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Décisions

CA Nîmes, 2e ch. C, 10 octobre 2024, n° 24/00192

NÎMES

Arrêt

Autre

CA Nîmes n° 24/00192

10 octobre 2024

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 24/00192 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JB4M

SI

PRESIDENT DU TJ DE NIMES

20 décembre 2023 RG :23/00387

[H]

[U]

C/

[N]

[N]

[N]

[N]

S.A.S. NORD SUD IMMO

Grosse délivrée

le

à Selarl Clergerie Semmel ...

Selarl Lamy Pomies Richaud

SCO Lobier & associés

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section C

ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2024

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Président du TJ de NIMES en date du 20 Décembre 2023, N°23/00387

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Sandrine IZOU, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre

Laure MALLET, Conseillère

Sandrine IZOU, Conseillère

GREFFIER :

Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 20 Juin 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 26 Septembre 2024 prorogé à ce jour.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTS :

M. [I] [D] [H]

né le 29 Avril 1971 à [Localité 12]

[Adresse 7]

[Localité 11]

Représenté par Me Julien SEMMEL de la SELARL CLERGERIE - SEMMEL - SALAUN - KAUTZMANN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Mme [M] [G] [U] épouse [H]

née le 16 Août 1972 à [Localité 12]

[Adresse 7]

[Localité 11]

Représentée par Me Julien SEMMEL de la SELARL CLERGERIE - SEMMEL - SALAUN - KAUTZMANN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉS :

M. [W] [S] [X] [N]

né le 22 Février 1953 à [Localité 19] (BELGIQUE)

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Georges POMIES RICHAUD de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Alexis SEMET, Plaidant, avocat au barreau de LYON

M. [T] [J], [V] [N]

né le 29 Septembre 1974 à [Localité 14]

[Adresse 16]

[Localité 18] SUISSE

Représenté par Me Georges POMIES RICHAUD de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Alexis SEMET, Plaidant, avocat au barreau de LYON

Mme [O] [V] [N] épouse [K]

née le 29 Septembre 1974 à [Localité 13]

[Adresse 9]

[Localité 8]

Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Alexis SEMET, Plaidant, avocat au barreau de LYON

M. [F] [N]

né le 27 Novembre 1987 à [Localité 17]

[Adresse 10]

[Adresse 10]

[Localité 17]

Représenté par Me Georges POMIES RICHAUD de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Alexis SEMET, Plaidant, avocat au barreau de LYON

S.A.S. NORD SUD IMMO SAS au capital de 20 760,00 €, immatriculée au RCS de AIX EN PROVENCE sous le n° 789 995 107 exerçant sous l'enseigne 'Dr House', prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 1]

Représentée par Me Raphaël LEZER de la SCP LOBIER & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Affaire fixée en application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre, le 10 octobre 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DU LITIGE

M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] sont propriétaires d'une maison d'habitation située [Adresse 7], à [Localité 11], parcelle cadastrée section YC n° [Cadastre 5], dont ils ont fait l'acquisition auprès de Messieurs [W], [T], [F] [N] et Mme [O] [N], par acte notarié en date du 26 juillet 2022.

Ce bien a été vendu par l'intermédiaire de l'agence immobilière SAS Nord Sud Immo, exerçant sous le nom commercial Dr House.

Par courrier en date du 21 octobre 2022, M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] ont alerté M. [L] [Y], agent immobilier, ayant conclu la vente, d'un certain nombre de désordres et de l'absence de réalisation de travaux qui devaient, selon eux, être réalisés.

Par actes de commissaire de justice en date des 23 mai 2023, 25 mai 2023, 30 mai 2023, 1er juin 2023, et 13 juillet 2023, M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] ont fait assigner M. [W] [N], M. [T] [N], Mme [O] [N], M. [F] [N] et la SAS Nord Sud Immo devant la Présidente du tribunal judiciaire de Nîmes, statuant en référé, aux fins de voir ordonner une expertise, au visa de l'article 145 du code de procédure civile afin de constater les désordres affectant la maison, préciser leur origine et de dire qui en est responsable, et aux fins de condamner solidairement les défendeurs, au visa de l'article 835 alinéa 2, à leur payer une somme de 8.000 euros à titre de provision.

Par ordonnance contradictoire du 20 décembre 2023, le président du tribunal judiciaire de Nîmes a :

dit n'y avoir lieu à référé ;

débouté M. [W] [N], M. [T] [N], Mme [O] [N], M. [F] [N] de leur demande de dommages et intérêts ;

dit que M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] conserveront la charge des dépens ;

Rappelé que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit.

Par déclaration du 12 janvier 2024, M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] ont interjeté appel de cette ordonnance, en toutes ses dispositions.

Au terme de leurs dernières conclusions notifiées le 23 mai 2024, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de leurs moyens et prétentions, M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H], appelants, demandent à la cour, au visa des articles 145 et 835 al.2 du code de procédure civile et des articles 1641 et 1615 et suivants du code civil, de :

- déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par M. et Mme [H],

Y faisant droit,

- infirmer le jugement rendu par le Juge des référés de Nîmes le 20 décembre 2023 en toutes ses dispositions,

Et, statuant à nouveau,

- renvoyer les parties à se pouvoir ainsi qu'elles aviseront,

Mais dès à présent,

- désigner tel expert qu'il appartiendra avec mission habituelle en la matière et notamment de :

- Se rendre sur les lieux sis [Adresse 7],

- Prendre connaissance du dossier, et se faire remettre tout document utile à son information, à charge d'en indiquer les sources,

- Recueillir les explications des parties et se faire communiquer par elles tous documents ou pièces qu'il estimera nécessaire à l'accomplissement de sa mission, et entendre, si besoin est, tous sachants,

- Recueillir tous éléments de nature à permettre, le cas échéant, à la juridiction saisie de déterminer la qualité et le rôle précis de chacune des parties,

- Visiter l'immeuble litigieux, décrire les désordres allégués dans l'acte introductif d'instance et ceux décrits dans les procès-verbaux de constat de Me [R], huissier de justice, en date des 17 janvier 2023 et 18 janvier 2024, et en déterminer la nature exacte, l`étendue, l'origine et les conséquences,

- Rechercher et indiquer leurs causes en donnant toutes explications techniques utiles sur les moyens d'investigations employés,

- Rechercher l'existence de désordres existant antérieurement à la vente, les décrire, et dire si ces désordres constituent des vices cachés au sens de l'article 1641 du Code civil, ou une absence de livraison conforme au titre de l'article 1615 du même Code,

- Dire si les désordres éventuellement relevé sont de nature à rendre le bien impropre à sa destination ou en compromettent la solidité,

- Dire si les désordres existaient antérieurement à la vente intervenue entre les parties, et si les vendeurs pouvaient en avoir connaissance,

- Dire si l'agent immobilier pouvait ignorer les vices de la chose vendue,

- Indiquer les travaux propres à remédier aux désordres relevés et à leurs conséquences dommageables, en en évaluer le coût,

- Dire si du fait de ces travaux il résulte une moins-value de l'immeuble,

- Préciser les travaux propres à y remédier, en évaluer le coût et la durée, et les contraintes pouvant en résulter pour les occupants, au besoin en s'appuyant sur des devis établis par des entreprises tierces en précisant, le cas échéant, la nécessité de faire appel à un maître d''uvre dont le coût d'intervention sera également à chiffrer,

- Donner son avis sur les ouvrages ou les parties d'ouvrages sur lesquels devraient porter les réfections,

- Fournir tous éléments permettant d'apprécier, le cas échéant, les responsabilités encourues et les préjudices subis, y compris le préjudice de jouissance et les préjudices financiers,

- En cas d'urgence reconnue par l'expert, autoriser la partie demanderesse à faire exécuter à ses frais avancés pour le compte de qui il appartiendra, les travaux qu'il estimera indispensables, et qu'il aura pris soin de détailler et de chiffrer, sous la direction d'un maître d''uvre choisi par elle, par des entreprises qualifiées de son choix.

- Préciser les travaux qui devront être réalisés pour remédier aux désordres, pour terminer les constructions,

- S'expliquer techniquement dans le cadre des chefs de sa mission ci-après sur les dires et observations des parties qu'il aura recueillir après leur avoir indiqué à quel point il en est arrivé dans ses investigations, en faisant précéder ses conclusions de la diffusion d'une note de synthèse et d'un pré-rapport ;

- Du tout dresser rapport qui sera déposé au greffe du Tribunal Judiciaire en prenant en compte les dires des parties.

- Dire qu'il en sera référé en cas de difficulté,

- Fixer la consignation à valoir sur les honoraires de l'Expert,

- dire que l'expert exécutera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248 et 263 à 284 du Code de procédure civile ;

- dire qu'en cas d'empêchement, refus ou retard de l'expert il pourra être pourvu à son remplacement par voie de simple ordonnance à la requête de la partie la plus diligente,

- condamner in solidum M. [W] [N], M. [T] [N], M. [F] [N], Mme [O] [N] épouse [E] et la SAS Nord Sud Immo à payer à M. [I] et Mme [M] [H] une somme de 8.000 euros à titre de provision ad litem à valoir sur les frais d'expertise dont ils vont devoir faire l'avance,

- débouter M. [W] [N], M. [T] [N], M. [F] [N], Mme [O] [N] épouse [E] et la SAS Nord Sud Immo de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- entendre réserver les dépens.

Au soutien de leur appel, M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] indiquent que s'il appartient au demandeur, souhaitant voir ordonner une mesure d'instruction avant procès, de rapporter la preuve d'un motif légitime pour la mise en 'uvre de ladite mesure, il ne lui appartient pas pour autant d'établir lui-même et avec certitude l'existence d'un vice caché. Ils ajoutent que pour être considéré comme apparent, le vice doit être connu par l'acquéreur. Ils contestent ainsi avoir eu connaissance de certains vices affectant le bien. Ils évoquent, en outre, l'obligation de délivrance dont doit garantie le vendeur. S'agissant de l'agent immobilier, ils estiment qu'il est tenu d'une obligation d'information et de conseil envers l'acquéreur profane, et que l'omission volontaire d'un agent immobilier de renseigner un acquéreur sur l'existence d'un vice affectant l'immeuble qu'il était chargé de vendre caractérise la faute commise par cet agent et engage sa responsabilité envers l'acquéreur.

Ils justifient leur demande d'expertise judiciaire par la présence de nombreux vices antérieurs et préexistants à la vente, affectant la villa, et dont la mesure d'instruction permettra notamment d'en déterminer l'origine ainsi que les préjudices subis et les éventuels les manquements de chacun.

Concernant les désordres, ils font état de problèmes d'infiltration, d'évacuation des toits-terrasses, de problèmes électriques et de chauffage outre d'autres désordres.

Ils sollicitent une provision ad litem, revenant sur le comportement des vendeurs qui auraient dissimulé ces désordres lors de la vente et qui ont fait preuve d'inertie lors des tentatives de résolution amiable.

M. [W] [N], M. [T] [N], Mme [O] [N] et M. [F] [N], en leur qualité d'intimés, par conclusions en date du 12 juin 2024, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, demandent à la cour, au visa des articles 145 et 835 du code de procédure civile, des articles 1603 et suivants, 1641 et suivants, 1991 et suivants du code civil, de :

- Déclarer M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] recevables et bien fondés en leur appel incident de l'ordonnance de référé rendue le 20 décembre 2023 par le Juge des référés du tribunal judiciaire de Nîmes ;

Y faisant droit,

Infirmer l'ordonnance sus énoncée en ce qu'elle a :

« Déboute M. [W] [N], M. [T] [N], Mme [O] [N], M. [F] [N] de leur demande de dommages et intérêts » ; Et statuant à nouveau,

A titre principal :

Condamner solidairement Mme [M] [H] et M. [I] [H] à verser une somme de 2.000,00 € à M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Confirmer pour le surplus l'ordonnance de référé déférée en ses dispositions non contraires aux présentes ;

Débouter les époux [H] de leur demande d'expertise judiciaire ;

Débouter les époux [H] de leur demande de condamnation de M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] au versement d'une provision ad litem ;

Condamner solidairement Mme [M] [H] et M. [I] [H] à verser une somme de 3.500,00 € à M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner solidairement Mme [M] [H] et M. [I] [H] aux entiers dépens de l'instance ;

A titre subsidiaire :

Juger que l'expertise judiciaire qui pourrait être ordonnée le sera aux frais avancés de Mme [M] [H] et de M. [I] [H] ;

Débouter Mme [M] [H] et M. [I] [H] de leur demande de condamnation de M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] au versement d'une provision ad litem ;

Débouter Mme [M] [H] et M. [I] [H] de leur demande tendant à voir la mission de l'Expert comporter le chef de mission suivant : « - Rechercher l'existence de désordres existant antérieurement à la vente, les décrire, et dire si ces désordres constituent des vices cachés au sens de l'article 1641 du Code civil, ou une absence de livraison conforme au sens de l'article 1615 du même Code » ;

Condamner solidairement Mme [M] [H] et M. [I] [H] aux entiers dépens de l'instance ;

A titre infiniment subsidiaire :

Rejeter la demande de mise hors de cause de la société Nord Sud Immo,

Condamner la société Nord Sud Immo à relever et garantir M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre ;

Débouter la société Nord Sud Immo de sa demande de condamnation de M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

Statuer ce que de droit sur les dépens.

A l'appui de leurs écritures, les consorts [N] exposent n'avoir rien caché ou dissimulé à leurs acquéreurs et ne s'être jamais engagés à réaliser des travaux avant la vente du bien litigieux, expliquant être profanes en matière de vente immobilière et avoir mandaté la société Nord Sud Immo pour les assister dans la vente.

Ils reprochent aux appelants de ne pas rapporter la preuve de la matérialité des désordres qu'ils allèguent, ni que ces désordres pourraient caractériser un vice caché ou un défaut de délivrance conforme. Ils ajoutent s'agissant des désordres électriques que des diagnostics ont été réalisés.

Ils sollicitent enfin la confirmation du rejet de la demande de provision ad litem puisque les demandes des époux [H], fondées sur la garantie de vices cachés et sur le défaut de délivrance conforme, se heurtent à de multiples contestations sérieuses, au mépris des dispositions de l'article 835 du code de procédure civile.

Ils forment par ailleurs un appel incident en ce que l'ordonnance déférée les a déboutés de leur demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre infiniment subsidiaire, ils entendent rappeler que l'agence immobilière doit les garantir, ayant fait preuve de négligence, ayant été mandatée par eux pour informer les acquéreurs des désordres existant sur le bien.

La SAS Nord Sud Immo, intimée, par conclusions notifiées le 15 avril 2024, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, demande à la cour, au visa de l'article 145 du code de procédure civile, de :

Confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé du 20 décembre 2023,

Débouter les époux [H] comme les consorts [N] de toutes leurs demandes en ce qu'elles sont dirigées contre la société Nord Sud Immo,

Condamner in solidum les époux [H] et les consorts [N] à payer à la société Nord Sud Immo 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Les condamner aux entiers dépens.

A l'appui de ses écritures, la SAS Nord Sud Immo soutient que sa responsabilité ne peut être recherchée au titre de la réalisation des travaux d'une part, et que la mesure d'expertise judiciaire sollicitée au titre de l'article 145 du code de procédure civile est dépourvue d'intérêt légitime à son encontre.

Elle indique également que les appelants ne démontrent pas la commission d'une faute dans l'exécution de son mandat ayant concouru aux préjudices qu'ils allèguent, rappelant que l'agent immobilier ne peut être responsable de désordres non apparents que s'il est démontré qu'il avait connaissance des vices.

Elle conclut que les désordres avancés étaient nécessairement visibles au moment de la vente, et que la caractérisation de la responsabilité de l'agence immobilière est un débat qui échappe à la compétence du juge des référés, se heurtant en tout état de cause à une contestation sérieuse. Elle demande sa mise hors de cause.

L'affaire a été fixée à l'audience du 20 juin 2024, pour être mise en délibéré, par mise à disposition au greffe, au 26 septembre 2024, prorogé au 10 octobre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Il ne ressort pas des pièces du dossier d'irrecevabilité de l'appel que la cour devrait relever d'office et les parties n'élèvent aucune discussion sur ce point.

1) Sur la demande d'expertise

Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, 's'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé'.

Une telle demande suppose l'existence d'un motif légitime, c'est à dire d'un litige crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse et qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur, dont l'objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d'autrui. Elle doit être en outre pertinente et utile.

Si le demandeur à la mesure d'instruction n'a pas à démontrer l'existence des faits qu'il invoque puisque cette mesure est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d'éléments rendant crédibles ses suppositions et démontrer que le litige potentiel n'est pas manifestement voué à l'échec, la mesure devant être de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur.

M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] se prévalent de plusieurs désordres affectant leur propriété, sollicitant une expertise judiciaire afin que soient déterminées les causes de ces désordres et que soient évalués les travaux nécessaires afin d'y mettre un terme.

Ils déplorent d'importantes infiltrations dans leur salle à manger mais également évoquent l'apparition d'infiltrations dans d'autres pièces, s'interrogeant sur le problème d'évacuation des eaux stagnantes des toits terrasses et leur étanchéité outre la présence de moisissures dans la buanderie.

Ils font valoir que la pompe à chaleur présenterait un dysfonctionnement et ne serait pas adaptée et que l'installation électrique présenterait des désordres. Ils font état, enfin, d'un problème de fissure du mur en pierre du salon ainsi que la fissuration de deux baies vitrées.

Les intimés font valoir que s'agissant du plafond de la salle à manger, les acheteurs ont été prévenus lors de leur visite d'un problème d'étanchéité affectant la douche située au-dessus et que concernant les toits terrasses, il n'est pas rapporté la preuve que ces derniers seraient à l'origine d'infiltrations. Il est également fait état d'un problème dans la buanderie avec des infiltrations d'eau dont ont été avisés M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] lors de la vente, Monsieur [N] ayant laissé un aspirateur à eau. Quant aux problèmes électriques, ils indiquent que les diagnostics ont été faits au moment de la vente et que les installations sont conformes. Ils précisent que la société Eco clim n'aurait pas les compétences pour remettre en cause l'installation du chauffage effectué par un bureau d'étude. Quant au surplus, M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] estiment que ces désordres sont mineurs et que par ailleurs, les acheteurs en avaient eu connaissance avant la vente.

Il est produit par les appelants :

- un constat d'un commissaire de justice en date du 17 janvier 2023 qui relève des peintures et enduits endommagés sur le plafond de la salle à manger ; une fissuration dans le plafond au dessus de la salle à manger, sous la douche avec écoulement d'eau lorsqu'elle est utilisée ; des traces d'auréoles au plafond dans la cage d'escalier ; le toit terrasse au dessus de l'entrée et de la salle à manger complètement immergé ; des moisissures et remontées humides dans la buanderie ; une baie vitrée brisée ;

- un second constat d'un commissaire de justice en date du 18 janvier 2024 qui retrouve au niveau du faux plafond de la salle à manger des traces de moisissures ainsi que des traces de calcaire sur la conduite PVC ; des traces de reprise sur les toits terrasses avec de l'eau stagnante sur chacun, les évacuations étant sèches, avec l'immersion d'un fil électrique et des gaines ouvertes ; dans la chambre au 1er étage, sous le toit terrasse, des auréoles jaunâtres avec des cloques de peinture ; des traces de brûlure sur la boîte de dérivation et sur un disjoncteur dans le garage ainsi que la présence d'un message d'erreur sur la pompe à chaleur ; une baie vitrée brisée ;

- un message de Monsieur [P], inscrit au registre des entreprises dans le domaine de l'étanchéité, aux appelants, confirmant être intervenu suite à une fuite (sur le toit) il y a deux ans, alors que Monsieur [N] avait mis en vente sa maison ;

- un message de Monsieur [Z], gérant de la société éco clim ainsi qu'une attestation de sa part, indiquant avoir dépanné la pompe à chaleur il y a quelques années car en panne et ayant constaté qu'elle était surdimensionnée, préconisant son remplacement par une autre 3 fois moins puissante et expliquant le message d'erreur de la pompe à chaleur constaté par le commissaire de justice, comme étant une erreur de communication entre les cartes électroniques,

- une facture d'électricité camarguaise au nom de M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] du 7 février 2023 pour une reprise aux normes du tableau général.

M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] se contentent d'alléguer qu'ils auraient informés leurs acheteurs de certains désordres.

Or, il ressort des éléments produits qu'un désaccord existe entre les parties relatif au dégât des eaux dans la salle à manger qui aurait ou non été réglé et dont les acquéreurs auraient ou non été informés, mais également quant à l'importance des écoulements dans la buanderie. Par ailleurs, d'autres traces d'infiltration sont apparues au plafond de la salle à manger depuis la vente mais également dans d'autres zones de la maison (cage d'escalier, chambre, buanderie), ces désordres persistant pour certains et ayant pu s'aggraver, au vu des constations réalisées et pouvant être liés à plusieurs causes (étanchéité des toits terrasses, étanchéité de la salle d'eau...) qu'il convient de rechercher.

Il est tout autant établi que M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] ont rencontré des problèmes électriques ayant nécessité l'intervention d'un professionnel et ce malgré la réalisation de diagnostics et que la pompe à chaleur dysfonctionne, la question de son remplacement n'étant pas minime.

Quant aux autres désordres, il apparaît au vu des constats qu'à chaque intervention, l'auxiliaire de justice mandaté a constaté qu'une baie vitrée était brisée et ce dans deux lieux différents. M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] ont pu communiquer une facture au nom de Monsieur [N] pour un remplacement d'une fenêtre en mai 2021, permettant de s'interroger sur la récurrence de ces bris de fenêtres et dont il apparaît nécessaire, là encore, de rechercher la cause.

S'agissant du mur du salon, si M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] ont pu dans leur courrier du mois d'octobre 2022 préciser qu'ils avaient vu l'existence de fissures lors de leur première visite, ils exposent que celles-ci se sont agrandies, ces éléments ressortant du constat du 17 janvier 2023.

Tenant ces éléments et la nécessité pour M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] de connaître avec précision les causes des désordres affectant leur propriété afin de pouvoir obtenir la réalisation de travaux nécessaires pour les faire cesser dans le cadre d'une éventuelle action au fond, il convient de dire que ces derniers justifient d'un intérêt légitime à voir désigner un expert.

La mission de l'expert sera indiquée au dispositif, étant précisé qu'une telle mesure ne préjuge en aucun cas de la décision au fond et qu'elle est ordonnée aux frais avancés de la partie qui la requiert.

Quant à la SAS Nord Sud Immo, celle-ci ne sollicitant pas sa mise hors de cause, au terme du dispositif de ses conclusions, l'expertise sera ordonnée au contradictoire des parties, M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] entendant rechercher une éventuelle responsabilité de son mandataire s'ils étaient condamnés, l'intimée ayant tout intérêt dès lors à être appelée aux opérations d'expertise.

La décision ayant débouté M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] de leur demande d'expertise est, dès lors, infirmée.

2) Sur la demande de provision ad litem

M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] sollicitent une provision ad litem pour faire face aux frais d'expertise à venir, tenant au comportement des vendeurs et à leur refus de rechercher des solutions amiables, exposant en outre avoir des frais importants grevant le bien.

Les dispositions de l'article 835, alinéa 2, du Code de procédure civile selon lesquelles, dans les cas où l'existence d'une obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire, sont applicables à la provision pour frais d'instance.

A ce stade de la procédure, le droit à indemnisation de M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] est sérieusement contestable, les responsabilités de M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] et la SAS Nord Sud Immo n'étant pas suffisamment établies, ce qui relève de la compétence du juge du fond.

L'ordonnance critiquée sera confirmée à ce titre.

3) Sur les demandes au titre des frais irrépétibles et des dépens

La décision de première instance ayant débouté M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] de leur demande de condamnation de M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] au paiement d'une indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sera confirmée.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] et la SAS Nord Sud Immo seront, en conséquence, respectivement déboutées de leurs prétentions de ce chef en cause d'appel.

Les dépens seront laissés à la charge des appelants puisqu'ils sont à l'origine de la demande de référé-expertise, tant s'agissant des dépens de première instance que d'appel, la décision de première instance étant confirmée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en référé et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance de référé rendue le 20 décembre 2023 par le président du tribunal judiciaire de Nîmes sauf en ce qu'elle a rejeté la demande d'expertise,

L'infirme de ce seul chef,

Statuant à nouveau,

Ordonne une expertise,

Commet en qualité d'expert :

Monsieur [A] [B]

[Adresse 4]

mèl : [Courriel 15]

avec pour mission de :

- Se rendre sur les lieux sis [Adresse 7],

- Prendre connaissance du dossier, et se faire remettre tout document utile à son information, à charge d'en indiquer les sources,

- Recueillir les explications des parties et se faire communiquer par elles tous documents ou pièces qu'il estimera nécessaire à l'accomplissement de sa mission, et entendre, si besoin est, tous sachants,

- Visiter l'immeuble litigieux, décrire les désordres tenant aux infiltrations, aux problèmes électriques et de chauffage, aux bris de fenêtres et au mur du salon, en déterminer la nature exacte, l'étendue, l'origine et les conséquences,

- Indiquer leur date d'apparition,

- Dire si le vice était caché au moment de la vente,

- Dire si les désordres éventuellement relevés sont de nature à rendre le bien impropre à sa destination ou en compromettent la solidité,

- Fournir tout élément technique pour déterminer les éventuelles responsabilités encourues à l'origine des dommages subis par le requérant,

- Indiquer les travaux propres à remédier aux désordres relevés et à leurs conséquences dommageables, en en évaluer le coût,

- Préciser les travaux propres à y remédier, en évaluer le coût et la durée, et les contraintes pouvant en résulter pour les occupants, au besoin en s'appuyant sur des devis établis par des entreprises tierces en précisant, le cas échéant, la nécessité de faire appel à un maître d''uvre dont le coût d'intervention sera également à chiffrer,

- S'expliquer techniquement dans le cadre des chefs de sa mission ci-après sur les dires et observations des parties qu'il aura recueillir après leur avoir indiqué à quel point il en est arrivé dans ses investigations, en faisant précéder ses conclusions de la diffusion d'une note de synthèse et d'un pré-rapport ;

- rapporter au tribunal l'accord éventuel qui pourrait intervenir entre les parties et à défaut, déposer son rapport dans les délais les plus brefs,

- apporter tous les éléments de nature à éclairer le tribunal sur la résolution du litige.

Dit que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile, qu'en particulier, il pourra recueillir les déclarations de toutes personnes informées, qu'il pourra s'adjoindre tout spécialiste de son choix à charge d'en informer préalablement le juge commis ci-après ;

Dit que M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] verseront par chèque libellé à l'ordre du régisseur d'avances du tribunal judiciaire de Nîmes une consignation de 2.500 € à valoir sur la rémunération de l'expert et ce dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision ; que ce chèque sera adressé, avec les références du dossier au greffe du tribunal judiciaire de Nîmes, service des référés,

Rappelle qu'à défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l'expert sera caduque selon les modalités fixées par l'article 271 du code de procédure civile,

Dit que l'expert devra déposer auprès du greffe du tribunal judiciaire de Nîmes, service des référés, un rapport détaillé de ses opérations dans les quatre mois de sa saisine et qu'il adressera copie complète de ce rapport, y compris la demande de fixation de rémunération à chacune des parties, conformément aux dispositions de l'article 173 du code de procédure civile,

Précise qu'une photocopie du rapport sera adressé à l'avocat de chaque partie,

Précise que l'expert doit mentionner dans son rapport l'ensemble des destinataires à qui il l'aura adressé,

Y ajoutant,

Déboute M. [W] [N], Mme [O] [N], M. [T] [N] et M. [F] [N] de leur demande de condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SAS Nord Sud Immo de leur demande de condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [I] [H] et Mme [M] [U] épouse [H] aux dépens d'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,