Décisions
CA Versailles, ch. com. 3-2, 15 octobre 2024, n° 24/01948
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 4GA
Chambre commerciale 3-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 15 OCTOBRE 2024
N° RG 24/01948 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WN3K
AFFAIRE :
SARL VIGILIA SÉCURITÉ PRIVÉE
C/
[L] [R]
...
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 07 Mars 2024 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° RG : 2024R00013
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU
Me Frédérique FARGUES
PG
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANTE
SARL VIGILIA SÉCURITÉ PRIVÉE
Ayant son siège
[Adresse 4]
[Localité 5]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 N° du dossier 005814
Plaidant : Me Marie-valentine GERONIMI, avocat au barreau de PARIS - vestiaire : K 170
****************
INTIMES
Monsieur [L] [R]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentant : Me Frédérique FARGUES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 138
Plaidant : Me Delphine TOMEZYK substitué par Me Denis SMADJA de l'ASSOCIATION SMADJA TOMEZYK AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 0086
LE PROCUREUR GENERAL
POLE ECOFI - COUR D'APPEL DE VERSAILLES
[Adresse 2]
[Localité 3]
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 02 Septembre 2024, Monsieur Cyril ROTH, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Ronan GUERLOT, Président,
Monsieur Cyril ROTH, Président,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
En la présence du Ministère Public, représenté par Monsieur Henri GENIN, Avocat Général dont l'avis du 14 mai 2024 a été transmis le même jour au greffe par la voie électronique.
EXPOSE DU LITIGE
Le 19 décembre 2017, la cour d'appel de Paris a condamné la société Vigilia Sécurité Privée (l'employeur) à verser à M. [R] (le salarié) diverses sommes, d'un total de 50 102, 42 euros.
Le 5 juin 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a placé la société Vigilia Sécurité Privée en redressement judiciaire.
Le 26 juin 2019, il arrêté en sa faveur un plan de continuation d'une durée de 9 ans ne prenant pas en compte la créance du salarié, désigné M. [T] en qualité de commissaire à l'exécution du plan, ainsi qu'un mandataire judiciaire, en la personne de M. [X].
Le 16 novembre 2022, infirmant un jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre du 6 juillet 2020, la cour d'appel de Versailles a ordonné l'inscription de la créance du salarié sur l'état des créances et fait injonction à M. [X], mandataire judiciaire, d'y procéder.
Le 2 novembre 2023, à la requête du salarié, le président du tribunal de commerce de Nanterre a désigné la société AJRS en qualité de mandataire ad hoc afin de procéder à l'inscription de la créance.
Le 28 décembre 2023, la société Vigilia Sécurité Privée a assigné M. [R] en référé devant ce juge en rétractation de l'ordonnance du 2 novembre 2023.
Le 7 mars 2024, ce juge a :
- rejeté la demande de rétractation ;
- confirmé l'ordonnance du 2 novembre 2023 ;
- condamné la société Vigilia Sécurité Privée à payer à M. [R] la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- laissé les dépens à la charge de la société Vigilia Sécurité Privée.
Le 21 mars 2024, la société Vigilia Sécurité Privée a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.
Par dernières conclusions du 29 juillet 2024, l'employeur demande à la cour d'infirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions ;
Et, statuant à nouveau, de :
- rétracter l'ordonnance du 2 novembre 2023 ;
- rejeter l'ensemble des demandes formulées par M. [R] ;
- condamner M. [R] à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par dernières conclusions du 20 mai 2024, M. [R] demande à la cour de :
- débouter la société Vigilia Sécurité Privée de l'intégralité de ses demandes ;
- confirmer l'ordonnance de référé entreprise en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
- condamner la société Vigilia Sécurité Privée à lui verser la somme complémentaire en cause d'appel de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Par avis du 14 mai 2024, le ministère public suggère à la cour de confirmer l'ordonnance entreprise.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 26 août 2024.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.
MOTIFS
Sur la demande de rétractation
Pour désigner un mandataire ad hoc, le président du tribunal de commerce de Nanterre a, dans son ordonnance du 2 novembre 2023, qui fait corps avec la requête présentée par le salarié, retenu en substance que la mission du mandataire judiciaire désigné le 26 juin 2019 était terminée, que toute mesure d'exécution forcée était exclue contre la société Vigilia Sécurité Privée en raison du plan de continuation dont elle faisait l'objet, de sorte que la désignation d'un mandataire ad hoc était nécessaire à l'exécution de l'arrêt du 16 novembre 2022 et à l'inscription de la créance litigieuse.
L'employeur fait valoir que le salarié n'a pas fait état, dans sa requête, de circonstances de nature à justifier qu'il soit procédé non contradictoirement au sens de l'article 493 du code de procédure civile ; que l'ordonnance rendue ne le justifie pas plus ; que la désignation litigieuse n'est pas une simple mesure d'administration judiciaire ; que cette mesure lui fait grief ; qu'il n'existait pas d'urgence au sens de l'article 875 du code de procédure civile justifiant une atteinte à la contradiction ; que selon l'article L. 621-7 du code de commerce, la demande de remplacement du mandataire judiciaire ne peut émaner du créancier ; que selon l'article L. 624-1 du code de commerce, seul le mandataire judiciaire peut établir la liste des créances ; que l'ordonnance est irrégulière pour ne pas lui avoir été signifiée.
Le salarié soutient que l'employeur n'est pas une partie à laquelle l'ordonnance est opposée au sens de l'article 495 du code de procédure civile ; que cette ordonnance a été dûment notifiée au mandataire ad hoc désigné et n'avait pas à l'être à l'employeur ; que l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce a pour seul objet l'exécution des arrêts du 19 décembre 2017 et 16 novembre 2022, à laquelle l'employeur fait obstacle sous le couvert d'une prétendue atteinte au principe de la contradiction.
Réponse de la cour
Selon l'article L. 631-1 du code de commerce, la procédure de redressement judiciaire est notamment destinée à permettre l'apurement du passif.
Selon l'article L. 626-25 de ce code, dans sa rédaction applicable au jour de l'ouverture de la procédure collective en cause, le tribunal nomme, en cas de plan de redressement, l'administrateur ou le mandataire judiciaire en qualité de commissaire chargé de veiller à l'exécution du plan ; il peut confier à l'administrateur ou au mandataire judiciaire n'ayant pas été nommé en cette qualité une mission d'une durée maximale de vingt-quatre mois.
Aux termes de l'article L. 626-24 de ce code, applicable au plan de redressement par renvoi de l'article L. 631-19, le mandataire judiciaire demeure en fonction pendant le temps nécessaire à la vérification et à l'établissement définitif de l'état des créances.
Aux termes de l'article 874 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce est saisi par requête dans les cas spécifiés par la loi.
Selon l'article 875 de ce code, il peut ordonner sur requête, dans les limites de la compétence du tribunal, toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement.
Les mesures urgentes prévues par ce texte ne peuvent être adoptées par voie de requête que si elles exigent une dérogation au principe de la contradiction, laquelle ne peut être rétablie par une demande de rétractation (Com, 26 janvier 1999, n°96-19.570, publié).
Aux termes de l'article 876-1 du même code, dans les cas prévus par la loi ou le règlement, le président du tribunal de commerce statue selon la procédure accélérée au fond.
Aucun texte ne prévoit la possibilité de saisir le président du tribunal de commerce par voie de requête en vue de la nomination d'un mandataire ad hoc aux fins d'inscription de la créance lorsque celle-ci n'a pas été inscrite à l'état des créances du débiteur bénéficiant d'un plan de redressement, est sanctionnée par une décision de justice et que le mandataire judiciaire a cessé sa mission.
Toutefois, la désignation d'un mandataire ad hoc pour poursuivre les instances en cours lorsque les organes de la procédure collective ont cessé leurs fonctions relève de la juridiction gracieuse au sens de l'article 25 du code de procédure civile (Com, 9 juin 1998, n°96-16.465, publié). Elle peut être attaquée par le recours en rétractation prévu à l'article 496 du code de procédure civile (Com, 30 octobre 2007, n°06-16.129, publié ; Com, 13 novembre 2007, n°06-10.817).
Il doit être considéré que, de la même façon, un créancier peut solliciter selon la procédure gracieuse la nomination d'un mandataire ad hoc aux fins d'inscription de sa créance lorsque celle-ci n'a pas été inscrite à l'état des créances du débiteur bénéficiant d'un plan de redressement, est sanctionnée par une décision de justice et que le mandataire judiciaire a cessé sa mission.
Aux termes de l'article 60 du code de procédure civile, en matière gracieuse, la demande est formée par requête.
Selon l'article 28 du code de procédure civile, en matière gracieuse, le juge peut se prononcer sans débat.
En l'espèce, par un courrier du 4 juillet 2018, le salarié a déclaré sa créance à la procédure collective ouverte à l'égard de l'employeur.
Cette créance a été contestée, de sorte que, le 26 juin 2019, le tribunal de commerce a décidé d'un plan de continuation ne la prenant pas en compte, désigné la société FHB en qualité de commissaire à l'exécution du plan, ainsi qu'un mandataire judiciaire en la personne de M. [X].
Le 3 juillet 2019, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes qui, par son jugement du 6 juillet 2020, a intégralement rejeté ses demandes contre la société Vigilia Sécurité Privée.
Le 16 novembre 2022, retenant que l'action du salarié n'était pas forclose, la cour d'appel de Versailles a infirmé ce jugement en toutes ses dispositions, ordonné l'inscription de la créance sur l'état des créances et fait injonction à M. [X], mandataire judiciaire, d'y procéder.
Il est constant que cette décision irrévocable n'a pu recevoir exécution en raison de la cessation des fonctions du mandataire judiciaire.
Le salarié était en conséquence fondé à solliciter par voie de requête non contradictoire, sans avoir à justifier d'une urgence, la nomination d'un mandataire ad hoc en vue de l'inscription de sa créance à l'état des créances.
L'employeur est recevable à solliciter la rétractation de l'ordonnance procédant à cette nomination, laquelle, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, ne constitue pas une mesure d'administration judiciaire insusceptible de recours.
Mais la demande de rétractation est mal fondée, la nomination critiquée étant le seul moyen de procéder à l'inscription de la créance litigieuse.
Il convient donc de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Sur les demandes accessoires
L'équité commande de laisser les dépens à la charge de l'employeur et d'allouer au salarié l'indemnité de procédure prévue au dispositif.
PAR CES MOTIFS,
la cour, statuant contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamne la société Vigilia Sécurité Privée aux dépens d'appel ;
Condamne la société Vigilia Sécurité Privée à payer à M. [R] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT,
DE
VERSAILLES
Code nac : 4GA
Chambre commerciale 3-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 15 OCTOBRE 2024
N° RG 24/01948 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WN3K
AFFAIRE :
SARL VIGILIA SÉCURITÉ PRIVÉE
C/
[L] [R]
...
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 07 Mars 2024 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° RG : 2024R00013
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU
Me Frédérique FARGUES
PG
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANTE
SARL VIGILIA SÉCURITÉ PRIVÉE
Ayant son siège
[Adresse 4]
[Localité 5]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 N° du dossier 005814
Plaidant : Me Marie-valentine GERONIMI, avocat au barreau de PARIS - vestiaire : K 170
****************
INTIMES
Monsieur [L] [R]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentant : Me Frédérique FARGUES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 138
Plaidant : Me Delphine TOMEZYK substitué par Me Denis SMADJA de l'ASSOCIATION SMADJA TOMEZYK AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 0086
LE PROCUREUR GENERAL
POLE ECOFI - COUR D'APPEL DE VERSAILLES
[Adresse 2]
[Localité 3]
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 02 Septembre 2024, Monsieur Cyril ROTH, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Ronan GUERLOT, Président,
Monsieur Cyril ROTH, Président,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
En la présence du Ministère Public, représenté par Monsieur Henri GENIN, Avocat Général dont l'avis du 14 mai 2024 a été transmis le même jour au greffe par la voie électronique.
EXPOSE DU LITIGE
Le 19 décembre 2017, la cour d'appel de Paris a condamné la société Vigilia Sécurité Privée (l'employeur) à verser à M. [R] (le salarié) diverses sommes, d'un total de 50 102, 42 euros.
Le 5 juin 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a placé la société Vigilia Sécurité Privée en redressement judiciaire.
Le 26 juin 2019, il arrêté en sa faveur un plan de continuation d'une durée de 9 ans ne prenant pas en compte la créance du salarié, désigné M. [T] en qualité de commissaire à l'exécution du plan, ainsi qu'un mandataire judiciaire, en la personne de M. [X].
Le 16 novembre 2022, infirmant un jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre du 6 juillet 2020, la cour d'appel de Versailles a ordonné l'inscription de la créance du salarié sur l'état des créances et fait injonction à M. [X], mandataire judiciaire, d'y procéder.
Le 2 novembre 2023, à la requête du salarié, le président du tribunal de commerce de Nanterre a désigné la société AJRS en qualité de mandataire ad hoc afin de procéder à l'inscription de la créance.
Le 28 décembre 2023, la société Vigilia Sécurité Privée a assigné M. [R] en référé devant ce juge en rétractation de l'ordonnance du 2 novembre 2023.
Le 7 mars 2024, ce juge a :
- rejeté la demande de rétractation ;
- confirmé l'ordonnance du 2 novembre 2023 ;
- condamné la société Vigilia Sécurité Privée à payer à M. [R] la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- laissé les dépens à la charge de la société Vigilia Sécurité Privée.
Le 21 mars 2024, la société Vigilia Sécurité Privée a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.
Par dernières conclusions du 29 juillet 2024, l'employeur demande à la cour d'infirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions ;
Et, statuant à nouveau, de :
- rétracter l'ordonnance du 2 novembre 2023 ;
- rejeter l'ensemble des demandes formulées par M. [R] ;
- condamner M. [R] à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par dernières conclusions du 20 mai 2024, M. [R] demande à la cour de :
- débouter la société Vigilia Sécurité Privée de l'intégralité de ses demandes ;
- confirmer l'ordonnance de référé entreprise en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
- condamner la société Vigilia Sécurité Privée à lui verser la somme complémentaire en cause d'appel de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Par avis du 14 mai 2024, le ministère public suggère à la cour de confirmer l'ordonnance entreprise.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 26 août 2024.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.
MOTIFS
Sur la demande de rétractation
Pour désigner un mandataire ad hoc, le président du tribunal de commerce de Nanterre a, dans son ordonnance du 2 novembre 2023, qui fait corps avec la requête présentée par le salarié, retenu en substance que la mission du mandataire judiciaire désigné le 26 juin 2019 était terminée, que toute mesure d'exécution forcée était exclue contre la société Vigilia Sécurité Privée en raison du plan de continuation dont elle faisait l'objet, de sorte que la désignation d'un mandataire ad hoc était nécessaire à l'exécution de l'arrêt du 16 novembre 2022 et à l'inscription de la créance litigieuse.
L'employeur fait valoir que le salarié n'a pas fait état, dans sa requête, de circonstances de nature à justifier qu'il soit procédé non contradictoirement au sens de l'article 493 du code de procédure civile ; que l'ordonnance rendue ne le justifie pas plus ; que la désignation litigieuse n'est pas une simple mesure d'administration judiciaire ; que cette mesure lui fait grief ; qu'il n'existait pas d'urgence au sens de l'article 875 du code de procédure civile justifiant une atteinte à la contradiction ; que selon l'article L. 621-7 du code de commerce, la demande de remplacement du mandataire judiciaire ne peut émaner du créancier ; que selon l'article L. 624-1 du code de commerce, seul le mandataire judiciaire peut établir la liste des créances ; que l'ordonnance est irrégulière pour ne pas lui avoir été signifiée.
Le salarié soutient que l'employeur n'est pas une partie à laquelle l'ordonnance est opposée au sens de l'article 495 du code de procédure civile ; que cette ordonnance a été dûment notifiée au mandataire ad hoc désigné et n'avait pas à l'être à l'employeur ; que l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce a pour seul objet l'exécution des arrêts du 19 décembre 2017 et 16 novembre 2022, à laquelle l'employeur fait obstacle sous le couvert d'une prétendue atteinte au principe de la contradiction.
Réponse de la cour
Selon l'article L. 631-1 du code de commerce, la procédure de redressement judiciaire est notamment destinée à permettre l'apurement du passif.
Selon l'article L. 626-25 de ce code, dans sa rédaction applicable au jour de l'ouverture de la procédure collective en cause, le tribunal nomme, en cas de plan de redressement, l'administrateur ou le mandataire judiciaire en qualité de commissaire chargé de veiller à l'exécution du plan ; il peut confier à l'administrateur ou au mandataire judiciaire n'ayant pas été nommé en cette qualité une mission d'une durée maximale de vingt-quatre mois.
Aux termes de l'article L. 626-24 de ce code, applicable au plan de redressement par renvoi de l'article L. 631-19, le mandataire judiciaire demeure en fonction pendant le temps nécessaire à la vérification et à l'établissement définitif de l'état des créances.
Aux termes de l'article 874 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce est saisi par requête dans les cas spécifiés par la loi.
Selon l'article 875 de ce code, il peut ordonner sur requête, dans les limites de la compétence du tribunal, toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement.
Les mesures urgentes prévues par ce texte ne peuvent être adoptées par voie de requête que si elles exigent une dérogation au principe de la contradiction, laquelle ne peut être rétablie par une demande de rétractation (Com, 26 janvier 1999, n°96-19.570, publié).
Aux termes de l'article 876-1 du même code, dans les cas prévus par la loi ou le règlement, le président du tribunal de commerce statue selon la procédure accélérée au fond.
Aucun texte ne prévoit la possibilité de saisir le président du tribunal de commerce par voie de requête en vue de la nomination d'un mandataire ad hoc aux fins d'inscription de la créance lorsque celle-ci n'a pas été inscrite à l'état des créances du débiteur bénéficiant d'un plan de redressement, est sanctionnée par une décision de justice et que le mandataire judiciaire a cessé sa mission.
Toutefois, la désignation d'un mandataire ad hoc pour poursuivre les instances en cours lorsque les organes de la procédure collective ont cessé leurs fonctions relève de la juridiction gracieuse au sens de l'article 25 du code de procédure civile (Com, 9 juin 1998, n°96-16.465, publié). Elle peut être attaquée par le recours en rétractation prévu à l'article 496 du code de procédure civile (Com, 30 octobre 2007, n°06-16.129, publié ; Com, 13 novembre 2007, n°06-10.817).
Il doit être considéré que, de la même façon, un créancier peut solliciter selon la procédure gracieuse la nomination d'un mandataire ad hoc aux fins d'inscription de sa créance lorsque celle-ci n'a pas été inscrite à l'état des créances du débiteur bénéficiant d'un plan de redressement, est sanctionnée par une décision de justice et que le mandataire judiciaire a cessé sa mission.
Aux termes de l'article 60 du code de procédure civile, en matière gracieuse, la demande est formée par requête.
Selon l'article 28 du code de procédure civile, en matière gracieuse, le juge peut se prononcer sans débat.
En l'espèce, par un courrier du 4 juillet 2018, le salarié a déclaré sa créance à la procédure collective ouverte à l'égard de l'employeur.
Cette créance a été contestée, de sorte que, le 26 juin 2019, le tribunal de commerce a décidé d'un plan de continuation ne la prenant pas en compte, désigné la société FHB en qualité de commissaire à l'exécution du plan, ainsi qu'un mandataire judiciaire en la personne de M. [X].
Le 3 juillet 2019, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes qui, par son jugement du 6 juillet 2020, a intégralement rejeté ses demandes contre la société Vigilia Sécurité Privée.
Le 16 novembre 2022, retenant que l'action du salarié n'était pas forclose, la cour d'appel de Versailles a infirmé ce jugement en toutes ses dispositions, ordonné l'inscription de la créance sur l'état des créances et fait injonction à M. [X], mandataire judiciaire, d'y procéder.
Il est constant que cette décision irrévocable n'a pu recevoir exécution en raison de la cessation des fonctions du mandataire judiciaire.
Le salarié était en conséquence fondé à solliciter par voie de requête non contradictoire, sans avoir à justifier d'une urgence, la nomination d'un mandataire ad hoc en vue de l'inscription de sa créance à l'état des créances.
L'employeur est recevable à solliciter la rétractation de l'ordonnance procédant à cette nomination, laquelle, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, ne constitue pas une mesure d'administration judiciaire insusceptible de recours.
Mais la demande de rétractation est mal fondée, la nomination critiquée étant le seul moyen de procéder à l'inscription de la créance litigieuse.
Il convient donc de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Sur les demandes accessoires
L'équité commande de laisser les dépens à la charge de l'employeur et d'allouer au salarié l'indemnité de procédure prévue au dispositif.
PAR CES MOTIFS,
la cour, statuant contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamne la société Vigilia Sécurité Privée aux dépens d'appel ;
Condamne la société Vigilia Sécurité Privée à payer à M. [R] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT,