Décisions
CA Montpellier, 2e ch. civ., 17 octobre 2024, n° 23/06262
MONTPELLIER
Arrêt
Autre
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre civile
ARRET DU 17 OCTOBRE 2024
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 23/06262 - N° Portalis DBVK-V-B7H-QB6V
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 29 NOVEMBRE 2023
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE MONTPELLIER
N° RG 1223000569
APPELANT :
Monsieur [L] [Z]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représenté par Me Marie THOMAS COMBRES, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIME :
Monsieur [S], [C] [T]
de nationalité Française
[Adresse 1], R
DC, appt 1,
[Localité 2]
assigné à étude le 23 janvier 2024
Révocation de l'ordonnance de clôture du 27 Août 2024 et nouvelle clôture à l'audience du 3 septembre 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Septembre 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre
Madame Nelly CARLIER, Conseillère
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère
Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO
ARRET :
- par défaut ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.
*
* *
FAITS, PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par acte sous seing privé en date du 28 janvier 2022, avec prise d'effet au 4 février 2022, M. [L] [Z] a donné à bail à M. [S] [T] un appartement, situé [Adresse 1] à [Localité 2], moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 715 euros, outre une provision pour charges de 75 euros.
Le 28 mars 2023, M. [Z] a fait délivrer à M. [T] un commandement de payer la somme de 1 811,44 euros au titre des loyers et charges impayés au 9 mars 2023 et de justifier d'une assurance du logement en cours, visant la clause résolutoire.
Saisi par acte en date du 23 mai 2023, délivré par M. [Z], le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Montpellier statuant en référé, par ordonnance rendue le 29 novembre 2023, a
- déclaré recevable l'action en référé,
- constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 28 janvier 2022 et ayant pris effet le 4 février 2022 entre M. [L] [Z] et M. [S] [T] concernant l'immeuble à usage d'habitation situé [Adresse 1], sont réunies à la date du 29 mai 2023,
- condamné M. [S] [T] à payer à M. [L] [Z] la somme provisionnelle de 3 696,60 euros représentant l'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation arrêté à la date du 6 novembre 2023, mensualité du mois de novembre comprise,
- autorisé M. [S] [T] à se libérer de la dette, outre le loyer et les charges courants, en 23 versements mensuels de 154 euros et une 24ème mensualité qui soldera la dette,
- précisé que chaque versement devra intervenir le 15 du mois, et pour le premier versement, au plus tard le 15 du mois suivant la signi'cation de la présente ordonnance,
- suspendu les effets de la clause résolutoire pendant l'exécution des délais accordés,
- dit que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n'avoir jamais été acquise,
- dit qu'en revanche, à défaut de paiement d'une seule mensualité a son échéance, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l'arriéré, la clause de résiliation de plein droit reprendra son plein et entier effet, de sorte que, le bail étant résilié, M. [S] [T] :
- sera tenu de régler immédiatement la totalité des sommes restant dues,
- qu'à défaut pour M. [S] [T] d'avoir volontairement libéré les lieux indûment occupés avec toutes les personnes et biens s'y trouvant de son chef, dans les deux mois de la signification d'un commandement de quitter les lieux, il sera procédé à son expulsion, au besoin avec le concours de la force publique et l'aide d'un serrurier et il sera procédé, conformément à l'article L. 433-1 du code des procédures civiles d'exécution, au transport des meubles laisses dans les lieux, à ses frais, dans tel garde-meuble désigne par la personne expulsée ou à défaut par le bailleur,
- devra payer une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer, augmente des charges courantes applicables au jour de la résiliation de plein droit du bail le 29 mai 2023, jusqu'à la date de la libération effective et dé'nitive des lieux, caractérisée par la restitution des clés au bailleur ou à son mandataire, avec le cas échéant, indexation selon les dispositions contractuelles,
- débouté M. [L] [Z] de ses autres demandes,
- condamné M. [S] [T] aux dépens,
- dit que s'il devait être exposé des dépens pour l'exécution de la décision, ils seraient à la charge de M. [S] [T],
- condamné M. [S] [T] à payer à M. [L] [Z] la somme de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- constaté l'exécution provisoire,
- dit qu'une copie de la présente décision sera transmise au représentant de l'Etat dans le département.
Par déclaration en date du 20 décembre 2023, M. [Z] a relevé appel partiel de cette ordonnance.
Par des dernières conclusions déposées le 8 février 2024 et signifiées le 13 février 2024, M. [Z] demande à la cour de :
- réformer l'ordonnance déférée, en ce qu'elle a autorisé M. [T] à se libérer de la dette en 24 versements, suspendu les effets de la clause résolutoire pendant l'exécution des délais accordés, dit qu'à défaut d'avoir volontairement libéré les lieux, il sera procédé à l'expulsion du locataire et qu'il devra payer une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer, l'a débouté de ses autres demandes et a condamné M. [T] à payer la somme de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- statuant à nouveau :
- juger que M. [S] [T] ne s'est pas acquitté de ses loyers et charges,
- juger que M. [S] [T] n'a pas justifié de l'assurance contre les risques locatifs,
- constater que le bail conclu entre les parties se trouve résilié de plein droit par le jeu de la clause résolutoire au 29 mai 2023,
- ordonner son expulsion, ainsi que celle de toutes personnes introduites dans les lieux de votre chef, avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin est, et qu'il sera procédé, conformément à l'article L. 433-1 du code des procédures civiles d'exécution, au transport des meubles laissés dans les lieux, à ses frais, dans tel garde-meuble désigné par la personne expulsée ou à défaut par le bailleur,
- condamner à titre provisionnel M. [S] [T] à lui régler de la somme provisionnelle de 1 575,66 euros représentant l'arriéré de loyers, charges et indemnité d'occupation arrêté au 8 février 2024, avec intérêts de droit,
- condamner à titre provisionnel M. [S] [T] au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle, fixée au montant du loyer et des charges au 29 mai 2023, jusqu'à son départ effectif des lieux, laquelle indemnité sera indexée tout comme le loyer et avec intérêts de droit,
- condamner M. [T] à lui régler la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, en ce compris le coût du commandement de payer, de l'assignation et de signification.
Au soutien de son appel, il fait essentiellement valoir que :
- aucun justificatif d'assurance n'a été produit dans le délai,
- la demande de délais de paiement n'est pas fondée, M. [T] ne justifiant pas de sa situation économique, aucune reprise des loyers courants n'est intervenue,
- M. [T] ne respecte pas les délais accordés, la dette étant de 1 576,66 euros au 8 février 2024.
Il est renvoyé, pour l'exposé exhaustif des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est en date du 3 septembre 2024.
M. [T], destinataire de la déclaration d'appel par acte d'huissier en date du 23 janvier 2024 remis à l'étude, n'a pas constitué avocat.
MOTIFS DE LA DECISION :
En appel, si l'intimé est défaillant, il est néanmoins statué sur le fond, et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés, la cour devant examiner, au vu des moyens d'appel, la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s'est déterminé.
1- sur le défaut d'assurance
En application de l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le juge des contentieux et de la protection, dans les limites de sa compétence, peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Selon l'article 7 g de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire a l'obligation de s'assurer contre les risques dont il doit répondre en sa qualité de locataire et d'en justifier lors de la remise des clefs puis, chaque année, à la demande du bailleur. La justification de cette assurance résulte de la remise au bailleur d'une attestation de l'assureur ou de son représentant.
Toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut d'assurance du locataire ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux, reproduisant les dispositions de cet article.
La clause résolutoire litigieuse (article 4.3.2.1) stipule que si le bailleur le souhaite, le contrat sera résilié immédiatement et de plein droit un mois après un commandement demeuré infructueux à défaut d'assurance du locataire contre les risques locatifs.
M. [Z] confirme, à hauteur de cour, qu'il a reçu une attestation d'assurance pour la période du 4 février 2023 au 3 février 2024, qui couvre, ainsi, le délai d'un mois ouvert par le commandement en date du 28 mars 2023, qui ne sollicitait, au demeurant, qu'un justificatif d'assurance pour l'année en cours. Si cette justification est postérieure à l'expiration du délai d'un mois, le locataire ayant rempli son obligation d'assurer le bien loué pour la période visée par le commandement, les conditions d'acquisition de la clause résolutoire ne sont pas réunies.
L'ordonnance sera confirmée de ce chef.
2- sur la résiliation du bail et ses conséquences
L'article 24 I de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version antérieure à la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023, applicable au litige, dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne
produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux, le commandement de payer devant satisfaire aux conditions de forme prévues à cet article.
Le commandement de payer du 28 mars 2023 est demeuré infructueux pendant plus de deux mois ; c'est à juste titre que le premier juge a constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire, figurant au bail conclu entre M. [Z] et M. [T], étaient réunies à la date du 29 mai 2023.
Il en résulte que M. [T] est occupant sans droit du logement appartenant à M. [Z] depuis la résiliation le 29 mai 2023. Cette occupation caractérise un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser sur le fondement de l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile.
L'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a ordonné à M. [T] de libérer les lieux et dit qu'à défaut, M. [Z] pourra, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion, étant constaté que ce dernier verse aux débats un procès-verbal de reprise des lieux loués en date des 7 et 12 août 2024.
3- sur le paiement de l'arriéré locatif et d'une indemnité mensuelle d'occupation
En application de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le juge des référés peut accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
Aux termes de l'article 7 a de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.
A compter de la résiliation du bail, l'occupant sans droit, ni titre du logement est tenu au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation, fixé par le premier juge, à un montant égal à celui des loyers et provisions sur charges applicables au jour de la résiliation.
Il ressort du décompte versé aux débats par M. [Z] qu'à la date du 8 février 2024 (terme de février 2024 inclus), M. [T] était redevable d'une somme de 1 575,66 euros au titre des loyers, provisions sur charges et indemnités d'occupation.
Au vu de ce décompte et du procès-verbal de reprise des lieux loués en date des 7 et 12 août 2024, l'ordonnance déférée sera confirmée sur le principe de la condamnation à titre provisionnel du locataire à s'acquitter de l'arriéré locatif et à verser une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant égal à celui des loyers et provisions sur charges, qui auraient été dus si le bail n'avait pas été résilié et amendée quant au montant de la provision au titre de l'arriéré locatif et à la date à laquelle l'indemnité mensuelle d'occupation a pris fin.
4- sur les délais de grâce
En application de l'article 24 V et VII de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version en vigueur, antérieure à la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023, le juge peut, même d'office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. Le quatrième alinéa de l'article 1343-5 s'applique lorsque la décision du juge est prise sur le fondement du présent alinéa. Le juge peut d'office vérifier tout élément constitutif de la dette locative et le respect de l'obligation prévue au premier alinéa de l'article 6 de la présente loi. Il invite les parties à lui produire tous éléments relatifs à l'existence d'une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.
Pendant le cours des délais accordés par le juge, les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges.
Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.
Le procès-verbal de reprise des lieux loués en date des 7 et 12 août 2024 rend sans objet tout délai de paiement de la dette locative et suspension des effets de la clause résolutoire, tels qu'accordés par le premier juge sur ce fondement tandis que la cour n'est saisie d'aucune demande de délais de grâce, fondée sur les dispositions de l'article 1343-5 du code civil.
Dans ces conditions, eu égard au départ de M. [T], l'ordonnance sera réformée de ce chef.
5 -sur les frais irrépétibles et les dépens
M. [T], partie succombante, sera condamné aux dépens d'appel et au vu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à payer la somme de 800 euros.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut,
- Confirme l'ordonnance de référé déférée, sauf en ce qu'elle a condamné M. [T] à payer à M. [Z] la somme provisionnelle de 3 696,60 euros représentant l'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation arrêté à la date du 6 novembre 2023, autorisé M. [T] à se libérer de la dette en 24 versements mensuels avec suspension des effets de la clause résolutoire et débouté M. [Z] de ses autres demandes ;
- Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
- Condamne M. [S] [T] à payer à M. [L] [Z] la somme provisionnelle de 1 575,66 euros, représentant l'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation arrêté à la date du 8 février 2024 (terme de février inclus) ;
- Constate qu'un procès-verbal de reprise des lieux loués a été établi les 7 et 12 août 2024 ;
- Dit que, par voie de conséquence, tout délai de paiement, avec suspension des effets de la clause résolutoire, fondé sur les dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 est devenu sans objet ;
- Dit que l'indemnité mensuelle d'occupation, due à compter du 29 mai 2023, a cessé le 12 août 2024 ;
- Condamne M. [S] [T] à verser à M. [L] [Z] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne M. [S] [T] aux dépens d'appel.
le greffier le président
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre civile
ARRET DU 17 OCTOBRE 2024
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 23/06262 - N° Portalis DBVK-V-B7H-QB6V
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 29 NOVEMBRE 2023
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE MONTPELLIER
N° RG 1223000569
APPELANT :
Monsieur [L] [Z]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représenté par Me Marie THOMAS COMBRES, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIME :
Monsieur [S], [C] [T]
de nationalité Française
[Adresse 1], R
DC, appt 1,
[Localité 2]
assigné à étude le 23 janvier 2024
Révocation de l'ordonnance de clôture du 27 Août 2024 et nouvelle clôture à l'audience du 3 septembre 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Septembre 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre
Madame Nelly CARLIER, Conseillère
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère
Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO
ARRET :
- par défaut ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.
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FAITS, PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par acte sous seing privé en date du 28 janvier 2022, avec prise d'effet au 4 février 2022, M. [L] [Z] a donné à bail à M. [S] [T] un appartement, situé [Adresse 1] à [Localité 2], moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 715 euros, outre une provision pour charges de 75 euros.
Le 28 mars 2023, M. [Z] a fait délivrer à M. [T] un commandement de payer la somme de 1 811,44 euros au titre des loyers et charges impayés au 9 mars 2023 et de justifier d'une assurance du logement en cours, visant la clause résolutoire.
Saisi par acte en date du 23 mai 2023, délivré par M. [Z], le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Montpellier statuant en référé, par ordonnance rendue le 29 novembre 2023, a
- déclaré recevable l'action en référé,
- constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 28 janvier 2022 et ayant pris effet le 4 février 2022 entre M. [L] [Z] et M. [S] [T] concernant l'immeuble à usage d'habitation situé [Adresse 1], sont réunies à la date du 29 mai 2023,
- condamné M. [S] [T] à payer à M. [L] [Z] la somme provisionnelle de 3 696,60 euros représentant l'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation arrêté à la date du 6 novembre 2023, mensualité du mois de novembre comprise,
- autorisé M. [S] [T] à se libérer de la dette, outre le loyer et les charges courants, en 23 versements mensuels de 154 euros et une 24ème mensualité qui soldera la dette,
- précisé que chaque versement devra intervenir le 15 du mois, et pour le premier versement, au plus tard le 15 du mois suivant la signi'cation de la présente ordonnance,
- suspendu les effets de la clause résolutoire pendant l'exécution des délais accordés,
- dit que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n'avoir jamais été acquise,
- dit qu'en revanche, à défaut de paiement d'une seule mensualité a son échéance, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l'arriéré, la clause de résiliation de plein droit reprendra son plein et entier effet, de sorte que, le bail étant résilié, M. [S] [T] :
- sera tenu de régler immédiatement la totalité des sommes restant dues,
- qu'à défaut pour M. [S] [T] d'avoir volontairement libéré les lieux indûment occupés avec toutes les personnes et biens s'y trouvant de son chef, dans les deux mois de la signification d'un commandement de quitter les lieux, il sera procédé à son expulsion, au besoin avec le concours de la force publique et l'aide d'un serrurier et il sera procédé, conformément à l'article L. 433-1 du code des procédures civiles d'exécution, au transport des meubles laisses dans les lieux, à ses frais, dans tel garde-meuble désigne par la personne expulsée ou à défaut par le bailleur,
- devra payer une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer, augmente des charges courantes applicables au jour de la résiliation de plein droit du bail le 29 mai 2023, jusqu'à la date de la libération effective et dé'nitive des lieux, caractérisée par la restitution des clés au bailleur ou à son mandataire, avec le cas échéant, indexation selon les dispositions contractuelles,
- débouté M. [L] [Z] de ses autres demandes,
- condamné M. [S] [T] aux dépens,
- dit que s'il devait être exposé des dépens pour l'exécution de la décision, ils seraient à la charge de M. [S] [T],
- condamné M. [S] [T] à payer à M. [L] [Z] la somme de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- constaté l'exécution provisoire,
- dit qu'une copie de la présente décision sera transmise au représentant de l'Etat dans le département.
Par déclaration en date du 20 décembre 2023, M. [Z] a relevé appel partiel de cette ordonnance.
Par des dernières conclusions déposées le 8 février 2024 et signifiées le 13 février 2024, M. [Z] demande à la cour de :
- réformer l'ordonnance déférée, en ce qu'elle a autorisé M. [T] à se libérer de la dette en 24 versements, suspendu les effets de la clause résolutoire pendant l'exécution des délais accordés, dit qu'à défaut d'avoir volontairement libéré les lieux, il sera procédé à l'expulsion du locataire et qu'il devra payer une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer, l'a débouté de ses autres demandes et a condamné M. [T] à payer la somme de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- statuant à nouveau :
- juger que M. [S] [T] ne s'est pas acquitté de ses loyers et charges,
- juger que M. [S] [T] n'a pas justifié de l'assurance contre les risques locatifs,
- constater que le bail conclu entre les parties se trouve résilié de plein droit par le jeu de la clause résolutoire au 29 mai 2023,
- ordonner son expulsion, ainsi que celle de toutes personnes introduites dans les lieux de votre chef, avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin est, et qu'il sera procédé, conformément à l'article L. 433-1 du code des procédures civiles d'exécution, au transport des meubles laissés dans les lieux, à ses frais, dans tel garde-meuble désigné par la personne expulsée ou à défaut par le bailleur,
- condamner à titre provisionnel M. [S] [T] à lui régler de la somme provisionnelle de 1 575,66 euros représentant l'arriéré de loyers, charges et indemnité d'occupation arrêté au 8 février 2024, avec intérêts de droit,
- condamner à titre provisionnel M. [S] [T] au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle, fixée au montant du loyer et des charges au 29 mai 2023, jusqu'à son départ effectif des lieux, laquelle indemnité sera indexée tout comme le loyer et avec intérêts de droit,
- condamner M. [T] à lui régler la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, en ce compris le coût du commandement de payer, de l'assignation et de signification.
Au soutien de son appel, il fait essentiellement valoir que :
- aucun justificatif d'assurance n'a été produit dans le délai,
- la demande de délais de paiement n'est pas fondée, M. [T] ne justifiant pas de sa situation économique, aucune reprise des loyers courants n'est intervenue,
- M. [T] ne respecte pas les délais accordés, la dette étant de 1 576,66 euros au 8 février 2024.
Il est renvoyé, pour l'exposé exhaustif des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est en date du 3 septembre 2024.
M. [T], destinataire de la déclaration d'appel par acte d'huissier en date du 23 janvier 2024 remis à l'étude, n'a pas constitué avocat.
MOTIFS DE LA DECISION :
En appel, si l'intimé est défaillant, il est néanmoins statué sur le fond, et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés, la cour devant examiner, au vu des moyens d'appel, la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s'est déterminé.
1- sur le défaut d'assurance
En application de l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le juge des contentieux et de la protection, dans les limites de sa compétence, peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Selon l'article 7 g de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire a l'obligation de s'assurer contre les risques dont il doit répondre en sa qualité de locataire et d'en justifier lors de la remise des clefs puis, chaque année, à la demande du bailleur. La justification de cette assurance résulte de la remise au bailleur d'une attestation de l'assureur ou de son représentant.
Toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut d'assurance du locataire ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux, reproduisant les dispositions de cet article.
La clause résolutoire litigieuse (article 4.3.2.1) stipule que si le bailleur le souhaite, le contrat sera résilié immédiatement et de plein droit un mois après un commandement demeuré infructueux à défaut d'assurance du locataire contre les risques locatifs.
M. [Z] confirme, à hauteur de cour, qu'il a reçu une attestation d'assurance pour la période du 4 février 2023 au 3 février 2024, qui couvre, ainsi, le délai d'un mois ouvert par le commandement en date du 28 mars 2023, qui ne sollicitait, au demeurant, qu'un justificatif d'assurance pour l'année en cours. Si cette justification est postérieure à l'expiration du délai d'un mois, le locataire ayant rempli son obligation d'assurer le bien loué pour la période visée par le commandement, les conditions d'acquisition de la clause résolutoire ne sont pas réunies.
L'ordonnance sera confirmée de ce chef.
2- sur la résiliation du bail et ses conséquences
L'article 24 I de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version antérieure à la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023, applicable au litige, dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne
produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux, le commandement de payer devant satisfaire aux conditions de forme prévues à cet article.
Le commandement de payer du 28 mars 2023 est demeuré infructueux pendant plus de deux mois ; c'est à juste titre que le premier juge a constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire, figurant au bail conclu entre M. [Z] et M. [T], étaient réunies à la date du 29 mai 2023.
Il en résulte que M. [T] est occupant sans droit du logement appartenant à M. [Z] depuis la résiliation le 29 mai 2023. Cette occupation caractérise un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser sur le fondement de l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile.
L'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a ordonné à M. [T] de libérer les lieux et dit qu'à défaut, M. [Z] pourra, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion, étant constaté que ce dernier verse aux débats un procès-verbal de reprise des lieux loués en date des 7 et 12 août 2024.
3- sur le paiement de l'arriéré locatif et d'une indemnité mensuelle d'occupation
En application de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le juge des référés peut accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
Aux termes de l'article 7 a de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.
A compter de la résiliation du bail, l'occupant sans droit, ni titre du logement est tenu au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation, fixé par le premier juge, à un montant égal à celui des loyers et provisions sur charges applicables au jour de la résiliation.
Il ressort du décompte versé aux débats par M. [Z] qu'à la date du 8 février 2024 (terme de février 2024 inclus), M. [T] était redevable d'une somme de 1 575,66 euros au titre des loyers, provisions sur charges et indemnités d'occupation.
Au vu de ce décompte et du procès-verbal de reprise des lieux loués en date des 7 et 12 août 2024, l'ordonnance déférée sera confirmée sur le principe de la condamnation à titre provisionnel du locataire à s'acquitter de l'arriéré locatif et à verser une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant égal à celui des loyers et provisions sur charges, qui auraient été dus si le bail n'avait pas été résilié et amendée quant au montant de la provision au titre de l'arriéré locatif et à la date à laquelle l'indemnité mensuelle d'occupation a pris fin.
4- sur les délais de grâce
En application de l'article 24 V et VII de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version en vigueur, antérieure à la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023, le juge peut, même d'office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. Le quatrième alinéa de l'article 1343-5 s'applique lorsque la décision du juge est prise sur le fondement du présent alinéa. Le juge peut d'office vérifier tout élément constitutif de la dette locative et le respect de l'obligation prévue au premier alinéa de l'article 6 de la présente loi. Il invite les parties à lui produire tous éléments relatifs à l'existence d'une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.
Pendant le cours des délais accordés par le juge, les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges.
Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.
Le procès-verbal de reprise des lieux loués en date des 7 et 12 août 2024 rend sans objet tout délai de paiement de la dette locative et suspension des effets de la clause résolutoire, tels qu'accordés par le premier juge sur ce fondement tandis que la cour n'est saisie d'aucune demande de délais de grâce, fondée sur les dispositions de l'article 1343-5 du code civil.
Dans ces conditions, eu égard au départ de M. [T], l'ordonnance sera réformée de ce chef.
5 -sur les frais irrépétibles et les dépens
M. [T], partie succombante, sera condamné aux dépens d'appel et au vu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à payer la somme de 800 euros.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut,
- Confirme l'ordonnance de référé déférée, sauf en ce qu'elle a condamné M. [T] à payer à M. [Z] la somme provisionnelle de 3 696,60 euros représentant l'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation arrêté à la date du 6 novembre 2023, autorisé M. [T] à se libérer de la dette en 24 versements mensuels avec suspension des effets de la clause résolutoire et débouté M. [Z] de ses autres demandes ;
- Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
- Condamne M. [S] [T] à payer à M. [L] [Z] la somme provisionnelle de 1 575,66 euros, représentant l'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation arrêté à la date du 8 février 2024 (terme de février inclus) ;
- Constate qu'un procès-verbal de reprise des lieux loués a été établi les 7 et 12 août 2024 ;
- Dit que, par voie de conséquence, tout délai de paiement, avec suspension des effets de la clause résolutoire, fondé sur les dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 est devenu sans objet ;
- Dit que l'indemnité mensuelle d'occupation, due à compter du 29 mai 2023, a cessé le 12 août 2024 ;
- Condamne M. [S] [T] à verser à M. [L] [Z] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne M. [S] [T] aux dépens d'appel.
le greffier le président