CA Grenoble, ch. com., 17 octobre 2024, n° 23/04329
GRENOBLE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
SCI Les Cèdres (SCI)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Figuet
Conseillers :
M. Bruno, Mme Faivre
Avocats :
Me Maguet, Me Ricotti, Me Oswald
EXPOSE DU LITIGE
Le 26 juillet 2009, M. [Z] [H] et Mme [T] [H], bailleur, ont régularisé un bail commercial avec Mme [U] [I] preneur, portant sur un immeuble affecté à l'usage d'hôtel, bar, tabac et restaurant situé [Adresse 4] à [Localité 3].
Par acte du 23 août 2013, M. [Z] [H] et Mme [T] [H] ont vendu le bien immobilier objet du bail à la SCI Les Cèdres.
Par acte du 25 janvier 2013, Mme [U] [I] a cédé son fonds de commerce, comprenant son droit au bail, à M. [B] [M] et Mme [C] [X].
Par acte du 1er août 2017, M. [B] [M] et Mme [C] [X] ont cédé le fonds de commerce et le droit au bail à M. [J] [P], exerçant en qualité d'entrepreneur individuel, actuel preneur du local. Cette cession de fonds de commerce a été signifiée par M.[P] à la SCI Les Cèdres le 6 Septembre 2017.
Le 18 janvier 2023, la SCI Les Cèdres a fait délivrer à M. [J] [P] un commandement de payer visant la clause résolutoire pour une somme en principal de 16.521,12 euros.
Ce commandement de payer est demeuré infructueux à l'expiration du délai d'un mois.
Par acte de commissaire de justice du 17 juillet 2023, la SCI Les Cèdres a saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu aux fins de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire issue du contrat de bail commercial régularisé le 26 juillet 2009 et l'expulsion du preneur et de tout occupant de son chef.
Par ordonnance le 21 novembre 2023 le juge des référés du tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu a :
- rejeté l'exception de nullité soulevée par M. [J] [P],
- constaté que les demandes des parties se heurtent à des contestations sérieuses,
- dit n'y avoir lieu à référé et rejeté l'ensemble des demandes formées par les parties,
- dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SCI Les Cèdres aux dépens.
Par déclaration du 20 décembre 2023, la SCI Les Cèdres a interjeté appel de cette ordonnance sauf en ce qu'elle a rejeté l'exception de nullité soulevée par M. [P].
Prétentions et moyens de la SCI Les Cèdres :
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par voie dématérialisée le 5 juin 2024, la SCI Les Cèdres demande à la cour au visa des articles 564, 834 et 835 du code de procédure civile, des articles L.145-41 et suivants du code de commerce et de l'article 1343-5 du code civil de :
- infirmer l'ordonnance du 21 novembre 2023 en ce qu'elle a :
* constaté que les demandes des parties se heurtent à des contestations sérieuses,
* dit n'y avoir lieu à référé et rejette l'ensemble des demandes formées par les parties,
* dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné la SCI Les Cèdres aux dépens.
Statuant à nouveau:
- juger recevable et bien fondée son action,
En conséquence,
- constater l'acquisition des effets de la clause résolutoire contenue dans le bail commercial contracté le 26 juillet 2009,
- constater par voie de conséquence la résiliation du bail commercial liant les parties,
- ordonner l'expulsion de M. [J] [P], et de tout occupant de son chef, des locaux tels que décrits dans le bail du 26 juillet 2009,
- condamner M. [J] [P] à payer par provision la somme de 16.546,97 euros TTC au titre des loyers échus et impayés selon décompte arrêté au 28 mai 2024,
- condamner M. [J] [P], au paiement d'une indemnité provisionnelle équivalente au montant du loyer contractuellement fixé de 3.597,17 euros HT soit 4.316,60 euros TTC, pour la période postérieure à la résiliation du bail commercial jusqu'à complète libération des lieux,
- condamner M. [J] [P] au remboursement des frais inhérents à la mise en 'uvre de la procédure de résiliation de bail à savoir la somme de 194,47 euros au titre de la délivrance du coût de commandement et 85,34 euros au titre du coût de la délivrance de l'état des inscriptions grevant le fonds de commerce,
- débouter M. [J] [P] de ses demandes reconventionnelles :
* de remboursement à son profit de la somme de 8.341,28 euros par la SCI Les Cèdres,
* de paiement de la somme de 9.238,08 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile par la SCI Les Cèdres,
* de paiement de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation d'un prétendu préjudice moral,
* de fixation de la dette à la somme de 12.134,12 euros HT,
* de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire,
- condamner M. [J] [P] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [J] [P] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Au soutien de sa demande de constat de l'acquisition de la clause résolutoire elle expose que :
- elle fonde sa demande de constatation de résiliation du bail commercial sur l'article 834 du code de procédure civile qui permet au juge des référés de le faire en cas d'urgence et en l'absence de contestation sérieuse sur l'acquisition des effets de la clause résolutoire,
- elle n'a pas à caractériser l'urgence, alors qu'il est admis par la jurisprudence, qu'en cas de désignation contractuelle du juge des référés dans une clause du contrat, ce qui est le cas du bail litigieux, en son article 21, le demandeur est dispensé de démontrer l'existence de cette condition d'urgence,
- il n'existe aucune contestation sérieuse, alors qu'elle conteste tout accord, qu'il soit écrit ou oral, sur l'exonération de deux mois de loyers,
- en ce qui concerne les sommes dues au jour du commandement, elle fait grief au juge des référés de s'être livré à son propre décompte en considérant que l'historique des virements, versé aux débats par M. [P], faisait état de quatre virements qui n'avaient pas été pris en considération, alors que cet
historique de virement ne saurait constituer une preuve de la réalité des virements invoqués par le preneur, car seule la production des relevés de compte de ce dernier est de nature à démontrer que les virements prétendument effectués ont bien été débités,
- elle justifie au contraire par la production de ses relevés de compte qu'elle n'a jamais été créditée des virements des 2 septembre 2022, 3 octobre 2022, 2 décembre 2022 et 2 janvier 2023, de telle sorte qu'au jour de la délivrance du commandement les sommes dues s'élevaient bien à 16.521,12 euros,
- si l'on en croit le relevé de compte de M. [P], il aurait effectué deux virements le 3 et le 5 avril 2023, mais sur le relevé de compte de la SCI Les Cèdres, seul le virement du 5 avril apparaît au crédit du compte,
- s'agissant de la facture du mois d'octobre 2022, tout comme la facture du mois d'octobre 2023, ces dernières comportent un montant supérieur au loyer appelé pour la simple et bonne raison qu'elles intègrent la taxe foncière qui est une charge récupérable en vertu de l'article 15 du bail,
- les causes du commandement de payer délivré par huissier de justice le 18 janvier 2023 sont donc constituées des loyers impayés de septembre, octobre (majoré de la taxe foncière 2022) et décembre 2022 et il est donc parfaitement établi qu'au jour de la délivrance du commandement de payer, M. [P] était débiteur d'une somme de 16.521,12 euros,
- conformément aux stipulations de l'article 21 du contrat de bail et contrairement à ce que soutient l'intimé, la taxe foncière, accessoire du loyer, pouvait parfaitement être intégrée dans les causes du commandement de payer,
- passé le délai d'un mois suivant la délivrance du commandement de payer, la situation n'était pas régularisée puisqu'au 1er mars 2023, le montant de l'arriéré locatif était toujours de 16.521,12 euros tel que cela ressort des décomptes locatifs produits, donc la cause résolutoire a nécessairement produit ses effets,
Au soutien de sa demande d'expulsion, elle indique qu'en application de l'article 835 du code de procédure civile, le juge peut toujours même en présence d'une contestation sérieuse prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite et en l'espèce, elle démontre l'acquisition des effets de la clause résolutoire contenue dans le bail, de telle sorte que l'occupation de M. [P] est sans droit ni titre et constitue un trouble manifestement illicite.
Au soutien de sa demande de provision, elle expose que contrairement à ce qu'a retenu le juge des référés, il n'existe aucune contestation sérieuse pour la période postérieure au 6 janvier 2023 alors que :
- sur l'arriéré d'indexation de loyer facturé en août 2023, non seulement le bailleur a le droit de facturer les arriérés d'indexation de loyer dans la limite de la prescription, ce qui a été fait sur la facture du mois d'août 2023, mais il n'a pas, comme cela est affirmé dans l'ordonnance, calculé cette indexation sur une indemnité d'occupation, mais sur un loyer effectif, et la régularisation d'indexation de loyer facturée est conforme à l'article 18 C du contrat de bail qui est la loi des parties.
- l'ordonnance rappelle en outre qu'après septembre 2023 il a été appelé un loyer identique à celui avant l'application de l'indexation, ce qui est exact et elle a rectifié le montant dont M. [P] est redevable sur l'appel de loyer de mars 2024,
- pour clore tout débat, elle produit un décompte actualisé au 28 mai 2024 et toutes les factures détaillées de septembre 2023 à mai 2024,
- s'agissant de la facture du mois d'octobre 2023, elle contient le remboursement de la taxe foncière conformément à l'article 15 du contrat de bail.
Au soutien de sa demande provisionnelle d'indemnité d'occupation, elle indique qu'il n'est pas sérieusement contestable que postérieurement à la résiliation du bail, la personne qui demeure dans les lieux est redevable d'une indemnité d'occupation au moins équivalente au montant du loyer du jusqu'à restitution des locaux par la remise des clés et le montant du loyer actualisé au 28 mai 2024 est de 3.597,17 euros HT soit 4.316,60 euros TTC.
Prétentions et moyens de M. [P] :
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par voie dématérialisée le 19 juin 2024, M. [P] demande à la cour au visa des articles 599, 699 et 700 du code de procédure civile, des articles 1343-5, 1240 et 1241 du code civil et de l'article L.145-41 du code de commerce de :
- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a :
* constaté que les demandes des parties se heurtent à des contestations sérieuses,
* dit qu'il n'y a pas lieu à référé,
* rejeté l'ensemble des demandes formées par les parties,
* condamné la SCI Les Cèdres aux dépens,
- juger irrecevable et mal fondée l'action introduite par la SCI Les Cèdres,
En conséquence :
A titre principal,
- constater les contestations sérieuses quant à la dette locative invoquée,
- constater l'incompétence du juge des référés en la matière, le litige relevant d'une procédure au fond,
- déclarer le juge des référés incompétent pour statuer sur le présent litige,
- débouter la SCI Les Cèdres de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- constater que M. [P] s'est régulièrement acquitté de ses loyers,
A titre reconventionnel,
- condamner la SCI Les Cèdres à lui rembourser la somme de 8.341,28 euros indûment perçue,
- condamner la SCI Les Cèdres à lui verser la somme de 9.238,08 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SCI Les Cèdres au versement de 2.000 euros de dommages et intérêts à M. [P] en réparation de son préjudice moral.
A titre subsidiaire,
- fixer la dette de loyer à la somme de 12.134,12 euros HT correspondant à la demande de révision indiciaire des 5 dernières années,
- accorder un délai de paiement de 24 mois à compter du jugement soit 500 euros HT par mois pendant 23 mois et le solde le 24 ème mois,
- suspendre la clause résolutoire du bail commercial.
Au soutien de ses prétentions, il expose que :
- la condition d'urgence de l'article 834 du code de procédure civile n'est pas caractérisée, alors que le mot « dispensant » contenu dans la clause du contrat de bail ne signifie pas « obligeant », de sorte que le juge des référés est tout à fait en droit de rechercher la caractérisation de la condition d'urgence, laquelle n'est en l'espèce, nullement démontrée par la SCI Les Cèdres qui ne démontre aucune difficulté financière résultant du présent litige, alors qu'il continue de payer de manière assidue ses loyers mensuels,
- il existe une contestation sérieuse, puisque si les relevés de compte de la SCI Les Cèdres n'intègrent pas les virements de 4.170,64 euros, ceux-ci figurent pourtant sur ses relevés du compte Crédit Agricole Centre Est des 2 septembre, 3 octobre, 2 décembre 2022, 2 janvier 2023 et avril 2023 et ces historiques de virement émanent directement de sa banque et attestent des « virements réalisés», de sorte qu'il s'agit d'un document externe qu'il ne pouvait modifier, a contrario des décomptes de la SCI Les Cèdres qui sont des documents internes à leur société, car établis par leur service de compatibilité interne.
- le commandement de payer était caduc alors qu'à la date de ce commandement, le 18 janvier 2023, il n'était redevable d'aucun loyer de retard dès lors que :
* l'historique de ses virements bancaires contredit les dires de la SCI Les Cèdres, puisque figurent sur ceux-ci de manière explicite : le virement bancaire de 4.170,64 euros adressé à la SCI le 2 septembre 2022, le virement bancaire de 4.170,64 euros adressé à la SCI le 3 octobre 2022, le virement bancaire de 4.170,64 euros adressé à la SCI le 2 novembre 2022 et le virement bancaire de 4.170,64 euros adressé à la SCI le 2 décembre 2022,
* les factures du mois d'octobre 2022 et du mois d'octobre 2023, intègrent le montant des taxes foncières, alors cependant que l'article 15 du contrat de bail prévoit que le bailleur supporte la charge des impôts et taxes (taxe foncière) dont il est le redevable légal, qui lui sera remboursé par anticipation par le preneur, sur présentation de l'avis de paiement, sans toutefois qu'il ne soit justifié qu'un avis de paiement de cette taxe foncière lui a été communiqué, et qu'en outre elle ne peut doubler les loyers en y intégrant la taxe foncière, de sorte que la somme de 8.179,84 euros au titre des loyers mensuels d'octobre 2022 et d'octobre 2023, n'est nullement justifiée,
* le commandement de payer du 18 janvier 2023 fait état d'un solde à payer au titre du principal, d'un montant de 16.521,12 euros, mais la SCI Les Cèdres réclame des loyers mensuels qu'elle estime impayés sur les mois de septembre, octobre, décembre 2022 et compte tenu du montant du loyer mensuel de 4.170,64 euros, la somme totale ainsi réclamée est erronée, le solde s'élevant non pas à 16.521,12 euros mais à 12.511,91 euros.
- il existe une contestation sérieuse s'agissant de la créance réclamée postérieurement au 6 janvier 2023 alors que si l'appelante soutient qu'elle a facturé les arriérés d'indexation de loyer et non pas qu'elle a calculé cette indexation sur une indemnité d'occupation mais sur un loyer effectif, aucun justificatif de calcul ne lui a été communiqué en ce sens, remettant sérieusement en doute le bien-fondé de ce montant réclamé à hauteur de 23.660,17 euros,
- il existe une contestation sérieuse s'agissant de la demande de provision au titre des loyers échus et impayés à hauteur de 16.546,97 euros correspondant aux loyers échus et impayés selon décompte du 28 mai 2024, alors qu'aucun justificatif de calcul ne lui a été communiqué pour démontrer que le bailleur a, comme il le soutient, facturé les arriérés d'indexation de loyer et non calculé cette indexation sur une indemnité d'occupation mais sur un loyer effectif.
Pour contester l'existence d'un trouble manifestement illicite, il indique que la demande de résiliation du bail et les demandes en paiement effectuées par la SCI Les Cèdres se heurtent à des contestations sérieuses et ce faisant, son occupation n'est pas sans droit et pas sans titre et à ce jour, il est toujours titulaire du bail commercial à défaut de résiliation de celui-ci.
Elle indique en outre que si l'appelante réfute la caractérisation d'une contestation sérieuse, au motif que celle-ci reposerait sur « un prétendu accord verbal » qui aurait été passé entre les parties s'agissant d'une exonération de loyers en échange de la réalisation de travaux dans le local, en réalité le juge des référés fonde cette contestation sérieuse de la créance de la SCI Les Cèdres non pas sur cet accord verbal mais sur le décompte que cette dernière a versé au débat et sur les relevés de compte du preneur.
Pour justifier de l'incompétence du juge des référés pour mettre en jeu la clause résolutoire, elle expose que :
- de jurisprudence constante le juge des référés ne peut pas prononcer la résiliation d'un contrat (Cass. 3 ème civ. 20 décembre 2018, n°17-16.783),
- lorsque le contrat prévoit des clauses relatives à sa résolution, mais qu'il y a une contestation sérieuse sur celles-ci, le juge des référés est encore incompétent et la compétence revient au juge du fond (Cass. Com. 26 octobre 1993, n°92-11.088),
- la demande d'expulsion est donc de manière subséquente irrecevable, alors qu'il n'est pas occupant sans droit ni titre.
Pour s'opposer à la demande au versement d'une indemnité d'occupation, il affirme qu'au regard du bail commercial, il occupe le logement en toute légitimité.
Au soutien de sa demande reconventionnelle en remboursement de loyers, il expose que :
- afin de prouver sa bonne foi et obtenir un désistement de l'action du bailleur, il s'est entièrement acquitté de la somme réclamée,
- pour autant, le bailleur lui avait accordé une exonération de deux mois des loyers de juillet et août 2022,
- il sollicite donc une provision d'un montant de 8.341,28 euros correspondant au loyer indûment réglé.
Au soutien de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, il fait valoir que la SCI Les Cèdres tente de le priver de son outil de travail, à savoir le bail commercial du 26 juillet 2009 et ce sans fondement juridique et factuel pertinent, alors qu'il continue de payer ses loyers mensuels en temps et en heure et ce en toute bonne foi et dans le respect de ses obligations contractuelles de preneur, de sorte que cette procédure apparaît donc comme dilatoire et lui cause un stress énorme et le bailleur cherche en réalité un prétexte pour activer la clause résolutoire du bail à des fins qui lui sont personnels et non relatives au comportement de son cocontractant.
Au soutien de sa demande de délais de paiement, il expose que le bailleur réclame le paiement de la clause d'indexation non appliquée ces 5 dernières années et cette information ne lui a été communiquée que lors des dernières conclusions, de sorte qu'au regard de cette demande tardive, il est fondé à solliciter un délai de paiement de 24 mois à compter du jugement s'échelonnant à 500 euros HT par mois pendant 23 mois et le solde le 24 ème mois ainsi que la suspension de la clause résolutoire.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 juin 2024, l'affaire a été appelée à l'audience du 27 juin 2024 et la décision mise en délibéré a été prononcée le 17 octobre 2024.
MOTIFS
A titre liminaire, la cour observe qu'il n'est formé ni appel principal, ni appel incident de la disposition de l'ordonnance rejetant l'exception de nullité soulevée par M. [P], de sorte que la cour n'est pas saisie de ce chef de dispositif.
Sur la résiliation du bail et les demandes en paiement
Conformément à l'article 834 du code civil, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Selon l'article 835 du même code, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Le juge des référés n'est toutefois pas tenu de caractériser l'urgence, au sens de l'article 834 précité, pour constater l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de droit d'un bail.
En application de ce texte, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de bail en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en 'uvre régulièrement.
Aux termes de l'article L.145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux.
En l'espèce, le commandement de payer délivré le 18 janvier 2023 par la SCI Les Cèdres à M. [P] pour un montant en principal de 16.521,59 euros et visant la clause résolutoire contenue dans le bail régularisé entre les parties mentionne un impayé au titre des loyers de septembre 2022 pour 4.170,64 euros, d'octobre 2022 pour 8.179,84 euros et de décembre 2022 pour 4.170,64 euros.
Or, s'agissant du loyer du mois d'octobre 2022, si la CSI les Cèdres soutient que le montant de 8.179,84 euros comprend le remboursement par le preneur de la taxe foncière, M. [P] lui oppose l'article 15 du contrat de bail relatif aux impôts et taxes lequel stipule ainsi qu'il suit que « le bailleur supportera la charge des impôts et taxes dont il est redevable légal, qui lui sera remboursée par anticipation par le preneur sur présentation de l'avis de paiement » et si l'appelant verse aux débats son avis de taxe foncière pour 2022 et une facture de loyer pour la période du 1er octobre 2022 au 31 octobre 2022, il ne justifie pas de la présentation de l'avis de paiement au preneur.
Par ailleurs, comme le relève justement le premier juge, ce décompte n'intègre pas les virements de 4.170,64 euros qui figurent en débit sur l'historique de compte bancaire de M. [P] le 2 septembre 2022, le 3 octobre 2022, le 2 décembre 2022 et le 2 janvier 2023.
Or, si l'appelante produit également ses relevés bancaires pour la période, lesquels ne portent pas trace de ces paiements, la cour observe, que le décompte produit par M. [P] porte la mention « virements réalisés ».
Il s'ensuit que, comme l'a encore justement relevé le premier juge, ce relevé qui émane de la banque est de nature à remettre en cause de manière sérieuse la créance de la SCI Les Cèdres à la date de délivrance du commandement, la prise en compte de ces paiements et la réduction du loyer du mois d'octobre 2022 au montant de 4.170,64 euros amenant à un solde au jour de sa délivrance de 4.170,64 euros en faveur du locataire.
En conséquence, les demandes en résiliation du bail, en expulsion, en paiement d'une indemnité d'occupation et d'une indemnité provisionnelle de 16.546,97 euros ne peuvent prospérer eu égard à la contestation sérieuse qui affecte la créance fondant ainsi le commandement de payer du 18 janvier 2023 visant la clause résolutoire. L'ordonnance déférée est confirmée.
Sur la demande reconventionnelle en remboursement de la somme de 8.341, 28 euros
Si M. [P] a procédé au mois de janvier et au mois d'avril 2023 à deux versements pour un montant total de 8.341,28 euros, en plus du loyer courant de 4.170,64 euros, son affirmation selon laquelle cette somme correspond à une exonération de deux mois de loyers accordée par le bailleur, de sorte qu'elle a été indûment versée, n'est assortie d'aucune offre de preuve, ce dernier contestant fermement la réalité de cet engagement. Il convient donc de débouter M. [P] de cette demande en répétition d'un indu dont l'existence n'est pas démontrée.
Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour préjudice moral
M. [P] qui se borne à allègue le caractère dilatoire de la demande formée contre lui par le bailleur, sera également débouté de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, lequel n'est pas davantage caractérisé, autrement que par les affirmations de l'intimé.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens
La SCI Les Cèdres doit supporter les dépens de première instance et d'appel comme la totalité des frais irrépétibles exposés et verser à M. [P] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et en cause d'appel. Il convient en outre d'infirmer l'ordonnance déférée sur ce point. Il y a également lieu de débouter la SCI Les cèdres de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme l'ordonnance déférée, sauf en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau et ajoutant
Déboute M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,
Condamne la SCI Les Cèdres à verser à M. [P] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et de l'appel,
Rejette la demande de la SCI Le Cèdres au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SCI Les Cèdres aux dépens d'appel.