèce, une action en revendication immobilière ne peut pas être qualifiée d'acte d'administration.

Or, les procurations produites par la SARL CGOI n'évoquent nullement une action en revendication telle qu'elle est engagée par l'appelante, s'agissant de mandat général et non d'un mandat spécial destiné à agir en justice au nom et pour le compte des mandants, sans préjudice de leur éventuelle qualité héréditaire.

Ainsi, adoptant les motifs du premier juge, il convient de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a jugé que la SARL CGOI ne dispose pas d'un pouvoir spécial lui permettant d'agir en revendication pour le compte de ses mandants.

L'ordonnance querellée sera confirmée de ce chef.

Sur le défaut d'intérêt à agir de la SARL CGOI :

Il est d'abord certain que la SARL CGOI n'invoque pas un intérêt direct à agir en revendication puisqu'elle le fait en vertu des mandats qui lui ont été confiés par les héritiers prétendus des successions [LC] et [JC].

Or, celui qui agit en justice doit justifier d'un intérêt direct tendant à la réalisation d'un droit propre ou d'une prérogative personnelle.

En l'espèce, la SARL CGOI invoque une qualité de mandataire successoral dont elle ne dispose pas en vertu de l'article 813 du code civil, relatif en réalité à l'administration de la succession par un mandataire conventionnel alors que le litige actuel porte d'abord sur la dévolution successorale alléguée puis la revendication du patrimoine immobilier des défunts.

S'il est incontestable que la SARL CGOI a un intérêt patrimonial certain à la réussite de l'action des personnes lui ayant confié un mandat général, il est tout aussi constant que cet intérêt est indirect par rapport à l'action en revendication initiée à l'encontre des intimés propriétaires des parcelles en cause, quels qu'ils soient, et inexistant à l'égard de l'action en responsabilité dirigée contre le notaire.

En conséquence, l'ordonnance querellée doit être confirmée en ce qu'elle a constaté le défaut d'intérêt à agir de la SARL CGOI à titre personnel.

Sur l'appel incident des Consorts [NW] :

Les Consorts [NW] formant appel incident, sollicitent la condamnation solidaire de la SCCV PETIT ETANG, l'agence IMMO [Localité 26], et du Cabinet de généalogie à payer à chacun des consorts [NW] la somme de 20.000 euros pour préjudice résultant des fraudes dénoncées.

Ils réclament aussi la condamnation, à titre reconventionnel, in solidum de Maître [JP] [SD] et la SCCV PETIT ETANG à payer aux consorts [NW] la somme de 80 000 euros indûment retenue correspondant au solde du prix de la vente de leur terrain.

La SCCV PETIT ETANG, la société CGOI, n'a pas répliqué à ces prétentions.

Si Maître [SD], dans son dispositif, conclut au rejet de toutes les prétentions des Consorts [NW], il n'évoque nullement dans la partie DISCUSSION de ses conclusions, les demandes dirigées contre lui par les Consorts [NW].

Sur ce,

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En l'espèce, la lecture de l'ordonnance querellée n'établit pas que les Consorts [NW] aient présenté en première instance des demandes de dommages et intérêts à l'encontre de la SCCV PETIT ETANG, de l'agence IMMO [Localité 26], du Cabinet de généalogie et de Maître [JP] [SD].

Outre le fait que ces demandes sont nouvelles, elles sont manifestement sans lien avec la question posée relative à la recevabilité de l'intervention volontaire de la CGOI dans l'instance introduite par la SCCV PETIT ETANG.

En conséquence, ces demandes seront déclarées d'office irrecevables.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

L'appelante supportera les dépens et les frais irrépétibles des parties constituées en appel en plus de ceux déjà alloués en première instance.

La SCCV PETIT ETANG et les Consorts [NW] doivent être déboutés de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt rendu par défaut mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

DEBOUTE Mme [NW] [KP] [BS], épouse [AX], Mme [NW] [HW] [UJ], M. [NW] [V] [CO], M. [NW] [NJ] [XX], Mme [NW] [KP] [U] , épouse [EW], M. [NW] [A] [N] et M. [NW] [GC], de leur demande de mise hors de cause ;

REJETTE l'exception de nullité de la déclaration d'appel ;

CONFIRME l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

DEBOUTE la SCCV PETIT ETANG et les Consorts [NW], soit Mme [NW] [KP] [BS], épouse [AX], Mme [NW] [HW] [UJ], M. [NW] [V] [CO], M. [NW] [NJ] [XX], Mme [NW] [KP] [U] , épouse [EW], M. [NW] [A] [N] et M. [NW] [GC], de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN (CGOI) à payer à Maître [JP] [SD] la somme de 3.000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL CABINET GENEALOGIQUE DE L'OCEAN INDIEN (CGOI) aux dépens.