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Décisions

CA Grenoble, 2e ch., 22 octobre 2024, n° 24/00362

GRENOBLE

Arrêt

Autre

CA Grenoble n° 24/00362

22 octobre 2024

N° RG 24/00362 - N° Portalis DBVM-V-B7I-MDGV

N° Minute :

C1

Copie exécutoire délivrée

le :

à

la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

Me Alexia JACQUOT

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 22 OCTOBRE 2024

Appel d'une ordonnance (N° R.G. 23/01015) rendue par le tribunal judiciaire de GRENOBLE en date du 11 janvier 2024, suivant déclaration d'appel du 18 janvier 2024

APPELANTE :

Mme [L] [N]

née le [Date naissance 4] 1986 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

représentée par Me KHATIBI Marie-France, de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC avocat au barreau de GRENOBLE et plaidant par Me Cécile MAGGIULLI de la SELEURL Edouard BOURGIN, avocat au barreau de GRENOBLE,

INTIMÉES :

Compagnie d'assurance MACIF

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Alexia JACQUOT, avocat au barreau de GRENOBLE, avocat postulant et plaidant par Me Emmanuel LAROUDIE, avocat au barreau de LYON,

Etablissement Public CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE (CPAM) DE [Localité 6] Prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

non-représentée

S.A.S. PLANSANTE, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

non-représentée

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère,

Mme Ludivine Chetail, conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 10 Septembre 2024, Mme Ludivine Chetail, conseillère qui a fait son rapport, assistée de Mme Solène Roux, greffière, a entendu seule les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile.

Il en a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 18 avril 2019, Mme [L] [N] a été victime d'un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré auprès de la MACIF.

Par assignations des 10 et 20 mai 2022, Mme [L] [N] a saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Grenoble aux fins d'expertise.

Par ordonnance du 14 septembre 2022, le juge des référés a ordonné une mesure d'expertise médicale.

L'expert judiciaire a déposé un rapport provisoire le 9 mai 2023, concluant que l'état de santé de Mme [N] n'était pas consolidé.

Par assignations des 27 et 29 juin 2023, Mme [L] [N] a saisi le juge des référés du tribunal judiciaire afin d'obtenir la condamnation de la MACIF à lui verser une provision de 402 772,91 euros.

Par ordonnance en date du 11 janvier 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Grenoble a :

- condamné la compagnie MACIF à verser à Mme [L] [N] la somme de 60 000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation de ses préjudices ;

- condamné la compagnie MACIF à verser à Mme [L] [N] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la compagnie MACIF aux dépens avec distraction au profit de Me Bourgin.

Par déclaration d'appel en date du 18 janvier 2024, Mme [L] [N] a interjeté appel de l'ordonnance en toutes ses dispositions.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions notifiées par voie électronique le 12 juillet 2024, l'appelante demande à la cour d'infirmer l'ordonnance entreprise et de condamner la compagnie d'assurance MACIF à lui payer :

- la somme de 1 681 938,73 euros à valoir sur l'indemnisation définitive de ses préjudices ;

- la somme de 7 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les dépens dont distraction faite au profit de Me Edouard Bourgin, sur son affirmation de droit.

Mme [N] soutient que :

- le juge des référés a commis un déni de justice en utilisant un copier-coller stéréotypé en violation de l'article 5 du code civil ;

- il existe un fait nouveau en ce qu'un second rapport concluant à la consolidation de ses séquelles orthopédiques et l'obligation n'est pas sérieusement contestatble dès lors que ses demandes sont fondées sur ce rapport.

Elle détaille l'évaluation de son préjudice poste par poste, hors les postes soumis au recours des tiers payeurs.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 avril 2024, la MACIF demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance dont appel et de débouter Mme [N] de toutes demandes plus amples ;

- à titre subsidiaire, au regard des provisions d'ores et déjà accordées à hauteur de 65 500 euros, réduire dans de notables proportions la provision allouée et dire qu'il appartiendra à Mme [N] de saisir le juge du fond d'une procédure de liquidation de son préjudice à défaut d'accord amiable ;

- condamner Mme [N] aux dépens d'appel.

La MACIF réplique que :

- l'appelante échoue dans la démonstration d'un vice affectant la motivation de l'ordonnance ;

- le rapport du docteur [F] n'est pas définitif puisqu'un avis sapiteur a été demandé, ses conclusions font l'objet de contestations tant sur l'analyse médico-légale des conséquences imputables à l'accident que s'agissant de l'évaluation du dommage essentiellement au titre de la tierce personne et l'appelante procède à une véritable liquidation de son préjudice ce qui vide de tout sens le débat sur la liquidation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

Le juge des référés peut accorder une provision égale à la totalité des sommes incontestablement dues puisque la seule limite dans la fixation du montant de la provision à allouer est le montant non sérieusement contestable de l'obligation (Civ. 2ème, 15 avril 2010, n° 09-66.705 ; Civ. 3ème, 5 octobre 2010, n° 09-70.147).

Il n'est pas contesté que la MACIF doit indemniser les préjudices subis par Mme [L] [N] ensuite de l'accident du 18 avril 2019.

Mme [N] a présenté au moment de l'accident une contusion au niveau du cou et des douleurs cervicales antérieures. Le lendemain, elle s'est plainte de lombalgies aiguës intenses.

Aux termes de ses rapports, le docteur [F] a conclu que la hernie discale L4-L5 avec décompensation oedémato-inflammatoire d'une discopathie mineure pouvait être en lien avec les faits.

Or, en regard de la distance entre l'apparition de ce symptôme et l'accident et le fait que le traumatisme a concerné les cervicales, il existe un doute sérieux quant à l'imputabilité de cette pathologie à l'accident. La contestation portée par la MACIF à ce sujet apparaît donc suffisamment sérieuse pour considérer qu'il n'est pas établi qu'elle a l'obligation d'indemniser les préjudices découlant de cette pathologie, et en particulier les préjudices persistant après la consolidation de l'état de Mme [N].

Le montant de la provision qui peut être accordée à Mme [N] peut être évalué en tenant compte de l'existence non contestée ni contestable des postes de préjudices parmi ceux invoqués par Mme [N].

S'agissant des frais divers, il est constant que Mme [N] a engagé la somme de 1 500 euros correspondant aux honoraires de son médecin-conseil. Elle a néanmoins perçu une somme de 1 500 euros à titre de provision ad litem, qui couvre ce préjudice certain.

En ce qui concerne l'assistance par tierce personne, avant comme après consolidation, les souffrances endurées, le préjudice esthétique temporaire, le déficit fonctionnel permanent, le préjudice esthétique permanent, le préjudice d'agrément, le préjudice sexuel, le préjudice d'établissement, l'évaluation de ces postes de préjudice a été réalisée par l'expert en considérant que les discopathies lombaires étaient imputables à l'accident.

Compte-tenu de ce qui précède, l'évaluation de ces postes de préjudices est sérieusement contestable en regard du débat portant sur l'imputabilité des discopathies à l'accident.

De surcroît, Mme [N] a déjà bénéficié du versement d'une provision.

L'ordonnance déférée sera donc confirmée.

2. Sur les frais du procès

Compte tenu de ce qu'elle succombe en appel, Mme [L] [N] doit être déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée aux dépens de l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi :

Confirme l'ordonnance déférée en ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant :

Déboute Mme [L] [N] de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne Mme [L] [N] aux dépens de la procédure d'appel.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère de la deuxième chambre civile, pour la présidente empêchée, et par Mme Solène Roux, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE