CA Versailles, ch. civ. 1-5, 17 octobre 2024, n° 24/00785
VERSAILLES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Compose (SAS)
Défendeur :
Immobilière 3F (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vasseur
Conseillers :
Mme De Rocquigny, Mme Igelman
Avocats :
Me Said, Me Chateauneuf, Me Berneron, Me Meknassi
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé en date du 5 octobre 2021, la société Immobilière 3F a donné à bail commercial à la société Compose des locaux situés au n° [Adresse 5] à [Localité 6] (département des Yvelines). Dans ce même acte, M. [N] [J] s'est porté caution solidaire de la société Compose.
Par un premier acte du 25 juillet 2022, puis un second du 4 avril 2023, la société Immobilière 3F a fait délivrer deux commandements de payer à la société Compose.
Par actes du 22 septembre 2023, la société Immobilière 3F a fait assigner en référé la société Compose et M. [J] pour que soit constatée l'acquisition de la clause résolutoire, ordonnée l'expulsion de la locataire et que les défendeurs soient condamnés solidairement au paiement de la somme provisionnelle de 9.518,70 euros, en principal.
Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 28 novembre 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Versailles a :
- constaté l'acquisition de la clause résolutoire du bail du 5 octobre 2023 et la résiliation de ce bail à la date du 5 mai 2023,
- ordonné, si besoin avec le concours de la force publique, l'expulsion de la locataire et celle de tous occupants de son chef des locaux loués, sis [Adresse 5] [Localité 6],
- ordonné que les meubles se trouvant sur place devront être déposés dans un lieu choisi par la bailleresse au frais, risques et péril de la locataire conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,
- condamné solidairement la société Compose et M. [J] à payer à la société Immobilière 3F à titre provisionnel une indemnité d'occupation d'un montant correspondant à celui d'un loyer mensuel conventionnel augmenté des charges et accessoires à compter du 5 mai 2023 et jusqu'à la libération effective des lieux loués,
- condamné solidairement la société Compose et M. [J] à payer à la société Immobilière 3F la somme provisionnelle de 9.456,91 euros correspondant aux loyers, et charges ou indemnités d'occupation impayés arrêtés au mois d'octobre 2023 inclus, augmentée des intérêts de retard au taux légal à compter de la signification de l'ordonnance,
- dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de conservation du dépôt de garantie,
- condamné in solidum la société Compose et M. [J] à payer à la société Immobilière 3F la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société Compose et M. [J] au paiement des dépens comprenant le coût du commandement de payer.
Par déclaration reçue au greffe le 6 février 2024, la société Compose et M. [J] ont interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.
Dans leurs dernières conclusions déposées le 25 mars 2024 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, la société Compose et M. [J] en sa qualité de caution solidaire demandent à la cour, au visa des articles 834 du code de procédure civile, L. 145-41 du code de commerce, 1103, 1725 et 1244-1 du code civil, de :
'- déclarer l'appel interjeté par la société Compose et M. [N] [J] à l'encontre de l'ordonnance entreprise recevable et bien fondé
- infirmer l'ordonnance rendue le 28 novembre 2023 en toutes ces dispositions (RG23/01315)
statuant à nouveau,
- débouter la société Immobiliere 3F de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions
à titre subsidiaire,
si la cour venait à confirmer l'ordonnance entreprise, accorder à la société Compose et à M. [J] les plus larges délais de paiement, soit 24 mois.'
Au soutien de leur appel, la société Compose et M. [J] exposent que la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire est une possibilité et non pas une obligation et que le locataire a tenté, en vain, de mettre en place un plan d'apurement de la dette, ce qui n'a manifestement pas été pris en compte par la juridiction de première instance. Ils indiquent que la société Compose ayant retrouvé un repreneur, il convient de réformer la décision de première instance afin qu'elle puisse être titulaire du bail pour revendre le fonds de commerce. Les appelants ajoutent que la société Compose n'a pas été en mesure de procéder au règlement de l'arriéré locatif du fait d'une faible fréquentation du restaurant qu'elle exploite mais qu'elle a toujours informé son bailleur de ses difficultés, en sollicitant la mise en place d'un plan d'apurement. Les appelants sollicitent la confirmation de l'ordonnance s'agissant du rejet de la prétention du bailleur tendant à garder le dépôt de garantie et demande des délais de paiement.
Dans ses dernières conclusions n° 2 déposées le 21 août 2024 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Immobilière 3F demande à la cour, au visa des articles R. 211-4 du code de l'organisation judiciaire, 809 du code de procédure civile, 1103 du code civil et L. 145-41 du code de commerce, de :
'- débouter purement et simplement la société Compose et M. [J] de leur appel et de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;
- confirmer l'ordonnance de référé en date du 23 novembre 2023 de M. le président du tribunal judiciaire de Versailles, en toutes ses dispositions ;
y ajoutant,
- condamner solidairement la société Compose et M. [N] [J], en sa qualité de caution solidaire ayant renoncé aux bénéfices de discussion et de division, à payer à la société Immobiliere 3F la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de la procédure d'appel dont distraction directement au profit de Maître Philippe Chateauneuf, avocat, sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile. '
La société Immobilière 3 F rappelle que la clause résolutoire figure en page 21 du bail conclu et que le commandement de payer délivré le 4 avril 2023 est resté infructueux dans le délai d'un mois. Elle souligne qu'à défaut de comparution de la locataire et de la caution en première instance, le juge des référés n'avait pas à accorder de délais de paiement. Elle considère que le moyen tenant à ce que la clause résolutoire ne devrait pas être acquise afin de permettre à la société Compose de vendre le fonds de commerce est dénué de pertinence, dès lors que le bail prévoit, en sa 12ème page, qu'en cas de cession, « le preneur ne devra être débiteur d'aucun loyer et charges arriérés à la date de demande d'agrément. » Exposant que l'arriéré locatif n'a fait que s'accroître pour s'élever désormais à la somme de 17.528 euros, échéance du troisième trimestre 2024 incluse, la société Immobilière 3 F sollicite le rejet de la demande de paiement.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 septembre 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le bail commercial souscrit stipule, en sa page 21, une clause résolutoire à défaut de paiement à l'échéance d'un seul terme, un mois après la délivrance d'un commandement de payer resté infructueux. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, cette acquisition de la clause résolutoire n'est que la résultante du bail souscrit et le juge des référés ne fait que constater l'acquisition de cette clause, ce qui a été le cas, à juste titre, en première instance.
Le moyen tenant à ce que la société Compose a besoin de conserver le bail afin de céder le fonds de commerce est mal fondé, dès lors que toute cession du droit au bail ne peut intervenir tant que demeure un arriéré locatif, ainsi qu'il résulte de l'article V. A. 3 du bail souscrit.
La demande des appelants tendant à ce qu'il leur soit accordé des délais de règlement doit être rejetée, dès lors que, loin de résorber l'arriéré locatif, les appelants l'ont laissé s'accroître, celui-ci étant passé de la somme de 9.456 euros, somme retenue par le premier juge, à 17.528 euros au 1er juillet 2024, ainsi qu'il résulte du décompte locatif communiqué en pièce n° 11.
En l'absence de tout effort significatif pour apurer, et même simplement stabiliser, l'arriéré locatif, la demande de délais de paiement doit être rejetée.
PAR CES MOTIFS
Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Rejette la demande des appelants tendant à obtenir des délais de règlement ;
Condamne la société Compose et M. [J] aux dépens, qui pourront être recouvrés par l'avocat de la société Immobilière 3 F dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Condamne la société Compose et M. [J] à verser à la société Immobilière 3 F la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.