Décisions
CA Rouen, ch. de la proximite, 17 octobre 2024, n° 23/00399
ROUEN
Arrêt
Autre
N° RG 23/00399 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JI6G
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ
Section PARITAIRE
ARRET DU 17 OCTOBRE 2024
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement au fond, origine Tribunal paritaire des baux ruraux de DIEPPE, décision attaquée en date du 11/01/2023, enregistrée sous le n° 51-21-000020
APPELANTE :
G.A.E.C. [J]
immatriculée au RCS de DIEPPE sous le numéro 399 301 472
dont le siège social est sis [Adresse 3] [Localité 8]
Non comparant, représenté par Me Pascale RONDEL de la SAS FORTIUM CONSEIL, avocat au barreau de DIEPPE
INTERVENANTS FORCES :
Me [Y] [E] ès qualité de mandataire judiciaire du GAEC [J]
[Adresse 3]
[Localité 8]
Non comparante, représentée par Me Pascale RONDEL de la SAS FORTIUM CONSEIL, avocat au barreau de DIEPPE
Monsieur [L] [H] [F] [J] ès qualité d'héritier de M. [A] [J]
né le 07 Février 1964 à [Localité 7]
[Adresse 1]
[Localité 8]
Non comparant, représenté par Me Béatrice OTTAVIANI, avocat au barreau de ROUEN substitué par Me Gaëlle ALEXANDRE, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 24 Juin 2024 devant
Madame GOUARIN, Présidente,
Madame TILLIEZ, Conseillère,
Monsieur MELLET, Conseiller.
GREFFIER lors des débats :
Madame DUPONT
DEBATS :
Rapport oral a été fait à l'audience
A l'audience publique du 24 juin 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 26 septembre 2024 prorogée au 17 octobre 2024
ARRET :
Contradictoire
Prononcé publiquement le 17 octobre 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
Signé par Madame TILLIEZ, conseillère suppléante de la présidente Madame GOUARIN empêchée et par Madame DUPONT, greffière lors de la mise à disposition.
Exposé des faits et de la procédure
Suivant acte sous seing privé du 12 septembre 2019, Mme [R] [C] épouse [J] a donné à bail rural au groupement agricole d'exploitation en commun (Gaec) '[J]' des parcelles de terres agricoles, situées sur la commune de [Localité 8], lieudit [Localité 9], pour une contenance de 3ha 77a 94ca, moyennant un fermage annuel indexable, de 637,02 euros par an, payable en deux fois, à terme échu, les 29 mars et 29 septembre, au domicile du bailleur ou en tout autre lieu qu'il lui plairait de désigner au preneur, outre 50% de la taxe foncière sur les propriétés non bâties et des frais d'établissement de rôle, payable selon la même périodicité.
Ce bail a été conclu pour une durée d'au moins neuf années entières et consécutives, commençant à courir le 15 septembre 2019, pour se finir le 15 septembre 2028.
Le Gaec [J] a actuellement pour associés, M. [B] [J] et Mme [G] [J] née [Z].
Suivant jugement du 29 octobre 2020, le juge des tutelles de Dieppe a instauré une mesure de curatelle renforcée au profit de M. [A] [J] pour une durée de 120 mois et a désigné M. [K] [I], mandataire judiciaire, en qualité de curateur.
Suivant jugement du 06 mai 2021, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Rouen du 06 octobre 2022, le juge des tutelles de Dieppe a aggravé la mesure de curatelle renforcée en tutelle au profit de M. [A] [J] pour une durée de 120 mois et a désigné M. [K] [I], mandataire judiciaire, en qualité de tuteur.
Mme [C] épouse [J] est décédée le 09 décembre 2020 à [Localité 6], laissant pour lui succéder son époux, M. [A] [J] et ses deux fils, MM. [L] et [B] [J].
Suivant ordonnance du 05 juillet 2022, le juge des tutelles de Dieppe a autorisé le tuteur de M. [A] [J] à confirmer l'article 2 du contrat de mariage signé le 18 septembre 1961 prévoyant la pleine propriété de la moitié et l'usufruit de l'autre moitié pour M. [J] en sa qualité de conjoint survivant sur les biens appartenant à la communauté des époux [J]/[C] et à opter pour l'usufruit total en sa faveur pour les biens propres de Mme [R] [J], conformément aux dispositions de l'article 757 du code civil.
M. [A] [J] bénéficiait en conséquence de l'usufruit total sur les parcelles faisant l'objet du contrat de bail signé le 12 septembre 2019 entre Mme [R] [J] et le Gaec [J].
Le 11 juin 2021, par acte d'huissier de justice délivré à personne, le Gaec [J] a été mis en demeure par M. [K] [I], agissant en qualité de tuteur de M. [A] [J], de régler un arriéré de fermages et taxes foncières à hauteur de 1 464,68 euros en principal, outre 158,46 euros de frais.
Par requête reçue le 22 octobre 2021, M. [A] [J] représenté par M. [I], son tuteur, a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Dieppe à l'encontre du Gaec [J] aux fins de résiliation du bail, expulsion des occupants, fixation d'une indemnité d'occupation et condamnation à des frais de procédure.
L'audience de conciliation a échoué.
Suivant jugement contradictoire du 11 janvier 2023, le tribunal paritaire des baux ruraux de Dieppe a :
- prononcé la résiliation du bail rural du 12 septembre 2009 consenti au Gaec [J] sur les parcelles sises commune de [Localité 8], [Localité 9], cadastrées comme suit : section A n° [Cadastre 4], d'une contenance de 1ha 84a 84ca ; section A n° [Cadastre 5] d'une contenance de 1ha 92a 83ca ; section A n° [Cadastre 2] d'une contenance de 00ha00a27ca ; soit une superficie totale de 3ha 77a 94ca ;
- ordonné l'expulsion du Gaec [J] et de tous occupants de leur chef, au besoin avec le concours de la force publique ;
- constaté que le Gaec [J] reconnaissait devoir la somme de 1 924,98 euros ;
- condamné le Gaec [J] au paiement d'une indemnité d'occupation de 10 euros par jour à compter de la décision jusqu'à la libération effective des lieux ;
- rejeté la demande de délai de paiement du Gaec [J] ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes non présentement satisfaites ;
- condamné le Gaec [J] au paiement de la somme de 1 000 euros à M. [J] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné le Gaec [J] aux entiers dépens ;
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Suivant jugement du 26 janvier 2023, le tribunal judiciaire de Dieppe a ouvert au bénéfice du Gaec [J] et de M. [B] [J] une procédure de sauvegarde judiciaire et désigné Maître [Y] [E] en qualité de mandataire judiciaire.
Par déclaration électronique du 01er février 2023, le Gaec [J] a interjeté appel de la décision du tribunal paritaire des baux ruraux de Dieppe.
M. [A] [J] est décédé le 03 juillet 2023 à [Localité 6], laissant pour lui succéder ses deux fils, MM. [L] et [B] [J].
M. [L] [J] a été assigné en intervention forcée par acte délivré à personne le 13 octobre 2023 devant la chambre de la proximité de la cour d'appel de Rouen.
Suivant ordonnance d'interruption d'instance du 18 octobre 2023, la présidente de la chambre de la proximité a :
- constaté l'interruption de l'instance ;
- invité les parties à faire part de leurs initiatives en vue de reprendre l'instance dans le délai de 3 mois du prononcé ;
- dit qu'à défaut des diligences accomplies dans le délai imparti, l'affaire serait radiée du rôle.
Exposé des prétentions des parties
Dans des conclusions communiquées le 13 avril 2023, Maître [Y] [E], ès-qualités, demande à la cour de lui donner acte de son intervention volontaire, de dire et juger que la décision à intervenir lui sera opposable et de statuer ce que de droit sur les dépens.
Dans leurs dernières conclusions du 15 février 2024, reprises oralement à l'audience le 24 juin 2024, le Gaec [J] et Maître [Y] [E], ès-qualités, demandent à la cour de :
- réformer et infirmer la décision rendue le 11 janvier 2023 par le tribunal paritaire des baux ruraux de Dieppe en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail rural du 12 septembre 2008 consenti au Gaec [J] sur les parcelles sises commune de [Localité 8] - [Localité 9], cadastrées section A n°[Cadastre 4], A n°[Cadastre 5], A n°[Cadastre 2] ; ordonné l'expulsion du Gaec [J] et de tous occupants de leur chef au besoin avec le concours de la force publique ; rejeté la demande de délai de paiement du Gaec [J] ; débouté les parties du surplus de leurs demandes non présentement satisfaites ; condamné le Gaec [J] au paiement de la somme de 1 000 euros à M. [A] [J] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; condamné le Gaec [J] aux entiers dépens ;
En conséquence,
- juger que le bail n'est pas résilié ;
- débouter M. [L] [J] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- accorder, sous réserve de la procédure de sauvegarde en cours, les plus larges délais au Gaec [J] pour s'acquitter de la dette sur une période de deux ans maximale, outre les fermages en cours et ce, sous réserve du plan en cours d'élaboration ;
- accorder en tout état de cause les délais jusqu'à la fin de la période culturale en cours ;
- condamner, en cas de résiliation définitive, M. [L] [J] à régler au Gaec [J] des indemnités de sortie de ferme ;
- voir nommer, si besoin est, un expert pour procéder à ces calculs techniques ;
- confirmer en tous points la décision rendue par le tribunal judiciaire de Dieppe statuant en matière paritaire ;
- rejeter les prétentions de M. [L] [J] à cet égard ;
- condamner M. [L] [J] à lui régler la somme de 1 500 euros au titre du maintien d'une procédure particulièrement abusive et injustifiée ;
- condamner M. [L] [J] à lui régler la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. [L] [J] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Pascale Rondel pour ceux dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu préalablement provision.
Dans ses dernières conclusions du 17 novembre 2023, reprises oralement à l'audience le 24 juin 2024, M. [L] [J] demande à la cour, au visa des articles L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime et L. 622-21 du code de commerce de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé la créance à l'encontre du Gaec [J] à la somme de 1 924,98 euros.
A l'audience, la cour a soulevé un moyen de procédure lié à l'éventuelle irrecevabilité pour défaut de pouvoir à défendre de M. [L] [J] pour représenter l'indivision [J].
Les parties ont présenté leurs observations sur ce moyen soulevé d'office à l'audience.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I- Sur le moyen de procédure soulevé d'office par la cour
[L] [J] a contesté toute irrégularité de procédure en se prévalant de l'article 724 du code civil et de la jurisprudence appliquée par la Cour de cassation sur le fondement de ce texte.
Le Gaec [J], représenté par M. [B] [J], gérant associé, indique que c'est un point qu'il a soulevé dans ses conclusions.
Aux termes de l'article 724 alinéa 1er du code civil, les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt.
En application de ce texte, tout héritier est fondé, même sans le concours des autres indivisaires, à exercer toutes les actions de son auteur, sans que puisse lui être opposé le droit commun de l'indivision.
En l'espèce, l'action en résiliation du bail a été initiée par M. [A] [J] représenté par son tuteur en première instance.
Le Gaec [J] a interjeté appel de la décision faisant droit aux demandes de M. [A] [J] représenté par son tuteur, qui a donc pris la qualité d'intimé.
A la suite du décès de M. [A] [J] le 03 juillet 2023, M. [L] [J] a été assigné en intervention forcée à la requête de M. [B] [J] et du Gaec [J], par acte du 13 octobre 2023 devant la chambre de la proximité de la cour d'appel de Rouen.
En application de l'article 724 du code civil, il y a lieu de considérer que l'action du défunt a été transmise de plein droit à ses héritiers et que [L] [J], assigné en intervention forcée à l'instance d'appel avait qualité (plutôt que pouvoir) pour défendre seul, sans que la règle des deux tiers des droits indivis prévus à l'article 815-3 du code civil n'y fasse obstacle.
C'est donc à bon droit que M. [L] [J] a contesté l'irrégularité de procédure soulevée d'office par la cour.
L'intervention forcée de M. [L] [J] sera en conséquence déclarée recevable.
II- Sur la résiliation du bail rural et sur le paiement des sommes dues
Le Gaec [J] soutient que l'ouverture d'une procédure de sauvegarde judiciaire le 26 janvier 2023 suspend toutes les procédures en cours et fait donc obstacle à la résiliation du bail. Il sollicite donc l'infirmation des dispositions du jugement relatives au prononcé de la résiliation du bail et à ses conséquences.
Il conteste les sommes réclamées par M. [L] [J], estimant que les créances antérieures ne peuvent être fixées que dans le cadre de la procédure collective et à défaut, par le cour d'appel de Rouen et que les créances postérieures au 26 janvier 2023 correspondent aux loyers courants, pour lesquels le preneur est à jour.
Il sollicite la confirmation de la décision entreprise en ce qui concerne la fixation de la créance due au titre des loyers impayés avant l'ouverture de la procédure collective, soit la somme de 1 924,98 euros.
Indépendamment des comptes, il développe sa position sur les problématiques liées à la créance de salaire différée sollicitée par [L] [J] et l'attribution préférentielle des terres et critique la gestion effectuée par M. [I], tuteur, du vivant de M. [A] [J].
Il demande en outre des délais de paiement pour s'acquitter du solde dû, contestant la qualification du premier juge de 'fermage nécessaire' pour payer la maison de retraite du défunt.
L'intimé sollicite la confirmation du jugement, faisant valoir que le Gaec [J] n'a pas régularisé le règlement des fermages dûs dans un délai de trois mois à compter de la délivrance le 11 juin 2021 d'une mise en demeure de payer visant deux échéances et postérieure aux échéances visées.
Il souligne que le Gaec a reconnu devoir la somme de 1 924,98 euros, montant arrêté au 29 septembre 2021.
A- Sur les conséquences de l'ouverture de la procédure de sauvegarde judiciaire
Aux termes de l'article L. 622-21 du code de commerce, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :
1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;
2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
II.-Sans préjudice des droits des créanciers dont la créance est mentionnée au I de l'article L. 622-17, le jugement d'ouverture arrête ou interdit toute procédure d'exécution tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif ayant le jugement d'ouverture.
III.-Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence interrompus. [...]
Le placement sous sauvegarde judiciaire du Gaec [J], intervenu le 26 janvier 2023, a effectivement interrompu toute possibilité de s'appuyer sur le motif du défaut de paiement des fermages pour prononcer la résiliation du bail rural.
Le premier juge a prononcé la résiliation du bail rural litigieux sur ce seul motif et aucun autre motif n'est invoqué par M. [L] [J] en appel.
La décision ayant prononcé la résiliation du bail rural du 12 septembre 2009 consenti au Gaec [J] par Mme [R] [J] née [C], ordonné son expulsion et celle de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique, condamné le Gaec [J] au paiement d'une indemnité d'occupation de 10 euros par jour à compter de la décision jusqu'à la libération effective des lieux, sera en conséquence infirmée.
B- Sur le montant des sommes dues au titre des fermages et des parts de taxes foncières
Les parties s'accordent sur le montant de 1 924,98 euros retenu par le premier juge au titre des impayés de fermages et des parts de taxes foncières dû par la Gaec [J] au 29 septembre 2021.
Eu égard à l'ouverture de la procédure collective intervenue après le prononcé du jugement de première instance, il y a lieu d'ajouter une disposition à la décision entreprise, en fixant la créance due par le Gaec [J] à l'indivision [J] à hauteur de 1 924,98 euros.
Cette somme prend en compte les fermages et parts de taxes foncières pour les années 2019, 2020 et 2021.
Le Gaec [J] demande à la cour d'appel de fixer sa créance avant l'ouverture de la procédure de sauvegarde judiciaire du 26 janvier 2023.
Or, en application de l'article 1353 du code civil, il appartient au preneur de justifier qu'il s'est libéré du paiement des fermages et parts des taxes foncières dues au titre du contrat de bail rural.
Faute de production de justificatifs en ce sens, il ne prouve pas qu'il est à jour des loyers et part de taxes foncières dûs au titre de l'année 2022.
La créance due par le Gaec [J] à l'indivision [J] ne sera donc fixée que jusqu'au 31 décembre 2021 inclus.
III- Sur la demande de délais de paiement
Eu égard à l'ouverture d'une procédure de sauvegarde judiciaire, la créance est fixée, toute poursuite étant suspendue.
Cette créance aura plutôt vocation à être remboursée dans le cadre d'un plan de sauvegarde.
En outre, le Gaec [J] sollicite des délais de paiement, sans justifier de ses moyens financiers pour y faire face.
La décision entreprise ayant rejeté cette demande de délais de paiement sera confirmée.
IV- Sur la demande indemnitaire au titre du maintien d'une procédure abusive
Le Gaec [J] sollicite la condamnation de M. [L] [J] à lui régler la somme de 1 500 euros au titre du maintien d'une procédure particulièrement abusive et injustifiée.
Or, l'appelant ne justifie d'aucun abus de poursuivre l'action du défunt M. [A] [J] en justice, de la part de l'intimé, étant observé au surplus que le Gaec [J] n'obtient gain de cause en appel qu'en application des règles d'ouverture d'une procédure collective à son bénéfice.
Il sera donc débouté de cette demande indemnitaire.
V- Sur les demandes accessoires
Les parties obtenant partiellement gain de cause, supporteront chacune la charge de leurs dépens d'appel.
Il est en outre équitable de ne pas faire droit aux demandes présentées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance seront confirmées sur l'identité du payeur, mais infirmées sur l'identité du bénéficiaire et sur la condamnation en paiement, ces sommes constituant des créances antérieures à l'ouverture de la sauvegarde judiciaire, désormais dues à l'indivision [J].
Il conviendra de fixer la créance de l'indivision [J] pour ces frais irrépétibles de 1 000 euros ainsi que pour les dépens de première instance à la charge du Gaec [J].
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Déclare l'intervention forcée M. [L] [J] recevable,
Dit que le présent arrêt sera opposable à Maître [Y] [E], agissant en qualité de mandataire judiciaire dans la procédure de sauvegarde judiciaire ouverte au bénéfice de M. [B] [J],
Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de délai de paiement du Gaec [J] et dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que l'ouverture d'une procédure de sauvegarde judiciaire le 26 janvier 2023 au bénéfice du Gaec [J] a interrompu l'action en résiliation du bail rural signé le 12 septembre 2019, par Mme [R] [C] épouse [J] et le dit Gaec,
Fixe la créance due par le Gaec [J] à l'égard de l'indivision [J], au titre de l'arriéré des fermages et des parts de taxes foncières impayés de 2019 au 31 décembre 2021 inclus, à la somme de 1 924,98 euros,
Déboute le Gaec [J] de sa demande de condamnation de M. [L] [J] à lui régler la somme de 1 500 euros au titre du maintien d'une procédure abusive,
Fixe la créance due par le Gaec [J] à l'égard de l'indivision [J], pour les dépens de première instance, ainsi que pour les frais irrépétibles de première instance de 1 000 euros,
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens d'appel,
Déboute les parties de leurs demandes présentées en appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La conseillère suppléante
De la présidente empêchée
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ
Section PARITAIRE
ARRET DU 17 OCTOBRE 2024
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement au fond, origine Tribunal paritaire des baux ruraux de DIEPPE, décision attaquée en date du 11/01/2023, enregistrée sous le n° 51-21-000020
APPELANTE :
G.A.E.C. [J]
immatriculée au RCS de DIEPPE sous le numéro 399 301 472
dont le siège social est sis [Adresse 3] [Localité 8]
Non comparant, représenté par Me Pascale RONDEL de la SAS FORTIUM CONSEIL, avocat au barreau de DIEPPE
INTERVENANTS FORCES :
Me [Y] [E] ès qualité de mandataire judiciaire du GAEC [J]
[Adresse 3]
[Localité 8]
Non comparante, représentée par Me Pascale RONDEL de la SAS FORTIUM CONSEIL, avocat au barreau de DIEPPE
Monsieur [L] [H] [F] [J] ès qualité d'héritier de M. [A] [J]
né le 07 Février 1964 à [Localité 7]
[Adresse 1]
[Localité 8]
Non comparant, représenté par Me Béatrice OTTAVIANI, avocat au barreau de ROUEN substitué par Me Gaëlle ALEXANDRE, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 24 Juin 2024 devant
Madame GOUARIN, Présidente,
Madame TILLIEZ, Conseillère,
Monsieur MELLET, Conseiller.
GREFFIER lors des débats :
Madame DUPONT
DEBATS :
Rapport oral a été fait à l'audience
A l'audience publique du 24 juin 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 26 septembre 2024 prorogée au 17 octobre 2024
ARRET :
Contradictoire
Prononcé publiquement le 17 octobre 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
Signé par Madame TILLIEZ, conseillère suppléante de la présidente Madame GOUARIN empêchée et par Madame DUPONT, greffière lors de la mise à disposition.
Exposé des faits et de la procédure
Suivant acte sous seing privé du 12 septembre 2019, Mme [R] [C] épouse [J] a donné à bail rural au groupement agricole d'exploitation en commun (Gaec) '[J]' des parcelles de terres agricoles, situées sur la commune de [Localité 8], lieudit [Localité 9], pour une contenance de 3ha 77a 94ca, moyennant un fermage annuel indexable, de 637,02 euros par an, payable en deux fois, à terme échu, les 29 mars et 29 septembre, au domicile du bailleur ou en tout autre lieu qu'il lui plairait de désigner au preneur, outre 50% de la taxe foncière sur les propriétés non bâties et des frais d'établissement de rôle, payable selon la même périodicité.
Ce bail a été conclu pour une durée d'au moins neuf années entières et consécutives, commençant à courir le 15 septembre 2019, pour se finir le 15 septembre 2028.
Le Gaec [J] a actuellement pour associés, M. [B] [J] et Mme [G] [J] née [Z].
Suivant jugement du 29 octobre 2020, le juge des tutelles de Dieppe a instauré une mesure de curatelle renforcée au profit de M. [A] [J] pour une durée de 120 mois et a désigné M. [K] [I], mandataire judiciaire, en qualité de curateur.
Suivant jugement du 06 mai 2021, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Rouen du 06 octobre 2022, le juge des tutelles de Dieppe a aggravé la mesure de curatelle renforcée en tutelle au profit de M. [A] [J] pour une durée de 120 mois et a désigné M. [K] [I], mandataire judiciaire, en qualité de tuteur.
Mme [C] épouse [J] est décédée le 09 décembre 2020 à [Localité 6], laissant pour lui succéder son époux, M. [A] [J] et ses deux fils, MM. [L] et [B] [J].
Suivant ordonnance du 05 juillet 2022, le juge des tutelles de Dieppe a autorisé le tuteur de M. [A] [J] à confirmer l'article 2 du contrat de mariage signé le 18 septembre 1961 prévoyant la pleine propriété de la moitié et l'usufruit de l'autre moitié pour M. [J] en sa qualité de conjoint survivant sur les biens appartenant à la communauté des époux [J]/[C] et à opter pour l'usufruit total en sa faveur pour les biens propres de Mme [R] [J], conformément aux dispositions de l'article 757 du code civil.
M. [A] [J] bénéficiait en conséquence de l'usufruit total sur les parcelles faisant l'objet du contrat de bail signé le 12 septembre 2019 entre Mme [R] [J] et le Gaec [J].
Le 11 juin 2021, par acte d'huissier de justice délivré à personne, le Gaec [J] a été mis en demeure par M. [K] [I], agissant en qualité de tuteur de M. [A] [J], de régler un arriéré de fermages et taxes foncières à hauteur de 1 464,68 euros en principal, outre 158,46 euros de frais.
Par requête reçue le 22 octobre 2021, M. [A] [J] représenté par M. [I], son tuteur, a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Dieppe à l'encontre du Gaec [J] aux fins de résiliation du bail, expulsion des occupants, fixation d'une indemnité d'occupation et condamnation à des frais de procédure.
L'audience de conciliation a échoué.
Suivant jugement contradictoire du 11 janvier 2023, le tribunal paritaire des baux ruraux de Dieppe a :
- prononcé la résiliation du bail rural du 12 septembre 2009 consenti au Gaec [J] sur les parcelles sises commune de [Localité 8], [Localité 9], cadastrées comme suit : section A n° [Cadastre 4], d'une contenance de 1ha 84a 84ca ; section A n° [Cadastre 5] d'une contenance de 1ha 92a 83ca ; section A n° [Cadastre 2] d'une contenance de 00ha00a27ca ; soit une superficie totale de 3ha 77a 94ca ;
- ordonné l'expulsion du Gaec [J] et de tous occupants de leur chef, au besoin avec le concours de la force publique ;
- constaté que le Gaec [J] reconnaissait devoir la somme de 1 924,98 euros ;
- condamné le Gaec [J] au paiement d'une indemnité d'occupation de 10 euros par jour à compter de la décision jusqu'à la libération effective des lieux ;
- rejeté la demande de délai de paiement du Gaec [J] ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes non présentement satisfaites ;
- condamné le Gaec [J] au paiement de la somme de 1 000 euros à M. [J] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné le Gaec [J] aux entiers dépens ;
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Suivant jugement du 26 janvier 2023, le tribunal judiciaire de Dieppe a ouvert au bénéfice du Gaec [J] et de M. [B] [J] une procédure de sauvegarde judiciaire et désigné Maître [Y] [E] en qualité de mandataire judiciaire.
Par déclaration électronique du 01er février 2023, le Gaec [J] a interjeté appel de la décision du tribunal paritaire des baux ruraux de Dieppe.
M. [A] [J] est décédé le 03 juillet 2023 à [Localité 6], laissant pour lui succéder ses deux fils, MM. [L] et [B] [J].
M. [L] [J] a été assigné en intervention forcée par acte délivré à personne le 13 octobre 2023 devant la chambre de la proximité de la cour d'appel de Rouen.
Suivant ordonnance d'interruption d'instance du 18 octobre 2023, la présidente de la chambre de la proximité a :
- constaté l'interruption de l'instance ;
- invité les parties à faire part de leurs initiatives en vue de reprendre l'instance dans le délai de 3 mois du prononcé ;
- dit qu'à défaut des diligences accomplies dans le délai imparti, l'affaire serait radiée du rôle.
Exposé des prétentions des parties
Dans des conclusions communiquées le 13 avril 2023, Maître [Y] [E], ès-qualités, demande à la cour de lui donner acte de son intervention volontaire, de dire et juger que la décision à intervenir lui sera opposable et de statuer ce que de droit sur les dépens.
Dans leurs dernières conclusions du 15 février 2024, reprises oralement à l'audience le 24 juin 2024, le Gaec [J] et Maître [Y] [E], ès-qualités, demandent à la cour de :
- réformer et infirmer la décision rendue le 11 janvier 2023 par le tribunal paritaire des baux ruraux de Dieppe en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail rural du 12 septembre 2008 consenti au Gaec [J] sur les parcelles sises commune de [Localité 8] - [Localité 9], cadastrées section A n°[Cadastre 4], A n°[Cadastre 5], A n°[Cadastre 2] ; ordonné l'expulsion du Gaec [J] et de tous occupants de leur chef au besoin avec le concours de la force publique ; rejeté la demande de délai de paiement du Gaec [J] ; débouté les parties du surplus de leurs demandes non présentement satisfaites ; condamné le Gaec [J] au paiement de la somme de 1 000 euros à M. [A] [J] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; condamné le Gaec [J] aux entiers dépens ;
En conséquence,
- juger que le bail n'est pas résilié ;
- débouter M. [L] [J] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- accorder, sous réserve de la procédure de sauvegarde en cours, les plus larges délais au Gaec [J] pour s'acquitter de la dette sur une période de deux ans maximale, outre les fermages en cours et ce, sous réserve du plan en cours d'élaboration ;
- accorder en tout état de cause les délais jusqu'à la fin de la période culturale en cours ;
- condamner, en cas de résiliation définitive, M. [L] [J] à régler au Gaec [J] des indemnités de sortie de ferme ;
- voir nommer, si besoin est, un expert pour procéder à ces calculs techniques ;
- confirmer en tous points la décision rendue par le tribunal judiciaire de Dieppe statuant en matière paritaire ;
- rejeter les prétentions de M. [L] [J] à cet égard ;
- condamner M. [L] [J] à lui régler la somme de 1 500 euros au titre du maintien d'une procédure particulièrement abusive et injustifiée ;
- condamner M. [L] [J] à lui régler la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. [L] [J] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Pascale Rondel pour ceux dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu préalablement provision.
Dans ses dernières conclusions du 17 novembre 2023, reprises oralement à l'audience le 24 juin 2024, M. [L] [J] demande à la cour, au visa des articles L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime et L. 622-21 du code de commerce de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé la créance à l'encontre du Gaec [J] à la somme de 1 924,98 euros.
A l'audience, la cour a soulevé un moyen de procédure lié à l'éventuelle irrecevabilité pour défaut de pouvoir à défendre de M. [L] [J] pour représenter l'indivision [J].
Les parties ont présenté leurs observations sur ce moyen soulevé d'office à l'audience.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I- Sur le moyen de procédure soulevé d'office par la cour
[L] [J] a contesté toute irrégularité de procédure en se prévalant de l'article 724 du code civil et de la jurisprudence appliquée par la Cour de cassation sur le fondement de ce texte.
Le Gaec [J], représenté par M. [B] [J], gérant associé, indique que c'est un point qu'il a soulevé dans ses conclusions.
Aux termes de l'article 724 alinéa 1er du code civil, les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt.
En application de ce texte, tout héritier est fondé, même sans le concours des autres indivisaires, à exercer toutes les actions de son auteur, sans que puisse lui être opposé le droit commun de l'indivision.
En l'espèce, l'action en résiliation du bail a été initiée par M. [A] [J] représenté par son tuteur en première instance.
Le Gaec [J] a interjeté appel de la décision faisant droit aux demandes de M. [A] [J] représenté par son tuteur, qui a donc pris la qualité d'intimé.
A la suite du décès de M. [A] [J] le 03 juillet 2023, M. [L] [J] a été assigné en intervention forcée à la requête de M. [B] [J] et du Gaec [J], par acte du 13 octobre 2023 devant la chambre de la proximité de la cour d'appel de Rouen.
En application de l'article 724 du code civil, il y a lieu de considérer que l'action du défunt a été transmise de plein droit à ses héritiers et que [L] [J], assigné en intervention forcée à l'instance d'appel avait qualité (plutôt que pouvoir) pour défendre seul, sans que la règle des deux tiers des droits indivis prévus à l'article 815-3 du code civil n'y fasse obstacle.
C'est donc à bon droit que M. [L] [J] a contesté l'irrégularité de procédure soulevée d'office par la cour.
L'intervention forcée de M. [L] [J] sera en conséquence déclarée recevable.
II- Sur la résiliation du bail rural et sur le paiement des sommes dues
Le Gaec [J] soutient que l'ouverture d'une procédure de sauvegarde judiciaire le 26 janvier 2023 suspend toutes les procédures en cours et fait donc obstacle à la résiliation du bail. Il sollicite donc l'infirmation des dispositions du jugement relatives au prononcé de la résiliation du bail et à ses conséquences.
Il conteste les sommes réclamées par M. [L] [J], estimant que les créances antérieures ne peuvent être fixées que dans le cadre de la procédure collective et à défaut, par le cour d'appel de Rouen et que les créances postérieures au 26 janvier 2023 correspondent aux loyers courants, pour lesquels le preneur est à jour.
Il sollicite la confirmation de la décision entreprise en ce qui concerne la fixation de la créance due au titre des loyers impayés avant l'ouverture de la procédure collective, soit la somme de 1 924,98 euros.
Indépendamment des comptes, il développe sa position sur les problématiques liées à la créance de salaire différée sollicitée par [L] [J] et l'attribution préférentielle des terres et critique la gestion effectuée par M. [I], tuteur, du vivant de M. [A] [J].
Il demande en outre des délais de paiement pour s'acquitter du solde dû, contestant la qualification du premier juge de 'fermage nécessaire' pour payer la maison de retraite du défunt.
L'intimé sollicite la confirmation du jugement, faisant valoir que le Gaec [J] n'a pas régularisé le règlement des fermages dûs dans un délai de trois mois à compter de la délivrance le 11 juin 2021 d'une mise en demeure de payer visant deux échéances et postérieure aux échéances visées.
Il souligne que le Gaec a reconnu devoir la somme de 1 924,98 euros, montant arrêté au 29 septembre 2021.
A- Sur les conséquences de l'ouverture de la procédure de sauvegarde judiciaire
Aux termes de l'article L. 622-21 du code de commerce, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :
1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;
2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
II.-Sans préjudice des droits des créanciers dont la créance est mentionnée au I de l'article L. 622-17, le jugement d'ouverture arrête ou interdit toute procédure d'exécution tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif ayant le jugement d'ouverture.
III.-Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence interrompus. [...]
Le placement sous sauvegarde judiciaire du Gaec [J], intervenu le 26 janvier 2023, a effectivement interrompu toute possibilité de s'appuyer sur le motif du défaut de paiement des fermages pour prononcer la résiliation du bail rural.
Le premier juge a prononcé la résiliation du bail rural litigieux sur ce seul motif et aucun autre motif n'est invoqué par M. [L] [J] en appel.
La décision ayant prononcé la résiliation du bail rural du 12 septembre 2009 consenti au Gaec [J] par Mme [R] [J] née [C], ordonné son expulsion et celle de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique, condamné le Gaec [J] au paiement d'une indemnité d'occupation de 10 euros par jour à compter de la décision jusqu'à la libération effective des lieux, sera en conséquence infirmée.
B- Sur le montant des sommes dues au titre des fermages et des parts de taxes foncières
Les parties s'accordent sur le montant de 1 924,98 euros retenu par le premier juge au titre des impayés de fermages et des parts de taxes foncières dû par la Gaec [J] au 29 septembre 2021.
Eu égard à l'ouverture de la procédure collective intervenue après le prononcé du jugement de première instance, il y a lieu d'ajouter une disposition à la décision entreprise, en fixant la créance due par le Gaec [J] à l'indivision [J] à hauteur de 1 924,98 euros.
Cette somme prend en compte les fermages et parts de taxes foncières pour les années 2019, 2020 et 2021.
Le Gaec [J] demande à la cour d'appel de fixer sa créance avant l'ouverture de la procédure de sauvegarde judiciaire du 26 janvier 2023.
Or, en application de l'article 1353 du code civil, il appartient au preneur de justifier qu'il s'est libéré du paiement des fermages et parts des taxes foncières dues au titre du contrat de bail rural.
Faute de production de justificatifs en ce sens, il ne prouve pas qu'il est à jour des loyers et part de taxes foncières dûs au titre de l'année 2022.
La créance due par le Gaec [J] à l'indivision [J] ne sera donc fixée que jusqu'au 31 décembre 2021 inclus.
III- Sur la demande de délais de paiement
Eu égard à l'ouverture d'une procédure de sauvegarde judiciaire, la créance est fixée, toute poursuite étant suspendue.
Cette créance aura plutôt vocation à être remboursée dans le cadre d'un plan de sauvegarde.
En outre, le Gaec [J] sollicite des délais de paiement, sans justifier de ses moyens financiers pour y faire face.
La décision entreprise ayant rejeté cette demande de délais de paiement sera confirmée.
IV- Sur la demande indemnitaire au titre du maintien d'une procédure abusive
Le Gaec [J] sollicite la condamnation de M. [L] [J] à lui régler la somme de 1 500 euros au titre du maintien d'une procédure particulièrement abusive et injustifiée.
Or, l'appelant ne justifie d'aucun abus de poursuivre l'action du défunt M. [A] [J] en justice, de la part de l'intimé, étant observé au surplus que le Gaec [J] n'obtient gain de cause en appel qu'en application des règles d'ouverture d'une procédure collective à son bénéfice.
Il sera donc débouté de cette demande indemnitaire.
V- Sur les demandes accessoires
Les parties obtenant partiellement gain de cause, supporteront chacune la charge de leurs dépens d'appel.
Il est en outre équitable de ne pas faire droit aux demandes présentées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance seront confirmées sur l'identité du payeur, mais infirmées sur l'identité du bénéficiaire et sur la condamnation en paiement, ces sommes constituant des créances antérieures à l'ouverture de la sauvegarde judiciaire, désormais dues à l'indivision [J].
Il conviendra de fixer la créance de l'indivision [J] pour ces frais irrépétibles de 1 000 euros ainsi que pour les dépens de première instance à la charge du Gaec [J].
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Déclare l'intervention forcée M. [L] [J] recevable,
Dit que le présent arrêt sera opposable à Maître [Y] [E], agissant en qualité de mandataire judiciaire dans la procédure de sauvegarde judiciaire ouverte au bénéfice de M. [B] [J],
Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de délai de paiement du Gaec [J] et dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que l'ouverture d'une procédure de sauvegarde judiciaire le 26 janvier 2023 au bénéfice du Gaec [J] a interrompu l'action en résiliation du bail rural signé le 12 septembre 2019, par Mme [R] [C] épouse [J] et le dit Gaec,
Fixe la créance due par le Gaec [J] à l'égard de l'indivision [J], au titre de l'arriéré des fermages et des parts de taxes foncières impayés de 2019 au 31 décembre 2021 inclus, à la somme de 1 924,98 euros,
Déboute le Gaec [J] de sa demande de condamnation de M. [L] [J] à lui régler la somme de 1 500 euros au titre du maintien d'une procédure abusive,
Fixe la créance due par le Gaec [J] à l'égard de l'indivision [J], pour les dépens de première instance, ainsi que pour les frais irrépétibles de première instance de 1 000 euros,
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens d'appel,
Déboute les parties de leurs demandes présentées en appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La conseillère suppléante
De la présidente empêchée