CA Aix-en-Provence, 15e ch. A, 25 avril 2008, n° 06/08051
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Jardel
Conseillers :
M. Couchet, M. Brue
Avoués :
SCP Blanc Amsellem-Mimran Cherfils, SCP Latil - Penarroya-Latil - Alligier, SCP de Saint Ferreol - Touboul
Avocats :
Me de Baets, Me Saves
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Saisi par M. Y de demandes tendant à voir constater la nullité des actes délivrés par la SCP MOLLEVILLE avec une référence de domicile de M. X erronée et le caractère illégal et abusif de l'enlèvement de son véhicule, ordonner la mainlevée de la mesure de saisie de ce véhicule, et condamner le défendeur 'à restituer le véhicule après constat de Maître FRANCK huissier de justice de l'état où peut se trouver celui-ci suite à son enlèvement, à la somme de 7.600 euros dans le cadre de l'article 1382 du code civil' outre une indemnité de 1.500 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nice a, par jugement du 10 avril 2006, déclaré la SCP MOLLEVILLE irrecevable en son exception de nullité de l'assignation, déclaré M. Y irrecevable en ses exceptions de nullité du procès-verbal d'immobilisation et d'enlèvement du véhicule dressé le 15 décembre 2005, rejeté le surplus de ses demandes, et mis à sa charge une indemnité de 1.200 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 28 avril 2006 M. Y a relevé appel de ce jugement.
Par conclusions notifiées et déposées le 30 août 2006 il expose que M. X ayant prétendu avoir occupé un emploi à son profit a été débouté par jugement du 'tribunal de prud'hommes' du 17 février 2000 infirmé par arrêt de la chambre sociale du 13 décembre 2004 allouant différents salaires et indemnités à M. X, lequel a sollicité la SCP MOLLEVILLE de procéder à l'exécution de cette décision par l'enlèvement de son véhicule automobile fermé et sécurisé sur un parking privatif, alors que l'huissier de justice avait été avisé par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 septembre 2005, suite à un commandement de saisie, d'un procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation en date du 17 janvier 2005, et ajoute avoir requis Maître FRANCK huissier de justice aux fins de constat de l'état de son véhicule retrouvé s'agissant d'un outil de travail insaisissable en vertu de l'article 14 de la loi du 9 juillet 1991.
L'appelant considère que le jugement entrepris se caractérise par l'oubli de la preuve des faits avec inversion flagrante des articles 20 et 21 de la loi du 9 juillet 1991, estime avoir fait l'objet d'un abus de saisie, formule diverses observations sur la fausse domiciliation de M. X délivrant tous les actes à partir de la même adresse à laquelle il ne reçoit pas cependant les actes délivrés à son encontre, et demande à la Cour de constater la nullité des actes délivrés par Maître MOLLEVILLE huissier de justice comme non conformes à l'article '648 du code civil' en conséquence de l'existence d'une adresse erronée de l'intimé, de constater que l'enlèvement du véhicule dans la partie privative de l'immeuble est illégal et pour le moins abusif avec comme conséquence un préjudice le contraignant à louer un véhicule pour continuer l'exercice de sa profession, d'ordonner la mainlevée de ces mesures inutiles et abusives, et de condamner conjointement M. X et Maître MOLLEVILLE à lui restituer le véhicule après constat de tout expert, ainsi qu'à lui payer conjointement les sommes de '10.000 euros dans le cadre de l'article 13182 du code civil' et de 2.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions déposées et signifiées le 29 janvier 2007 M. X réplique, après le rappel des faits et de la procédure, avoir fait procéder par la SCP MOLLEVILLE, à défaut de paiement par M. Y des sommes mises à sa charge par arrêt de la chambre sociale de la Cour de céans du 13 décembre 2004 à titre notamment de rappel de salaires et d'indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, à l'immobilisation et à l'enlèvement de son véhicule par procès-verbal dénoncé le 16 décembre 2005, souligne que force est de constater que les nombreuses assignations délivrées à la requête de l'appelant le furent à son adresse prétendument fausse, alors précisément que ces actes mentionnent que son nom figure bien sur la boîte aux lettres, en déduit que M. Y ne peut invoquer sa propre turpitude pour solliciter la nullité du commandement de payer, et souligne que l'intéressé ne rapporte pas la preuve d'un grief au titre de l'article 114 du code de procédure civile, de sorte que son exception de nullité doit être rejetée avec confirmation du jugement entrepris sur ce point.
L'intimé conclut que l'enlèvement du véhicule de l'appelant est intervenu valablement dans la cour d'un immeuble accessible depuis la voie publique ne constituant pas au sens légal un domicile, estime que l'acte d'huissier de justice doit être validé pour un enlèvement non abusif entrepris en vertu d'un arrêt lui octroyant des sommes, ajoute que les dispositions de l'article 14 de la loi du 9 juillet 1991 sont sans objet dans la mesure où un véhicule automobile ne peut être assimilé à un bien mobilier nécessaire à la vie et au travail, et demande à la Cour de confirmer le jugement critiqué en toutes ses dispositions et de condamner l'appelant au paiement d'une somme de 3.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions déposées et signifiées le 16 avril 2007 la SCP MOLLEVILLE observe, après le rappel factuel et procédural, s'en rapporter à justice du chef de la nullité de l'assignation délivrée le 6 janvier 2006 soulevée en première instance par application de l'article 56 du code de procédure civile, énumère les actes d'exécution effectués en vertu du titre exécutoire, en l'occurrence l'arrêt du 13 décembre 2004, s'oppose à l'argumentation de l'appelant relative au caractère erroné de l'adresse de M. X, laquelle se trouve expressément mentionnée par les décisions de justice rendues entre les parties, souligne que M. Y ne peut nullement sur ce point invoquer un quelconque grief par application de l'article 114 du code de procédure civile, et considère que la motivation du premier juge est parfaitement fondée.
La SCP intimée conclut par ailleurs que l'indisponibilité du certificat d'immatriculation en date du 29 juin 2005 n'interdisait pas pour autant l'immobilisation et l'enlèvement du véhicule, d'autant plus que le débiteur n'a pas exécuté les causes du titre exécutoire, qualifie de parfaitement régulière la procédure considérée avec transport du véhicule au garage GROSSI et dénonciation à l'appelant de la procédure d'immobilisation et d'enlèvement par acte du 16 décembre 2005 outre à cette date un commandement de payer, formule diverses observations sur l'argumentation de l'appelant commettant une erreur d'interprétation des articles 20 et 21 de la loi du 9 juillet 1991 ainsi que l'a indiqué avec raison le juge de l'exécution, et demande à la Cour de débouter l'appelant de ses demandes de nullité des actes, de mainlevée de l'indisponibilité et de l'enlèvement de son véhicule, de confirmer purement et simplement le jugement entrepris, et, en toute hypothèse, de condamner M. Y au paiement d'une somme de 3.000 ?en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été rendue le 3 septembre 2007.
Par bordereaux en date des 28 février 2008 et 10 mars 2008, les avoués de la SCP MOLLEVILLE et de M. Y ont communiqué et produit de nouvelles pièces.
Par lettre de son avoué du 11 mars 2008 M. X a sollicité le rejet des pièces communiquées au nom de M. Y.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Les pièces communiquées et produites dans les intérêts de la SCP MOLLEVILLE et de M. Y postérieurement à l'ordonnance de clôture - dont la révocation n'a nullement été sollicitée - seront déclarées irrecevables d'office en application de l'article 783 du code de procédure civile.
Agissant en vertu d'un arrêt définitif de la Cour de céans du 13 décembre 2004, condamnant M. Y à lui payer diverses sommes correspondant à des rappels de salaires, de congés payés, ainsi qu'à des indemnités compensatrices de préavis, de non maintien dans le logement de fonction et de licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'un montant total de 27.266,42 , et ordonnant la remise des bulletins de salaires de juillet 1996 à mars 1998, du certificat de travail et de l'attestation ASSEDIC sous astreinte, M. X a fait dresser à son encontre par la SCP MOLLEVILLE un procès-verbal d'immobilisation et d'enlèvement d'un véhicule automobile suivant acte du 15 décembre 2005, régulièrement dénoncé par nouvel acte du 16 décembre 2005.
M. Y, déclaré irrecevable en ses exceptions de nullité du procès-verbal d'immobilisation et d'enlèvement du véhicule dressé le 15 décembre 2005 par le jugement dont appel, a également été condamné au paiement d'une indemnité de 1.200 ?en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et débouté du surplus de ses demandes, tendant à voir constater la nullité des actes délivrés par la SCP MOLLEVILLE, motifs pris d'une référence de domicile de M. X erronée et du caractère illégal et abusif de l'enlèvement de son véhicule.
L'appelant conclut en cause d'appel à une fausse domiciliation de l'intimé se prévalant de 3 domiciles, situés "...à Nice", <adresse 1> à Nice où M. X déclare habiter à Maître FRANCK mais où son nom ne figure pas sur la boîte aux lettres, et <adresse 2>, domicile de Mme W où loge son fils, dont il déduit "la nullité des actes délivrés par Maître MOLLEVILLE, huissier de justice, non conformes à l'article 648 du code civil [lire du code de procédure civile]".
Or M. Y a procédé à la saisine du juge de l'exécution par acte du 6 janvier 2006, domiciliant M. X notamment '<adresse 2> 06000 Nice' ainsi qu'en l'étude de la SCP MOLLEVILLE à titre de 'domicile élu', conformément d'ailleurs aux mentions figurant sur l'acte d'exécution contesté, de sorte que M. Y ne saurait arguer d'une erreur de domiciliation de M. X.
Les mentions de l'acte du 15 décembre 2005, se révèlent ainsi - y compris quant au domicile élu de M. X - parfaitement exactes et, en conséquence, conformes aux dispositions de l'article 648 du code de procédure civile sans qu'aucune nullité ne soit encourue contrairement aux écritures de l'appelant.
Le jugement entrepris sera dès lors confirmé de ce chef.
L'argumentation de l'appelant afférente à la nullité de la mesure d'exécution aux motifs de l'enlèvement de son véhicule sur un parking privatif ne peut davantage prospérer, l'article 58 de la loi du 9 juillet 1991 autorisant 'l'huissier de justice chargé de l'exécution' à immobiliser 'le véhicule du débiteur... en quelque lieu qu'il se trouve, par tout moyen'.
De plus l'enlèvement critiqué a été réalisé sur un parking, si bien que l'article 21 de la même loi, argué par M. Y, n'est pas applicable en l'espèce, comme se rapportant, selon l'article 20 de ladite loi, à un local 'servant à l'habitation'.
Enfin les dispositions de l'article 14 de la loi du 9 juillet 1991 ne sauraient justifier la demande de nullité de l'appelant, à défaut pour celui-ci de prouver que son véhicule automobile constitue un bien mobilier nécessaire à sa vie ou à son travail au sens de ce texte.
En fonction de ces éléments il est justifié de débouter l'appelant de l'ensemble de ses demandes, et de confirmer le jugement entrepris, non autrement discuté, en toutes ses dispositions.
L'équité commande de condamner l'appelant au paiement des sommes de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à chaque intimé.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Reçoit l'appel,
Déclare irrecevables d'office les pièces communiquées et produites par la SCP MOLLEVILLE et M. Y postérieurement à l'ordonnance de clôture,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne M. Y à payer à M. X et à la SCP MOLLEVILLE chacun la somme de 1.000 euros (mille) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
Condamne M. Y aux entiers dépens ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.