Décisions
Cass. 2e civ., 24 octobre 2024, n° 22-15.682
COUR DE CASSATION
Autre
Cassation
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 24 octobre 2024
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 993 F-B
Pourvoi n° A 22-15.682
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 OCTOBRE 2024
1°/ M. [R] [C],
2°/ Mme [L] [U], épouse [C],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° A 22-15.682 contre l'arrêt rendu le 18 janvier 2022 par la cour d'appel de Poitiers (2e chambre civile), dans le litige les opposant à M. [B] [G], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Chevet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. et Mme [C], et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 18 septembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Chevet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 18 janvier 2022), une ordonnance portant injonction de payer, rendue sur requête de M. [G], a été signifiée à M. et Mme [C], le 14 décembre 2017, puis, après apposition par le greffe de la formule exécutoire, le 28 février 2018, les deux significations étant intervenues par remise de l'acte à l'étude de l'huissier de justice.
2. Le 19 novembre 2018, M. [C] a formé opposition à cette ordonnance.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. M. et Mme [C] font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'opposition formée par M. [C] à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer n° 17300/21/17/222798 dont opposition et de dire que cette ordonnance d'injonction de payer reprendra son entier effet dans le respect des articles 1450 et suivants du code de procédure civile, alors « que le délai accordé au débiteur pour former opposition dans les conditions de l'article 1416 du code de procédure civile court nécessairement, lorsque l'ordonnance portant injonction de payer ne lui a pas été signifiée à personne, à compter du jour où la mesure d'exécution a été portée à sa connaissance ; qu'en cas d'intervention à une procédure de saisie des rémunérations en cours, le délai pour former opposition, en l'absence de signification de l'ordonnance à personne, court à compter de la dénonciation de l'intervention au débiteur ; que, pour dire irrecevable l'opposition formée par M. [C] le 19 novembre 2018 à l'ordonnance d'injonction de payer du 28 novembre 2017, la cour d'appel, après avoir énoncé que ni l'ordonnance d'injonction de payer ni aucun acte d'exécution postérieur n'avait été signifié à personne à M. [C], a considéré qu'il résultait de la lettre de M. [K], huissier de justice, à l'avocat de M. [G] informant celui-ci que des fonds avaient été répartis en application de la demande d'intervention dans le cadre de la procédure de saisie des rémunérations de M. [C] en vertu de l'ordonnance d'injonction de payer du 28 novembre 2017, la preuve d'une mesure rendant indisponible les biens du débiteur, en l'espèce une saisie des rémunérations notifiée au débiteur en application de l'article R. 325231 du code du travail, au plus tard le 11 octobre 2018 dès lors que les fonds saisis ont à cette date fait l'objet d'une répartition au titre de la créance faisant l'objet d'une intervention ; qu'en statuant ainsi sans constater que l'intervention de M. [G] à la procédure de saisie des rémunérations en cours aurait été effectivement dénoncée à M. [C] et la date de cette dénonciation, seule de nature à faire courir le délai d'opposition, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1416 du code de procédure civile et de l'article R. 3252-31 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 668 et 1416 du code de procédure civile, R. 3252-6, R. 3252-30 et R. 3252-31, ce dernier dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-913 du 30 août 2019, du code du travail :
4. Aux termes du deuxième de ces textes, l'opposition est formée dans le mois qui suit la signification de l'ordonnance. Toutefois, si la signification n'a pas été faite à personne, l'opposition est recevable jusqu'à l'expiration du délai d'un mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur.
5. Selon le quatrième, le créancier muni d'un titre exécutoire peut, sans tentative de conciliation préalable, intervenir à une procédure de saisie des sommes dues à titre de rémunération en cours, afin de participer à la répartition des sommes saisies. Cette intervention est formée par requête remise contre récépissé ou adressée au greffe.
6. Selon le cinquième, après que le juge a vérifié le montant de la créance nouvelle faisant l'objet d'une intervention d'une saisie en cours en principal, intérêts et frais, le greffier notifie l'intervention au débiteur ainsi qu'aux créanciers qui sont déjà dans la procédure.
7. Selon le troisième, sauf disposition contraire, les notifications et convocations faites en application du chapitre II du titre V du livre II du code du travail sont adressées par lettre recommandée avec avis de réception.
8. Selon le premier, la date de la notification par voie postale est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition et, à l'égard de celui à qui elle est faite, la date de la réception de la lettre.
9. Il résulte de la combinaison des quatre derniers de ces textes que le point de départ de l'opposition à une ordonnance portant injonction de payer qui n'a pas été signifiée à personne est, en cas d'intervention d'un créancier à une procédure de saisie des rémunérations, la date de notification de l'intervention au débiteur.
10. Pour déclarer irrecevable l'opposition à l'ordonnance portant injonction de payer, l'arrêt retient que le créancier rapporte la preuve de l'existence d'une mesure rendant indisponibles les biens du débiteur, en l'espèce une saisie des rémunérations, notifiée au débiteur en application de l'article R. 3252-31 du code du travail au plus tard le 11 octobre 2018, dès lors que les fonds saisis ont fait l'objet, à cette date, d'une répartition au titre de la créance faisant l'objet d'une intervention.
11. En se déterminant ainsi, sans constater la date à laquelle l'intervention avait été notifiée au débiteur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Portée et conséquences de la cassation
12. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt déclarant l'opposition irrecevable entraîne la cassation des autres chefs de dispositif de l'arrêt, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne M. [G] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [G] à payer à M. et Mme [C] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille vingt-quatre.
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 24 octobre 2024
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 993 F-B
Pourvoi n° A 22-15.682
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 OCTOBRE 2024
1°/ M. [R] [C],
2°/ Mme [L] [U], épouse [C],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° A 22-15.682 contre l'arrêt rendu le 18 janvier 2022 par la cour d'appel de Poitiers (2e chambre civile), dans le litige les opposant à M. [B] [G], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Chevet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. et Mme [C], et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 18 septembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Chevet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 18 janvier 2022), une ordonnance portant injonction de payer, rendue sur requête de M. [G], a été signifiée à M. et Mme [C], le 14 décembre 2017, puis, après apposition par le greffe de la formule exécutoire, le 28 février 2018, les deux significations étant intervenues par remise de l'acte à l'étude de l'huissier de justice.
2. Le 19 novembre 2018, M. [C] a formé opposition à cette ordonnance.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. M. et Mme [C] font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'opposition formée par M. [C] à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer n° 17300/21/17/222798 dont opposition et de dire que cette ordonnance d'injonction de payer reprendra son entier effet dans le respect des articles 1450 et suivants du code de procédure civile, alors « que le délai accordé au débiteur pour former opposition dans les conditions de l'article 1416 du code de procédure civile court nécessairement, lorsque l'ordonnance portant injonction de payer ne lui a pas été signifiée à personne, à compter du jour où la mesure d'exécution a été portée à sa connaissance ; qu'en cas d'intervention à une procédure de saisie des rémunérations en cours, le délai pour former opposition, en l'absence de signification de l'ordonnance à personne, court à compter de la dénonciation de l'intervention au débiteur ; que, pour dire irrecevable l'opposition formée par M. [C] le 19 novembre 2018 à l'ordonnance d'injonction de payer du 28 novembre 2017, la cour d'appel, après avoir énoncé que ni l'ordonnance d'injonction de payer ni aucun acte d'exécution postérieur n'avait été signifié à personne à M. [C], a considéré qu'il résultait de la lettre de M. [K], huissier de justice, à l'avocat de M. [G] informant celui-ci que des fonds avaient été répartis en application de la demande d'intervention dans le cadre de la procédure de saisie des rémunérations de M. [C] en vertu de l'ordonnance d'injonction de payer du 28 novembre 2017, la preuve d'une mesure rendant indisponible les biens du débiteur, en l'espèce une saisie des rémunérations notifiée au débiteur en application de l'article R. 325231 du code du travail, au plus tard le 11 octobre 2018 dès lors que les fonds saisis ont à cette date fait l'objet d'une répartition au titre de la créance faisant l'objet d'une intervention ; qu'en statuant ainsi sans constater que l'intervention de M. [G] à la procédure de saisie des rémunérations en cours aurait été effectivement dénoncée à M. [C] et la date de cette dénonciation, seule de nature à faire courir le délai d'opposition, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1416 du code de procédure civile et de l'article R. 3252-31 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 668 et 1416 du code de procédure civile, R. 3252-6, R. 3252-30 et R. 3252-31, ce dernier dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-913 du 30 août 2019, du code du travail :
4. Aux termes du deuxième de ces textes, l'opposition est formée dans le mois qui suit la signification de l'ordonnance. Toutefois, si la signification n'a pas été faite à personne, l'opposition est recevable jusqu'à l'expiration du délai d'un mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur.
5. Selon le quatrième, le créancier muni d'un titre exécutoire peut, sans tentative de conciliation préalable, intervenir à une procédure de saisie des sommes dues à titre de rémunération en cours, afin de participer à la répartition des sommes saisies. Cette intervention est formée par requête remise contre récépissé ou adressée au greffe.
6. Selon le cinquième, après que le juge a vérifié le montant de la créance nouvelle faisant l'objet d'une intervention d'une saisie en cours en principal, intérêts et frais, le greffier notifie l'intervention au débiteur ainsi qu'aux créanciers qui sont déjà dans la procédure.
7. Selon le troisième, sauf disposition contraire, les notifications et convocations faites en application du chapitre II du titre V du livre II du code du travail sont adressées par lettre recommandée avec avis de réception.
8. Selon le premier, la date de la notification par voie postale est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition et, à l'égard de celui à qui elle est faite, la date de la réception de la lettre.
9. Il résulte de la combinaison des quatre derniers de ces textes que le point de départ de l'opposition à une ordonnance portant injonction de payer qui n'a pas été signifiée à personne est, en cas d'intervention d'un créancier à une procédure de saisie des rémunérations, la date de notification de l'intervention au débiteur.
10. Pour déclarer irrecevable l'opposition à l'ordonnance portant injonction de payer, l'arrêt retient que le créancier rapporte la preuve de l'existence d'une mesure rendant indisponibles les biens du débiteur, en l'espèce une saisie des rémunérations, notifiée au débiteur en application de l'article R. 3252-31 du code du travail au plus tard le 11 octobre 2018, dès lors que les fonds saisis ont fait l'objet, à cette date, d'une répartition au titre de la créance faisant l'objet d'une intervention.
11. En se déterminant ainsi, sans constater la date à laquelle l'intervention avait été notifiée au débiteur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Portée et conséquences de la cassation
12. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt déclarant l'opposition irrecevable entraîne la cassation des autres chefs de dispositif de l'arrêt, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne M. [G] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [G] à payer à M. et Mme [C] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille vingt-quatre.