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Décisions

CA Poitiers, 2e ch., 15 octobre 2024, n° 24/00255

POITIERS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Brassotel (EURL)

Défendeur :

Les Jardins du Lac (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Marquer

Vice-président :

M. Pascot

Conseiller :

M. Lecler

Avocats :

Me Mazaudon, Me Glaentzlin

TJ Poitiers, du 20 déc. 2023, n° 24/0025…

20 décembre 2023

Le 30 décembre 2005, la société civile immobilière Les Jardins du Lac (la société Les Jardins ou le bailleur) a consenti à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Brassotel (la société Brassotel ou la preneuse) un bail commercial, contenant une clause résolutoire, portant sur un immeuble à usage commercial situé [Adresse 2] à [Localité 3] pour une durée de 9 ans à compter du 15 décembre 2005 moyennant un loyer mensuel de 3811,23 euros hors taxes, majoré des charges de copropriété.

Le 6 juin 2023, la société Les Jardins a mis en demeure la société Brassotel de lui payer la somme de 59.974,29 euros toutes taxes comprises au titre des loyers et charges impayés.

Le 17 juillet 2023, la société Les Jardins a délivré un commandement de payer la somme de 59 974,29 euros visant la clause résolutoire à la société Brassotel.

Le 30 août 2023, la société Les Jardins a assigné la société Brassotel devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Poitiers.

Dans le dernier état de ses demandes, la société Les Jardins a demandé :

- de constater l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire contenue au bail litigieux à la date du 18 août 2023 ;

- de constater la résolution du bail à compter du 18 août 2023 ;

- d'ordonner l'expulsion immédiate de la société Brassotel et de tous occupants de son chef des locaux en cause et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'ordonnance jusqu'au départ définitif ;

- de condamner, à titre provisionnel, la société Brassotel au paiement à son profit des sommes de :

- 19.200 euros toutes taxes comprises (ttc) au titre des arriérés de loyers dus au 18 août 2023 ;

- 18.859,37 euros ttc au titre des arriérés de charges pour les années 2021, 2022 et 2023 ;

- 35.873,30 euros ttc us au titre des rappels de loyers liés à l'indexation pour les années à 2023 ;

- 7.448,88 euros ttc à titre d'indemnité d'occupation correspondant au montant du loyer courant mensuel revalorisé et ce jusqu'à la libération effective des lieux et la remise des clés ;

- débouter la société Brassotel de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la société Brassotel à lui payer la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

En dernier lieu, la société Brassotel a demandé :

- de débouter la société Les Jardins en ses demandes de condamnation provisionnelle formées contre elle au titre de l'arriéré de charges et du rappel de loyer (indexation) ;

- de statuer ce que de droit sur la demande de la société Les Jardins de condamnation à titre provisionnel à lui payer les sommes de 19 200 euros au titre des loyers des mois de mai à août 2023 et de 2751 euros au titre de la taxe foncière 2023 ;

- en tout état de cause, de dire que les paiements reçus par la société Les Jardins dans le cadre des saisies-attribution auxquelles elle avait procédé les 12 et 14 septembre 2023 entre les mains de la Bnp Paribas Securities Service et du Cic Ouest, de montants respectifs de 2273,30 euros et 5508,12 euros, viendraient en déduction de sa créance ;

- en tout état de cause également, de lui accorder un délai de 2 ans pour paiement des sommes dues à la société Les Jardins et l'autoriser à se libérer de sa dette en 23 versements mensuels de 1200 euros chacun et un 24ème versement du solde de la dette ;

- d'ordonner la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours du délai accordé ;

- de rappeler en tant que de besoin que la clause résolutoire ne jouait pas si le locataire se libérait dans les conditions fixées par le juge ;

- de dire n'y avoir lieu à la condamner au titre des frais irrépétibles ;

- de débouter la société Les Jardins de ses demandes contraires.

Par ordonnance contradictoire en date du 20 décembre 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Poitiers a :

- constaté la résiliation du bail commercial au 17 août 2023 ;

- ordonné, à défaut de libération des lieux dans le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision, l'expulsion de la société Brassotel des lieux loués, ainsi que celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique ;

- condamné la société Brassotel à payer à titre provisionnel la somme de 19.200 euros à la société Les Jardins au titre des arriérés de loyers dus, comptes arrêtés au 18 août 2023 ;

- condamné la société Brassotel à payer à la société Les Jardins à titre provisionnel la somme de 2.751 euros ttc dus au titre de la taxe foncière de 2023 ;

- dit qu'il devrait être déduit les sommes de 2.273,30 euros et 5.508,12 euros saisies les 12 et 14 septembre 2023 ;

- condamné la société Brassotel à payer à titre provisionnel la somme mensuelle de 4.800 euros ttc à la société Les Jardins à titre d'indemnité d'occupation à compter du 18 juillet 2023 et jusqu'au complet départ ;

- rejeté les demandes plus amples ou contraires ;

- condamné la société Brassotel à verser à la société Les Jardins la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles.

Le 1er février 2024, la société Brassotel a relevé appel de cette ordonnance en intimant la société Les Jardins.

Le 5 février 2024, la société Les Jardins a constitué avocat.

Le 14 février 2024, le greffe a avisé les parties d'un calendrier de procédure en circuit court.

Le 16 février 2024, la société Brassotel a notifié sa déclaration d'appel et le calendrier de procédure à la société Les Jardins.

Le 14 mars 2024, la société Brassotel a déposé ses premières écritures.

Le 3 avril 2024, la société Les Jardins a déposé ses premières écritures.

Le 9 avril 2024, l'entreprise Brassotel a assigné la société Les Jardins devant la première présidente de la cour d'appel de céans, statuant en référé, afin d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire assortissant la décision dont appel.

Par ordonnance de référé en date du 18 avril 2024, le magistrat délégué par la première présidente de la cour d'appel de céans a ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance déférée.

Le 3 mai 2024, la société Brassotel a demandé l'infirmation intégrale de l'ordonnance déférée et, statuant à nouveau :

à titre principal,

- de constater et au besoin juger que le commandement de payer du 17 juillet 2023 ne pouvait produire effet qu'à hauteur de la somme de 9.600 euros correspondant aux loyers impayés des mois de mai et juin 2023 ;

- de lui accorder un délai rétroactif pour le paiement de la somme de 9.600 euros correspondant au loyers impayés des mois de mai et juin 2023 ;

- de constater que la somme de 9.600 euros correspondant aux loyers impayés des mois de mai et juin 2023 visés dans le commandement du 17 juillet 2023 avaient été réglées par l'entreprise Brassotel ;

- de juger en conséquence n'y avoir lieu à constatation de la résiliation du bail ni à son expulsion ;

à titre subsidiaire,

- de lui accorder un délai pour le paiement des sommes susceptibles de rester dues à la société Les Jardins ;

- de l'autoriser à se libérer des sommes susceptibles de rester dues à la société Les Jardins par versements mensuels de 1.200 euros chacun jusqu'à apurement de la dette, et le cas échéant un dernier versement d'un montant correspondant au solde de la dette au terme du délai de deux années prévu par l'article 1343-5 du code civil ;

- d'ordonner la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours du délai ainsi accordé ;

en tout état de cause,

- de débouter la société Les Jardins de toutes ses demandes ;

- de dire n'y avoir lieu à la condamner au titre des frais irrépétibles.

Le 11 juillet 2024, la société Les Jardins a demandé la confirmation de l'ordonnance déférée sauf en ce qu'elle avait dit qu'il devrait être déduit les sommes de 2.273,30 euros et 5.508,12 euros saisies les 12 et 14 septembre 2023 et rejeté les demandes plus ou contraires, d'infirmer l'ordonnance des deux chefs plus haut cités, et statuant à nouveau de :

- condamner, à titre provisionnel, la société Brassotel au paiement, à son profit des sommes de :

- 23.944,35 euros ttc dus au titre des arriérés de charges pour les années 2021, 2022, 2023 et 2024 ;

- 36 960,36 euros ttc dus au titre des rappels de loyers liés à l'indexation pour les années 2018 à 2023 ;

- dire que ce sont les sommes de 1 630,15 euros et de 5 064,21 euros qui devraient être déduites des sommes dues par la société Brassotel ;

en tout état de cause,

- débouter la société Brassotel de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la société Brassotel à lui payer la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Pour plus ample exposé, il sera expressément renvoyé aux écritures des parties déposées aux dates susdites.

Le 27 août 2024, a été ordonnée la clôture de l'instruction de l'affaire.

MOTIVATION :

Selon l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

L'article 835 alinéa 2 du même code ajoute que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation, même s'il s'agit d'une obligation de faire.

C'est au demandeur en référé qu'il appartient de démontrer l'apparence de bien-fondé de sa créance, tandis qu'il revient au défendeur qui la conteste de démontrer l'existence d'une contestation sérieuse.

Le juge des référés n'est pas tenu de caractériser l'urgence pour constater l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail, ni pour allouer des provisions au titre des loyers et charges impayés, ou pour indemnité d'occupation.

L'article L. 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail, prévoyant sa résiliation de plein droit, ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement, à peine de nullité, doit mentionner ce délai.

Selon l'article L. 145-41 alinéa 2 du code de commerce, les juges, saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la résiliation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée; la clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

Selon l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux ans, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêts à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

S'il appartient à celui se prévalant d'une obligation de la démontrer, il revient réciproquement à celui prétendant s'être libéré d'apporter la preuve de son paiement.

Sur la provision au titre des loyers et charges impayés :

Créances non contestées :

Le bien fondé d'une créance soulevée devant le juge des référés a pour assiette le montant ne faisant l'objet d'aucune contestation sérieuse de la part du défendeur.

Il ressort des écritures d'appel de la société Brassotel que celle-ci reconnaît elle-même le bien fondé de la créance adverse à hauteur de 19 200 euros ttc au titre des arriérés de loyers dus au 18 août 2023, outre 2751 euros ttc au titre de la taxe foncière 2023.

L'ordonnance sera donc confirmée en ce qu'elle a condamné la preneuse à payer à la bailleresse des provisions à ces titres.

Charges pour les années 2021, 2022, et 2023 :

La qualification d'une clause, d'un acte ou d'un fait échappe aux pouvoirs du juge des référés.

Le contrat de bail a exclu des charges auquel serait tenu le preneur celles correspondant à des grosses réparations auxquelles le locataire n'aurait pas à participer.

La société Les Jardins avait présenté une demande à hauteur de 18 859,37 euros ttc au titre des arriérés de charges pour les années 2021, 2022, et 2023.

Mais la société Brassotel lui objecte, pour ce faire, qu'elle se fonde à ce titre sur des factures correspondant à des grosses réparations. Elle observe que les justificatifs de charges de copropriété pour les années 2021 à 2023 font état d'importants travaux.

Si la société Les Jardins soutient que la quote-part des charges réclamée à la société Brassotel a précisément exclu les dites grosses réparations, l'examen du décompte de charges du 9 novembre 2022 met en évidence que des travaux d'étanchéité de la toiture et de réfection de cette même terrasse ont été pris en compte dans le calcul des arriérés de charges impayés.

Et si la société Les Jardins fait état pour l'année 2022, d'un arriéré de charges de 4544,44 euros, la société Brassotel lui rappelle, exactement, que dans le mail qu'elle lui avait adressé le 11 décembre 2022, la bailleresse avait elle-même indiqué que le reliquat à ce titre n'était que de 73,57 euros.

Il en ressort que la demande de la bailleresse au titre des rappels de charges est sérieusement susceptible de porter sur des grosses réparations.

Ainsi, la preneuse a réussi à opposer à la bailleresse des contestations sérieuses relativement à sa demande au titre des rappels de charges pour les années 2021, 2022 et 2023.

Il y aura donc lieu de débouter la bailleresse de sa demande provisionnelle au titre des rappels de charges pour les années 2021, 2022 et 2023, et l'ordonnance sera confirmée de ce chef.

Charges pour l'année 2024 :

En revanche, par la production de son décompte, la société Les Jardins a établi le bien fondé de sa demande au titre des charges pour l'année 2024 à hauteur de 6799,53 euros, sans qu'au titre de cette année, la société Brassotel ne lui objecte que les justificatifs feraient état de travaux quelconques, ni ne présente la moindre contestation.

Il y aura donc lieu de condamner à titre provisionnel la preneuse à payer à la bailleresse la somme de 6799,53 euros au titre des charges pour l'année 2024.

Rappels de loyer au titre de la clause d'indexation de 2018 à 2023 :

La société Les Jardins sollicite une provision à hauteur de 36 960,36 euros, au titre de rappels liés à l'indexation des loyers pour les années 2018 à 2023.

La société Brassotel lui objecte avoir conclu un accord avec l'ancien gérant de la bailleresse, aujourd'hui décédé, limitant l'augmentation du loyer par l'effet de la clause d'indexation stipulée au bail.

La société Les Jardins dénie l'existence d'un tel accord, en remarquant que la société Brassotel n'en démontre pas l'existence.

Mais il ressort des éléments du dossier que si le bail stipulé au contrat était initialement de 3811 euros mensuels hors taxes, il apparaît que la bailleresse n'a par la suite payé que 4000 euros hors taxes (soit 4800 euros ttc) jusqu'au mois d'avril 2023, sans réclamation jusqu'alors de la bailleresse.

Bien plus encore, dans son courrier en date du 10 décembre 2021, la bailleresse indique elle-même que le loyer dû au titre de l'année 2021 était de 4000 euros ht taxes par mois.

La mise en demeure du 14 juin 2022 porte sur un solde de loyer augmenté, à compter du 1er janvier 2022, de par l'effet de la clause d'indexation, à hauteur de 4663,25 euros ht, soit 5595,90 euros ttc.

Mais la mise en demeure du 6 juin 2023, postérieure, a été adressée sur la base du montant antérieur de 3811,23 euros ht, soit 4000 euros ttc, tout en faisant grief à la preneuse de ne plus payer le montant habituel de 4800 euros ttc par mois (soit 4000 euros ht) à compter des mois de mai et juin 2023.

Il est ainsi établi la vraisemblance d'un accord entre les parties, visant à limiter la hausse de la clause d'indexation contractuellement convenue, de telle sorte que la preneuse a opposé avec succès à la bailleresse une contestation sérieuse de ce chef.

La société Les Jardins sera déboutée de sa demande de condamnation provisionnelle au titre des rappels de loyers lié à l'indexation pour les années 2018 à 2023, et l'ordonnance sera confirmée de ce chef.

Sur les paiements réalisés par la preneuse à hauteur d''appel et sur la déduction des sommes dues au titre des saisies-attribution :

Il ressort des justificatifs présentée par l'appelante que celle-ci s'est acquittée de la totalité des sommes mise à sa charge par l'ordonnance déférée, ainsi que l'a constaté l'ordonnance primo-présidentielle du 18 avril 2024.

Les saisies attributions pratiquées sur les comptes bancaires de preneuse les 12 et 14 septembre 2023 ont conduit à la saisie respectivement des sommes de 2273,30 et 5508,12 euros.

Mais il ressort du décompte du commissaire de justice que sur ces sommes effectivement saisies auprès la débitrice, après déduction de divers frais et émoluments, seules ont été perçues par la bailleresse les sommes respectives de 1630,15 et 5064,21 euros.

Il conviendra donc de dire qu'il devra être déduit des sommes dues par la preneuse à la bailleresse les sommes de 1630,15 et 5064,21 euros saisies les 12 et 14 septembre 2023, et l'ordonnance sera infirmée de ce chef.

Sur l'acquisition de la clause de la clause résolutoire et son éventuelle suspension :

Le contrat de bail commercial comporte une clause selon laquelle les parties conviennent expressément qu'en cas de manquement par le preneur à l'une quelconque de ses obligations contractuelles, qui sont toutes de rigueur, ou en cas de violation des dispositions imposées au preneur par les textes légaux et réglementaires, dont les articles L. 145-1 et suivants du code de commerce, le bail serait résilié de plein droit un mois après mise en demeure d'exécuter délivrée par exploit d'huissier restée sans effet, les conditions d'acquisition de la clause résolutoire seraient constatées judiciairement et l'expulsion du preneur devenu occupant sans droit ni titre, serait ordonnée par le juge.

Il ressort des écritures même de la société Brassotel que celle-ci a reconnu que la somme de 9600 euros ttc, correspondant au montant des loyers et charges impayés des mois de mai et juin 2023, tel que visés au commandement de payer qui lui a été délivré le 17 juillet 2023, n'a été réglée par elle-même qu'au cours de l'instance d'appel qu'elle a introduite le 1er février 2024.

Il s'ensuit donc que la preneuse n'a pas régularisé les causes du commandement de payer dans le mois suivant le jour de sa signification.

Il y aura donc lieu de constater l'acquisition de la clause résolutoire.

Mais toutefois, il est constant entre parties que les causes de l'ordonnance déférée ont été intégralement versées par l'appelante en cours d'instance d'appel.

Et la bailleresse ne se prévaut d'aucun impayé au titre des loyers en cours, hormis la question de l'indexation faisant l'objet d'une contestation sérieuse.

En substance, demeurent à payer le reliquat, - modique - des condamnations provisionnelles prononcées par le premier juge, après réduction de la déduction des sommes objet des saisies attributions par la cour.

Ce reliquat s'évalue ainsi à :

19 200 euros ttc au titre des arriérés de loyers au 18 août 2023 ;

+ 2751 euros ttc au titre de la taxe foncière 2023 ;

- 1630,15 et 5064,21 euros saisis les 12 et 14 septembre 2023 ;

- 9600 euros ttc au titre des arriérés de loyers réglés en cours d'instance d'appel ;

soit 5656,64 euros.

Demeurent encore à payer pour 6799,53 euros les charges au titre de l'année 2024, nées postérieurement à la délivrance du commandement de payer.

Or les éléments versés par son expert-comptable, en particulier s'agissant de son chiffre d'affaires pour la période de janvier 2023 à février 2024, mettent en évidence une amélioration de la situation financière de la société Brassotel.

De la sorte, la proposition de la société Brassotel, consistant à se libérer des sommes éventuelles dues par versement mensuels de 1200 euros apparaît crédible.

Mais eu égard au montant du reliquat retenu, un délai de paiement limité à un an sera suffisant.

Il y aura donc lieu :

- d'accorder à la preneuse un délai d'un an pour le paiement des sommes susceptibles de rester dues à la bailleresse, de l'autoriser à s'en libérer par versements mensuels de 1200 euros, le cas échéant par un dernier versement d'un montant correspondant au solde de la dette ;

- d'ordonner la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais ainsi accordés ;

- de débouter la bailleresse de ses demandes tant à constater la résiliation du bail, à ordonner l'expulsion de la preneuse, et à condamner celle-ci à payer une indemnité d'occupation.

L'ordonnance sera donc infirmée de ces chefs.

* * * * *

Succombante exactement en première instance, la société Brassotel sera condamnée aux entiers dépens de première instance comprenant le coût du commandement de payer, et à payer à la société Les Jardins la somme de 1000 euros au titre de frais irrépétibles de première instance : l'ordonnance sera confirmée de ces chefs.

Succombante à hauteur d'appel, la société Brassotel sera condamnée aux dépens d'appel et à verser à la société Les Jardins la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a :

- dit qu'il devrait être déduit les sommes de 2.273,30 euros et 5.508,12 euros saisies les 12 et 14 septembre 2023 ;

- constaté la résiliation du bail commercial au 17 août 2023 ;

- ordonné, à défaut de libération des lieux dans le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision, l'expulsion de la société Brassotel des lieux loués, ainsi que celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique ;

- condamné la société Brassotel à payer à titre provisionnel la somme mensuelle de 4.800 euros ttc à la société Les Jardins du Lac à titre d'indemnité d'occupation à compter du 18 juillet 2023 et jusqu'au complet départ ;

- rejeté les demandes plus amples ou contraires ;

Infirme l'ordonnance déférée des chefs plus haut cités ;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :

Condamne l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Brassotel à payer à titre provisionnel à la société civile immobilière Les Jardins du Lac la somme de 6799,53 euros au titre des charges pour l'année 2024 ;

Dit que devront être déduites des sommes dues à titre provisionnel par l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Brassotel à la société civile immobilière Les Jardins du Lac les sommes de 1630,15 euros et 5064,21 euros saisies les 12 et 14 septembre 2023 ;

Constate l'acquisition de la clause résolutoire au 17 août 2023 ;

Accorde à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Brassotel un délai d'un an pour payer les sommes dues à titre provisionnel à la société civile immobilière Les Jardins du Lac ;

Autorise l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Brassotel à s'en libérer par versements mensuels de 1200 euros, le cas échéant par un dernier versement d'un montant correspondant au solde de la dette ;

Ordonne la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais ainsi accordés ;

Déboute la société civile immobilière Les Jardins du Lac de ses demandes en expulsion et à titre d'indemnité d'occupation à l'encontre de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Brassotel ;

Condamne l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Brassotel aux dépens d'appel et à payer à la société civile immobilière Les Jardins du Lac la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.