CA Paris, Pôle 4 ch. 1, 11 octobre 2024, n° 23/03961
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
Connexion Immobilier (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Sentucq
Conseillers :
Mme Bret, Mme Girard-Alexandre
Avocats :
Me Freville, Me Nakache, Me Havet, Me Loir
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte sous seing privé du 9 mai 2019, Mme [N] [H] a consenti à la société Connexion Immobilier un mandat de vente sans exclusivité, de 12 mois, portant sur un appartement sis [Adresse 3] à [Localité 8], au prix de 2.200.000 €, les honoraires du mandataire, soit 4% du prix, étant payables en sus par l'acquéreur.
Le mandat stipulait que le mandant chargeait le mandataire à l'effet de rechercher un acquéreur et de négocier au mieux de ses intérêts, en vue d'aboutir à la signature d'une promesse de vente ou d'un compromis de vente.
Le 19 novembre 2019, Mme [H] a, par écrit, indiqué modifier le mandat précité en ce que le prix de vente de l'appartement serait désormais fixé à la somme de 2.100.000 €, soit 2.030.000 € net vendeur et 70.000 € d'honoraires.
Le 29 novembre 2019, Mme [J] [M] a transmis à la société Connexion Immobilier une 'offre d'achat au prix de 2.100.000 €, frais dits de notaire à ma charge. Cette offre de prix est sans condition de financement. Vous trouverez ci-dessous les coordonnées de mon notaire ...'.
Par courriel du 4 décembre 2019, la société Connexion Immobilier l'a adressée à Mme [H].
Par courrier non daté, adressé en recommandé et distribué le 14 décembre 2019, la société Connexion Immobilier a confirmé à Mme [H] avoir transmis 'votre décision à l'acquéreur Mme [M] suite à votre refus de régulariser la vente de votre bien ...', en précisant que Mme [M] a 'réalisé une offre d'achat au prix proposé et ce sans condition suspensive d'obtention de prêt agrémentée d'un accord concernant une prise de jouissance différée à juin 2020 conformément à votre souhait".
Par courrier du 3 janvier 2020, la société Connexion Immobilier a indiqué à Mme [H] que Mme [M] était toujours intéressée par l'acquisition et l'a mise en demeure de préciser si son notaire avait préparé le projet de promesse de vente ou si elle n'entendait plus donner suite à la vente.
Par acte du 4 mars 2020, soutenant que Mme [H] avait violé l'engagement, figurant au mandat, de vendre son bien à l'acquéreur qui lui avait été présenté par elle et qui avait fait une offre au prix du mandat rendant la vente parfaite, et qu'elle lui avait causé un préjudice en la conduisant à poursuivre des diligences en vain, en la privant délibérément de sa rémunération et en la discréditant au regard de l'acquéreur, la société Connexion Immobilier l'a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins notamment de la voir condamnée à lui payer la somme de 70.000 € à titre de dommages et intérêts.
Par conclusions notifiées électroniquement le 16 juillet 2021, Mme [M] est intervenue volontairement à l'instance aux fins de voir Mme [H] condamnée à lui payer la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive des pourparlers.
Par jugement du 25 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Paris a statué ainsi :
- Déclare recevable l'intervention volontaire de Mme [M],
- Rejette la demande en paiement de dommages et intérêts formée par la société Connexion Immobilier à l'encontre de Mme [H],
- Rejette la demande en paiement de dommages et intérêts formée par Mme [M] à l'encontre de Mme [H],
- Rejette la demande en paiement de dommages et intérêts formée par Mme [H] à l'encontre de la société Connexion Immobilier et de Mme [M],
- Condamne in solidum la société Connexion Immobilier et Mme [M] aux dépens,
- Condanme in solidum la société Connexion Immobilier et Mme [M] à payer à Mme [H] la somme de 3.000 € au titre de l'artic1e 700 du code de procédure civile,
- Rappelle que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit.
Mme [J] [M] a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 20 février 2023.
La procédure devant la cour a été clôturée le 25 avril 2024.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu les conclusions en date du 17 avril 2024 par lesquelles Mme [J] [M], appelante, invite la cour à :
Vu les dispositions des articles 565 et 566 du Code de procédure civile,
Vu les dispositions des articles 1103, 1112, 1113, 1114, 1156, 1217, 1240, 1310 et 1583 du Code civil,
INFIRMER le jugement rendu le 25 novembre 2022 par le Tribunal Judiciaire de
PARIS,
CONDAMNER Madame [H] à payer à Madame [M] la somme de 50.000 € à titre de dommages-intérêts,
CONDAMNER subsidiairement la société Connexion Immobilier à payer à Madame [M] la somme de 50.000 € à titre de dommages-intérêts,
DEBOUTER Madame [H] et la société Connexion Immobilier de toutes leurs demandes, fins et conclusions, en ce qu'elles sont dirigées contre Madame [J] [M] ;
CONDAMNER Madame [H] et, à défaut, la société Connexion Immobilier au paiement de la somme de 5.000 €, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;
Vu les conclusions en date du 19 avril 2023, par lesquelles Mme [N] [H], intimée, invite la cour à :
DEBOUTER Madame [M] de son appel comme étant mal fondé ;
Statuant à nouveau :
Vu les dispositions des articles 1103 et suivants, 1235 et suivants du Code civil.
Vu les pièces produites au débat ;
CONFIRMER le jugement dans toutes ces dispositions.
CONDAMNER Madame [J] [M] à payer à Madame [H] [G] la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts, outre 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
CONDAMNER Madame [J] [M] aux entiers dépens d'appel ;
Vu les conclusions en date du 16 avril 2024 par lesquelles la société Connexion Immobilier, intimée, invite la cour à :
Vu les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile
Vu les dispositions des articles 1103, 1104, 1217 et 1235-1 et suivants du code civil,
Vu le mandat signé le 9 mai 2019 modifié par avenant du 19 novembre 2019
- Juger la Société Connexion IMMOBLIER recevable et bien fondée en ses
présentes écritures ;
Y faisant droit,
- Juger Madame [M] irrecevable en sa demande nouvelle visant à voir condamner la Société Connexion Immobilier à lui payer la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts ;
- Confirmer le jugement rendu le 25 novembre 2022 en ce qu'il a rejeté la demande en
paiement de dommages et intérêts formée par Madame [H] contre la société Connexion Immobilier ;
- Débouter Madame [H] et Madame [M] de toutes leurs fins, demandes et prétentions en ce qu'elles sont dirigées contre la Société Connexion Immobilier ;
- Pour le cas où la Cour jugerait la vente entre Madame [H] et Madame [M] parfaite, condamner Madame [N] [H] à payer à la Société Connexion Immobilier la somme de 70.000 € à titre de dommages et intérêts ;
- Condamner Madame [N] [H] et Madame [J] [M] à payer chacune à la Société Connexion Immobilier la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner Madame [N] [H] et Madame [J] [M] aux entiers dépens ;
SUR CE,
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;
En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;
Au préalable, il convient de préciser que le jugement n'est pas contesté en ce qu'il :
- déclare recevable l'intervention volontaire de Mme [M] ;
- rejette la demande en paiement de dommages et intérêts formée par Mme [H] à l'encontre de la société Connexion Immobilier ;
Sur la recevabilité de la prétention formée pour la première fois en appel
La société Connexion Immobilier soulève, sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile, l'irrecevabilité de la demande de Mme [M] de la condamner à lui verser la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts, au motif qu'il s'agit d'une prétention nouvelle en appel ;
Mme [M] oppose que sa demande à l'encontre de la société Connexion Immobilier tend aux mêmes fins que celle à l'encontre de Mme [H], à savoir la réparation de son préjudice ;
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, 'A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait' ;
Aux termes de l'article 565 du même code, 'Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent' ;
Aux termes de l'article 566 du même code, 'Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire' ;
En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que :
- en première instance :
Mme [M] a sollicité de condamner Mme [H] à lui payer la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive des pourparlers ;
Elle n'a pas demandé d'engager la responsabilité de la société Connexion Immobilier et n'a formé aucune demande à son encontre ;
La société Connexion Immobilier n'a formé aucune prétention à l'encontre de Mme [M];
- en appel :
Mme [M] sollicite de condamner Mme [H] à lui payer la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts à titre principal sur le fondement de sa responsabilité contractuelle pour refus de vente, et à titre subsidiaire pour rupture abusive des pourparlers ;
Elle demande à titre subsidiaire de condamner la société Connexion Immobilier pour manquement à ses obligations d'information relatives à son absence de pouvoir d'engager Mme [H] et le refus de contracter de Mme [H] ;
La société Connexion Immobilier ne forme aucune prétention à l'encontre de Mme [M];
Il en ressort que la prétention nouvelle en appel de Mme [M] à l'encontre de la société Connexion Immobilier n'a pas pour objet d'opposer compensation, de faire écarter les prétentions adverses de la société Connexion Immobilier ou de faire juger les questions nées de la survenance ou de la révélation d'un fait ;
La prétention formée pour la première fois en appel de Mme [M] de condamner la société Connexion Immobilier, au titre de son préjudice résultant du manque d'information donné par l'agence immobilière, ne tend pas aux mêmes fins que les prétentions de Mme [M] soumises au premier juge, qui visaient seulement à condamner Mme [H] au titre de son préjudice relatif à la rupture abusive des pourparlers, sans aucune demande à l'encontre de la société Connexion Immobilier ; cette prétention formée pour la première fois en appel n'est pas non plus l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions de Mme [M] soumises au premier juge ;
En conséquence, il y a lieu de déclarer irrecevable la prétention nouvelle en appel de Mme [M] de condamner subsidiairement la société Connexion Immobilier à lui payer la somme de 50.000 € à titre de dommages-intérêts ;
Sur les demandes à l'encontre de Mme [H]
La société Connexion Immobilier sollicite la somme de 70.000 € à titre de dommages et intérêts pour l'indemniser du montant des honoraires dont elle a été privée, sur le fondement des articles 1113, 1114, 1583 du code civil, en faisant valoir que Mme [M] lui a confié un mandat de vente, que Mme [M] a accepté l'offre de vente et que la vente est donc parfaite entre Mme [M] et Mme [H] du fait de l'accord sur la chose et sur le prix ;
Mme [M] sollicite la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts ; à titre principal, elle fonde sa demande sur l'existence d'une vente parfaite, au titre des articles 1113, 1114, 1583 du code civil et la théorie de l'apparence consacré par l'article 1156 du même code, puisque la mise en vente contenait la chose et le prix, soit les éléments essentiels du contrat de vente envisagé et exprimait, à tout le moins en apparence, la volonté de son auteur d'être lié en cas d'acceptation, d'autant plus que la société Connexion Immobilier ne lui a pas indiqué qu'elle n'était pas en mesure d'engager son mandant ; subsidiairement elle invoque la rupture fautive des pourparlers, sur le fondement de l'article 1112 du code civil, au motif que les pourparlers ont duré près de deux mois, sans que rien ne laisse présager une rupture brutale et inexpliquée ; elle conteste avoir reçu la lettre de la société Connexion Immobilier du '12 décembre 2019", dans laquelle celle-ci l'aurait informé du refus de son offre d'achat par Mme [H] ;
Mme [H] oppose qu'il n'y a pas de vente parfaite car le simple accord donné par le vendeur sur un mandat de vente est une invitation à entamer des pourparlers visant à conclure un avant-contrat, la vente immobilière nécessitant des vérifications par le notaire, et il n'est pas démontré un accord sur le montant et le débiteur de la commission ; elle ajoute que Mme [M] n'a pas considéré qu'il y avait vente parfaite puisqu'elle n'a pas fait sommation de comparaître chez un notaire et n'a plus donné de suite à son courrier adressé à l'agence immobilière le 19 novembre 2019 avant son intervention volontaire en septembre 2021 ;
Sur le caractère parfait de la vente
Aux termes de l'article 1113 du code civil, dans sa version en vigueur depuis le 1er octobre 2016, 'Le contrat est formé par la rencontre d'une offre et d'une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s'engager.
Cette volonté peut résulter d'une déclaration ou d'un comportement non équivoque de son auteur' ;
Aux termes de l'article 1114 du même code, dans sa version en vigueur depuis le 1er octobre 2016, 'L'offre, faite à personne déterminée ou indéterminée, comprend les éléments essentiels du contrat envisagé et exprime la volonté de son auteur d'être lié en cas d'acceptation. A défaut, il y a seulement invitation à entrer en négociation' ;
Aux termes de l'article 1583 du même code, 'Elle est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé' ;
Aux termes de l'article 1156 du même code, dans sa version en vigueur depuis le 1er octobre 2016, 'L'acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs est inopposable au représenté, sauf si le tiers contractant a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations du représenté.
Lorsqu'il ignorait que l'acte était accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs, le tiers contractant peut en invoquer la nullité.
L'inopposabilité comme la nullité de l'acte ne peuvent plus être invoquées dès lors que le représenté l'a ratifié' ;
Aux termes de l'article 6 de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970, 'Les conventions conclues avec les personnes visées à l'article 1er ci-dessus et relatives aux opérations qu'il mentionne, doivent être rédigées par écrit et préciser conformément aux dispositions d'un décret en Conseil d'Etat :
Les conditions dans lesquelles ces personnes sont autorisées à recevoir, verser ou remettre des sommes d'argent, biens, effets ou valeurs à l'occasion de l'opération dont il s'agit ;
Les modalités de la reddition de compte ;
Les conditions de détermination de la rémunération, ainsi que l'indication de la partie qui en aura la charge.
Les dispositions de l'article 1325 du code civil leur sont applicables.
Aucun bien, effet, valeur, somme d'argent, représentatif de commissions, de frais de recherche, de démarche, de publicité ou d'entremise quelconque, n'est dû aux personnes indiquées à l'article 1er ou ne peut être exigé ou accepté par elles, avant qu'une des opérations visées audit article ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit contenant l'engagement des parties.
Toutefois, lorsqu'un mandat est assorti d'une clause d'exclusivité ou d'une clause pénale ou lorsqu'il comporte une clause aux termes de laquelle une commission sera due par le mandant, même si l'opération est conclue sans les soins de l'intermédiaire, cette clause recevra application dans les conditions qui seront fixées par décret' ;
Aucune commission ni somme d'argent quelconque ne peut être exigée par l'agent immobilier ayant concouru à une opération qui n'a pas été effectivement conclue ;
Il résulte du rapprochement de l'article 6 alinéa 3, de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, dans sa rédaction issue de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 et de l'article 72 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, dans sa rédaction issue du décret n° 2010-1707 du 30 décembre 2010, qu'aucune somme d'argent n'est due, à quelque titre que ce soit, à l'agent immobilier avant que l'opération pour laquelle il a reçu un mandat écrit ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte contenant l'engagement des parties ; qu'un tel mandat ne permettant pas à l'intermédiaire qui l'a reçu d'engager le mandant pour l'opération envisagée à moins qu'une clause ne l'y autorise expressément, le refus de ce dernier de réaliser cette opération aux conditions convenues dans le mandat ne peut lui être imputé à faute pour justifier sa condamnation au paiement de dommages-intérêts, hormis s'il est établi que le mandant a conclu l'opération en privant le mandataire de la rémunération à laquelle il aurait pu légitimement prétendre (1ère chambre civile 16 novembre 2016 pourvoi n°15-22010) ;
En l'espèce, Mme [H] a consenti à la société Connexion Immobilier un mandat de vente de son bien à un certain prix, sans exclusivité ; ce mandat ne porte que sur une mission d'entremise et la société Connexion Immobilier n'avait pas le pouvoir de représenter Mme [H] pour accepter des offres d'achat en son nom et ne l'avait pas non plus pour vendre le bien pour son compte ;
Le fait pour Mme [H] d'avoir mandaté cet agent immobilier pour proposer son bien à la vente ne constitue pas une offre ferme de vente suffisamment précise quant au contenu et aux modalités de la vente et n'exprime pas la volonté de Mme [H] de s'engager ni d'être liée en cas d'acceptation ;
D'ailleurs le mandat stipulait que le mandant chargeait le mandataire à l'effet de rechercher un acquéreur 'en vue d'aboutir à la signature d'une promesse de vente ou d'un compromis de vente' et c'est en ce sens que dans son courrier du 3 janvier 2020, la société Connexion Immobilier a demandé à Mme [H] si son notaire avait préparé le projet de promesse de vente ;
Au surplus, la société Connexion Immobilier n'avait pas le pouvoir d'accepter une offre d'achat au nom de Mme [H] ;
La théorie de l'apparence, au sens de l'article 1156 précité, ne s'applique que si le tiers contractant a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations du représenté ;
Or Mme [M], qui se contente dans le cadre de la présente procédure de reprocher à la société Connexion Immobilier de ne pas l'avoir informée qu'elle ne représentait pas Mme [H], ne produit aucun élément attestant d'un comportement ou de déclarations de la société Connexion Immobilier qui lui aient légitimement fait croire que celle-ci avait le pouvoir de représenter Mme [H] ;
Mme [M] ne justifie donc pas d'un mandat apparent de la société Connexion Immobilier;
Au surplus, l'offre d'achat de Mme [M] du 29 novembre 2019 ne comprend pas les éléments essentiels du contrat envisagé en ce qu'elle ne précise pas si le montant offert inclut ou non les frais d'agence et si celle-ci prend ces frais à sa charge ;
Il n'est pas justifié que Mme [H] aurait ajouté une condition d'une 'prise de jouissance différée à juin 2020" tel que la société Connexion Immobilier l'indique dans son courrier du 14 décembre 2019 et à le supposer, cela confirme que le contenu du mandat ne constitue pas une offre ferme de vente suffisamment précise quant au contenu et aux modalités de la vente ;
Le fait que Mme [M] ait pu visiter l'appartement et consulter les diagnostics ne modifie pas cette analyse ;
En l'absence de preuve de la rencontre d'une offre et d'une acceptation et d'un accord sur la chose et le prix, il convient de considérer que la société Connexion Immobilier et Mme [M] ne démontrent pas l'existence d'une vente parfaite et que la proposition du bien à la vente ne constituait qu'une offre d'entrer en pourparlers ;
Le moyen relatif à la vente parfaite est rejeté ;
La société Connexion Immobilier n'a maintenu que le moyen relatif à la vente parfaite en appel, en précisant qu'elle ne conteste pas, si la vente n'est pas parfaite, qu'en application de la jurisprudence la plus récente de la cour de cassation, elle ne peut prétendre à aucune rémunération tant que Mme [H] n'a pas vendu son appartement ;
Il y a lieu néanmoins de préciser que le mandat stipule, dans le paragraphe relatif aux obligations et pouvoirs du mandant, notamment :
'De convention expresse et à titre de condition essentielle sans laquelle le mandataire n'aurait pas accepté sa mission, le mandant :
a) s'engage à signer aux prix, charges et conditions convenus toute promesse de vente éventuellement assortie d'une demande de prêt immobilier (articles L313-1 et suivants du code de la consommation) avec tout acquéreur présenté par le mandataire et à ne pas refuser, le cas échéant, de conclure tout compromis de vente aux mêmes conditions (..).
EN CAS DE NON-RESPECT DES OBLIGATIONS ÉNONCÉES CI-AVANT AUX PARAGRAPHES a- (...), IL S'ENGAGE IRREVOCABLEMENT À VERSER AU MANDATAIRE, EN VERTU DES ARTICLES 1231-1 ET SUIVANTS DU CODE CIVIL, UNE INDEMNITÉ COMPENSATRICE FORFAITAIRE ET NON REDUCTIBLE ÉGALE AU MONTANT DES HONORAIRES PREVU AU RECTO, ALORS MEME QUE LA VENTE N'AURAIT PAS ETE REALISEE PAR LES SOINS DU MANDATAIRE ...' ;
Il est constant que la vente n'a pas été effectivement conclue, de sorte que la société Connexion Immobilier, agent immobilier, ne peut se prévaloir des dispositions de la clause litigieuse, laquelle emporte, contrairement aux dispositions légales susvisées, obligation de conclure la vente, sauf à payer la somme contractuellement prévue, même en l'absence de faute imputable au mandant ;
Le refus de Mme [H] de réaliser cette opération aux conditions convenues dans le mandat ne peut lui être imputée à faute pour justifier sa condamnation au paiement de dommages-intérêts, hormis s'il est établi qu'elle a conclu l'opération en privant le mandataire de la rémunération à laquelle il aurait pu légitimement prétendre, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;
Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de dommages et intérêts formée par la société Connexion Immobilier à l'encontre de Mme [H] ;
Sur la rupture abusive des pourparlers entre Mme [H] et Mme [M]
Aux termes de l'article 1112 du code civil, dans sa version en vigueur à compter du 1er octobre 2018, 'L'initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi.
En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d'obtenir ces avantages' ;
La rupture des pourparlers peut engager la responsabilité de son auteur, si celui-ci commet un abus dans l'exercice de son droit de rupture unilatérale, abus caractérisé soit par la mauvaise foi de l'auteur de la rupture, soit par son absence de motif légitime, soit par le caractère brutal et sans préavis de la rupture en cas de pourparlers très avancés ;
En l'espèce, Mme [M] a formé une offre d'achat le 29 novembre 2019 ; or il ressort de la lettre recommandée adressée le 14 décembre 2019 par la société Connexion Immobilier à Mme [H], qu'à cette date, Mme [H] avait informé la société Connexion Immobilier de son refus de régulariser la vente de son bien et que la société Connexion avait indiqué à Mme [H] en avoir informé Mme [M] ;
Aussi même à supposer qu'il puisse être retenu que de véritables pourparlers s'étaient engagés entre Mme [H] et Mme [M] dès le 29 novembre 2019, il convient de considérer, compte tenu du délai de seulement 15 jours entre le 29 novembre 2019 et le 14 décembre 2019, que les pourparlers n'étaient pas très avancés et que Mme [M] a été informée très rapidement que son offre n'était pas acceptée ;
Le fait que Mme [H] indique, dans ses conclusions et dans celles de première instance (pièce 10 Connexion) qu'elle n'a pas souhaité donner suite à cette vente pour des raisons notamment liées à la fiscalité de cette opération, ne remet pas en cause l'absence de pourparlers très avancés et ne justifie donc pas d'une faute ou d'une mauvaise foi de la part de Mme [H] dans la rupture des pourparlers ;
Le fait que Mme [M] n'aurait pas reçu l'information de la part de la société Connexion Immobilier, contrairement au courrier adressé par celle-ci à Mme [H], ne remet pas en cause la bonne foi de Mme [H] ;
Mme [M] ne démontre donc pas une rupture abusive de pourparlers ;
Ce moyen est aussi rejeté ;
Ainsi le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mme [M] de sa demande en paiement de dommages et intérêts formée à l'encontre de Mme [H] ;
Sur la demande reconventionnelle de Mme [H] à l'encontre de Mme [M]
Le premier juge a débouté Mme [H] de sa demande reconventionnelle à l'encontre de Mme [M] en relevant que 'Si Mme [H] forme dans le dispositif de ses conclusions une demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts, elle n'articule dans le corps de celles-ci aucun moyen au soutien de cette demande, ne précisant ni les fautes reprochées aux deux autres parties ni le préjudice subi, autre que celui d'avoir à se défendre en justice réparé au titre des frais irrépétibles' ;
En l'espèce, si dans le dispositif de ses conclusions, Mme [H] sollicite de condamner Mme [M] à lui payer la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts, elle ne précise,
dans le corps de ses conclusions, aucune motivation fondant cette demande ;
En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mme [H] de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de Mme [M] ;
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Mme [M], partie perdante, doit être condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à Mme [H] la somme supplémentaire de 3.000 € et à la société Connexion Immobilier la somme de 2.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par Mme [M] ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Déclare irrecevable la prétention nouvelle en appel de Mme [J] [M] de condamner subsidiairement la société Connexion Immobilier à lui payer la somme de 50.000 € à titre de dommages-intérêts ;
Confirme le jugement ;
Y ajoutant,
Condamne Mme [J] [M] aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à Mme [N] [H] la somme supplémentaire de 3.000 € et à la SARL Connexion Immobilier la somme de 2.000 €, par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Rejette la demande de Mme [M] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;