CA Montpellier, 5e ch. civ., 15 octobre 2024, n° 21/03463
MONTPELLIER
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Foncière Tournezy (SCI)
Défendeur :
Trane France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Fillioux
Conseillers :
M. Garcia, Mme Strunk
Avocats :
Me Castagne, Me Deudon, Me Anahory
EXPOSE DU LITIGE
Par acte authentique reçu le 29 mai 2015, la SCI Foncière Tournezy a acquis d'une indivision composée par les sociétés Figesta et Grumbach Immobilier, des locaux commerciaux sis [Adresse 6] à [Localité 5].
Le lot 148 et 11 parkings extérieurs (n°62 à72) sont concernés par un contrat de bail commercial conclu le 15 décembre 2008 entre le propriétaire initial, la SAS SR3 MdB 1, aux droits de laquelle intervient la SCI Foncière Tournezy, et la société Trane France SAS (RCS 803 519 800), qui a succédé à la société « société Trane » (RCS 306 050 188) suivant avenant en date du 13 août 2015.
Dans le cadre de l'exécution de ce bail commercial, il a été prévu le versement par le preneur d'un dépôt de garantie de 6.959,44 euros outre le règlement d'un loyer trimestriel de 6.959,44 euros hors taxes et hors charges.
Considérant que la société Trane France a abandonné les locaux loués au début de l'année 2016, la société Foncière Tournezy a dénoncé à sa locataire, par un courrier adressé avec accusé de réception le 19 décembre 2016, cet abandon ainsi que le délabrement des locaux laissés vacants depuis plus d'un an, exigeant dès lors une remise en état conformément aux clauses du bail, en listant les désordres suivants :
- Vitres brisées et sales ;
- Murs et sols présentant des attaches dangereuses ;
- Murs des bureaux ternis et dégradés ;
- Dalles de faux plafond tachées ou manquantes ;
- Sols et sanitaires souillés ;
- Grilles de sécurité arrachées ;
- Gaines et huisseries détériorées.
Par acte en date du 12 juin 2017, les sociétés « SAS Société Trane» et « Trane France» ont donné congé à la requérante à effet au 31 janvier 2018.
Un état des lieux a été établi par huissier le 31 janvier 2018.
La SCI a ensuite fait établir un second constat de l'état des lieux le 26 février 2018.
Soutenant que les locaux restitués présentaient diverses dégradations, par un courrier adressé avec accusé de réception le 23 mars 2018 réceptionné le 3 avril 2018, la SCI Foncière Tournezy avisait le preneur de la non restitution du dépôt de garantie de 6.959,44 € tout en le mettant en demeure de régler une somme de 33.337,48 €.
En l'absence de réponse positive et sur assignation délivrée par la SCI Foncière Tournezy, le tribunal judiciaire de Montpellier, par jugement en date du 13 avril 2021 :
Dit que la SAS Trane France est redevable, à l'égard de la SCI Foncière Tournezy de la somme de 5 383,20 € au titre des frais de réparation de la climatisation et de nettoyage de la façade ;
Déboute la société Foncière Tournezy du surplus de sa demande au titre des travaux ;
Déboute la société Foncière Tournezy de sa demande en paiement de la franchise de loyer ;
Déboute la société Foncière Tournezy de sa demande de dommages et intérêts ;
Ordonne la compensation entre les créances réciproques des parties ;
Condamne en conséquence, la société Foncière Tournezy à payer à la SAS TRANE France la somme de 1.141,80 € ;
Déboute la SCI Foncière Tournezy de sa demande de paiement d'intérêts sur le montant des travaux à la charge de la SAS Trane France ;
Déboute la SAS Trane France de sa demande de dommages et intérêts,
Condamne la SAS Trane France à payer à la SCI Foncière Tournezy la somme de 2500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette les demandes plus amples ou contraires ;
Condamne la SAS Trane France aux dépens dont la distraction est ordonnée au profit de Maître Hélène Castage, avocat au barreau de Montpellier ;
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Le premier juge considère tout d'abord que les locaux litigieux présentaient un état de vétusté démontré par le preneur lors de son entrée dans les lieux ce qui lui permet d'écarter la présomption édictée à l'article 1731 du code civil. Il estime néanmoins que le preneur ne démontre pas le défaut d'exécution des travaux incombant au bailleur comme le prévoit le bail initial.
Par ailleurs, le tribunal examine l'application de l'article 13 des conditions particulières et 13.8§2 des conditions générales du contrat de bail à la lumière de la nature des travaux dont il est réclamé paiement pour déterminer s'il s'agit de travaux de grosses réparations ou des travaux d'entretien. Le premier juge considère à cet effet que le dépannage de la climatisation et la réfection de la façade incombent au preneur tout en déboutant le bailleur des demandes portant sur les murs, cloisons sanitaires ainsi que la mise aux normes des personnes à mobilité réduite.
S'agissant de la franchise des loyers, il la rejette considérant que les travaux supportés par le nouveau locataire concernaient l'aménagement des locaux et non leur réparation.
En réponse aux demandes indemnitaires présentées par la SCI Foncière Tournezy, le tribunal les rejette soulignant le défaut de preuve du non-respect de l'obligation de garnissement et d'un préjudice.
S'agissant de la demande de dommages et intérêts présentée par la SAS Trane France, le premier juge la rejette au motif qu'elle ne démontre pas la défaillance du bailleur dans le respect de son obligation d'entretien et l'exécution des travaux de réparation de la toiture.
La SCI Foncière Tournezy a relevé appel de la décision par déclaration au greffe du 28 mai 2021.
Dans ses dernières conclusions du 18 février 2022, la société Foncière Tournezy demande à la cour, en application des articles 1134, 1720 et 1347 du code civil, l'article R 145-23 du code de commerce, de :
Réformer la décision du tribunal judiciaire de Montpellier en ce qu'elle a :
Débouté la société Foncière Tournezy du surplus de sa demande au titre des travaux ;
Débouté la société Foncière Tournezy de sa demande en paiement de la franchise de loyer ;
Débouté la société Foncière Tournezy de sa demande de dommages et intérêts ;
Condamné en conséquence, la société Foncière Tournezy à payer à la SAS TRANE France la somme de 1 141,80 € ;
Débouté la SCI Foncière Tournezy de sa demande de paiement d'intérêts sur le montant des travaux à la charge de la SAS Trane France ;
Statuant à nouveau,
Condamner la société la société Trane France SAS à lui payer les sommes suivantes :
- 24.113,72 € correspondant aux devis AB STRUCTURES (devis du 8 février 2018 relatif à la remise en peinture des murs et cloisons, des sols, de sanitaires et de mise aux normes PMR pour un montant de 19.493,72 € TTC auquel il convient d'ajouter le coût de la mise aux normes PMR à hauteur de 4.620 € TTC) outre intérêt légaux à compter de la mise en demeure réceptionnée le 4 avril 2018 ;
- 2.623,20 € correspondant aux devis GAYRAUD électricité du 14 mars 2018 relatif au dépannage sur climatisation outre intérêt légaux à compter de la mise en demeure réceptionnée le 4 avril 2018 ;
- 2.760 € correspondant aux devis OMNIUM FACADES du 15 mars 2018 relatif au traitement des façades taguées outre intérêt légaux à compter de la mise en demeure réceptionnée le 4 avril 2018 ;
- 10 800 € correspondant à la franchise de loyers de 4 mois allouée au locataire suivant, correspondant à la période de réalisation des travaux qui auraient dû être effectués par l'intimée outre intérêt légaux à compter de la mise en demeure réceptionnée le 4 avril 2018 ;
- 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat et résistance
abusive ;
Ordonner que le montant du dépôt de garantie de 6.959,44 € soit compensé avec les condamnations ci-dessus ;
Débouter la société Trane France SAS de l'intégralité de ses moyens, fins et conclusions et notamment de son appel incident et ses demandes reconventionnelles ;
La condamner à lui payer une somme de 4.000 € au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux dépens distraits au profit de Maître Helène Castagne, avocat au barreau de Montpellier.
L'appelante se réfère aux dispositions du contrat de bail, ainsi qu'aux stipulations des articles 1730 et suivants du code civil pour solliciter la prise en charge financière par le preneur du coût de la remise en état des lieux considérant que les désordres sont de nature locative et relèvent de l'obligation d'entretien incombant à tout locataire.
Elle se réfère ainsi au premier constat d'état des lieux de sortie, ainsi qu'au second constat daté du 26 février 2018 révélant divers désordres (présence de trous et de fissures sur la quasi-totalité des murs ; murs crépis décroutés ; ouvertures obturées ; voiles posés sur les grilles de protection des fenêtres ; façades intégralement taguées ; dalles de faux plafond auréolées ou manquantes ; traces d'infiltrations) pour réclamer la prise en charge du remplacement de la climatisation, des travaux de ravalement, la remise en état et la mise aux normes, ainsi que la perte de loyers dont le locataire suivant a été dispensé sur la période de réalisation des travaux.
La SCI Foncière Tournezy critique le jugement déféré qui a retenu la vétusté des locaux lors de la prise à bail pour exonérer ainsi le preneur de toute obligation de remise en état soutenant pour sa part que le bailleur a consenti une franchise de loyer de 6 mois pour tenir compte de cette vétusté qui ne pouvait donc être de nouveau considérée par le premier juge.
Elle réclame en outre l'application des dispositions de l'article 13.8 du bail rappelant que le preneur disposait de 15 jours suivant la réception des devis et estimations de remise en état, soit le 23 mars 2018, pour faire connaître ses observations et qu'à défaut, les pièces communiquées ne pouvaient plus être critiquées. Selon elle, l'intimée est tenue de régler les sommes indiquées dans les devis non contestés dans les délais par simple application des dispositions cntractuelles. Elle considère sur cette question que le premier juge ne pouvait imposer une condition non prévue au contrat en imposant un examen de la nature des travaux par la juridiction pour déterminer la partie qui devait en assumer la charge.
Elle conteste en dernier lieu la bonne foi du preneur dans l'exécution du bail et dénonce sa résistance abusive arguant de l'abandon des lieux depuis le début de l'année 2016 en dépit de l'obligation de garnissement ayant contribué à la dégradation des lieux.
En réponse aux moyens exposés par l'intimée, la société appelante conteste la violation de l'obligation de délivrance soulevée plus de 12 années après l'entrée dans les lieux de la société Trane France qui a accepté les locaux en l'état étant précisé qu'aucun manquement du bailleur n'est justifié.
Elle conteste l'impropriété de l'immeuble à sa destination soutenant pour sa part que les désordres résultent du défaut d'entretien des locaux par le preneur. Elle relève sur ce point un défaut de preuve reprenant sur ce point l'analyse du premier juge.
Enfin, l'appelante relève que les réparations d'entretien et de remise en état réclamées ne correspondent pas à des travaux de grosses réparations lui incombant, ni à des travaux de ravalement de façade mais bien à un nettoyage.
Elle conteste pour finir l'application de l'article L 145-40-1 du code de commerce inapplicable au bail litigieux.
Dans ses dernières conclusions du 22 novembre 2021, la SAS Trane France demande à la cour de :
- Confirmer le jugement dont appel à l'exception de la condamnation au paiement de la somme de 5383,20 euros et des 3 erreurs matérielles commises ;
Statuant à nouveau,
- Débouter également la société Foncière Tournezy de ses demandes ;
- Corriger les erreurs matérielles en ce sens :
Condamner la société Foncière Tournezy à restituer à la société Trane France SAS le dépôt de garantie réactualisé de 6.959,44 euros (et non 6525 €) ainsi que les intérêts légaux y afférents à compter de la prise de congé au 31 janvier 2018 ;
Condamner la société Foncière Tournezy à payer à la société Trane France SAS la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 ainsi que les entiers dépens ;
Y ajoutant,
Condamner la société Foncière Tournezy à payer à la société Trane France SAS la somme de 2.500 euros à titre de dommages-intérêts tant pour les préjudices soufferts pendant et après le bail qu'en raison des procédures véritablement abusives.
L'intimée prétend en premier lieu qu'à la signature du bail, elle a été contrainte d'effectuer de nombreux travaux afin de rendre les locaux conformes à leur destination et rappelle que lors de son entrée dans les lieux le 1er février 2009, les locaux ne bénéficiaient toujours pas d'une installation électrique. Elle soutient que l'immeuble était vétusté et subissait de nombreuses infiltrations.
Elle prétend en outre qu'en raison de la dégradation du quartier, le bailleur précédent a refusé d'engager toute dépense d'entretien entraînant ainsi une dégradation du bâti dont la valeur a chuté comme le démontre le prix de vente obtenu le 29 mai 2015.
En dépit du non-respect par le bailleur de ses obligations de délivrance et d'entretien, l'intimée fait valoir qu'elle a réglé les loyers sans difficulté ce qui justifie le rejet des prétentions exposées par la société Foncière Tournezy. L'état de vétusté initial, l'absence d'entretien récurrent commandent le rejet de demandes présentées par le bailleur.
L'intimée estime en outre que de nombreuses réparations dont se prévaut le bailleur n'ont pas à être mises à sa charge s'agissant de travaux de grosses réparations. Elle estime à cet égard que les conditions particulières du contrat seules doivent être appliquées lesquelles mettent à la charge du bailleur les travaux de grosses réparations incluant le traitement des façades.
Enfin, elle indique que si aucun état des lieux d'entrée n'a été établi, cela n'autorise pas le bailleur à se prévaloir de la présomption édictée par l'article 1731 du code civil alors qu'il résulte clairement du contrat de bail que les locaux étaient vétustes.
L'intimée sollicite donc la restitution du dépôt de garantie et soutient notamment que la climatisation a été posée par ses soins et qu'elle a été abîmée par les infiltrations si bien qu'elle n'a pas à en supporter à nouveau le coût.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du19 août 2024.
MOTIFS
1/ Sur l'obligation de paiement :
Sur l'exception d'inexécution :
La société Trane conteste la demande en paiement présentée par la SCI Foncière Tournezy en opposant une exception d'inexécution considérant que le bailleur a manqué tant à son obligation de délivrance qu'à son obligation d'entretien.
S'agissant du premier manquement, il n'est nullement contesté que l'article 28§2, relatif aux conditions particulières applicables au cas d'espèce, énonce que le preneur bénéficie d'une franchise de loyer en principal HT et HC de 6 mois commençant à courir le jour de la prise d'effet du bail jusqu'au 31 juillet 2019 à charge pour lui de réaliser « des travaux d'installations de tel sorte que l'aménagement prévu est celui décrit sur le plan annexé » tandis que le bailleur s'engage « à réaliser à ses frais, la remise en état ponctuelles des locaux suivant le devis établi par la société A4 dont une copie est annexée aux présentes ».
Le devis établi par la société A4 le 23 septembre 2008 pour un montant de 14.408,93 euros liste les prestations suivantes :
- Arrachage du revêtement de sol actuel, emport des gravats, application d'un fixateur, d'un ragréage, fourniture et pose de dalles 30x30, dépose de la banque existante et évacuation, mise en jeu de la porte d'accès au bureau, mise en jeu de la porte d'entrée au local, mise en place de crémone pompier, remplacement du vitrage Stopsol, remplacement d'une porte à âme pleine compris béquille chromé à condamnation, remplacement de wc (2u), fourniture et pose l'ensemble, dépose sorte extérieur, remplacement de crémone aluminium sur ouvrant extérieur et mise en jeu, nettoyage général, remplacement panneau isolant épaisseur 20mm tôle alu.
L'examen des photographies prises lors de la signature du bail ne met pas en évidence le non-respect par le bailleur de son engagement à effectuer les prestations susvisées et ce d'autant que la société Trane ne justifie pas d'une mise en demeure ou de courrier rappelant le bailleur à son obligation. Il apparaît en outre que la présence d'amiante relevée dans les locaux lors d'un diagnostic effectué en 2005 n'a plus été mentionnée dans les diagnostics établis postérieurement dans le cadre des ventes passées en 2011 puis 2015, ce qui permet d'en déduire le traitement de cette difficulté.
En outre, le locataire a accepté de procéder à l'aménagement des lieux pour permettre l'exercice de son activité en contrepartie d'une dispense de loyer durant 6 mois de sorte qu'il ne peut être fait grief au bailleur d'avoir manqué à son obligation de délivrance.
Ce moyen sera donc rejeté.
S'agissant du manquement à l'obligation d'entretien, la société Trane fait grief au bailleur d'avoir omis de réaliser des travaux d'entretien tout au long de l'exécution du bail.
Il résulte des pièces produites aux débats que la société Trane a eu à subir des infiltrations provenant de la toiture comme en témoignent un mail daté du 23 juillet 2010 et les photographies qui y sont jointes.
Le preneur justifie de l'envoi d'un mail adressé le 11 avril 2012 à Grumbach-immobilier, ancien propriétaire du local, pour dénoncer un défaut d'étanchéité du toit et une aggravation des dommages au fur et à mesure des épisodes pluvieux.
Il est à relever que la SCI Foncière Tournezy n'était pas propriétaire des locaux au moment de cet envoi et qu'après ce mail, le locataire n'a plus fait valoir de dysfonctionnements affectant les locaux pas plus qu'il ne justifie avoir mis en demeure le bailleur d'engager des travaux de réparation laissant ainsi supposer que la difficulté tenant au problème d'étanchéité de la toiture a été traité.
Il ne peut donc être retenu à l'encontre de la société appelante un comportement fautif de nature à justifier le rejet de sa demande en paiement.
Sur les dispositions applicables :
La SCI Foncière Tournezy justifie sa demande en paiement par l'application des dispositions des articles 13.4.1, 13.4.2 et 13.8§2 relatifs aux conditions générales du bail commercial signé le 15 décembre 2008 tout en se référant aux articles 1730 et suivants du code civil qui imposent au preneur la restitution de la chosé louée dans le même état qu'en début de contrat en-dehors des détériorations liées à la vétusté ou à la force majeure.
Les clauses du bail sont ainsi rédigées :
Article 13.4.1
« Le preneur jouira des lieux loués en bon père de famille et les entretiendra ' en parfait état, il effectuera en outre à ses frais, pendant toute la durée du bail, tous travaux de réparations, réfections, remplacements, y compris ceux relevant de l'article 606 du code civil, ou mises aux normes de quelque nature ou importance qu'ils soient, qui seraient nécessaires ou utiles au fur et à mesure qu'ils le seront,' y compris ceux qui seraient dus à la vétusté, à la force majeure ou qui seraient imposés par l'administration, par les lois ou les règlements.
Il devra notamment, sans que cette liste soit limitative :
Entretenir et remplacer si nécessaire tous les équipements spécifiques (climatisation, ventilation, installations électriques, téléphone') conformément aux normes en vigueur et les rendre en parfait état d'utilisation ;
Effectuer à ses frais tout remplacement de compteur et toute modification de branchement ou d'installation pouvant être exigés par tout concessionnaire ou compagnie distributrice ;
Entretenir et remplacer si nécessaire les fermetures, volets, rideaux de fermeture et les rendre en parfait état de propreté, entretien et fonctionnement ;
Entretenir et remplacer si nécessaire les revêtements de sol et remédier à l'apparition de tâches, brûlures, déchirures ou toute dégradation en général ;
Entretenir les peintures et revêtements de mur ou cloisons en procédant à leur réfection chaque fois que nécessaire ;
Entretenir ou assumer la réfection lui-même si l'immeuble lui est loué en totalité, ou, s'il n'en loue qu'une partie rembourser au bailleur sa quote-part de l'entretien ou de la réfection des façades de l'immeuble '».
Article 13.4.2
« Le preneur fera son affaire personnelle pendant toute la durée du bail de la mise en conformité des locaux et de leur maintien permanent en conformité à toutes les règlementations administratives et de police applicables et à venir, tant auxdits locaux qu'à l'activité qui y sera exercée, et notamment à la réglementation gouvernant les établissements recevant du public et ou les immeubles de grande hauteur qui lui serait applicable... ».
Article 13.8§ 1
« Le preneur devra, au plus tard le jour à l'expiration du bail, restituer les locaux en parfait état' ».
Article 13.8§2
« Si, au vu de l'état des lieux de sortie, des travaux à la charge du preneur se révélaient nécessaires, ce dernier devra, dans les quinze jours de la notification qui lui sera faite par le bailleur des devis ou des estimations des coûts établis' donner son accord ou faire connaître ses observations détaillées et justifiées sur lesdits devis ou estimations de coûts.
En cas de silence ou de contestation non justifiée du preneur avant l'expiration de ce délai, les devis ou estimations de coûts présentés par le bailleur ne pourront plus être contestés par le preneur et seront réputés acceptés par lui.
Le preneur sera tenu de régler au bailleur sans délai une indemnité forfaitaire correspondant au montant des travaux de remise en état.
Cette indemnité sera acquise au bailleur sans que celui-ci soit tenu de réaliser les travaux pour quelque raison que ce soit ».
L'intimée conteste cette analyse ainsi que l'application des dispositions contractuelles susvisées arguant de la contradiction existant entre conditions générales et particulières pour réclamer la seule application des conditions particulières.
Celles-ci prévoient notamment en leur article 33 intitulé « Modifications du bail » que :
- article 8 « charges et accessoires du loyer » : ' il est toutefois précisé que les grosses réparations de l'article 606 du code civil demeureront à la charge du bailleur ;
- article 13 « travaux » : d'un commun accord entre les parties, le bailleur prend à sa charge les réparations prévues à l'article 606 alinéas 1 er 2 du code civil ainsi que les travaux de réfection des façades.
Il résulte de la comparaison des dispositions générales et particulières une discordance quant à la prise en charge des « travaux de réparations, réfections, remplacements, y compris ceux relevant de l'article 606 du code civil, ou mises aux normes de quelque nature ou importance » qui incombe au preneur selon les conditions générales alors que les conditions particulières imposent au bailleur la prise en charge des travaux de grosses réparations résultant de l'article 606.
Dès lors, en présence d'une contradiction effective entre ces dispositions contractuelles, le litige doit s'apprécier à l'aune des dispositions particulières.
Il s'ensuit que la SCI Foncière Tournezy ne peut exiger une simple application des dispositions générales prévues à l'article 13.8§2 à savoir une acceptation implicite par le preneur de régler les travaux réclamés qui se déduirait d'un défaut de réponse apportée dans les 15 jours à compter de la réception la demande en paiement présentée par le bailleur et des devis relatifs aux travaux de réfection.
C'est donc à bon droit que le premier juge a examiné les prétentions de la société appelante en procédant à une qualification des travaux au visa de l'article 606 du code civil auquel se réfère l'article 33 des conditions particulières.
Sur les travaux incombant au preneur :
Dans la mise en demeure adressée le 23 mars 2018, la SCI Foncière Tournezy réclame la condamnation de la société Trane à prendre en charge les réparations suivantes :
Remise en peinture des murs et cloisons, des sols, sanitaires et de mise aux normes PMR pour un montant total de 24.113,72 euros ;
Dépannage de la climatisation pour un montant de 2.623,20 euros ttc ;
Traitement de la façade taguée : 2.760 euros.
Elle produit deux procès-verbaux de constat datés du 31 janvier 2018 puis 26 février 2018 auquel elle se réfère pour justifier du bien-fondé de la demande en paiement.
En premier lieu, il doit être souligné que les trois postes d'indemnisation susvisés correspondent à des réparations d'entretien qui incombent en conséquence au preneur.
En second lieu, il convient de confirmer l'analyse du premier juge qui a écarté la présomption édictée à l'article 1731 du code civil, dans la mesure où les photographies produites lors de l'entrée dans les lieux démontrent que le local était dans un état vétuste, les sols et les charpentes étant nus.
L'appréciation de l'obligation de réparation de la société Trane doit en conséquence tenir compte de ces deux éléments.
Pour le surplus, l'analyse du premier juge sera confirmée en ce qu'il a fait une juste appréciation des réparations incombant au preneur et notamment en ce qu'il a écarté la demande relative à la réfection des peintures, cloisons et sols dont la dégradation est liée à l'usure après une occupation de près de 10 ans étant relevé que les photographies produites font déjà état de l'existence de fissures relevées par l'huissier de justice dans le constat établi le 31 janvier 2018.
S'agissant de la mise aux normes « PMR », le premier juge a estimé que le bailleur ne démontrait pas que ces normes s'appliquaient à la société Trane dont rien ne démontre l'accueil de public. La décision déférée sera confirmée.
Enfin, s'agissant de l'entretien d'un élément d'équipement, à savoir la climatisation, et de la réfection de la façade taguée, la décision sera confirmée en ce qu'elle a mis les dépenses à la charge du preneur qui ne justifie pas de l'entretien régulier de la climatisation étant relevé que le nettoyage de la façade relève de l'entretien du bâtiment incombant au preneur en application de l'article 606 du code civil.
Il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société intimée au paiement d'une somme de 5.383,20 euros.
Sur la franchise de loyer :
La société appelante réclame la somme de 10 800 € correspondant à la franchise de loyers de 4 mois allouée au locataire suivant, correspondant à la période de réalisation des travaux rendus nécessaires par l'état de délabrement des locaux imputable à la société Trane qui doit donc supporter le coût d'une telle franchise.
Le premier juge a écarté cette demande sur le constat que cette franchise a été accordée au nouveau locataire afin qu'il effectuer les travaux d'aménagement dans le local.
La lecture du contrat de bail signé par l'appelante et la société Vitalaire le 23 février 2018, et plus précisément l'article 16, confirme cette analyse puisqu'il est bien spécifié que « cette dernière réduction a été consentie par le bailleur au preneur en contrepartie de la participation financière du bailleur à la réalisation des travaux d'aménagement mentionnés à l'article 7-1-2 ».
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Foncière Tournezy de cette prétention.
2/ Sur la demande de dommages et intérêts présentée par l'appelante :
La société Foncière Tournezy réclame des dommages et intérêts afin de réparer le préjudice né du manquement par la société Trane à son obligation de garnissement telle qu'elle résulte du contrat de bail.
Comme l'a justement relevé le premier juge, aucun élément ne démontre que la société Trane n'a pas donné suite à la mise en demeure adressée par le bailleur le 19 décembre 2016 aux termes de laquelle il sollicitait le garnissement des locaux, ni d'ailleurs que le bâtiment a été dégarni. Aucune nouvelle pièce n'est produite en appel de nature à modifier cette première analyse qui sera en conséquence entérinée par la cour d'appel.
Enfin, il n'est nullement justifié par l'appelante de l'attitude fautive ou la résistance abusive de la part de la société intimée qui a respecté ses obligations notamment par le paiement régulier des loyers et charges.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par la société Foncière Tournezy.
3/ Sur la demande reconventionnelle de l'intimée :
Sur les dommages et intérêts :
La société Trane réclame une indemnisation d'un montant de 2.500 euros à titre de dommages-intérêts tant pour les préjudices soufferts pendant et après le bail qu'en raison des procédures véritablement abusives.
Or, elle ne justifie pas en appel d'un comportement fautif imputable à la SCI Foncière Tournezy de nature à motiver le bien-fondé d'une telle demande dont elle sera en conséquence déboutée.
Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur la restitution du dépôt de garantie :
La société Trane se prévaut d'un dépôt de garantie réactualisé d'un montant de 6.959,44 euros et non de 6.525 euros comme retenu par erreur par le premier juge.
Le contrat de bail commercial signé le 15 décembre 2008 fait état du versement à la signature d'un dépôt de garantie représentant le quart du loyer annuel toutes taxes comprises à titre de garantie à l'exécution de toutes les charges et conditions du bail par le preneur ce qui correspond effectivement à la somme de 6.525 euros.
Si ce contrat prévoit qu'en cas de révision ou de variation du prix du loyer, ce dépôt de garantie sera réajusté proportionnellement au nouveau loyer afin de le maintenir au quart du loyer annuel ttc, il n'est pas justifié par la société Trane du réajustement de la caution.
Il s'ensuit que la société Trane pourra récupérer, après compensation des créances telle qu'elle a été retenue par le premier juge, la somme de 1.141,80 euros au titre du solde du dépôt de garantie.
4/ Sur les demandes accessoires :
La décision entreprise sera confirmée sur les dépens et les frais irrépétibles.
En application de l'article 696 du code de procédure civile, il y a lieu de condamner l'appelante, qui succombe, à la charge des dépens ainsi qu'à la somme de 2.500 euros en application des dispositions au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant après en avoir délibéré conformément à la loi, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 13 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Montpellier en toutes ses dispositions
Y ajoutant,
Condamne la SCI Foncière Tournezy à payer à la société Trane la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamner la SCI Foncière Tournezy aux dépens d'appel.