Décisions
CA Versailles, ch. civ. 1-2, 15 octobre 2024, n° 24/00987
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 51C
Chambre civile 1-2
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 15 OCTOBRE 2024
N° RG 24/00987
N° Portalis DBV3-V-B7I-WLE5
AFFAIRE :
Epoux [L]
C/
Consorts [G]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Janvier 2024 par le Juge des contentieux de la protection de BOULOGNE BILLANCOURT
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 1123000349
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 15/10/24
à :
- Me Carine TARLET
- Me Mélina PEDROLETTI
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [V], [T], [Z] [L]
né le 27 Juin 1976 à [Localité 9]
Chez M. [S] [A]
[Adresse 2]
[Localité 7]
Madame [P], [N], [F], [I] [A] épouse [L]
née le 21 Mai 1980 à [Localité 9]
[Adresse 3]
[Localité 1] - BELGIQUE
représentés par Me Carine TARLET de la SELEURL CABINET TARLET, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 590 - N° du dossier E000463Y
Me Caroline CLEMENT-BIGORRE substituant Me Jacques ADAM, avocat - barreau de PARIS, vestiaire : D0781
APPELANTS
****************
Madame [C], [E], [H], [U] [J] [G]
née le 07 Septembre 1963 à [Localité 8] (92)
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 5]
Madame [M], [X], [I], [K], [D] [G]
née le 05 Mars 1956 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 7]
représentées par Me Mélina PEDROLETTI, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - N° du dossier 26381
Me Mylène LIMAZZI substituant Me Olivia ZAHEDI de la SELAS GOLDWIN PARTNERS, avocat - barreau de PARIS
INTIMÉES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 Juin 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Philippe JAVELAS, Président et Madame Anne THIVELLIER, Conseillère chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Madame Isabelle BROGLY, Magistrate honoraire,
Madame Anne THIVELLIER, Conseillère,
Greffière, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,
Greffière, lors du prononcé de la décision : Madame Céline KOC,
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte sous-seing privé du 22 décembre 2016, M. [V] [L] et Mme [P] [A] épouse [L] ont donné à bail à Mme [M] [G] et Mme [C] [G] un appartement situé [Adresse 4], moyennant un loyer de 2 030 euros outre une provision sur charges de 270 euros.
Les 30 juin et 6 juillet 2022, M. et Mme [L] ont fait délivrer à Mmes [G] un congé pour reprise pour y habiter à effet du 15 janvier 2023.
A défaut pour Mmes [G] d'avoir libéré les lieux à l'échéance, M. et Mme [L] ont, par actes de commissaire de justice signifiés les 15 mars et 12 avril 2023, fait assigner Mmes [G] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Boulogne-Billancourt aux fins de :
- valider le congé pour reprise délivré les 30 juin et 6 juillet 2022 à effet du 15 janvier 2023,
- constater que les locataires sont, depuis le 15 janvier 2023, déchues de plein droit de tout titre d'occupation sur le local litigieux,
- débouter les défenderesses de leurs demandes,
- subsidiairement, prononcer la résiliation du bail à compter de la décision à intervenir,
- ordonner leur expulsion et celle de tout occupant de son chef,
- supprimer le délai de deux mois en application de l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution,
- condamner in solidum les locataires au paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer courant en sus des charges, et ce jusqu'à restitution des clés du 15 janvier 2023 et jusqu'à la libération des lieux,
- condamner in solidum Mmes [G] au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel subi, soit la somme de 2 250 euros par mois à compter du 15 janvier 2023 et jusqu'à la libération des lieux,
- condamner in solidum Mmes [G] au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,
- condamner in solidum les locataires au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Par jugement contradictoire du 19 janvier 2024, le juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité de Boulogne Billancourt a :
- annulé les congés pour reprise délivrés respectivement le 30 juin 2022 à Mme [M] [G] et le 4 juillet 2022 à Mme [C] [G] par M. et Mme [L],
- constaté que le bail est reconduit pour une nouvelle période triennale à compter du 16 janvier 2023,
- rejeté la demande de résiliation du bail de M. et Mme [L],
- rejeté les demandes plus amples et contraires de M. et Mme [L],
- rejeté la demande reconventionnelle de Mmes [G],
- rejeté les demandes formulées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. et Mme [L] aux entiers dépens,
- rappelé que le jugement est de plein droit exécutoire par provision.
Par déclaration déposée au greffe le 13 février 2024, M. et Mme [L] ont relevé appel de ce jugement.
L'affaire a fait l'objet d'une fixation à bref délai en application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, selon avis du 8 mars 2024.
Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées le 31 mai 2024, M. et Mme [L], appelants, demandent à la cour de :
- infirmer le Jugement en ce qu'il :
* a rejeté leur demande de résiliation du bail
* a rejeté leurs demandes plus amples et contraires
* a rejeté les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* les a condamnés aux entiers dépens,
Statuant de nouveau,
- débouter Mmes [G] de leur demandes, fins et conclusions,
- prononcer la résiliation du bail à compter de la décision à intervenir,
- ordonner l'expulsion de Mmes [G] et de tous occupants de leurs chefs,
- supprimer le délai de deux mois en application de l'article L. 412-1 du code de procédures civiles d'exécution,
- condamner in solidum Mmes [G] au paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer courant en sus des charges, et ce jusqu'à restitution des clefs après déménagement complet à compter de la résiliation du bail,
- condamner in solidum Mmes [G] au paiement de 20 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et matériel subi,
- condamner in solidum Mmes [G] au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel,
- condamner in solidum Mmes [G] aux entiers dépens de l'instance distraits au profit de Me Tarlet, avocat, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées le 24 mai 2024, Mmes [G], intimées et appelantes à titre incident, demandent à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement rendu le 19 janvier 2024 par le tribunal de proximité de Boulogne-Billancourt, en ce qu'il a :
* annulé les congés pour reprise qui leur ont été délivrés respectivement le 30 juin 2022 et le 4 juillet 2022 par M. et Mme [L],
* constaté que le bail est reconduit pour une nouvelle période triennale à compter du 16 janvier 2023,
* rejeté la demande de résiliation du bail de M. et Mme [L],
* rejeté les demandes plus amples et contraires de M. et Mme [L],
* condamné M. et Mme [L] aux entiers dépens,
* rappelé que le jugement est de plein droit exécutoire par provision,
A titre subsidiaire,
- leur octroyer un délai de douze mois pour quitter le logement sis [Adresse 4],
En tout état de cause,
- infirmer le jugement rendu le 19 janvier 2024 par le tribunal de proximité de Boulogne-Billancourt, en ce qu'il a :
* rejeté leur demande reconventionnelle,
* rejeté les demandes formulées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter M. et Mme [L] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- condamner M. et Mme [L] à leur payer la somme de 10 000 euros au titre de leur préjudice moral,
- condamner M. et Mme [L] à leur payer la somme de 7 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civiles, outre les entiers dépens dont le montant sera recouvré par Me Pedroletti, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 6 juin 2024.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de résiliation du bail
M. et Mme [L] font grief au premier juge d'avoir rejeté leur demande de résiliation du bail aux motifs qu'ils ne rapportaient pas la preuve que le bien avait été effectivement sous-loué moyennant une contrepartie financière, et ce alors qu'il avait relevé le comportement mensonger de Mme [M] [G] et que les éléments en sa possession ne permettaient pas d'expliquer comment elle pouvait payer le loyer sans la contribution de M. [Y].
Ils font valoir qu'ils sont dans l'impossibilité matérielle de rapporter la preuve de paiements de la part de M. [Y] au profit de Mme [G] pour contribuer au paiement du loyer mais qu'ils peuvent rapporter la preuve de la sous-location par tout moyen et qu'elle résulte en l'espèce de tous les éléments versés aux débats et notamment du constat de commissaire de justice du 7 juillet 2023.
Ils relèvent qu'il en ressort que Mme [M] [G] ne vit pas seule, ce qu'elle a tenté de lui cacher et ce qu'elle n'aurait pas fait si elle hébergeait simplement un ami comme elle le prétendait alors. Ils ajoutent qu'il ne ressort pas de ce constat que M. [Y] serait son compagnon ni qu'il serait simplement hébergé alors qu'ils ont chacun leur chambre. Ils relèvent également que les revenus de Mme [M] [G] sont bien inférieurs au montant du loyer, de sorte qu'il est démontré qu'elle ne peut l'assumer seule et que M. [Y] en paye une partie grâce à ses revenus qui sont supérieurs aux siens. Ils indiquent également que Mme [M] [G] et M. [Y] n'ont pas déclaré cet hébergement aux services des impôts alors qu'ils en ont l'obligation.
Ils affirment que Mme [C] [G] ne vit plus dans les lieux et que M. [Y] n'occupe pas les lieux à titre gratuit et qu'il est bien sous-locataire de Mme [M] [G] et ce en infraction avec l'article 8 de la loi du 6 juillet 1989.
Ils font enfin valoir qu'en violation de l'article 1104 du code civil, Mmes [G] n'ont pas négocié ni exécuté de bonne foi le contrat de bail en ce qu'elles sont agi par ruse pour obtenir la signature du bail et qu'elles n'en ont pas respecté les règles en sous-louant une chambre. Ils ajoutent qu'elles ont tenté de manipuler les faits pour faire échec à un congé dont le caractère légitime et sérieux est démontré.
Ils affirment qu'il y a urgence à ce qu'ils récupèrent les lieux loués pour lesquels ils avaient donné congé à effet au 15 janvier 2023 alors que M. [L] a été contraint de revenir en France depuis le 17 octobre 2022 en raison de la fin de sa mission d'expatriation et que sa famille n'a pu le rejoindre faute de restitution de l'appartement.
Mmes [G] demandent quant à elles la confirmation du jugement critiqué en ce qu'il a rejeté la demande de résiliation du bail.
Elle font valoir que Mme [C] [G] a donné congé du bail le 27 juin 2022 réitéré le 16 juillet puis le 6 septembre 2022, de sorte qu'il n'est pas anormal qu'elle ne soit plus présente dans les lieux plus d'un an après. Elles ajoutent que M. et Mme [L] ne rapportent pas la preuve de ce qu'elle n'aurait jamais habité dans les lieux.
Elles relèvent que la sous-location, interdite, est le fait pour le locataire de se substituer un tiers à titre onéreux contrairement à l'hébergement, accepté dès lors qu'il est à titre gratuit, et qu'il ne remet pas en cause l'obligation du locataire d'occuper personnellement le bien loué.
Elles font valoir qu'il ressort du constat du commissaire de justice que des factures d'énergie sont bien au nom de Mme [M] [G], ce qui prouve qu'elle occupe le bien. Elles soutiennent que M. [Y], qui occupe les lieux, est son compagnon, âgé de 81 ans, malade et disposant de faibles revenus, et qu'elle ne perçoit aucune contrepartie onéreuse de sa part.
Elles ajoutent que la non-déclaration à l'administration fiscale de cet hébergement ne démontre pas que Mme [M] [G] percevrait des sous-loyers ou qu'elle confirmerait la sous-location. Ils relèvent que les allégations de M. et Mme [L] ne sont corroborées par aucune pièce alors que la charge de la preuve leur incombe.
Elles soutiennent que les loyers ont toujours été réglés à leur échéance et que Mme [M] [G] dispose d'une épargne suffisante pour subvenir à ses besoins et ne se trouve donc pas dans l'impossibilité de régler seule les loyers; que le fait que M. [Y] dispose de revenus de plus d'un tiers supérieurs aux siens ne démontre pas une sous-location illicite laquelle ne résulte pas davantage du fait qu'il ait une chambre à part, ces allégations portant par ailleurs atteinte à sa vie privée.
Sur ce,
En application de l'article 8 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire ne peut ni céder le contrat de location, ni sous-louer le logement sauf avec l'accord écrit du bailleur, y compris sur le prix du loyer.
Il en résulte que seule la cession et la sous-location sont interdites et non l'hébergement d'un tiers à titre gratuit, la qualification de sous-location interdite imposant de caractériser l'existence d'une obligation de paiement à la charge du tiers, en argent ou en nature, en contrepartie de cet hébergement. La charge de la preuve de l'existence d'une contrepartie onéreuse consentie par l'occupant au locataire principal appartient au bailleur et peut être rapportée par tout moyen.
En l'espèce, M. et Mme [L] produisent un constat de commissaire de justice réalisé le 7 juillet 2023 duquel il ressort que:
- les noms '[G] [Y]' sont apposés sur une des boites aux lettres dans le hall de l'immeuble,
- Mme [M] [G] lui a déclaré que Mme [C] [G] n'habite pas à cette adresse et que les requérants le savaient déjà,
- dans un premier temps, elle a refusé son entrée dans les lieux avant d'avoir l'accord de son avocat avant de se raviser ;
- elle lui a présenté une facture dématérialisée EDF à ses nom et prénom,
- elle lui a déclaré vivre seule dans l'appartement et qu'à sa demande de savoir pourquoi le nom [Y] apparaît sur sa boîte aux lettres, elle lui a déclaré qu'il s'agissait d'un ami qui reçoit de temps en temps du courrier à cette adresse et qui vient parfois dormir,
- dans la chambre située au fond à droite de l'appartement, était présent un homme déclarant s'appeler [B] [Y], né le 15 mars 1943 ; que sont présents dans cette pièce un sommier et un matelas avec des draps, une table, un bureau, une lampe de bureau, une chaise, un fauteuil, une télévision, un ordinateur, une imprimante, un radio-réveil, une corbeille à papier, un tapis et une armoire remplie de vêtements et sous-vêtements d'homme; et qu'en ouvrant l'armoire, M. [Y] s'est emporté violemment.
Il ressort en outre de l'avis d'imposition sur les revenus 2021 de Mme [M] [G] qu'elle a déclaré un revenu annuel de 11 625 euros, soit d'un montant inférieur au montant annuel du loyer. Il y est également fait mention de prélèvements forfaitaires déjà versés sur des revenus de capitaux mobiliers, permettant de corroborer ses allégations selon lesquelles elle disposerait d'une épargne pour faire face au paiement des loyers. L'avis d'imposition sur les revenus 2022 de M. [Y] fait apparaître qu'il a déclaré un revenu annuel de 17 009 euros, soit également inférieur au montant du loyer.
Il résulte ainsi de l'ensemble de ces éléments que M. [Y] est hébergé au domicile de Mme [M] [G], étant relevé qu'il n'est ni allégué que celle-ci ne résiderait plus dans les lieux.
Pour autant, le fait que cette dernière a pu faire des déclarations contradictoires quant à ses relations avec M. [Y], a été réticente à faire visiter les lieux au commissaire de justice et n'a pas déclaré aux services fiscaux l'hébergement de M. [Y], n'est pas suffisant à établir le caractère onéreux de cette occupation. Si ce dernier dispose d'une chambre à part, cela ne permet pas d'en déduire qu'il ne peut être le compagnon de Mmes [G] [M].
Les bailleurs n'apportent enfin aucun élément quant aux montants qui auraient été perçus par Mme [M] [G] en contrepartie.
En conséquence, comme l'a justement relevé le premier juge, M. et Mme [L] n'apportent pas la preuve d'un manquement grave et persistant la part des locataires à leurs obligations contractuelles.
Par ailleurs, il n'est pas établi que Mme [C] [G] ne résidait pas dans les lieux depuis l'origine du bail, qu'elle n'avait pas l'intention d'y habiter et qu'elle vivait avec son époux et sa fille, ce que M. et Mme [L] échouent à démontrer par les pièces produites (une page facebook non datée mentionnant '[C] [G] [W]' et le relevé de deux sociétés auxquelles elle participe). Il apparaît en outre qu'elle avait donné congé pour le mois de septembre 2022. En tout état de cause, les appelants n'explicitent pas en quoi cette situation aurait fait obstacle à la validité du congé alors que le juge des contentieux et de la protection a rappelé que sa validité s'appréciait pour chacun des locataires et les a annulés en raison de l'absence d'offre de relogement pour Mme [M] [G], locataire protégée, ce qui a été définitivement jugé.
Au surplus, M. et Mme [L] ne démontrent pas que les locataires auraient agi par ruse pour obtenir la signature du bail ni qu'elles auraient manipulé les faits pour faire échec au congé qu'ils leur avaient délivré, étant relevé que ce congé a été déclaré nul par le premier juge, ce que les appelants n'ont pas contesté en cause d'appel, de sorte que ce point a été définitivement tranché.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. et Mme [L] de leur demande en résiliation du bail et de leurs demandes subséquentes en expulsion et en paiement d'une indemnité d'occupation.
Sur la demande de dommages et intérêts des bailleurs
M. et Mme [L] demandent la condamnation de Mmes [G] à leur verser la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice matériel et moral.
Ils font valoir que l'appartement a été donné à bail à deux soeurs qui ont prétendu y vivre ensemble et dont les revenus permettaient le paiement du loyer mais qu'il est apparu que Mme [C] [G] n'a jamais habité dans les lieux et que Mme [M] [G] avait recours à la sous-location pour régler le loyer.
Ils soutiennent que ce montage a eu pour conséquence qu'ils n'ont pu emménager dans leur appartement avec leur quatre enfants du fait que le congé valablement délivré en fin d'expatriation était voué à l'échec en raison d'un mensonge sur l'occupation des lieux.
Ils font état d'un préjudice matériel et moral en résultant en ce que M. [L] travaille à nouveau en France depuis le mois d'octobre 2022 et qu'en l'absence de départ des locataires, son épouse et ses enfants ont été contraints de demeurer en Belgique où il retourne chaque fin de semaine, ce qui engendre un coût financier et constitue un préjudice moral en raison de cette séparation et de l'éloignement géographique.
Mmes [G] demandent la confirmation de ce chef du jugement.
Elles rappellent que les congés n'ont pas été régulièrement délivrés comme l'a jugé le premier juge sans que les bailleurs n'en demandent l'infirmation, de sorte qu'elles n'avaient pas à restituer l'appartement, ajoutant qu'ils sont donc sont seuls responsables de cette situation.
Elles font valoir qu'ils ne justifient pas préjudices dont ils font état au vu des pièces versées aux débats.
Sur ce,
L'article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer .
En l'espèce, les appelants échouant à démontrer un comportement fautif de la part des locataires et un lien de causalité avec le préjudice dont ils font état puisque le bail n'est pas résilié et que les locataires n'ont pas donc pas l'obligation de libérer les lieux, il convient en conséquence de les débouter de leur demande en dommages et intérêts et de confirmer le jugement déféré de ce chef.
Sur la demande en dommages et intérêts de Mmes [G]
Mmes [G] demandent la condamnation de M. et Mme [L] à leur verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil.
Elles font valoir que M. et Mme [L] ont voulu les tromper sur l'étendue de leurs droits, ce qui démontre leur mauvaise foi dans la négociation et l'exécution du contrat et ce qui a eu pour conséquence de les soumettre à un grave état d'anxiété, surtout pour Mme [M] [G] du fait de l'incertitude pesant sur la situation de son logement et un éventuel relogement au regard de sa situation financière personnelle et financière alors que les bailleurs disposent d'une situation financière stable.
Elles soutiennent que l'acharnement dont font preuve M. et Mme [L] est le témoin de leur mauvaise foi manifeste dans la mesure où ils ont une parfaite connaissance de la situation et persistent à demander la résiliation du bail alors qu'elles ne font que solliciter l'application de la loi du 6 juillet 1989 d'ordre public.
M. et Mme [L] s'opposent à cette demande et font valoir que Mme [C] [G] qui n'a jamais habité dans les lieux et à tout le moins les a quittés avant l'échéance du congé, ne justifie donc d'aucun préjudice.
Ils relèvent que Mme [M] [G] ne justifie aucunement de son état d'anxiété et qu'elles ont touts deux agi de manière déloyale au détriment de leur famille, sans rechercher un nouveau logement alors qu'elle reconnaît implicitement qu'elle devrait quitter les lieux.
Sur ce,
En application de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
En l'espèce, Mmes [G] ne démontrent pas de faute contractuelle de la part des bailleurs. En effet, le fait de délivrer un congé déclaré non régulier par la suite ne saurait suffire à caractériser un tel comportement.
Le fait pour M. et Mme [L], qui ont pu se méprendre sur l'étendue de leurs droits, de poursuivre devant la cour leur demande de résiliation du bail dont ils avaient été déboutés en première instance, ne saurait davantage constituer une faute.
En outre, elles ne justifient nullement du préjudice qu'elles allèguent, aucune pièce n'étant produite à cet effet.
Il convient en conséquence de débouter Mmes [G] de leur demande et de confirmer le jugement déféré de ce chef.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
M. et Mme [L], qui succombent devant la cour, sont condamnés aux dépens d'appel, les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et aux frais irrépétibles étant confirmés.
M. et Mme [L] sont condamnés à verser à Mmes [G] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions dévolues à la cour ;
Condamne M. [V] [L] et Mme [P] [A] épouse [L] à payer à Mme [M] [G] et Mme [C] [G] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [V] [L] et Mme [P] [A] épouse [L] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par Me Pedroletti en application de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Céline KOC, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, Le Président,
DE
VERSAILLES
Code nac : 51C
Chambre civile 1-2
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 15 OCTOBRE 2024
N° RG 24/00987
N° Portalis DBV3-V-B7I-WLE5
AFFAIRE :
Epoux [L]
C/
Consorts [G]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Janvier 2024 par le Juge des contentieux de la protection de BOULOGNE BILLANCOURT
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 1123000349
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 15/10/24
à :
- Me Carine TARLET
- Me Mélina PEDROLETTI
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [V], [T], [Z] [L]
né le 27 Juin 1976 à [Localité 9]
Chez M. [S] [A]
[Adresse 2]
[Localité 7]
Madame [P], [N], [F], [I] [A] épouse [L]
née le 21 Mai 1980 à [Localité 9]
[Adresse 3]
[Localité 1] - BELGIQUE
représentés par Me Carine TARLET de la SELEURL CABINET TARLET, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 590 - N° du dossier E000463Y
Me Caroline CLEMENT-BIGORRE substituant Me Jacques ADAM, avocat - barreau de PARIS, vestiaire : D0781
APPELANTS
****************
Madame [C], [E], [H], [U] [J] [G]
née le 07 Septembre 1963 à [Localité 8] (92)
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 5]
Madame [M], [X], [I], [K], [D] [G]
née le 05 Mars 1956 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 7]
représentées par Me Mélina PEDROLETTI, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - N° du dossier 26381
Me Mylène LIMAZZI substituant Me Olivia ZAHEDI de la SELAS GOLDWIN PARTNERS, avocat - barreau de PARIS
INTIMÉES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 Juin 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Philippe JAVELAS, Président et Madame Anne THIVELLIER, Conseillère chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Madame Isabelle BROGLY, Magistrate honoraire,
Madame Anne THIVELLIER, Conseillère,
Greffière, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,
Greffière, lors du prononcé de la décision : Madame Céline KOC,
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte sous-seing privé du 22 décembre 2016, M. [V] [L] et Mme [P] [A] épouse [L] ont donné à bail à Mme [M] [G] et Mme [C] [G] un appartement situé [Adresse 4], moyennant un loyer de 2 030 euros outre une provision sur charges de 270 euros.
Les 30 juin et 6 juillet 2022, M. et Mme [L] ont fait délivrer à Mmes [G] un congé pour reprise pour y habiter à effet du 15 janvier 2023.
A défaut pour Mmes [G] d'avoir libéré les lieux à l'échéance, M. et Mme [L] ont, par actes de commissaire de justice signifiés les 15 mars et 12 avril 2023, fait assigner Mmes [G] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Boulogne-Billancourt aux fins de :
- valider le congé pour reprise délivré les 30 juin et 6 juillet 2022 à effet du 15 janvier 2023,
- constater que les locataires sont, depuis le 15 janvier 2023, déchues de plein droit de tout titre d'occupation sur le local litigieux,
- débouter les défenderesses de leurs demandes,
- subsidiairement, prononcer la résiliation du bail à compter de la décision à intervenir,
- ordonner leur expulsion et celle de tout occupant de son chef,
- supprimer le délai de deux mois en application de l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution,
- condamner in solidum les locataires au paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer courant en sus des charges, et ce jusqu'à restitution des clés du 15 janvier 2023 et jusqu'à la libération des lieux,
- condamner in solidum Mmes [G] au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel subi, soit la somme de 2 250 euros par mois à compter du 15 janvier 2023 et jusqu'à la libération des lieux,
- condamner in solidum Mmes [G] au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,
- condamner in solidum les locataires au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Par jugement contradictoire du 19 janvier 2024, le juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité de Boulogne Billancourt a :
- annulé les congés pour reprise délivrés respectivement le 30 juin 2022 à Mme [M] [G] et le 4 juillet 2022 à Mme [C] [G] par M. et Mme [L],
- constaté que le bail est reconduit pour une nouvelle période triennale à compter du 16 janvier 2023,
- rejeté la demande de résiliation du bail de M. et Mme [L],
- rejeté les demandes plus amples et contraires de M. et Mme [L],
- rejeté la demande reconventionnelle de Mmes [G],
- rejeté les demandes formulées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. et Mme [L] aux entiers dépens,
- rappelé que le jugement est de plein droit exécutoire par provision.
Par déclaration déposée au greffe le 13 février 2024, M. et Mme [L] ont relevé appel de ce jugement.
L'affaire a fait l'objet d'une fixation à bref délai en application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, selon avis du 8 mars 2024.
Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées le 31 mai 2024, M. et Mme [L], appelants, demandent à la cour de :
- infirmer le Jugement en ce qu'il :
* a rejeté leur demande de résiliation du bail
* a rejeté leurs demandes plus amples et contraires
* a rejeté les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* les a condamnés aux entiers dépens,
Statuant de nouveau,
- débouter Mmes [G] de leur demandes, fins et conclusions,
- prononcer la résiliation du bail à compter de la décision à intervenir,
- ordonner l'expulsion de Mmes [G] et de tous occupants de leurs chefs,
- supprimer le délai de deux mois en application de l'article L. 412-1 du code de procédures civiles d'exécution,
- condamner in solidum Mmes [G] au paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer courant en sus des charges, et ce jusqu'à restitution des clefs après déménagement complet à compter de la résiliation du bail,
- condamner in solidum Mmes [G] au paiement de 20 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et matériel subi,
- condamner in solidum Mmes [G] au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel,
- condamner in solidum Mmes [G] aux entiers dépens de l'instance distraits au profit de Me Tarlet, avocat, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées le 24 mai 2024, Mmes [G], intimées et appelantes à titre incident, demandent à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement rendu le 19 janvier 2024 par le tribunal de proximité de Boulogne-Billancourt, en ce qu'il a :
* annulé les congés pour reprise qui leur ont été délivrés respectivement le 30 juin 2022 et le 4 juillet 2022 par M. et Mme [L],
* constaté que le bail est reconduit pour une nouvelle période triennale à compter du 16 janvier 2023,
* rejeté la demande de résiliation du bail de M. et Mme [L],
* rejeté les demandes plus amples et contraires de M. et Mme [L],
* condamné M. et Mme [L] aux entiers dépens,
* rappelé que le jugement est de plein droit exécutoire par provision,
A titre subsidiaire,
- leur octroyer un délai de douze mois pour quitter le logement sis [Adresse 4],
En tout état de cause,
- infirmer le jugement rendu le 19 janvier 2024 par le tribunal de proximité de Boulogne-Billancourt, en ce qu'il a :
* rejeté leur demande reconventionnelle,
* rejeté les demandes formulées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter M. et Mme [L] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- condamner M. et Mme [L] à leur payer la somme de 10 000 euros au titre de leur préjudice moral,
- condamner M. et Mme [L] à leur payer la somme de 7 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civiles, outre les entiers dépens dont le montant sera recouvré par Me Pedroletti, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 6 juin 2024.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de résiliation du bail
M. et Mme [L] font grief au premier juge d'avoir rejeté leur demande de résiliation du bail aux motifs qu'ils ne rapportaient pas la preuve que le bien avait été effectivement sous-loué moyennant une contrepartie financière, et ce alors qu'il avait relevé le comportement mensonger de Mme [M] [G] et que les éléments en sa possession ne permettaient pas d'expliquer comment elle pouvait payer le loyer sans la contribution de M. [Y].
Ils font valoir qu'ils sont dans l'impossibilité matérielle de rapporter la preuve de paiements de la part de M. [Y] au profit de Mme [G] pour contribuer au paiement du loyer mais qu'ils peuvent rapporter la preuve de la sous-location par tout moyen et qu'elle résulte en l'espèce de tous les éléments versés aux débats et notamment du constat de commissaire de justice du 7 juillet 2023.
Ils relèvent qu'il en ressort que Mme [M] [G] ne vit pas seule, ce qu'elle a tenté de lui cacher et ce qu'elle n'aurait pas fait si elle hébergeait simplement un ami comme elle le prétendait alors. Ils ajoutent qu'il ne ressort pas de ce constat que M. [Y] serait son compagnon ni qu'il serait simplement hébergé alors qu'ils ont chacun leur chambre. Ils relèvent également que les revenus de Mme [M] [G] sont bien inférieurs au montant du loyer, de sorte qu'il est démontré qu'elle ne peut l'assumer seule et que M. [Y] en paye une partie grâce à ses revenus qui sont supérieurs aux siens. Ils indiquent également que Mme [M] [G] et M. [Y] n'ont pas déclaré cet hébergement aux services des impôts alors qu'ils en ont l'obligation.
Ils affirment que Mme [C] [G] ne vit plus dans les lieux et que M. [Y] n'occupe pas les lieux à titre gratuit et qu'il est bien sous-locataire de Mme [M] [G] et ce en infraction avec l'article 8 de la loi du 6 juillet 1989.
Ils font enfin valoir qu'en violation de l'article 1104 du code civil, Mmes [G] n'ont pas négocié ni exécuté de bonne foi le contrat de bail en ce qu'elles sont agi par ruse pour obtenir la signature du bail et qu'elles n'en ont pas respecté les règles en sous-louant une chambre. Ils ajoutent qu'elles ont tenté de manipuler les faits pour faire échec à un congé dont le caractère légitime et sérieux est démontré.
Ils affirment qu'il y a urgence à ce qu'ils récupèrent les lieux loués pour lesquels ils avaient donné congé à effet au 15 janvier 2023 alors que M. [L] a été contraint de revenir en France depuis le 17 octobre 2022 en raison de la fin de sa mission d'expatriation et que sa famille n'a pu le rejoindre faute de restitution de l'appartement.
Mmes [G] demandent quant à elles la confirmation du jugement critiqué en ce qu'il a rejeté la demande de résiliation du bail.
Elle font valoir que Mme [C] [G] a donné congé du bail le 27 juin 2022 réitéré le 16 juillet puis le 6 septembre 2022, de sorte qu'il n'est pas anormal qu'elle ne soit plus présente dans les lieux plus d'un an après. Elles ajoutent que M. et Mme [L] ne rapportent pas la preuve de ce qu'elle n'aurait jamais habité dans les lieux.
Elles relèvent que la sous-location, interdite, est le fait pour le locataire de se substituer un tiers à titre onéreux contrairement à l'hébergement, accepté dès lors qu'il est à titre gratuit, et qu'il ne remet pas en cause l'obligation du locataire d'occuper personnellement le bien loué.
Elles font valoir qu'il ressort du constat du commissaire de justice que des factures d'énergie sont bien au nom de Mme [M] [G], ce qui prouve qu'elle occupe le bien. Elles soutiennent que M. [Y], qui occupe les lieux, est son compagnon, âgé de 81 ans, malade et disposant de faibles revenus, et qu'elle ne perçoit aucune contrepartie onéreuse de sa part.
Elles ajoutent que la non-déclaration à l'administration fiscale de cet hébergement ne démontre pas que Mme [M] [G] percevrait des sous-loyers ou qu'elle confirmerait la sous-location. Ils relèvent que les allégations de M. et Mme [L] ne sont corroborées par aucune pièce alors que la charge de la preuve leur incombe.
Elles soutiennent que les loyers ont toujours été réglés à leur échéance et que Mme [M] [G] dispose d'une épargne suffisante pour subvenir à ses besoins et ne se trouve donc pas dans l'impossibilité de régler seule les loyers; que le fait que M. [Y] dispose de revenus de plus d'un tiers supérieurs aux siens ne démontre pas une sous-location illicite laquelle ne résulte pas davantage du fait qu'il ait une chambre à part, ces allégations portant par ailleurs atteinte à sa vie privée.
Sur ce,
En application de l'article 8 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire ne peut ni céder le contrat de location, ni sous-louer le logement sauf avec l'accord écrit du bailleur, y compris sur le prix du loyer.
Il en résulte que seule la cession et la sous-location sont interdites et non l'hébergement d'un tiers à titre gratuit, la qualification de sous-location interdite imposant de caractériser l'existence d'une obligation de paiement à la charge du tiers, en argent ou en nature, en contrepartie de cet hébergement. La charge de la preuve de l'existence d'une contrepartie onéreuse consentie par l'occupant au locataire principal appartient au bailleur et peut être rapportée par tout moyen.
En l'espèce, M. et Mme [L] produisent un constat de commissaire de justice réalisé le 7 juillet 2023 duquel il ressort que:
- les noms '[G] [Y]' sont apposés sur une des boites aux lettres dans le hall de l'immeuble,
- Mme [M] [G] lui a déclaré que Mme [C] [G] n'habite pas à cette adresse et que les requérants le savaient déjà,
- dans un premier temps, elle a refusé son entrée dans les lieux avant d'avoir l'accord de son avocat avant de se raviser ;
- elle lui a présenté une facture dématérialisée EDF à ses nom et prénom,
- elle lui a déclaré vivre seule dans l'appartement et qu'à sa demande de savoir pourquoi le nom [Y] apparaît sur sa boîte aux lettres, elle lui a déclaré qu'il s'agissait d'un ami qui reçoit de temps en temps du courrier à cette adresse et qui vient parfois dormir,
- dans la chambre située au fond à droite de l'appartement, était présent un homme déclarant s'appeler [B] [Y], né le 15 mars 1943 ; que sont présents dans cette pièce un sommier et un matelas avec des draps, une table, un bureau, une lampe de bureau, une chaise, un fauteuil, une télévision, un ordinateur, une imprimante, un radio-réveil, une corbeille à papier, un tapis et une armoire remplie de vêtements et sous-vêtements d'homme; et qu'en ouvrant l'armoire, M. [Y] s'est emporté violemment.
Il ressort en outre de l'avis d'imposition sur les revenus 2021 de Mme [M] [G] qu'elle a déclaré un revenu annuel de 11 625 euros, soit d'un montant inférieur au montant annuel du loyer. Il y est également fait mention de prélèvements forfaitaires déjà versés sur des revenus de capitaux mobiliers, permettant de corroborer ses allégations selon lesquelles elle disposerait d'une épargne pour faire face au paiement des loyers. L'avis d'imposition sur les revenus 2022 de M. [Y] fait apparaître qu'il a déclaré un revenu annuel de 17 009 euros, soit également inférieur au montant du loyer.
Il résulte ainsi de l'ensemble de ces éléments que M. [Y] est hébergé au domicile de Mme [M] [G], étant relevé qu'il n'est ni allégué que celle-ci ne résiderait plus dans les lieux.
Pour autant, le fait que cette dernière a pu faire des déclarations contradictoires quant à ses relations avec M. [Y], a été réticente à faire visiter les lieux au commissaire de justice et n'a pas déclaré aux services fiscaux l'hébergement de M. [Y], n'est pas suffisant à établir le caractère onéreux de cette occupation. Si ce dernier dispose d'une chambre à part, cela ne permet pas d'en déduire qu'il ne peut être le compagnon de Mmes [G] [M].
Les bailleurs n'apportent enfin aucun élément quant aux montants qui auraient été perçus par Mme [M] [G] en contrepartie.
En conséquence, comme l'a justement relevé le premier juge, M. et Mme [L] n'apportent pas la preuve d'un manquement grave et persistant la part des locataires à leurs obligations contractuelles.
Par ailleurs, il n'est pas établi que Mme [C] [G] ne résidait pas dans les lieux depuis l'origine du bail, qu'elle n'avait pas l'intention d'y habiter et qu'elle vivait avec son époux et sa fille, ce que M. et Mme [L] échouent à démontrer par les pièces produites (une page facebook non datée mentionnant '[C] [G] [W]' et le relevé de deux sociétés auxquelles elle participe). Il apparaît en outre qu'elle avait donné congé pour le mois de septembre 2022. En tout état de cause, les appelants n'explicitent pas en quoi cette situation aurait fait obstacle à la validité du congé alors que le juge des contentieux et de la protection a rappelé que sa validité s'appréciait pour chacun des locataires et les a annulés en raison de l'absence d'offre de relogement pour Mme [M] [G], locataire protégée, ce qui a été définitivement jugé.
Au surplus, M. et Mme [L] ne démontrent pas que les locataires auraient agi par ruse pour obtenir la signature du bail ni qu'elles auraient manipulé les faits pour faire échec au congé qu'ils leur avaient délivré, étant relevé que ce congé a été déclaré nul par le premier juge, ce que les appelants n'ont pas contesté en cause d'appel, de sorte que ce point a été définitivement tranché.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. et Mme [L] de leur demande en résiliation du bail et de leurs demandes subséquentes en expulsion et en paiement d'une indemnité d'occupation.
Sur la demande de dommages et intérêts des bailleurs
M. et Mme [L] demandent la condamnation de Mmes [G] à leur verser la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice matériel et moral.
Ils font valoir que l'appartement a été donné à bail à deux soeurs qui ont prétendu y vivre ensemble et dont les revenus permettaient le paiement du loyer mais qu'il est apparu que Mme [C] [G] n'a jamais habité dans les lieux et que Mme [M] [G] avait recours à la sous-location pour régler le loyer.
Ils soutiennent que ce montage a eu pour conséquence qu'ils n'ont pu emménager dans leur appartement avec leur quatre enfants du fait que le congé valablement délivré en fin d'expatriation était voué à l'échec en raison d'un mensonge sur l'occupation des lieux.
Ils font état d'un préjudice matériel et moral en résultant en ce que M. [L] travaille à nouveau en France depuis le mois d'octobre 2022 et qu'en l'absence de départ des locataires, son épouse et ses enfants ont été contraints de demeurer en Belgique où il retourne chaque fin de semaine, ce qui engendre un coût financier et constitue un préjudice moral en raison de cette séparation et de l'éloignement géographique.
Mmes [G] demandent la confirmation de ce chef du jugement.
Elles rappellent que les congés n'ont pas été régulièrement délivrés comme l'a jugé le premier juge sans que les bailleurs n'en demandent l'infirmation, de sorte qu'elles n'avaient pas à restituer l'appartement, ajoutant qu'ils sont donc sont seuls responsables de cette situation.
Elles font valoir qu'ils ne justifient pas préjudices dont ils font état au vu des pièces versées aux débats.
Sur ce,
L'article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer .
En l'espèce, les appelants échouant à démontrer un comportement fautif de la part des locataires et un lien de causalité avec le préjudice dont ils font état puisque le bail n'est pas résilié et que les locataires n'ont pas donc pas l'obligation de libérer les lieux, il convient en conséquence de les débouter de leur demande en dommages et intérêts et de confirmer le jugement déféré de ce chef.
Sur la demande en dommages et intérêts de Mmes [G]
Mmes [G] demandent la condamnation de M. et Mme [L] à leur verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil.
Elles font valoir que M. et Mme [L] ont voulu les tromper sur l'étendue de leurs droits, ce qui démontre leur mauvaise foi dans la négociation et l'exécution du contrat et ce qui a eu pour conséquence de les soumettre à un grave état d'anxiété, surtout pour Mme [M] [G] du fait de l'incertitude pesant sur la situation de son logement et un éventuel relogement au regard de sa situation financière personnelle et financière alors que les bailleurs disposent d'une situation financière stable.
Elles soutiennent que l'acharnement dont font preuve M. et Mme [L] est le témoin de leur mauvaise foi manifeste dans la mesure où ils ont une parfaite connaissance de la situation et persistent à demander la résiliation du bail alors qu'elles ne font que solliciter l'application de la loi du 6 juillet 1989 d'ordre public.
M. et Mme [L] s'opposent à cette demande et font valoir que Mme [C] [G] qui n'a jamais habité dans les lieux et à tout le moins les a quittés avant l'échéance du congé, ne justifie donc d'aucun préjudice.
Ils relèvent que Mme [M] [G] ne justifie aucunement de son état d'anxiété et qu'elles ont touts deux agi de manière déloyale au détriment de leur famille, sans rechercher un nouveau logement alors qu'elle reconnaît implicitement qu'elle devrait quitter les lieux.
Sur ce,
En application de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
En l'espèce, Mmes [G] ne démontrent pas de faute contractuelle de la part des bailleurs. En effet, le fait de délivrer un congé déclaré non régulier par la suite ne saurait suffire à caractériser un tel comportement.
Le fait pour M. et Mme [L], qui ont pu se méprendre sur l'étendue de leurs droits, de poursuivre devant la cour leur demande de résiliation du bail dont ils avaient été déboutés en première instance, ne saurait davantage constituer une faute.
En outre, elles ne justifient nullement du préjudice qu'elles allèguent, aucune pièce n'étant produite à cet effet.
Il convient en conséquence de débouter Mmes [G] de leur demande et de confirmer le jugement déféré de ce chef.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
M. et Mme [L], qui succombent devant la cour, sont condamnés aux dépens d'appel, les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et aux frais irrépétibles étant confirmés.
M. et Mme [L] sont condamnés à verser à Mmes [G] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions dévolues à la cour ;
Condamne M. [V] [L] et Mme [P] [A] épouse [L] à payer à Mme [M] [G] et Mme [C] [G] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [V] [L] et Mme [P] [A] épouse [L] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par Me Pedroletti en application de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Céline KOC, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, Le Président,