Cass. com., 23 octobre 2024, n° 23-18.952
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vigneau
Rapporteur :
Mme Coricon
Avocat général :
Mme Henry
Avocat :
Me Balat
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 25 mai 2023), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 21 décembre 2017, pourvoi n° 16-28.549) entre le mois de mai 2004 et le mois de mai 2009, le Régime social des indépendants (le RSI), aux droits duquel vient l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) des Pays de la Loire, a émis neuf contraintes à l'encontre de M. [X] aux fins de recouvrer des cotisations impayées au titre des années 2002 à 2008 pour un montant total de 42 784 euros.
2. Le 7 avril 2009, M. [X] a été mis en redressement judiciaire, procédure convertie en liquidation judiciaire le 1er septembre 2009. Par une ordonnance du 27 juillet 2010, le juge-commissaire a prononcé l'admission de la créance du RSI à titre définitif et privilégié à hauteur de 42 784 euros.
3. Au mois de novembre 2012, M. [X], agissant seul, a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale aux fins d'annulation des contraintes. Après mise en cause du liquidateur, le tribunal a déclaré la demande irrecevable comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée attachée à la décision d'admission de créance.
4. M. [X] a fait appel seul de ce jugement.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. M. [X] fait grief à l'arrêt de déclarer qu'il n'avait pas qualité à agir pour contester les contraintes émises par l'URSSAF des Pays de la Loire et de déclarer son appel irrecevable, alors « que si le jugement de liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, les droits et actions concernant son patrimoine étant exercés pendant la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur, le débiteur conserve, malgré son dessaisissement, un droit propre pour exercer notamment les voies de recours contre les décisions statuant sur l'existence et le montant des créances ; qu'en déclarant irrecevable l'appel formé par M. [X] contre le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Beauvais du 17 octobre 2023, au motif qu'il n'avait pas qualité à agir pour contester les contraintes émises par l'URSSAF des Pays de la Loire et que « le liquidateur judiciaire Maître [S] [D], appelé en cause, n'a pas comparu et n'a pas conclu », cependant que le recours formé par M. [X] à l'encontre du jugement du 17 octobre 2023, relatif à des créances alléguées par l'URSSAF des Pays de la Loire, était parfaitement recevable en vertu de son pouvoir propre, la cour d'appel a violé l'article L. 641-9 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 641-9 du code de commerce :
6. Il résulte de ce texte que le débiteur en liquidation judiciaire dessaisi de l'administration et de la disposition de ses droits patrimoniaux dispose du droit propre d'exercer les voies de recours prévues par la loi contre les décisions statuant sur l'existence et le montant d'une créance déclarée au passif de la procédure collective.
7. En conséquence, pourvu qu'il le fasse en présence du liquidateur, le débiteur est recevable à contester devant les juridictions compétentes les titres exécutoires telles les contraintes fondant des créances déclarées à son passif.
8. Pour dire que M. [X] n'avait pas qualité à agir en contestation de créance et déclarer son appel irrecevable, l'arrêt retient que le débiteur qui fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire est dessaisi de l'administration de ses biens, de sorte que, en vertu de l'article L. 641-9 du code de commerce, seul le liquidateur est habilité à poursuivre les instances introduites par le débiteur. Il ajoute que le liquidateur appelé dans la cause n'ayant pas comparu, ni conclu, il n'y a pas lieu de prendre en considération les conclusions du débiteur et que l'appel n'est pas soutenu.
9. En statuant ainsi, alors que le liquidateur, après avoir été appelé dans la cause devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, avait été intimé, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 mai 2023, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai.