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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 16 octobre 2024, n° 22/18395

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Alpha Glass (SARL)

Défendeur :

Actiglass (SAS), Allo Vitrage Auto (SARL), Elise (SARL), Sud Gestion (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Douillet

Conseillers :

Mme Barutel, Mme Bohee

Avocats :

Me Filmont, Me Langlois, Me Meynard, Me Beaugendre, Me Baechlin, Me Bali, Me Lamy, Me Oliveira, Me Ohana-Zerhat, Me Souleau Travers

TJ Paris, 3e ch. 1re sect., du 15 sept. …

15 septembre 2022

EXPOSÉ DU LITIGE

La société SUD GESTION, spécialisée dans le vitrage sur tout type de véhicules, gère un réseau 'A+ GLASS', comptant environ 350 centres franchisés de pose et de réparation de vitrage et éclairage en France. Elle est titulaire :

d'une marque verbale française 'A PLUS GLASS' n° 394894 (ci-après la marque n° 894), déposée le 26 septembre 2012, pour désigner les produits et services des classes 11, 12 et 37, notamment les 'Services d'entretien et de réparation de véhicules ; services d'entretien, de réparation, de remplacement d'appareils d'éclairage pour véhicules ; services d'entretien, de réparation, de remplacement de phares de véhicules, de feux de véhicules, de feux de signalisation pour véhicules, de dispositifs anti éblouissants pour véhicules, d'indicateurs de direction pour véhicules ; services d'entretien, de réparation, de remplacement de vitres de véhicules, de pare-brise pour véhicules, de lunettes arrière de véhicules, de toits ouvrants pour véhicules' ;

et d'une marque française semi figurative 'A + GLASS - LE TRAVAIL BIEN FAIT' n° 4231339 (ci-après, la marque n° 339), déposée le 4 décembre 2015, pour désigner les produits et services des classes 11,12 et 37, et notamment les 'Services d'entretien et de réparation de véhicules ; services d'entretien, de réparation et de remplacement d'appareils d'éclairage pour véhicules ; services d'entretien, de réparation et de remplacement de phares de véhicules, d'ampoules de phares de véhicules, de feux de véhicules, d'optiques de phares de véhicules, de dispositifs anti éblouissants pour véhicules, de réflecteurs pour véhicules, d'indicateurs de direction pour véhicules, d'ampoules d'indicateurs de direction pour véhicules et de vitres de phares de véhicules ; services d'entretien, de réparation et de remplacement de vitres de véhicules, de pare-brise de véhicules, de lunettes arrière de véhicules, de toits ouvrants de véhicules, de capotes de véhicules, d'essuie-glace et de balais d'essuie-glace de véhicules, d'essuie-glace et de balais d'essuie-glace de phares de véhicules, de rétroviseurs de véhicules et de miroirs de rétroviseurs de véhicules ; pose sur des vitrages de véhicules de films de protection contre les rayonnements solaires (anti infra-rouges et anti ultra-violets) ; pose sur des vitrages de véhicules de films de sécurité et de protection contre les effractions ; lavage et nettoyage de véhicules, et en particulier : lavage et nettoyage de vitres de véhicules ; assistance en cas de bris de glaces de véhicules (réparation)'.

La société ACTIGLASS exploite depuis 2015 une activité de service et propose une solution complète de réparation et/ou remplacement de vitrage automobile à domicile ou sur le lieu de travail du client. Elle anime et développe un réseau de concessionnaires à l'enseigne ACTIGLASS.

La société ALPHA GLASS, précédemment dénommée ATOUT PARE-BRISE, exerce son activité de réparation et de remplacement de vitrage automobile, sous la dénomination ALLO PARE BRISE EXPRESS, et sous la direction de son gérant, M. [Y] [C]. Elle compte plusieurs centres, implantés à [Localité 18], [Localité 10], [Localité 12], [Localité 15], [Localité 16] et [Localité 17]. Elle a été membre du réseau 'A + GLASS' jusqu'à la fin du mois de novembre 2015, avant d'intégrer le réseau ACTIGLASS.

La société ALLO VITRAGE AUTO exerce à [Localité 9] (76) une activité de réparation mécanique, carrosserie et peinture. Elle a pour dirigeant M. [V] [N] et pour associé majoritaire M. [C], lequel en est également le créateur et l'ancien gérant.

La société ELISE est spécialisée dans l'accueil téléphonique. Elle a notamment assuré la gestion et l'accueil téléphonique de la société ACTIGLASS et de certains membres de son réseau.

La société SUD GESTION expose avoir été informée en janvier 2019, par la compagnie d'assurance AXA, avec laquelle elle avait noué des accords, que la société ALLO VITRAGE AUTO avait fait éditer et distribuait des cartes de visite reproduisant, sans son autorisation, sa marque semi figurative n° 339 et son logo A+ GLASS, outre les couleurs et caractères de sa charte graphique.

Elle ajoute que le 22 février 2019, l'une de ses salariés, Mme [Z], a contacté le numéro de téléphone figurant sur cette carte de visite et a été mise en relation avec une téléopératrice de la société ELISE, laquelle lui a indiqué qu'il était possible par le biais de ce numéro de téléphone de prendre rendez-vous avec des centres situés dans toute la France et notamment avec les centres de la société ALPHA GLASS, membres du réseau ACTIGLASS. Elle précise que la téléopératrice a également indiqué que l'établissement situé à [Localité 12] pouvait être joint par le biais d'un numéro général et qu'il s'agissait de celui de la société ACTIGLASS. Cet échange téléphonique a été réalisé en présence d'un huissier de justice qui, aux termes de son procès-verbal, en a retranscrit les termes.

Par courriers du 28 mars 2019, la société SUD GESTION a mis en demeure les sociétés ALPHA GLASS et ACTIGLASS de cesser la diffusion de cette carte de visite reproduisant sa marque et utilisant ses signes distinctifs et de lui communiquer un certain nombre d'informations. Le 10 avril 2019, les sociétés ACTIGLASS et ALPHA GLASS lui ont répondu qu'elles étaient étrangères aux faits qui leur étaient reprochés, ont décliné ainsi toute responsabilité et précisé n'entretenir aucun lien avec la société ALLO VITRAGE AUTO.

Le 16 avril 2019, la société SUD GESTION a fait constater par huissier de justice que sur un panneau publicitaire situé à [Localité 13], une affiche ALLO PARE BRISE (de la société ALPHA GLASS) représentait un logo reproduisant ses marques.

Par courrier du 15 juillet 2019, elle a adressé à la société ALLO VITRAGE AUTO le même courrier de mise en demeure qu'elle avait adressé aux sociétés ACTIGLASS et ALPHA GLASS le 28 mars 2019.

Entre temps, le 1er avril 2019, la société SUD GESTION a fait assigner en référé les sociétés ACTIGLASS, ALPHA GLASS et ALLO VITRAGE AUTO, devant le président du tribunal judiciaire de Paris, en contrefaçon de ses marques et en concurrence déloyale.

Par une ordonnance du 20 décembre 2019, le juge des référés a notamment :

écarté des débats le constat d'huissier dressé le 22 février 2019,

dit que l'imitation et l'usage par la société ALLO VITRAGE AUTO des marques n° 338 et 339 sur des cartes publicitaires constituent des actes de contrefaçon vraisemblable desdites marques,

débouté la société SUD GESTION de l'ensemble de ses demandes sur le fondement du droit des marques à l'encontre des sociétés ACTIGLASS et ALPHA GLASS, ainsi que de l'ensemble de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et parasitaire,

et débouté les sociétés ACTIGLASS et ALPHAGLASS de leurs demandes fondées sur l'abus de droit d'agir en justice.

Par actes d'huissier de justice des 17, 18 et 20 janvier 2020, la société SUD GESTION a fait assigner les sociétés ALPHA GLASS, ACTIGLASS et ALLO VITRAGE AUTO devant le tribunal judiciaire de Paris, en contrefaçon de marques et en concurrence déloyale et parasitaire.

Par acte d'huissier de justice du 28 février 2020, la société ACTIGLASS a fait assigner la société ELISE en intervention forcée.

Les deux instances ont fait l'objet d'une jonction.

Par jugement rendu le 15 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :

déclaré irrecevables les passages du procès-verbal d'huissier de justice dressé le 22 février 2019 relatifs à la retranscription de l'échange téléphonique qui a eu lieu entre Mme [Z], salariée de la société SUD GESTION, et la téléopératrice de la société ELISE ;

déclaré recevables les attestations sur l'honneur établies par Mme [Z] et Mme [W] [DG de SUD GESTION], produites par la société SUD GESTION en pièces n° 49 et 50 ;

dit qu'en éditant et en distribuant une carte de visite sur laquelle figure un logo imitant les marques verbale et semi-figurative n° 943 et 339, dont est titulaire la société SUD GESTION, sans son autorisation, la société ALLO VITRAGE AUTO a commis des actes de contrefaçon de ces marques ;

dit qu'en maintenant postérieurement à la fin du mois de novembre 2015, sur son site Internet accessible à l'adresse , un signe imitant la marque verbale n° 943, outre des photographies présentant un logo imitant la marque semi-figurative n° 339, sans l'autorisation de la société SUD GESTION, la société ALPHA GLASS a commis des actes de contrefaçon de ces marques ;

dit qu'en maintenant postérieurement à la fin du mois de novembre 2015, sur un panneau publicitaire situé à « [Localité 12] » [lire [Localité 13]], une affiche comportant un logo imitant la marque semi-figurative n° 339, sans l'autorisation de la société SUD GESTION, la société ALPHA GLASS a commis des actes de contrefaçon de cette marque ;

fait interdiction, en tant que de besoin, aux sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS de poursuivre la commission d'actes de contrefaçon des marques n° 943 et 339, dont est titulaire la société SUD GESTION ;

ordonné à la société ALLO VITRAGE AUTO, en tant que de besoin, de cesser la diffusion des cartes litigieuses, ainsi que de tout document comportant les marques n° 943 et 339, dont est titulaire la société SUD GESTION, et ce à compter de la signification du jugement ;

condamné la société ALPHA GLASS, en tant que de besoin, à déposer la totalité des matériels comportant les marques n° 943 et 339, dont est titulaire la société SUD GESTION, dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard, l'astreinte courant pour une durée de six mois ;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes d'informations, de destruction et de publication ;

condamné la société ALLO VITRAGE AUTO à payer à la société SUD GESTION une indemnité forfaitaire de 560,45 euros, en réparation de son préjudice de nature patrimoniale, résultant des actes de contrefaçon de ses marques n° 943 et 339 ;

condamné la société ALPHA GLASS à payer à la société SUD GESTION une indemnité forfaitaire de 33 614,50 euros, en réparation de son préjudice de nature patrimoniale, résultant des actes de contrefaçon de ses marques n° 943 et 339 ;

condamné in solidum les sociétés ALPHA GLASS et ALLO VITRAGE AUTO à payer à la société SUD GESTION la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral, résultant des actes de contrefaçon de ses marques n° 943 et 339 ;

débouté la société ALLO VITRAGE AUTO de sa demande de condamnation de la société ALPHA GLASS à la garantir des condamnations prononcées à son encontre;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes de condamnation formées à l'encontre de la société ACTIGLASS, au titre de la contrefaçon de ses marques n° 943 et 339 ;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme ;

débouté les sociétés ALPHA GLASS et ACTIGLASS de leur demande reconventionnelle fondée sur l'abus du droit d'agir en justice ;

condamné in solidum les sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS à payer à la société SUD GESTION la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société SUD GESTION à payer à la société ACTIGLASS la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société ACTIGLASS à payer à la société ELISE la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné in solidum les sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS aux dépens de l'instance ;

rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

La société Alpha Glass a interjeté appel de ce jugement le 26 octobre 2022.

Dans ses dernières conclusions, transmises le 17 juillet 2023, la société ALPHA GLASS, appelante, demande à la cour de :

infirmer le jugement en ce qu'il a :

dit qu'en maintenant postérieurement à la fin du mois de novembre 2015, sur son site Internet accessible à l'adresse , un signe imitant la marque verbale n° 3948943, outre des photographies présentant un logo imitant la marque semi-figurative n° 4231339, sans l'autorisation de la société SUD GESTION, la société ALPHA GLASS a commis des actes de contrefaçon de ces marques ;

dit qu'en maintenant postérieurement à la fin du mois de novembre 2015, sur un panneau publicitaire situé à [Localité 12], une affiche comportant un logo imitant la marque semi-figurative n° 4231339, sans l'autorisation de la société SUD GESTION, la SOCIETE ALPHA GLASS a commis des actes de contrefaçon de cette marque ;

fait interdiction, en tant que de besoin, à la société Alpha Glass de poursuivre la commission d'actes de contrefaçon des marques n° 3948943 et 4231339, dont est titulaire la société SUD GESTION ;

condamné la société ALPHA GLASS, en tant que de besoin, à déposer la totalité des matériels comportant les marques n° 3948943 et 4231339, dont est titulaire la société SUD GESTION, dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard, l'astreinte courant pour une durée de six mois ;

condamné la société ALPHA GLASS à payer à la société SUD GESTION une indemnité forfaitaire de 33.614,50 euros, en réparation de son préjudice de nature patrimoniale, résultant des actes de contrefaçon de ses marques n° 3948943 et 4231339 ;

condamné la société ALPHA GLASS, in solidum avec la société ALLO VITRAGE AUTO, à payer à la société SUD GESTION la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral, résultant des actes de contrefaçon de ses marques n° 3948943 et 4231339 ;

débouté la société ALPHA GLASS de sa demande reconventionnelle fondée sur l'abus du droit d'agir en justice ;

condamné la société ALPHA GLASS, in solidum avec la société ALLO VITRAGE AUTO, à payer à la société Sud Gestion la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société ALPHA GLASS, in solidum avec la société ALLO VITRAGE AUTO, aux dépens de l'instance ;

débouté la société ALPHA GLASS de ses demandes tendant à voir la société SUD GESTION déboutée de l'intégralité de ses demandes dirigées à son encontre et de la voir condamner à lui régler une indemnité de 10.000 euros pour procédure manifestement abusive et une indemnité de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens ;

confirmer le jugement en ce qu'il a :

déclaré irrecevables les passages du procès-verbal d'huissier de justice dressé le 22 février 2019 relatifs à la retranscription de l'échange téléphonique qui a eu lieu entre Mme [Z], salariée de la société SUD GESTION, et la téléopératrice de la société ELISE ;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes d'informations, de destruction et de publication ;

débouté la société ALLO VITRAGE AUTO de sa demande de condamnation de la société ALPHA GLASS à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme formées à l'encontre de la société ALPHA GLASS ;

débouté la société SUD GESTION du surplus de ses demandes dirigées à l'encontre de la société ALPHA GLASS ;

rejeter l'appel incident de la société SUD GESTION ;

statuant à nouveau :

débouter la société SUD GESTION de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la société ALPHA GLASS ;

condamner la société SUD GESTION à payer à la société ALPHA GLASS une indemnité de 20.000 euros pour procédure manifestement abusive ;

condamner la société SUD GESTION à payer à la société ALPHA GLASS une indemnité de 20.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens ;

débouter la société ELISE de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la société ALPHA GLASS.

Dans ses uniques conclusions, transmises le 25 avril 2023, la société ACTIGLASS, intimée, demande à la cour de :

Vu les articles 809 du code de procédure civile ensemble l'article 6 §1 CEDH,

Vu les articles 713-2, 716-1, 716-14, 716-15 du code de la propriété intellectuelle,

Vu l'article 1240 du code civil,

Vu les pièces produites et la jurisprudence citée, spécialement la convention d'honoraires versée aux débats en pièce n°32,

confirmer le jugement, sauf en ce qu'il a :

débouté la société ACTIGLASS de sa demande reconventionnelle fondée sur l'abus du droit d'agir en justice ;

au titre de l'article 700, fixé l'indemnité à verser par la société SUD GESTION à la société ACTIGLASS à la somme de 2.000 euros, et condamné cette dernière à verser une indemnité de ce même montant à la société ELISE ;

et statuer à nouveau comme suit :

condamner la société SUD GESTION pour attitude déloyale et procédure abusive, à indemniser la société ACTIGLASS par une indemnité de 30.000 euros en réparation du préjudice moral (atteinte à l'image, tentative de déstabilisation du réseau, tracas) ;

en toute hypothèse, condamner la société SUD GESTION aux entiers dépens et à payer à la société ACTIGLASS la somme de 16.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles qu'elle a effectivement supportés.

Dans ses dernières conclusions, numérotées 2, transmises le 10 juillet 2023, la société Elise, intimée, demande à la cour de :

à titre principal

constater que l'appel de la société ALPHA GLASS est limité aux chefs du jugement entrepris critiqués par l'appelante, lesquels ne causent pas grief à la société ELISE ;

constater qu'aucune demande n'est formulée à l'encontre de la société ELISE par l'appelante principale, la société ALPHA GLASS ;

rejeter les appels incidents des sociétés SUD GESTION et ACTIGLASS ;

en conséquence

confirmer le jugement entrepris s'agissant des points intéressant la société ELISE, à savoir en ce qu'il a :

déclaré irrecevables les passages du procès-verbal d'huissier de justice dressé le 22 février 2019 relatifs à la retranscription de l'échange téléphonique qui a eu lieu entre Mme [Z], salariée de la société SUD GESTION, et la téléopératrice de la société ELISE ;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes de condamnation formées à l'encontre de la société ACTIGLASS, au titre de la contrefaçon de ses marques n° 3948943 et 4231339 ;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme ;

condamné la société SUD GESTION à payer à la société ACTIGLASS la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

condamné la société ACTIGLASS à payer à la société ELISE la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

à titre subsidiaire, condamner la société ALLO VITRAGE AUTO à garantir et relever indemne la société Elise de toute condamnation qui viendrait à être prononcée à son encontre des chefs des demandes de la société ACTIGLASS ou de toute autre partie au présent litige.

en tout état de cause,

débouter la société ACTIGLASS, la société SUD GESTION, la société ALLO VITRAGE AUTO et la société ALPHA GLASS de toutes leurs demandes formées à l'encontre de la société Elise ;

condamner la société ALPHA GLASS, ou tout autre succombant, aux entiers dépens de l'appel sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile ;

condamner la société ALPHA GLASS, ou tout autre succombant, à payer à la société ELISE la somme de 6.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.

Dans ses dernières conclusions, transmises le 20 juillet 2023, la société ALLO VITRAGE AUTO, intimée, demande à la cour de :

à titre principal

infirmer le jugement en ce qu'il a :

dit qu'en éditant et en distribuant une carte de visite sur laquelle figure un logo imitant les marques verbale et semi-figurative n° 3948943 et 4231339, dont est titulaire la société SUD GESTION, sans son autorisation, la société ALLO VITRAGE AUTO a commis des actes de contrefaçon de ces marques ;

fait interdiction, en tant que de besoin, aux sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS de poursuivre la commission d'actes de contrefaçon des marques n° 3948943 et 4231339, dont est titulaire la société SUD GESTION ;

ordonné à la société ALLO VITRAGE AUTO, en tant que de besoin, de cesser la diffusion des cartes litigieuses, ainsi que de tout document comportant les marques n° 3948943 et 4231339, dont est titulaire la société SUD GESTION, et ce à compter de la signification du présent jugement ;

condamné la société ALLO VITRAGE AUTO à payer à la société SUD GESTION une indemnité forfaitaire de 560,45 euros, en réparation de son préjudice de nature patrimoniale, résultant des actes de contrefaçon de ses marques n° 3948943 et 4231339 ;

condamné in solidum les sociétés ALPHA GLASS et ALLO VITRAGE AUTO à payer à la société SUD GESTION la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral, résultant des actes de contrefaçon de ses marques n° 3948943 et 4231339 ;

condamné in solidum les sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS à payer à la société Sud Gestion la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné in solidum les sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS aux dépens de l'instance ;

confirmer le jugement en ce qu'il a :

déclaré irrecevables les passages du procès-verbal d'huissier de justice dressé le 22 février 2019 relatifs à la retranscription de l'échange téléphonique qui a eu lieu entre Mme [Z], salariée de la société SUD GESTION, et la téléopératrice de la société ELISE ;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes d'informations, de destruction et de publication ;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme formées à l'encontre de la société ALLO VITRAGE AUTO ;

débouté la société SUD GESTION du surplus de ses demandes dirigées à l'encontre de la société ALLO VITRAGE AUTO ;

statuant à nouveau

débouter la société SUD GESTION de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la société ALPHA GLASS ;

condamner la société SUD GESTION à payer à la société ALPHA GLASS une indemnité de 20.000 euros pour procédure manifestement abusive ;

condamner la société SUD GESTION à payer à la société ALPHA GLASS une indemnité de 20.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens ;

débouter la société ELISE de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société ALLO VITRAGE AUTO ;

en tout état de cause

débouter les sociétés SUD GESTION, ALPHA GLASS, ELISE de toutes demandes à l'encontre de la société ALLO VITRAGE AUTO ;

condamner la société SUD GESTION ou tout succombant à verser à la société ALLO VITRAGE AUTO la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Dans ses dernières conclusions, numérotées 2, transmises le 21 juillet 2023, la société SUD GESTION, demande à la cour de :

Vu les articles 46 alinéa 3 du code de procédure civile et D 211-6-1 du code de l'organisation judiciaire,

Vu le titre VII du code de la propriété intellectuelle,

Vu les articles 716-7-1 et '5, 713-2, 716-7-1 ; 716-4- 10 ; 716-4- 11 du code de la propriété intellectuelle,

Vu l'article 1240 du code civil,

Vu les articles L121-1 et L121-2 du code de la consommation,

confirmer le jugement en ce qu'il a :

déclaré recevable les attestations sur l'honneur établies par Madame [Z] et Madame [W] produites par la société SUD GESTION en pièces n°49 et 50;

dit qu'en éditant et en distribuant la carte de visite sur laquelle figure un logo imitant la marque verbale et semi-figurative n°3948943 et 4231339, dont est titulaire la société SUD GESTION, sans son autorisation, la société ALLO VITRAGE AUTO a commis des actes de contrefaçon de ces marques ;

dit qu'en maintenant postérieurement à la fin du mois de novembre 2015, sur son site internet accessible à l'adresse http://apbexpress.com/index.php, un signe distinctif imitant la marque verbale 3948943, outre des photographies représentant un logo imitant la marque semi-figurative n°4231339, sans l'autorisation de la société SUD GESTION, la société ALPHA GLASS a commis des actes de contrefaçon de cette marque ;

dit qu'en maintenant postérieurement à la fin du mois de novembre 2015, sur un panneau publicitaire situé à [Localité 12], une affiche comportant un logo imitant la marque semi-figurative n°4231339, sans l'autorisation de la société SUD GESTION, la société ALPHA GLASS a commis des actes de contrefaçon de cette marque ;

fait interdiction autant que de besoin aux sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS de poursuivre la commission d'actes de contrefaçon des marques n°3948943 et 4231339, dont est titulaire la société SUD GESTION ;

ordonné à la société ALLO VITRAGE AUTO, en tant que de besoin de cesser la diffusion des cartes litigieuses, ainsi que tout documents comportant les marques n°3948943 et 4231339, dont est titulaire la société SUD GESTION, et ce à compter de la signification du présent jugement ;

condamné la société ALPHA GLASS, en tant que de besoin, à déposer la totalité des matériels comportant les marques n°3948943 et 4231339, dont est titulaire la société SUD GESTION, dans le délai d'un mois à compter de la

signification du présent jugement, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard, l'astreinte courant pour une durée de six mois ;

condamné la société ALLO VITRAGE AUTO à payer à la société SUD GESTION une indemnité forfaitaire en réparation de son préjudice de nature patrimoniale résultant des actes de contrefaçon de ses marques n°39489432 et 4231339 ;

condamné la société ALPHA GLASS à payer à la société SUD GESTION une indemnité forfaitaire en réparation de son préjudice de nature patrimoniale résultant des actes de contrefaçon de ses marques n°39489432 et 4231339 ;

condamné in solidum des sociétés ALPHA GLASS et ALLO VITRAGE AUTO à payer à la société Sud Gestion une indemnité en réparation de son préjudice moral résultant des actes de contrefaçon de ses marques n°39489432 et 4231339 ;

débouté les sociétés ALPHA GLASS et ACTIGLASS de leur demande reconventionnelle fondée sur l'abus du droit d'agir en justice ;

condamné in solidum les sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS à payer à la société Sud Gestion la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné in solidum les sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS aux dépens de l'instance.

infirmer le jugement en ce qu'il a :

débouté la société SUD GESTION de ses demandes d'informations, de destruction et de publication ;

limité à 560,45 euros la condamnation de la société ALLO VITRAGE AUTO à payer à la société SUD GESTION une indemnité forfaitaire en réparation de son préjudice de nature patrimoniale résultant des actes de contrefaçon de ses marques n°39489432 et 4231339 ;

limité à 33.614,50 euros la condamnation de la société ALPHA GLASS à payer à la société SUD GESTION une indemnité forfaitaire en réparation de son préjudice de nature patrimoniale résultant des actes de contrefaçon de ses marques n°39489432 et 4231339 ;

limité à 10.000 euros la condamnation in solidum des sociétés ALPHA GLASS et ALLO VITRAGE AUTO à payer à la société SUD GESTION en réparation de son préjudice moral résultant des actes de contrefaçon de ses marques n°39489432 et 4231339 ;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme ;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes à l'encontre de la société ACTIGLASS ;

condamné la société SUD GESTION à payer à la société ACTIGLASS la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

statuant à nouveau,

condamner la société ALPHA GLASS et la société ACTIGLASS in solidum au paiement de la somme de 200.000 euros de dommages et intérêts forfaitaires au titre de la contrefaçon ;

subsidiairement,

condamner la société ALPHA GLASS au paiement de la somme de 200.000 euros de dommages et intérêts forfaitaires au titre de la contrefaçon ;

en toute hypothèse,

condamner la société ALLO VITRAGE AUTO au paiement de la somme de 8.562 euros de dommages et intérêts forfaitaire au titre de la contrefaçon ;

condamner solidairement les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ALPHA GLASS et ACTIGLASS paiement de la somme de 100.000 euros entre les mains de la société SUD GESTION au titre de la réparation du préjudice moral résultant de la contrefaçon ;

condamner les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ALPHA GLASS et ACTIGLASS in solidum au paiement de 350.000 euros entre les mains de la société SUD GESTION à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices matériel (150.000 euros) et moral (200.000 euros) subis du fait et de la concurrence déloyale et du parasitisme commis par les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ALPHA GLASS et ACTIGLASS ;

condamner solidairement les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ALPHA GLASS et ACTIGLASS au paiement de la somme de 3.000 euros entre les mains de la société SUD GESTION au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 février 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.

Sur les chefs du jugement non contestés

La cour constate que le jugement n'est pas contesté, et est donc irrévocable, en ce qu'il a :

déclaré recevables les attestations sur l'honneur établies par Mme [Z] et Mme [W], produites par la société SUD GESTION en pièces n° 49 et 50 ;

débouté la société SUD GESTION de ses demandes de communication de pièces, de destruction et publication.

Sur la recevabilité des passages du procès-verbal d'huissier de justice du 22 février 2019 relatifs à la retranscription de l'échange téléphonique entre Mme [Z] (SUD GESTION) et la téléopératrice de la société ELISE

La société ACTIGLASS soutient que le constat d'huissier est doublement illicite, pour être la retranscription d'une conversation téléphonique opérée à l'insu de l'auteur des propos, l'huissier n'ayant pas décliné son identité ni sa qualité, ni averti son interlocutrice de sa présence et de l'enregistrement en cours, et pour être le fruit d'un stratagème mis en 'uvre par la société SUD GESTION ; que la conversation téléphonique au cours de laquelle a été évoqué le nom de la société ACTIGLASS a été menée de manière artificielle par une employée de la société SUD GESTION ; que l'opératrice téléphonique a répondu comme phrase d'accueil « Allo Vitrage Bonjour », sans jamais parler d'ACTIGLASS avant d'être délibérément poussée à sortir de son rôle de standardiste téléphonique par la salariée de SUD GESTION qui l'a interrogée sur les possibilités de faire réparer un véhicule dans différentes villes dans lesquelles la société ALLO VITRAGE AUTO n'intervient pas mais où l'opératrice a identifié, par son système informatique, la présence d'un concessionnaire ACTIGLASS et ce, sans jamais que la salariée de SUD GESTION n'indique vouloir faire réparer sa voiture dans un centre A+ GLASS. La société ACTIGLASS rappelle que le caractère déloyal dudit a été retenu tant en référé qu'en première instance.

La société ELISE fait valoir que son opératrice n'a été, à aucun moment, avertie que la conversation était sur haut-parleur et qu'un huissier de justice était présent pour enregistrer et retranscrire l'échange ; que cette manière de procéder constitue un procédé déloyal ; qu'en outre, l'employée de SUD GESTION et sa dirigeante n'ont pas décliné leur identité et leurs qualités et les raisons de leur appel ; que son opératrice a parfaitement rempli son rôle (respecter sa phrase d'accueil et inviter son interlocutrice à appeler la société ALLO VITRAGE AUTO, proposer une prise de rendez-vous avec celle-ci) ; que SUD GESTION a employé des stratagèmes pour essayer de faire dire à l'opératrice ce qu'elle voulait entendre ; que les faits relatés dans les attestations ne sont pas circonstanciés (le jour et l'heure des appels ne sont pas précisés) ; que pour être recevable, la preuve ne doit émaner ni de celui qui entend l'utiliser ni d'un mandataire de ce dernier, quels que soient son mode, son support ou son origine ; qu'en tout état de cause, à supposer que ces attestations soient conformes à la réalité, elles ne démontrent aucunement une faute de la société ELISE.

La société SUD GESTION, intimée, soutient qu'en posant des questions à l'opératrice pour savoir à qui correspondait les mentions portées sur la carte, ni sa salariée ni sa directrice ne se sont livrées à un stratagème, puisqu'elles ont au contraire posé directement la question à laquelle elles souhaitaient une réponse ; qu'elle était de parfaite bonne foi et ne cherchait pas à induire en erreur qui que ce soit.

Ceci étant exposé, sur le fondement de l'article 6, § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du principe de loyauté dans l'administration de la preuve et de l'article 9 du code de procédure civile, selon lequel il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, la jurisprudence a consacré le principe selon lequel, dans un procès civil, l'illicéité ou la déloyauté dans l'obtention ou la production d'un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l'écarter des débats. Le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d'éléments portant atteinte à d'autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi (Cass, assemblée plénière, 22 décembre 2023, 20.20-648).

En l'espèce, il ressort du procès-verbal établi le 22 février 2019 à la requête de la société SUD GESTION (pièce 12) (qui n'est pas même fourni dans son intégralité à la cour par cette dernière, plusieurs pages étant manquantes) que Mme [Z], sa salariée, n'a à aucun moment informé la téléopératrice de la société ELISE du fait que la conversation était enregistrée et retranscrite par un huissier de justice présent lors de l'échange téléphonique. La société SUD GESTION ne justifie nullement qu'elle n'était pas en mesure de se procurer les informations recherchées, relatives à l'identité des entités répondant au numéro de téléphone figurant sur la carte de visite litigieuse qui portait la mention « ALLO VITRAGE AUTO », sans recourir à ce procédé déloyal.

Dans ces conditions, le procédé déloyal auquel a recouru la société SUD GESTION, n'apparaît pas proportionné au but recherché par la société SUD GESTION de se constituer des preuves.

Le jugement doit donc être approuvé en ce qu'il a déclaré irrecevables les passages du procès-verbal d'huissier de justice dressé le 22 février 2019 relatifs à la retranscription de l'échange téléphonique qui a eu lieu entre Mme [Z], salariée de la société SUD GESTION, et la téléopératrice de la société ELISE.

Sur les demandes de la société SUD GESTION en contrefaçon de ses marques françaises verbale n° 943 et semi-figurative n° 339

Sur les cartes de visite remises aux compagnies d'assurance

La société ALPHA GLASS, appelante, soutient que la société ALLO VITRAGE AUTO, qui est à l'origine de la carte de visite litigieuse, a toujours été juridiquement, commercialement et financièrement distincte d'elle (activité principale différente, localisation géographique différente, non affiliation au même réseau) ; qu'elle est donc totalement étrangère à la carte de visite litigieuse, qu'elle n'en est pas l'auteur, qu'elle n'a jamais commandé ce type de carte et qu'elle n'en détient aucun exemplaire dans ses centres ; que le numéro de téléphone qui y est mentionné n'est pas le sien et que seul le nom d'ALLO VITRAGE AUTO figure sur la carte ; que la carte a été établie à la demande et au nom de ALLO VITRAGE AUTO à l'époque (fin 2018/début 2019) où il avait été confirmé à cette dernière par la directrice du réseau A+GLASS que sa demande d'admission avait été acceptée et que la zone géographique de [Localité 9] lui était réservée ; que le tribunal a jugé à bon droit que le témoignage de la téléopératrice de ELISE, retranscrit par l'huissier, censé démontrer que le numéro de téléphone inscrit sur la carte renverrait à l'ensemble des centres ANTIGLASS, devait être écarté des débats car obtenu dans des conditions déloyales ; qu'il a également écarté à juste raison la pièce 22 de SUD GESTION censé démontrer qu'ALPHA GLASS avait distribué la carte litigieuse en prétendant appartenir au réseau A+GLASS.

La société ALLO VITRAGE AUTO, intimée, précise qu'elle n'a aucun lien juridique, commercial ou financier avec la société ALPHA GLASS (dénommée autrement ALLO PARE BRISE EXPRESS). Elle soutient que son gérant a produit quelques cartes de visite isolées pensant, sans aucune mauvaise foi, qu'il faisait partie du réseau A+ GLASS après l'envoi d'éléments contractuels par la société SUD GESTION et le suivi d'une formation imposée par le réseau A+ GLASS ; que la société SUD GESTION a d'ailleurs participé à cette confusion en lui indiquant qu'une zone géographique lui était réservée pour exercer son activité ; que ce n'est donc pas sans autorisation qu'elle a émis ces cartes et s'est vue attribuer un numéro de téléphone lui permettant d'accéder à la plateforme téléphonique ELISE ; que ce n'est que plusieurs mois après que son gérant a été informé de l'impossibilité de franchiser ALLO VITRAGE AUTO, en raison d'un conflit entre son associé et la société SUD GESTION ; qu'après avoir appris qu'il ne pourrait pas être franchisé, son gérant a demandé l'annulation de la ligne auprès de la plateforme ELISE ; qu'il n'est fait plus usage de la marque A+ GLASS, la société ne disposant plus d'aucune carte de visite litigieuse et le numéro de téléphone inscrit sur la carte n'étant plus accessible.

La société ACTIGLASS, intimée, soutient que pour fonder une action en contrefaçon, un acte de reproduction, d'usage, d'apposition, de suppression ou de modification doit être caractérisé ; qu'en l'espèce, à l'examen des cartes de visite litigieuses, il est manifeste que la société ALLO VITRAGE AUTO, dont le nom apparaît distinctement sur les cartes, en est seule à l'origine ; qu'aucune mention n'est faite ni de la société ACTIGLASS, ni du réseau ACTIGLASS ; que le numéro de téléphone n'est ni celui de la société ACTIGLASS, ni celui du réseau ACTIGLASS.

La société SUD GESTION, intimée, soutient que les cartes de visite litigieuses ont été largement distribuées pendant plusieurs mois chez différents assureurs (AXA, REAS ASSURANCES) ; qu'elles reproduisent à l'identique sa marque et son logo A+ GLASS ; que le numéro de téléphone associé à l'ensemble de ces signes renvoie aux centres ALPHA GLASS et à la société ACTIGLASS, indifféremment, tous ces acteurs bénéficiant ainsi directement de la contrefaçon ; qu'au surplus, le numéro de téléphone litigieux faisant bien partie des numéros d'appel dédiés à ACTIGLASS, c'est systématiquement à cette société que finissait par aboutir la discussion avec l'opératrice de la société ELISE ; que la société ALLO VITRAGE AUTO n'apporte aucune preuve, ni de la destruction des cartes, ni de leur nombre initial, ni de la fermeture de la ligne téléphonique.

Sur la réalisation et la distribution des cartes de visite par la société ALLO VITRAGE AUTO

La société SUD GESTION produit, en pièce 11 bis, une copie de la carte de visite suivante, remise à un agent de la compagnie d'assurance AXA :

Comme le tribunal l'a relevé, les sociétés ALPHA GLASS, ACTIGLASS, ELISE et ALLO VITRAGE AUTO ne contestent aucunement la similitude entre les signes figurant sur cette carte et les marques n° 943 et 339 dont est titulaire la société SUD GESTION, pas plus que l'identité des produits et services respectivement désignés sous les signes en conflit. Il n'y a pas lieu en conséquence de procéder à la comparaison des signes litigieux et des services en cause, ni à établir l'existence d'un risque de confusion, lequel n'est pas davantage contesté.

C'est pour de justes motifs, que la cour adopte, que le tribunal a jugé que la société ALLO VITRAGE AUTO a commis des actes de contrefaçon en éditant et distribuant ces cartes de visite, après avoir relevé que, si des démarches ont été accomplies par son gérant afin que la société puisse adhérer au réseau A+GLASS animé par la société SUD GESTION, elle ne démontre pas avoir finalisé ces démarches en signant et retournant à la société SUD GESTION le contrat de franchisage l'autorisant à faire usage des marques et du logo invoqués.

Il sera seulement ajouté que le contrat de franchise proposé par la société SUD GESTION comporte un article 14 (« Publicité ») qui prévoit que le franchisé devra recueillir l'accord préalable du franchiseur sur le contenu et la forme de la publicité locale qu'il entendrait développer et que la bonne foi, alléguée par la société ALLO VITRAGE AUTO, est indifférente en matière de contrefaçon.

Le jugement sera donc confirmé sur ce premier point.

Sur l'implication des sociétés ALPHA GLASS et ACTIGLASS

Pour soutenir que les sociétés ALPHA GLASS et ACTI GLASS ont également commis des actes de contrefaçon en distribuant la carte de visite litigieuse ou, à tout le moins en en retirant un bénéfice, la société SUD GESTION verse au débat, outre le procès-verbal d'huissier de justice du 22 février 2019 qui a été écarté pour les raisons exposées ci-dessus, deux attestations sur l'honneur de deux salariées, Mme [Z], précitée, et Mme [P], sa directrice, et un échange de courriels de mars 2019 entre Mme [P] et M. [T] de la société AREAS.

Si le caractère probant de l'attestation de Mme [P] peut légitimement être mis en doute en raison des liens qui sont les siens avec la société SUD GESTION qu'elle dirige, il n'en est pas de même du témoignage de Mme [Z], qui est une ancienne salariée de la société, ayant quitté l'entreprise le 23 juin 2019 selon le certificat de travail qui est fourni, et qui n'est donc plus soumise par un lien de subordination à son ancien employeur, le 3 février 2021, lorsqu'elle atteste, se référant manifestement à l'échange enregistré par l'huissier de justice le 22 février 2019, que lorsqu'elle a composé le numéro de téléphone inscrit sur la carte de visite litigieuse, la personne (de la société ELISE) qui lui a répondu, après l'avoir accueillie par « Allo Vitrage Auto, bonjour », l'a orientée vers un centre ACTIGLASS dont elle lui a donné un numéro de téléphone pour une prise de rendez-vous. Ce témoignage est corroboré par le témoignage, produit par la société ELISE, de M. [B], son gérant, qui relate que « les appels concernant la société ALLO VITRAGE AUTO ont été très peu nombreux, 3 appels par jour les jours de transport. En comparaison, nous traitons 110 appels par jour pour ACTIGLASS ».

Ces deux éléments clairs et concordants suffisent à établir que la société ACTIGLASS a, si ce n'est elle-même diffusé la carte de visite, à tout le moins retiré un profit de sa diffusion par la société ALLO VITRAGE AUTO et, par voie de conséquence, à retenir son implication dans la commission des faits de contrefaçon des marques verbale et semi-figurative de la société SUD GESTION.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté la société SUD GESTION de ses demandes de condamnation formées à l'encontre de la société ACTIGLASS, au titre de la contrefaçon de ses marques n° 943 et 339.

En revanche, c'est à juste raison que le tribunal a considéré que l'échange de courriels de mars 2019 entre Mme [P], directrice de SUD GESTION, et M. [T] de la société d'assurance AREAS, dans lequel ce dernier interroge sa correspondante sur le point de savoir si un garage ALLO PARE BRISE (ce qui correspond à la dénomination de la société ALPHA GLASS) situé à Neufchatel en Bray est bien agréé A+GLASS, comme l'avait indiqué ce garage à son agent local, n'est pas suffisant, à défaut de production de la carte de visite évoquée dans cet échange et censée être jointe au courriel de M. [T], pour établir que la société ALPHA GLASS a distribué la carte de visite litigieuse.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le contenu du site internet exploité par la société ALPHA GLASS

La société ALPHA GLASS, appelante, autrement dénommée ALLO PARE BRISE EXPRESS, soutient qu'à l'époque des faits litigieux, son site internet ne comportait strictement aucune référence au réseau A+ GLASS, la seule référence visible étant celle du réseau ACTIGLASS ; que contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, le procès-verbal de constat d'huissier du 17 avril 2019 n'établit pas que son site internet faisait état de son appartenance au réseau A+ GLASS ; qu'en effet, en recherchant sur internet « ALLO PARE-BRISE », autre dénomination de ALPHA GLASS, l'huissier est tombé sur le site http://allo-parebrise.com sur lequel figure bien le logo ACTIGLASS et non le logo A+ GLASS ; qu'en recherchant sur internet « ALPHA GLASS », à aucun moment l'huissier n'est tombé sur un site faisant sous une forme ou une autre référence à la marque A+ GLASS ; que ce n'est qu'à la fin de son constat, en recherchant les termes « ALLO PARE BRISE EXPRESS » (et non ALLO PARE-BRISE) que l'huissier est tombé sur un site « apbexpress.com » totalement obsolète faisant référence au réseau A+ GLASS ; que toutefois, il ne s'agit pas du site de la société ALPHA GLASS en vigueur à cette époque comme en témoigne le procès-verbal de constat internet qu'elle a fait établir le 14 octobre 2019 qui montre que le site de la société ALPHA GLASS à l'époque ne comportait strictement aucune référence au réseau A + GLASS, la seule référence visible étant celle du réseau ACTIGLASS.

La société SUD GESTION soutient que le procès-verbal de constat d'huissier du 17 avril 2019 démontre que la société ALPHA GLASS (ALLO PARE BRISE) affirmait encore à cette date, alors qu'elle avait quitté le réseau A+ GLASS en novembre 2015, être « membre du réseau national A+GLASS » et publiait des photos faisant figurer le logo A+ GLASS sur ses centres ([Localité 14], [Localité 15] et [Localité 17]) ; que le fait que les mentions litigieuses ne soient plus affichées sur le site internet d'ALPHA GLASS le 14 octobre 2019, comme le montre un constat d'huissier que la société ALPHA GLASS a fait établir à cette date, quelques jours avant l'audience de référé pour les besoins de sa défense, ne fait pas disparaître la présence sur son site internet des mentions litigieuses jusqu'en avril 2019.

Ceci étant exposé, c'est pour de justes motifs, que la cour adopte, que le tribunal, au vu du procès-verbal de constat en date du 17 avril 2019 fourni par la société SUD GESTION, a jugé que la société ALPHA GLASS a commis des actes de contrefaçon des deux marques opposées en continuant à faire figurer sur son site internet accessible à l'adresse apbexpress.com, le signe verbal « A+GLASS », ainsi que le logo de la société SUD GESTION qui constitue une déclinaison de la marque semi-figurative n° 339, bien qu'étant sortie du réseau A+GLASS exploité par la société SUD GESTION à la fin du mois de novembre 2015.

Il sera ajouté que l'extrait « Whois » produit par la société SUD GESTION montre que la société ALPHA GLASS, également dénommée ATOUT PARE BRISE, détenait encore le site apbexpress.com en février 2021, et que la circonstance que les mentions litigieuses apparaissent à partir de lointaines occurrences sur son site ne peut lui permettre de s'exonérer de sa responsabilité, la société ALPHA GLASS devant s'assurer, au moment où elle quittait le réseau A+GLASS pour rejoindre le réseau concurrent ACTIGLASS, de la disparition de toute mention pouvant constituer un usage illicite des signes distinctifs de la société SUD GESTION, susceptible en outre d'entraîner un risque de confusion, démarche qu'elle a au demeurant entreprise avec succès comme en atteste le procès-verbal qu'elle a fait établir le 14 octobre 2019, dans les jours qui ont précédé l'audience de référé ayant abouti à l'ordonnance précitée du 20 décembre 2019, et qui n'a révélé plus aucune référence au réseau A+GLASS.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur l'affiche publicitaire d'[Localité 13] apposée par la société ALPHA GLASS

La société ALPHA GLASS soutient que le panneau portant l'affiche litigieuse se trouvait sur un terrain pris en location par un garage automobile n'ayant aucun lien avec elle ; qu'elle n'est plus, par conséquent, la gardienne du panneau portant l'affiche litigieuse et qu'elle n'a donc aucun pouvoir d'intervention sur ce panneau ; que SUD GESTION a d'ailleurs fait délivrer sommation d'avoir à retirer l'affiche au représentant d'une société tierce et non à la société ALPHA GLASS ; que l'affiche litigieuse ne porte mention d'aucune adresse et d'aucun numéro de téléphone en fonctionnement afférent à l'une des agences de la société ALPHA GLASS.

La société SUD GESTION sollicite la confirmation du jugement sur ce point.

Ceci étant exposé, c'est par de justes motifs, que la cour adopte, que le tribunal, au vu d'un procès-verbal de constat d'huissier que la société SUD GESTION a fait établir le 16 avril 2019, a considéré qu'en maintenant postérieurement à la fin du mois de novembre 2015, sur un panneau publicitaire situé à Evreux ' et non pas à Dieppe comme indiqué par erreur dans le jugement ', une affiche comportant un logo A+GLASS imitant la marque semi-figurative n° 339, sans l'autorisation de la société SUD GESTION, la société ALPHA GLASS a commis des actes de contrefaçon de cette marque.

La circonstance que le terrain sur lequel est implanté le panneau litigieux était au jour du procès-verbal occupé par un garage automobile tiers est sans emport dès lors que, comme l'ont retenu les premiers juges, il appartenait à la société ALPHA GLASS, lorsqu'elle a quitté le réseau A+GLASS à la fin du mois de novembre 2015, de faire disparaître le panneau publicitaire du terrain qu'elle louait ou, par la suite, de demander au nouveau locataire de procéder à son retrait, au besoin à ses frais.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes de la société SUD GESTION en concurrence déloyale et en parasitisme

La société ALPHA GLASS demande la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté les demandes en concurrence déloyale et parasitaire de la société SUD GESTION, sans développer d'argumentation particulière sur ces points.

La société SUD GESTION soutient avoir été victime d'une « fraude collective », laquelle avait pour but l'instauration d'une confusion avec le réseau A+GLASS grâce à la copie de son identité visuelle très caractéristique (petite voiture arrondie, couleurs bleu et le jaune, formes rondes et courbes, caractères rappelant le graphisme de la bande dessinée), mais aussi sa désorganisation par un détournement de sa clientèle, ses clients étant démarchés d'une manière très pernicieuse, par le biais d'assureurs chez lesquels la carte, éditée et diffusée par ALLO VITRAGE AUTO, était déposée, par des informations inexactes données sur son réseau de franchise et également par l'altération des relations de confiance qu'elle avait avec les assureurs, les cartes de visite litigieuses comportant la mention « franchise offerte », ce qui, dès lors qu'elle ne pratiquait pas en réalité de telles conditions, a conduit certains assureurs à lui retirer leur agrément, comme la société AXA ; que la participation d'ACTIGLASS à ces actes de concurrence déloyale est établie par sa passivité dès lors qu'elle ne pouvait ignorer, notamment à la suite de la mise en demeure du mois de mars 2019, que son nom était associé au nom commercial de son franchisé contrefacteur ACTIGLASS ALLO PARE BRISE (ALPHA GLASS) et de la société ALPHA GLASS, elle aussi contrefactrice.

Elle soutient que les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ALPHA GLASS et ACTIGLASS se sont en outre rendues coupables d'actes de parasitisme en s'immisçant dans son sillage afin de tirer profit sans rien dépenser de ses efforts et de son savoir-faire.

La société ACTIGLASS soutient qu'aucun fait de concurrence déloyale ou de parasitisme distinct ne vient s'ajouter aux faits invoqués au titre de la prétendue contrefaçon ; que pour toute preuve de ses allégations, la société SUD GESTION produit un constat d'huissier irrégulier fondé sur un procédé déloyal ainsi que des attestations sans valeur probante (ex-salariée et dirigeante) ; qu'en tout état de cause, elle ne saurait répondre que de son fait et non des éventuelles fautes des sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS (son concessionnaire), et de l'erreur commise par la préposée de la société ELISE qui l'a désignée lors de l'échange avec la préposée de SUD GESTION ; qu'il n'est nullement démontré à son encontre des faits positifs, autrement dit (i) qu'elle aurait connu ALLO VITRAGE AUTO et su que celle-ci faisait éditer des cartes de visite contrefaisantes, (ii) qu'elle aurait su qu'ALLO VITRAGE AUTO utilisait également les services de la société ELISE pour faire renvoyer ses appels téléphoniques, (iii) qu'elle aurait mis en place avec ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS une stratégie consistant à détourner les clients A+ GLASS qui appelleraient le standard téléphonique géré par ELISE sur renvoi du numéro de téléphone d'ALLO VITRAGE AUTO et (iv) qu'elle aurait demandé à ELISE de détourner tout appel au numéro d'ALLO VITRAGE AUTO d'un client pensant avoir à faire à un franchisé A+ GLASS, pour le détourner vers le centre d'un concessionnaire ACTIGLASS.

La société ALLO VITRAGE AUTO demande la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté la société SUD GESTION de sa demande au titre de la concurrence déloyale et du parasitisme. Elle fait valoir que son gérant a payé un droit d'entrée, a suivi une formation, a reçu un document écrit de SUD GESTION lui indiquant qu'une zone géographique lui était réservée ; qu'elle ne peut être responsable du prétendu préjudice de la société SUD GESTION puisque la méthode de rémunération dans le système des franchises est très encadrée et ne fonctionne qu'avec agrément, de sorte que si ALLO VITRAGE AUTO était responsable d'une quelconque perte financière, SUD GESTION aurait en sa possession toutes les factures émises par elle puisque ces factures lui auraient été transmises pour règlement aux assureurs qui n'auraient pas manqué de lui transmettre tout comme il l'a fait pour la carte de visite ; que seules quelques cartes de visite ont été utilisées début 2019 alors que SUD GESTION sollicite le dédommagement d'une chute de facturation entre 2017 et 2018.

Ceci étant exposé, il est rappelé que la concurrence déloyale et le parasitisme sont pareillement fondés sur l'article 1240 du code civil mais sont caractérisés par l'application de critères distincts, la concurrence déloyale l'étant au regard du risque de confusion, considération étrangère au parasitisme qui requiert la circonstance selon laquelle, à titre lucratif et de façon injustifiée, une personne morale ou physique copie une valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements.

La société SUD GESTION dont l'action en contrefaçon de marques a prospéré ne peut invoquer au titre de la concurrence déloyale et parasitaire que des actes distincts de ceux déjà retenus au titre de la contrefaçon.

Tel est le cas de la reprise de la charte graphique utilisée par la société SUD GESTION (sa pièce 7) sur la carte de visite contrefaisante éditée et diffusée par la société ALLO VITRAGE AUTO. Le graphisme de la carte litigieuse reprend en effet non seulement le code couleur jaune et bleu adopté par la société SUD GESTION, mais également et de façon servile, le dessin représentant deux cercles jaunes reliés entre eux, agrémentés chacun de deux virgules blanches donnant une impression de volume et de brillance et d'une main blanche, l'un d'une main ouverte et l'autre d'une main refermée avec le pouce levé, ainsi que le dessin de la même petite voiture bleue avec des inscriptions sur la porte côté passager, un petit rétroviseur et un petit feu arrière rouge, ces dessins, qui évoquent l'univers de la bande dessinée, lequel n'est pas commun dans le secteur de l'automobile, ne se retrouvant pas dans les éléments figuratifs de la marque n° 339. La remise de cette carte à des clients ou clients potentiels était donc de nature à créer ou entretenir une confusion, ces derniers étant amenés à croire que la société ALLO VITRAGE AUTO dont le nom figurait sur la carte était affilié au réseau A+GLASS.

Par ailleurs, la remise de la carte contrefaisante à des assureurs, qui étaient eux-mêmes pourvoyeurs de clients, était de nature à détourner la clientèle de la société SUD GESTION, invitée à appeler le numéro de téléphone imprimé sur la carte qui l'orientait vers la société ALLO VITRAGE AUTO ou la société ACTIGLASS comme il a été vu, ce qui brouillait nécessairement l'organisation du réseau A+GLASS auquel étaient faussement rattachées ces deux sociétés. En outre, la carte litigieuse comportait la mention « franchise offerte », ce qui pouvait s'avérer contraire au cahier des charges des assureurs, telle la société AXA comme en justifie la société SUD GESTION, ce qui était de nature à compromettre les relations entre cette dernière et les assureurs.

Aucun fait distinct de ceux de contrefaçon imputables à la société ALPHA GLASS, résultant du maintien sur son site internet ou sur un panneau publicitaire de signes imitant les marques de la société SUD GESTION, n'est en revanche caractérisé.

Pour ces motifs, la concurrence déloyale alléguée du fait du risque de confusion et de la désorganisation de la société SUD GESTION est constituée et doit être imputée aux sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ACTIGLASS.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

Le jugement sera en revanche confirmé en ce qu'il a rejeté la demande fondée sur le parasitisme, aucun élément n'étant apporté établissant l'existence d'une quelconque valeur économique individualisée qui aurait été indûment captée par les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ALPHA GLASS et ACTIGLASS.

Sur les mesures de réparation

Sur les demandes indemnitaires

La société SUD GESTION demande réparation de son préjudice matériel découlant de la contrefaçon de ses marques sur la base d'une évaluation forfaitaire calculée à partir de la redevance que les sociétés contrefactrices auraient dû acquitter si elles avaient sollicité l'autorisation de faire usage desdites marques, à laquelle elle prétend qu'il convient d'ajouter des frais d'acquisition d'équipements (signalétique, logiciel) nécessaires dans le cadre de la franchise pour l'exploitation des marques ; elle sollicite en outre réparation d'un préjudice moral qu'elle estime important, résultant du fait que les actes de contrefaçon ont eu un impact négatif sur ses relations avec ses partenaires assureurs en discréditant la marque aux yeux de ces derniers. Au titre de la concurrence déloyale, elle réclame réparation d'un préjudice économique et d'un préjudice moral, arguant que la fréquentation des centres A+ GLASS dans les départements de la Seine maritime et de l'Eure a nettement diminué au cours de l'année 2018, en lien avec le déplacement de clientèle résultant des actes déloyaux, et invoquant une atteinte à son image et à sa réputation du fait qu'elle subit un risque de confusion et une désorganisation de ses activités commerciales.

La société ALPHA GLASS soutient que le montant des dommages et intérêts qui lui sont réclamés n'est pas sérieux ; que le manque à gagner sur les redevances et le préjudice moral ne peuvent être retenus étant donné que ALPHA GLASS n'a jamais fait usage des marques appartenant à SUD GESTION et n'a jamais voulu faire croire à sa clientèle qu'elle faisait partie du réseau A+ GLASS après la cessation de ses relations contractuelles avec cette dernière ; que la marque litigieuse n'a plus rien d'attractif pour elle et qu'elle n'a donc plus aucun intérêt à l'utiliser.

La société ACTIGLASS soutient que SUD GESTION demande la réparation de préjudices dont ni l'existence, ni la consistance ne sont démontrées ; que SUD GESTION ne démontre pas en quoi chacun des co-responsables aurait contribué à la production de l'entier dommage ; qu'elle ne justifie pas des montants qu'elle invoque et qu'elle n'établit pas le lien de causalité avec les faits dénoncés.

La société ALLO VITRAGE AUTO soutient que SUD GESTION n'établit pas, pour chacune de ses demandes et chacune des sociétés mises en cause, l'existence d'une faute et d'un préjudice ; qu'il n'y a aucun lien entre le préjudice invoqué et le fait de ALLO VITRAGE AUTO.

En ce qui concerne la contrefaçon des marques

Ceci étant exposé, l'article L. 716-4-10 du code de la propriété intellectuelle prévoit que « Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner est la perte subie par la partie lésée ;

2° Le préjudice morale causé à cette dernière ;

3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d'investissement intellectuel, matériel et promotionnel que celui-ci a retiré de la contrefaçon.

Toutefois, la juridiction peut à titre d'alternative et ce sur demande de la partie lésée allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée. »

En l'espèce, la société SUD GESTION produit aux débats des factures adressées à ses franchisés, outre une plaquette destinée aux nouveaux franchisés, desquelles il résulte qu'en 2019, la redevance annuelle d'exploitation des marques A+ GLASS due par la société franchisée s'élevait à 2 037,97 euros pour un premier centre, 1 527,72 euros HT pour un deuxième centre, puis 1 018,49 euros HT pour un troisième centre (ou davantage). Il n'est pas justifié que la majoration prévue par l'alinéa 4 de l'article L. 716-4-10 devrait correspondre en l'espèce à des frais d'acquisition d'équipements (signalétique, logiciel) nécessaires dans le cadre de la franchise. La condamnation de la société ACTIGLASS doit être proportionnée au nombre de centres dont elle disposait au moment des faits (une vingtaine) et à la durée de l'usage qu'elle a fait des signes contrefaisants, qui est la même que celle appliquée à la société ALLO VITRAGE AUTO, une condamnation in solidum ne se justifiant pas, dès lors que la responsabilité de chacune des sociétés incriminées peut être précisément évaluée au regard de sa participation aux faits dommageables.

Ainsi, la cour est en mesure de juger que le tribunal a procédé à une juste appréciation de la somme au paiement de laquelle doit être condamnée la société ALLO VITRAGE AUTO, qui dispose d'un centre, qui a fait usage des signes contrefaisant les marques pendant près de 3 mois, et qui aurait donc dû régler une redevance de 509, 50 €, en la fixant à 560,45 € tenant compte d'une majoration de 10 %.

La condamnation de la société ACTIGLASS, qui dispose de 20 centres et a fait usage des signes contrefaisant les marques pendant près de 3 mois également, et qui aurait donc dû régler une redevance de 5 474,62 €, sera fixée à 6 022 € en retenant une même majoration de 10 %.

La condamnation de la société ALPHA GLASS, qui dispose de 6 centres et qui a fait l'usage de signes contrefaisants pendant près de 4 ans, aurait dû payer une redevance de 30 558, 60 €. Cependant, compte tenu de la nature des actes de contrefaçon retenus à son encontre (maintien de signes contrefaisants sur son site internet et sur un panneau publicitaire) et du moindre impact dommageable qui en découle, il n'y a lieu de prononcer à son encontre une condamnation basée sur la redevance majorée mais de fixer à la somme forfaitaire de 20 000 € l'indemnité qu'elle devra verser à la société SUD GESTION.

Les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ACTIGLASS et ALPHA GLASS seront en outre condamnées in solidum à payer à la société SUD GESTION la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral résultant de l'amoindrissement du pouvoir distinctif de ses marques.

Le jugement sera réformé en ce sens.

En ce qui concerne la concurrence déloyale

Le préjudice de la société SUD GESTION né des actes de concurrence déloyale sera indemnisé par l'allocation d'une somme de 6 000 € à titre de dommages et intérêts qui sera mise à la charge in solidum des sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ACTIGLASS.

Sur les mesures complémentaires

Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives à la mesure d'interdiction prononcée à l'encontre des sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS de poursuivre les actes de contrefaçon des marques de la société SUD GESTION.

Il sera également confirmé en ce qu'il a, en tant que de besoin, ordonné à la société ALPHA GLASS de cesser la diffusion des cartes litigieuses, ainsi que de tout document comportant les marques et en ce qu'il a condamné la société ALPHA GLASS à déposer la totalité des matériels comportant les marques.

Sur la demande de la société ELISE en garantie de la société ALLO VITRAGE AUTO

La société ELISE n'étant condamnée à aucun titre, sa demande de condamnation de la société ALLO VITRAGE AUTO à la garantir est sans objet.

Sur les demandes des sociétés ALPHA GLASS, ACTIGLASS et ALLO VITRAGE AUTO pour procédure abusive

Le sens du présent arrêt conduit à la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté les sociétés ALPHA GLASS et ACTIGLASS de leurs demandes formées contre la société SUD GESTION pour procédure abusive et à rejeter les demandes présentées en appel par les sociétés ALPHA GLASS, ACTIGLASS et ALLO VITRAGE AUTO sur le même fondement.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ALPHA GLASS aux dépens de première instance et également en ce qu'il a condamné les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ALPHA GLASS (au profit de la société SUD GESTION) et ACTIGLASS (au profit de la société ELISE) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera en revanche infirmé en ce qu'il a condamné la société SUD GESTION sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à payer 2 000 € à la société ACTIGLASS.

En appel, les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ALPHA GLASS et ACTIGLASS seront condamnées in solidum aux dépens et au paiement à la société SUD GESTION de la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société ALPHA GLASS paiera sur ce même fondement la somme de 3 000 € à la société ELISE.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a :

débouté la société SUD GESTION de ses demandes de condamnation formées à l'encontre de la société ACTIGLASS, au titre de la contrefaçon de ses marques n° 943 et 339,

débouté la société SUD GESTION de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale,

condamné la société ALPHA GLASS à payer à la société SUD GESTION une indemnité forfaitaire de 33 614,50 euros, en réparation de son préjudice de nature patrimoniale, résultant des actes de contrefaçon de ses marques n° 943 et 339,

condamné in solidum les sociétés ALPHA GLASS et ALLO VITRAGE AUTO à payer à la société SUD GESTION la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral, résultant des actes de contrefaçon de ses marques n° 943 et 339,

condamné la société SUD GESTION à payer à la société ACTIGLASS la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

L'infirme de ces chefs,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la société ACTIGLASS a commis des actes de contrefaçon de la marque verbale n° 894 et de la marque semi-figuratives n° 339 de la société SUD GESTION,

Dit que les sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ACTIGLASS ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société SUD GESTION,

Condamne la société ACTIGLASS à payer à la société SUD GESTION la somme forfaitaire de 6 022 € en réparation de son préjudice de nature patrimoniale résultant des actes de contrefaçon de ses marques,

Condamne la société ALPHA GLASS à payer à la société SUD GESTION la somme forfaitaire de 20 000 € en réparation de son préjudice de nature patrimoniale résultant des actes de contrefaçon de ses marques,

Condamne in solidum les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ACTIGLASS et ALPHA GLASS à payer à la société SUD GESTION la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral résultant des actes de contrefaçon de ses marques,

Condamne in solidum les sociétés ALLO VITRAGE AUTO et ACTIGLASS à payer à la société SUD GESTION la somme de 6 000 € en réparation de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale,

Dit sans objet la demande de la société ELISE en garantie de la société ALLO VITRAGE AUTO,

Déboute les sociétés ALPHA GLASS, ACTIGLASS et ALLO VITRAGE AUTO de leurs demandes pour procédure abusive à l'encontre de la société SUD GESTION,

Condamne in solidum les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ALPHA GLASS et ACTIGLASS aux dépens d'appel,

Condamne in solidum les sociétés ALLO VITRAGE AUTO, ALPHA GLASS et ACTIGLASS à payer à la société SUD GESTION la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société ALPHA GLASS à payer à la société ELISE la somme de 3 000 € sur ce même fondement.