Décisions
CA Caen, 1re ch. civ., 22 octobre 2024, n° 23/01547
CAEN
Arrêt
Autre
AFFAIRE : N° RG 23/01547 -
N° Portalis DBVC-V-B7H-HHOV
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : Décision du Juge de la mise en état d'[Localité 9] du 03 Mars 2022 - RG n° 19/00713
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 22 OCTOBRE 2024
APPELANTE :
La S.A. [14]
N° SIRET : [N° SIREN/SIRET 6]
[Adresse 2]
[Localité 8]
prise en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Dominique LE PASTEUR, avocat au barreau D'ARGENTAN
INTIMÉ :
Monsieur [E] [U]
né le [Date naissance 4] 1969 à [Localité 9]
[Adresse 11]
[Localité 7]
représenté et assisté de Me Valérie LE BRAS, avocat au barreau D'ARGENTAN
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C14118-2023-001551 du 23/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
DÉBATS : A l'audience publique du 20 juin 2024, sans opposition du ou des avocats, Mme DELAUBIER, Conseillère, a entendu seule les observations des parties sans opposition de la part des avocats et en a rendu compte à la cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme COLLET
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. GUIGUESSON, Président de chambre,
Mme VELMANS, Conseillère,
Mme DELAUBIER, Conseillère,
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 22 Octobre 2024 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier
* * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
[V] [U] est décédé le [Date décès 3] 2016 à [Localité 10] laissant pour lui succéder son fils M. [E] [U].
Le défunt avait souscrit un contrat d'assurance-vie auprès de la [14].
Lors des opérations de liquidation de la succession, le notaire de M. [E] [U] a sollicité Mme [K] [L] afin qu'elle restitue la moitié du capital perçu.
Me [P], notaire chargé du règlement de la succession, a interrogé la [14] afin d'obtenir l'historique détaillé des primes versées par le défunt.
M. [U] a fait assigner Mme [L] par acte du 9 août 2019 devant le tribunal de grande instance d'Argentan afin d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 22 559 euros.
Par conclusions d'incident du 24 septembre 2019, M. [U] a sollicité la condamnation de la [14] à communiquer diverses pièces relatives au contrat d'assurance-vie souscrit par le de cujus.
Par décision du 21 novembre 2019, le juge de la mise en état a ordonné à la [14] de communiquer à M. [E] [U] :
- la copie du contrat d'assurance-vie [13] référencé 216/6331695 4 souscrit par [V] [U] né le [Date naissance 1] 1949 avec date d'effet du 28 mai 2004 ;
- l'historique des primes versées depuis sa souscription ;
- les justificatifs des versements réalisés, avec leurs montants, aux bénéficiaires désignés, avec copie du courrier d'envoi des fonds ;
sous astreinte provisoire d'un montant de 50 euros par jour de retard pendant une durée de 100 jours, passé le quinzième jour suivant la signification de l'ordonnance.
Par ordonnance du 20 août 2020, le juge de la mise en état a considéré qu'il était compétent jusqu'à l'ouverture des débats ou à la date fixée pour le dépôt des conclusions des parties constituées pour liquider l'astreinte.
Suivant acte du 28 août 2020, M. [U] a fait assigner la [14] en intervention forcée dans la procédure déjà pendante devant le tribunal judiciaire d'Argentan.
Par conclusions d'incident notifiées par voie électronique le 7 septembre 2020, M. [U] a saisi le juge de la mise en état d'une demande de jonction des procédures, de liquidation de l'astreinte et de fixation d'une nouvelle astreinte.
Les deux procédures ont été jointes le 5 novembre 2020 et par ordonnance en date du 28 janvier 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Argentan :
- a liquidé l'astreinte provisoire fixée par l'ordonnance du 21 novembre 2019 à la somme de 5 000 euros et condamné la [14] à payer cette somme à M. [E] [U] ;
- a assorti l'obligation faite à la [14] ([Adresse 5] ou [Adresse 2]) de communiquer à M. [E] [U] :
- la copie du contrat d'assurance vie [13] référencé 216/6331695 4 souscrit par [V] [U] né le [Date naissance 1] 1949 avec date d'effet au 28 mai 2004 ;
- l'historique des primes versées depuis sa souscription ;
- les justificatifs des versements réalisés, avec leurs montants, aux bénéficiaires désignés, avec copie du courrier d'envoi des fonds ;
d'une nouvelle astreinte provisoire d'un montant de 100 euros par jour de retard pendant une durée de 100 jours, passé le quinzième jour suivant la signification de l'ordonnance ;
- s'est réservé le contentieux de la liquidation de l'astreinte ;
- a renvoyé le dossier à l'audience de mise en état électronique du 4 février 2021 ;
- a invité Me [N] à conclure au fond ;
- a condamné la [14] aux dépens de l'incident ;
- a réservé les autres demandes ;
- a ordonné l'exécution provisoire de l'ordonnance.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 mai 2021et signifiées les 7 mai et 3 juin 2021 par huissier de justice aux parties non intimées, M. [U] a saisi le juge de la mise en état d'un incident aux fins de liquidation de l'astreinte.
Par ordonnance du 3 mars 2022, le juge de la mise en état a :
- liquidé l'astreinte provisoire fixée par l'ordonnance du 28 janvier 2021 à la somme de 5 000 euros et condamné la [14] au paiement de cette somme à M. [E] [U] ;
- dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- condamné la [14] aux dépens.
Par jugement du 16 mars 2023 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal judiciaire d'Argentan a statué en ces termes :
'- déboute M. [V] [U] de l'ensemble de ses demandes ;
- condamne M. [V] [U] à payer à Mme [K] [L] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne M. [V] [U] aux entiers dépens ;
- constate l'exécution provisoire de la présente décision.'
Par requête reçue le 5 mai 2023, Mme [K] [L], par l'intermédiaire de son avocat, a exposé que le jugement du 16 mars 2023 du tribunal judiciaire d'Argentan était entaché d'une erreur en ce qu'il était mentionné en pages 4 et 5 du jugement l'identité de [V] [U] alors qu'il s'agit en réalité de M. [E] [U].
Par jugement en rectification d'erreur matérielle du 8 juin 2023 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal judiciaire d'Argentan a :
- déclaré recevable la demande ;
- corrigé le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Argentan en date du 16 mars 2023 enregistré au répertoire général sous le numéro 19/00713 de la façon suivante :
L'identité [V] [U] mentionnée page 4 et 5 du jugement doit être remplacée par l'identité de [E] [U] ;
Ainsi, le dispositif du jugement doit être corrigé ainsi :
' Débouté M. [E] [U] de l'ensemble de ses demandes ;
Condamné M. [E] [U] à payer à Mme [K] [L] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné M. [E] [U] aux entiers dépens ;
Constaté l'exécution provisoire de la présente décision';
- dit qu'il sera fait mention de cet ajout en marge de la minute de la décision en cause et des expéditions qui seront délivrées ;
- dit que la décision devra être notifiée au même titre que le précédent jugement ;
- dit que les frais et les dépens resteront à la charge du Trésor Public.
Par déclaration du 27 juin 2023, la [14] a relevé appel des décisions suivantes, intimant M. [E] [U] :
- ordonnances des 28 janvier 2021 et 3 mars 2022 rendues par le juge de la mise en état ;
- jugements des 16 mars et 8 juin 2023 du tribunal judiciaire.
Le président de la chambre civile a, en application de l'article 905 du code de procédure civile, fixé l'appel de l'affaire à bref délai à l'audience du 20 juin 2024.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 20 septembre 2023, la [14] demande à la cour de :
- juger qu'elle est autant recevable que bien fondée en son appel ;
En conséquence,
- infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état en date du 28 janvier 2021 en ce qu'elle a :
* liquidé l'astreinte provisoire fixée par l'ordonnance du 21 novembre 2019 à la somme de 5 000 euros et l'a condamnée à payer cette somme à M. [U] ;
* assorti son obligation de communiquer à M. [U] :
- la copie du contrat d'assurance vie [13] référencé 216/6331695 4 souscrit par [V] [U] né le [Date naissance 1] 1949 avec date d'effet au 28 mai 2004 ;
- l'historique des primes versées depuis sa souscription ;
- les justificatifs des versements réalisés, avec leurs montants, aux bénéficiaires désignés, avec copie du courrier d'envoi des fonds ;
- d'une nouvelle astreinte provisoire d'un montant de 100 euros par jour de retard pendant une durée de 100 jours, passé le quinzième jour suivant la signification de la présente ordonnance ;
* l'a condamnée aux dépens de l'incident ;
- infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état en date du 3 mars 2022 en ce qu'elle a :
* liquidé l'astreinte provisoire par l'ordonnance du 28 janvier 2021 à la somme de 5 000 euros et l'a condamnée au paiement de cette somme à M. [U] ;
* l'a condamnée aux entiers dépens ;
Y ajoutant,
- condamner M. [U] à lui payer une somme de 10 000 euros en restitution des sommes perçues dans le cadre de l'exécution provisoire des deux ordonnances ainsi infirmées ;
- condamner M. [U] à lui payer une indemnité de 2 500 en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. [U] aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 22 septembre 2023, M. [U] demande à la cour au visa des articles 795 et 546 du code de procédure civile de :
- juger que l'appel fait par la [14] est irrecevable ;
- condamner la [14] à lui payer la somme de 3 300 euros en application en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et subsidiairement, de l'article 700 du code de procédure civile ;
Subsidiairement, le recevoir en son appel incident ;
- réformer les jugements du 16 mars 2023 et du 8 juin 2023 en ce qu'ils l'ont condamné à verser à Mme [L] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ; débouter Mme [L] de ces demandes ;
Subsidiairement,
le recevoir en son appel incident en ce que l'ordonnance du 28 janvier 2021 a limité la liquidation de l'astreinte à 5 000 euros alors qu'il avait sollicité la somme de 50 000 euros ; réformer, subsidiairement infirmer l'ordonnance du 28 janvier 2021 à ce sujet ;
- condamner la [14] à lui payer à la somme de 50 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte prononcée par le Juge de la mise en état dans son ordonnance du 21 novembre 2019 ;
le recevoir en son appel incident en ce que l'ordonnance du 3 mars 2022 a limité la liquidation de l'astreinte à 5 000 euros alors qu'il avait sollicité la somme de 10 000 euros ; réformer, subsidiairement infirmer l'ordonnance du 3 mars 2022 à ce sujet ;
- condamner la [14] à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte prononcée par le Juge de la mise en état dans son ordonnance du 28 janvier 2021 ;
Subsidiairement, débouter la [14] de ses demandes visant à infirmer les ordonnances du juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Argentan, en date du 28 janvier 2021 et du 3 mars 2022 ; juger qu'il n'y a pas lieu de le condamner à restituer la somme de 10 000 euros ;
En tout état de cause, débouter la [14] de ses demandes ; la condamner à lui payer la somme de 3 300 euros en application en des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et subsidiairement, de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 22 mai 2024.
Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
M. [U] soulève l'irrecevabilité des appels formés par la [14] à l'encontre :
- des deux ordonnances du juge de la mise en état des 28 janvier 2021 et 3 mars 2022 au motif que la société n'a pas formé appel de ces décisions dans les quinze jours de leur signification alors qu'en application de l'article 795 du code de procédure civile, en ce qui concerne la liquidation de l'astreinte prononcée, il doit être considéré que chacune des ordonnances entreprises a mis fin à l'instance ; il relève que la [14] n'a formulé aucune demande devant le tribunal ;
- des jugements des 16 mars et 8 juin 2023 du tribunal judiciaire dès lors que la [14] qui n'a succombé à aucune de ses demandes faites devant le tribunal est dépourvue de tout intérêt à relever appel à l'encontre de ces décisions en application de l'article 546 du code de procédure civile.
Il ajoute que la [14] n'est pas recevable au motif ajouté que l'appelante n'a pas intimé Mme [L], partie au litige, à l'encontre de laquelle lui-même a forme appel incident.
La [14] réplique qu'elle a été assignée en intervention forcée par acte du 28 août 2020 dans le cadre d'une procédure diligentée par M. [U] à l'encontre de Mme [L] alors qu'elle n'était nullement concernée sur le fond de l'affaire, qu'elle a été condamnée en qualité de tiers au litige puis en qualité de partie intervenante forcée au fond à la suite de deux incidents de communication de pièces ayant donné lieu aux ordonnances rendues les 21 janvier 2021 et 3 mars 2022.
Elle affirme que le juge de la mise en état ne pouvait liquider l'astreinte prononcée le 21 novembre 2019 alors qu'elle n'était pas partie à la procédure au fond et ne pouvait se défendre dans le cadre de cet incident. Elle ajoute que son intervention forcée signifiée par la suite n'était pas recevable dans le cadre de la procédure au fond.
Enfin, elle fait valoir que le contrat d'assurance-vie désigné par M. [E] [U] a été ouvert dans les livres de la société [15] SA dont le siège est à [Localité 12], entité juridique autonome et indépendante de la [14], de sorte que les ordonnances entreprises devront être infirmées.
Sur ce,
Aux termes de l'article 546 du code de procédure civile, le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n'y a pas renoncé.
En application de l'article 795 du code de procédure civile dans sa version applicable au cas d'espèce, les ordonnances du juge de la mise en état ne peuvent être frappées d'appel qu'avec le jugement statuant sur le fond.
Toutefois, elles sont susceptibles d'appel dans les cas et conditions prévus en matière d'expertise ou de sursis à statuer.
Elles le sont également, dans les quinze jours à compter de leur signification, lorsque :
1° Elles statuent sur un incident mettant fin à l'instance, elles ont pour effet de mettre fin à celle-ci ou elles en constatent l'extinction (...).
En l'espèce, il est constant que par acte d'huissier du 28 août 2020, la [14] a été assignée devant le tribunal judiciaire d'Argentan 'avec dénonciation de procédure' à la demande de M. [E] [U] aux fins de :
'Vu l'ordonnance du 21 novembre 2019, et après jonction avec l'affaire enrôlée sous le numéro de RG 19/00713 :
- juger que M. [U] est bien fondé à solliciter l'intervention forcée de la [14] afin qu'elle puisse défendre aux demandes qu'il a formulées devant le juge de la mise en état, en incident, savoir :
- liquider l'astreinte prononcée dans ladite ordonnance à hauteur de 50 000 euros, condamner la [14] à payer pareille somme à M. [U] ;
- prononcer une nouvelle astreinte à la charge de la [14], pour la production des documents visés dans l'ordonnance du 21 novembre 2019, de 100 euros par jour de retard passé le 10ème jour suivant la signification de l'ordonnance à intervenir ;
- condamner la [14] à payer à M. [U] la somme de 3000 euros en application des articles 37 et 75 de la loi de 1991 sur l'aide juridictionnelle, outre les dépens de l'incident.'
Etaient jointes à l'assignation :
- l'ordonnance du 21 novembre 2019 du juge de la mise en état rendue au contradictoire de Mme [L] et faisant droit, en application de l'article 138 du code de procédure civile, à la demande de M. [U] de voir ordonner sous astreinte à la [14], tiers non partie à l'instance engagée, de communiquer à M. [U], diverses pièces relatives au contrat d'assurance vie [13] souscrit par [V] [U] et ce, sous astreinte provisoire d'un montant de 50 euros par jour de retard pendant une durée de 100 jour passé le quinzième jour suivant la signification de l'ordonnance ;
- les actes de signification de cette ordonnance à la [14] des 6 février 2020 (au siège de Paris) et du 27 mai 2020 (agence de Caen) ;
- la mise en demeure avec accusé de réception adressée à la même le 27 mars 2019.
Cette assignation en intervention forcée a été enregistrée sous le numéro de RG 20/00537 et jointe le 5 novembre 2020 à l'instance enregistrée sous le numéro RG 19/00713 opposant M. [U] à Mme [L], étant rappelé qu'une jonction d'instance ne créée pas de procédure unique ni, à elle-seule, des liens juridiques entre les parties en cause.
Il n'est pas contesté que la [14] a constitué avocat le 18 juin 2021 alors que :
- l'ordonnance réputée contradictoire du 28 janvier 2021 par laquelle le juge de la mise en état a liquidé l'astreinte provisoire, condamné la [14] à la somme de 5000 euros et ordonné une nouvelle astreinte provisoire à l'encontre de la banque en se réservant le contentieux de la liquidation de l'astreinte, a été rendue cinq mois après l'intervention forcée de la banque délivrée le 28 août 2020 aux fins de défendre à la demande de liquidation de l'astreinte ; la dite décision a été signifiée les 5 et 8 février 2021 sans qu'un appel ait étéformé par la [14] dans les quinze jours ;
- l'ordonnance contradictoire constatant que la [14] avait communiqué les documents attendus le 28 octobre 2021, soit postérieurement au délai imparti de sorte que le juge de la mise en état a liquidé l'astreinte provisoire fixée par l'ordonnance du 28 janvier 2021 à la somme de 5000 euros et condamné la banque à payer cette somme à M. [U], a été rendue le 3 mars 2022, la [14] ayant dans le cadre de cet incident notifié des conclusions en défense.
Par ailleurs, l'examen du jugement au fond rendu le 16 mars 2023 et rectifié le 8 juin 2023 révèle que tant M. [U] que Mme [L] n'ont formulé la moindre demande à l'encontre de la [14], laquelle, par suite, n'a fait l'objet d'aucune condamnation. La banque n'ayant pas conclu, elle n'a pas davantage présenté de prétentions à l'encontre de ces deux parties dont elle aurait été le cas échéant déboutée totalement ou partiellement.
La cour relève au vu de ces éléments qu'à considérer la [14] comme ayant eu la qualité de partie à l'instance au fond opposant M. [U] à Mme [L], celle-ci ne justifie d'aucun intérêt au sens de l'article 546 du code de procédure civile pour relever appel à l'encontre du jugement prononcé et rectifié. Il en résulte que l'appel formé à l'encontre du jugement rendu le 16 mars 2023 et la décision rectificative du 8 juin 2023 est irrecevable.
La cour est saisie de l'appel des deux ordonnances du juge de la mise en état en application de l'article 795 précité alinéa 1er par une déclaration d'appel unique, et non dans le cadre d'un appel immédiat de décisions mettant fin à l'instance, de sorte que l'irrecevabilité de l'appel du jugement emporte irrecevabilité de l'appel formé à l'encontre des deux ordonnances critiquées.
En effet, à retenir que l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 3 mars 2022 qui liquide la précédente astreinte provisoire ordonnée après avoir constaté néanmoins que les documents exigés avaient été remis, a mis fin à l'instance opposant M. [U] à la [14] dans les limites de l'assignation en intervention forcée délivrée à l'encontre de celle-ci, il doit être observé que la [14] n'a pas relevé appel immédiat de la dite ordonnance.
S'agissant de l'appel dirigé contre l'ordonnance du 28 janvier 2021, cette décision, en ordonnant une nouvelle astreinte, n'a pas mis fin à l'instance engagée par M. [U] à l'encontre de la [14], étant observé au surplus qu'elle n'a fait l'objet d'aucun appel immédiat dans les quinze jours de sa signification.
Enfin, il est constaté que l'appel interjeté par la [14] présentement examiné ne constitue pas un appel-nullité pour excès de pouvoir.
En conséquence, l'ensemble de ces éléments conduit la cour à déclarer irrecevable l'appel formé par la [14] à l'encontre des quatre décisions visées à la déclaration d'appel.
Par suite, il n'y aura pas lieu de statuer sur les demandes formées subsidiairement par M. [U].
II- Sur les demandes accessoires :
La [14] qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens de la procédure d'appel.
En revanche, l'équité ne commande pas de faire droit à la demande formée par M. [U] sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et subsidiairement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, publiquement par mise à disposition au greffe,
Déclare irrecevable l'appel formé par la [14] par déclaration d'appel du 27 juin 2023 à l'encontre des décisions suivantes :
- le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Argentan le 16 mars 2023 rectifié par jugement du 8 juin 2023 ;
- les ordonnances du juge de la mise en état du tribunal judiciaire du tribunal d'Argentan en date des 28 janvier 2021 et 3 mars 2022 ;
Rejette les demandes présentées par les parties sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ou de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la [14] aux dépens de la procédure d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. COLLET G. GUIGUESSON
N° Portalis DBVC-V-B7H-HHOV
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : Décision du Juge de la mise en état d'[Localité 9] du 03 Mars 2022 - RG n° 19/00713
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 22 OCTOBRE 2024
APPELANTE :
La S.A. [14]
N° SIRET : [N° SIREN/SIRET 6]
[Adresse 2]
[Localité 8]
prise en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Dominique LE PASTEUR, avocat au barreau D'ARGENTAN
INTIMÉ :
Monsieur [E] [U]
né le [Date naissance 4] 1969 à [Localité 9]
[Adresse 11]
[Localité 7]
représenté et assisté de Me Valérie LE BRAS, avocat au barreau D'ARGENTAN
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C14118-2023-001551 du 23/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
DÉBATS : A l'audience publique du 20 juin 2024, sans opposition du ou des avocats, Mme DELAUBIER, Conseillère, a entendu seule les observations des parties sans opposition de la part des avocats et en a rendu compte à la cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme COLLET
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. GUIGUESSON, Président de chambre,
Mme VELMANS, Conseillère,
Mme DELAUBIER, Conseillère,
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 22 Octobre 2024 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier
* * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
[V] [U] est décédé le [Date décès 3] 2016 à [Localité 10] laissant pour lui succéder son fils M. [E] [U].
Le défunt avait souscrit un contrat d'assurance-vie auprès de la [14].
Lors des opérations de liquidation de la succession, le notaire de M. [E] [U] a sollicité Mme [K] [L] afin qu'elle restitue la moitié du capital perçu.
Me [P], notaire chargé du règlement de la succession, a interrogé la [14] afin d'obtenir l'historique détaillé des primes versées par le défunt.
M. [U] a fait assigner Mme [L] par acte du 9 août 2019 devant le tribunal de grande instance d'Argentan afin d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 22 559 euros.
Par conclusions d'incident du 24 septembre 2019, M. [U] a sollicité la condamnation de la [14] à communiquer diverses pièces relatives au contrat d'assurance-vie souscrit par le de cujus.
Par décision du 21 novembre 2019, le juge de la mise en état a ordonné à la [14] de communiquer à M. [E] [U] :
- la copie du contrat d'assurance-vie [13] référencé 216/6331695 4 souscrit par [V] [U] né le [Date naissance 1] 1949 avec date d'effet du 28 mai 2004 ;
- l'historique des primes versées depuis sa souscription ;
- les justificatifs des versements réalisés, avec leurs montants, aux bénéficiaires désignés, avec copie du courrier d'envoi des fonds ;
sous astreinte provisoire d'un montant de 50 euros par jour de retard pendant une durée de 100 jours, passé le quinzième jour suivant la signification de l'ordonnance.
Par ordonnance du 20 août 2020, le juge de la mise en état a considéré qu'il était compétent jusqu'à l'ouverture des débats ou à la date fixée pour le dépôt des conclusions des parties constituées pour liquider l'astreinte.
Suivant acte du 28 août 2020, M. [U] a fait assigner la [14] en intervention forcée dans la procédure déjà pendante devant le tribunal judiciaire d'Argentan.
Par conclusions d'incident notifiées par voie électronique le 7 septembre 2020, M. [U] a saisi le juge de la mise en état d'une demande de jonction des procédures, de liquidation de l'astreinte et de fixation d'une nouvelle astreinte.
Les deux procédures ont été jointes le 5 novembre 2020 et par ordonnance en date du 28 janvier 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Argentan :
- a liquidé l'astreinte provisoire fixée par l'ordonnance du 21 novembre 2019 à la somme de 5 000 euros et condamné la [14] à payer cette somme à M. [E] [U] ;
- a assorti l'obligation faite à la [14] ([Adresse 5] ou [Adresse 2]) de communiquer à M. [E] [U] :
- la copie du contrat d'assurance vie [13] référencé 216/6331695 4 souscrit par [V] [U] né le [Date naissance 1] 1949 avec date d'effet au 28 mai 2004 ;
- l'historique des primes versées depuis sa souscription ;
- les justificatifs des versements réalisés, avec leurs montants, aux bénéficiaires désignés, avec copie du courrier d'envoi des fonds ;
d'une nouvelle astreinte provisoire d'un montant de 100 euros par jour de retard pendant une durée de 100 jours, passé le quinzième jour suivant la signification de l'ordonnance ;
- s'est réservé le contentieux de la liquidation de l'astreinte ;
- a renvoyé le dossier à l'audience de mise en état électronique du 4 février 2021 ;
- a invité Me [N] à conclure au fond ;
- a condamné la [14] aux dépens de l'incident ;
- a réservé les autres demandes ;
- a ordonné l'exécution provisoire de l'ordonnance.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 mai 2021et signifiées les 7 mai et 3 juin 2021 par huissier de justice aux parties non intimées, M. [U] a saisi le juge de la mise en état d'un incident aux fins de liquidation de l'astreinte.
Par ordonnance du 3 mars 2022, le juge de la mise en état a :
- liquidé l'astreinte provisoire fixée par l'ordonnance du 28 janvier 2021 à la somme de 5 000 euros et condamné la [14] au paiement de cette somme à M. [E] [U] ;
- dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- condamné la [14] aux dépens.
Par jugement du 16 mars 2023 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal judiciaire d'Argentan a statué en ces termes :
'- déboute M. [V] [U] de l'ensemble de ses demandes ;
- condamne M. [V] [U] à payer à Mme [K] [L] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne M. [V] [U] aux entiers dépens ;
- constate l'exécution provisoire de la présente décision.'
Par requête reçue le 5 mai 2023, Mme [K] [L], par l'intermédiaire de son avocat, a exposé que le jugement du 16 mars 2023 du tribunal judiciaire d'Argentan était entaché d'une erreur en ce qu'il était mentionné en pages 4 et 5 du jugement l'identité de [V] [U] alors qu'il s'agit en réalité de M. [E] [U].
Par jugement en rectification d'erreur matérielle du 8 juin 2023 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal judiciaire d'Argentan a :
- déclaré recevable la demande ;
- corrigé le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Argentan en date du 16 mars 2023 enregistré au répertoire général sous le numéro 19/00713 de la façon suivante :
L'identité [V] [U] mentionnée page 4 et 5 du jugement doit être remplacée par l'identité de [E] [U] ;
Ainsi, le dispositif du jugement doit être corrigé ainsi :
' Débouté M. [E] [U] de l'ensemble de ses demandes ;
Condamné M. [E] [U] à payer à Mme [K] [L] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné M. [E] [U] aux entiers dépens ;
Constaté l'exécution provisoire de la présente décision';
- dit qu'il sera fait mention de cet ajout en marge de la minute de la décision en cause et des expéditions qui seront délivrées ;
- dit que la décision devra être notifiée au même titre que le précédent jugement ;
- dit que les frais et les dépens resteront à la charge du Trésor Public.
Par déclaration du 27 juin 2023, la [14] a relevé appel des décisions suivantes, intimant M. [E] [U] :
- ordonnances des 28 janvier 2021 et 3 mars 2022 rendues par le juge de la mise en état ;
- jugements des 16 mars et 8 juin 2023 du tribunal judiciaire.
Le président de la chambre civile a, en application de l'article 905 du code de procédure civile, fixé l'appel de l'affaire à bref délai à l'audience du 20 juin 2024.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 20 septembre 2023, la [14] demande à la cour de :
- juger qu'elle est autant recevable que bien fondée en son appel ;
En conséquence,
- infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état en date du 28 janvier 2021 en ce qu'elle a :
* liquidé l'astreinte provisoire fixée par l'ordonnance du 21 novembre 2019 à la somme de 5 000 euros et l'a condamnée à payer cette somme à M. [U] ;
* assorti son obligation de communiquer à M. [U] :
- la copie du contrat d'assurance vie [13] référencé 216/6331695 4 souscrit par [V] [U] né le [Date naissance 1] 1949 avec date d'effet au 28 mai 2004 ;
- l'historique des primes versées depuis sa souscription ;
- les justificatifs des versements réalisés, avec leurs montants, aux bénéficiaires désignés, avec copie du courrier d'envoi des fonds ;
- d'une nouvelle astreinte provisoire d'un montant de 100 euros par jour de retard pendant une durée de 100 jours, passé le quinzième jour suivant la signification de la présente ordonnance ;
* l'a condamnée aux dépens de l'incident ;
- infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état en date du 3 mars 2022 en ce qu'elle a :
* liquidé l'astreinte provisoire par l'ordonnance du 28 janvier 2021 à la somme de 5 000 euros et l'a condamnée au paiement de cette somme à M. [U] ;
* l'a condamnée aux entiers dépens ;
Y ajoutant,
- condamner M. [U] à lui payer une somme de 10 000 euros en restitution des sommes perçues dans le cadre de l'exécution provisoire des deux ordonnances ainsi infirmées ;
- condamner M. [U] à lui payer une indemnité de 2 500 en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. [U] aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 22 septembre 2023, M. [U] demande à la cour au visa des articles 795 et 546 du code de procédure civile de :
- juger que l'appel fait par la [14] est irrecevable ;
- condamner la [14] à lui payer la somme de 3 300 euros en application en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et subsidiairement, de l'article 700 du code de procédure civile ;
Subsidiairement, le recevoir en son appel incident ;
- réformer les jugements du 16 mars 2023 et du 8 juin 2023 en ce qu'ils l'ont condamné à verser à Mme [L] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ; débouter Mme [L] de ces demandes ;
Subsidiairement,
le recevoir en son appel incident en ce que l'ordonnance du 28 janvier 2021 a limité la liquidation de l'astreinte à 5 000 euros alors qu'il avait sollicité la somme de 50 000 euros ; réformer, subsidiairement infirmer l'ordonnance du 28 janvier 2021 à ce sujet ;
- condamner la [14] à lui payer à la somme de 50 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte prononcée par le Juge de la mise en état dans son ordonnance du 21 novembre 2019 ;
le recevoir en son appel incident en ce que l'ordonnance du 3 mars 2022 a limité la liquidation de l'astreinte à 5 000 euros alors qu'il avait sollicité la somme de 10 000 euros ; réformer, subsidiairement infirmer l'ordonnance du 3 mars 2022 à ce sujet ;
- condamner la [14] à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte prononcée par le Juge de la mise en état dans son ordonnance du 28 janvier 2021 ;
Subsidiairement, débouter la [14] de ses demandes visant à infirmer les ordonnances du juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Argentan, en date du 28 janvier 2021 et du 3 mars 2022 ; juger qu'il n'y a pas lieu de le condamner à restituer la somme de 10 000 euros ;
En tout état de cause, débouter la [14] de ses demandes ; la condamner à lui payer la somme de 3 300 euros en application en des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et subsidiairement, de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 22 mai 2024.
Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
M. [U] soulève l'irrecevabilité des appels formés par la [14] à l'encontre :
- des deux ordonnances du juge de la mise en état des 28 janvier 2021 et 3 mars 2022 au motif que la société n'a pas formé appel de ces décisions dans les quinze jours de leur signification alors qu'en application de l'article 795 du code de procédure civile, en ce qui concerne la liquidation de l'astreinte prononcée, il doit être considéré que chacune des ordonnances entreprises a mis fin à l'instance ; il relève que la [14] n'a formulé aucune demande devant le tribunal ;
- des jugements des 16 mars et 8 juin 2023 du tribunal judiciaire dès lors que la [14] qui n'a succombé à aucune de ses demandes faites devant le tribunal est dépourvue de tout intérêt à relever appel à l'encontre de ces décisions en application de l'article 546 du code de procédure civile.
Il ajoute que la [14] n'est pas recevable au motif ajouté que l'appelante n'a pas intimé Mme [L], partie au litige, à l'encontre de laquelle lui-même a forme appel incident.
La [14] réplique qu'elle a été assignée en intervention forcée par acte du 28 août 2020 dans le cadre d'une procédure diligentée par M. [U] à l'encontre de Mme [L] alors qu'elle n'était nullement concernée sur le fond de l'affaire, qu'elle a été condamnée en qualité de tiers au litige puis en qualité de partie intervenante forcée au fond à la suite de deux incidents de communication de pièces ayant donné lieu aux ordonnances rendues les 21 janvier 2021 et 3 mars 2022.
Elle affirme que le juge de la mise en état ne pouvait liquider l'astreinte prononcée le 21 novembre 2019 alors qu'elle n'était pas partie à la procédure au fond et ne pouvait se défendre dans le cadre de cet incident. Elle ajoute que son intervention forcée signifiée par la suite n'était pas recevable dans le cadre de la procédure au fond.
Enfin, elle fait valoir que le contrat d'assurance-vie désigné par M. [E] [U] a été ouvert dans les livres de la société [15] SA dont le siège est à [Localité 12], entité juridique autonome et indépendante de la [14], de sorte que les ordonnances entreprises devront être infirmées.
Sur ce,
Aux termes de l'article 546 du code de procédure civile, le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n'y a pas renoncé.
En application de l'article 795 du code de procédure civile dans sa version applicable au cas d'espèce, les ordonnances du juge de la mise en état ne peuvent être frappées d'appel qu'avec le jugement statuant sur le fond.
Toutefois, elles sont susceptibles d'appel dans les cas et conditions prévus en matière d'expertise ou de sursis à statuer.
Elles le sont également, dans les quinze jours à compter de leur signification, lorsque :
1° Elles statuent sur un incident mettant fin à l'instance, elles ont pour effet de mettre fin à celle-ci ou elles en constatent l'extinction (...).
En l'espèce, il est constant que par acte d'huissier du 28 août 2020, la [14] a été assignée devant le tribunal judiciaire d'Argentan 'avec dénonciation de procédure' à la demande de M. [E] [U] aux fins de :
'Vu l'ordonnance du 21 novembre 2019, et après jonction avec l'affaire enrôlée sous le numéro de RG 19/00713 :
- juger que M. [U] est bien fondé à solliciter l'intervention forcée de la [14] afin qu'elle puisse défendre aux demandes qu'il a formulées devant le juge de la mise en état, en incident, savoir :
- liquider l'astreinte prononcée dans ladite ordonnance à hauteur de 50 000 euros, condamner la [14] à payer pareille somme à M. [U] ;
- prononcer une nouvelle astreinte à la charge de la [14], pour la production des documents visés dans l'ordonnance du 21 novembre 2019, de 100 euros par jour de retard passé le 10ème jour suivant la signification de l'ordonnance à intervenir ;
- condamner la [14] à payer à M. [U] la somme de 3000 euros en application des articles 37 et 75 de la loi de 1991 sur l'aide juridictionnelle, outre les dépens de l'incident.'
Etaient jointes à l'assignation :
- l'ordonnance du 21 novembre 2019 du juge de la mise en état rendue au contradictoire de Mme [L] et faisant droit, en application de l'article 138 du code de procédure civile, à la demande de M. [U] de voir ordonner sous astreinte à la [14], tiers non partie à l'instance engagée, de communiquer à M. [U], diverses pièces relatives au contrat d'assurance vie [13] souscrit par [V] [U] et ce, sous astreinte provisoire d'un montant de 50 euros par jour de retard pendant une durée de 100 jour passé le quinzième jour suivant la signification de l'ordonnance ;
- les actes de signification de cette ordonnance à la [14] des 6 février 2020 (au siège de Paris) et du 27 mai 2020 (agence de Caen) ;
- la mise en demeure avec accusé de réception adressée à la même le 27 mars 2019.
Cette assignation en intervention forcée a été enregistrée sous le numéro de RG 20/00537 et jointe le 5 novembre 2020 à l'instance enregistrée sous le numéro RG 19/00713 opposant M. [U] à Mme [L], étant rappelé qu'une jonction d'instance ne créée pas de procédure unique ni, à elle-seule, des liens juridiques entre les parties en cause.
Il n'est pas contesté que la [14] a constitué avocat le 18 juin 2021 alors que :
- l'ordonnance réputée contradictoire du 28 janvier 2021 par laquelle le juge de la mise en état a liquidé l'astreinte provisoire, condamné la [14] à la somme de 5000 euros et ordonné une nouvelle astreinte provisoire à l'encontre de la banque en se réservant le contentieux de la liquidation de l'astreinte, a été rendue cinq mois après l'intervention forcée de la banque délivrée le 28 août 2020 aux fins de défendre à la demande de liquidation de l'astreinte ; la dite décision a été signifiée les 5 et 8 février 2021 sans qu'un appel ait étéformé par la [14] dans les quinze jours ;
- l'ordonnance contradictoire constatant que la [14] avait communiqué les documents attendus le 28 octobre 2021, soit postérieurement au délai imparti de sorte que le juge de la mise en état a liquidé l'astreinte provisoire fixée par l'ordonnance du 28 janvier 2021 à la somme de 5000 euros et condamné la banque à payer cette somme à M. [U], a été rendue le 3 mars 2022, la [14] ayant dans le cadre de cet incident notifié des conclusions en défense.
Par ailleurs, l'examen du jugement au fond rendu le 16 mars 2023 et rectifié le 8 juin 2023 révèle que tant M. [U] que Mme [L] n'ont formulé la moindre demande à l'encontre de la [14], laquelle, par suite, n'a fait l'objet d'aucune condamnation. La banque n'ayant pas conclu, elle n'a pas davantage présenté de prétentions à l'encontre de ces deux parties dont elle aurait été le cas échéant déboutée totalement ou partiellement.
La cour relève au vu de ces éléments qu'à considérer la [14] comme ayant eu la qualité de partie à l'instance au fond opposant M. [U] à Mme [L], celle-ci ne justifie d'aucun intérêt au sens de l'article 546 du code de procédure civile pour relever appel à l'encontre du jugement prononcé et rectifié. Il en résulte que l'appel formé à l'encontre du jugement rendu le 16 mars 2023 et la décision rectificative du 8 juin 2023 est irrecevable.
La cour est saisie de l'appel des deux ordonnances du juge de la mise en état en application de l'article 795 précité alinéa 1er par une déclaration d'appel unique, et non dans le cadre d'un appel immédiat de décisions mettant fin à l'instance, de sorte que l'irrecevabilité de l'appel du jugement emporte irrecevabilité de l'appel formé à l'encontre des deux ordonnances critiquées.
En effet, à retenir que l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 3 mars 2022 qui liquide la précédente astreinte provisoire ordonnée après avoir constaté néanmoins que les documents exigés avaient été remis, a mis fin à l'instance opposant M. [U] à la [14] dans les limites de l'assignation en intervention forcée délivrée à l'encontre de celle-ci, il doit être observé que la [14] n'a pas relevé appel immédiat de la dite ordonnance.
S'agissant de l'appel dirigé contre l'ordonnance du 28 janvier 2021, cette décision, en ordonnant une nouvelle astreinte, n'a pas mis fin à l'instance engagée par M. [U] à l'encontre de la [14], étant observé au surplus qu'elle n'a fait l'objet d'aucun appel immédiat dans les quinze jours de sa signification.
Enfin, il est constaté que l'appel interjeté par la [14] présentement examiné ne constitue pas un appel-nullité pour excès de pouvoir.
En conséquence, l'ensemble de ces éléments conduit la cour à déclarer irrecevable l'appel formé par la [14] à l'encontre des quatre décisions visées à la déclaration d'appel.
Par suite, il n'y aura pas lieu de statuer sur les demandes formées subsidiairement par M. [U].
II- Sur les demandes accessoires :
La [14] qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens de la procédure d'appel.
En revanche, l'équité ne commande pas de faire droit à la demande formée par M. [U] sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et subsidiairement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, publiquement par mise à disposition au greffe,
Déclare irrecevable l'appel formé par la [14] par déclaration d'appel du 27 juin 2023 à l'encontre des décisions suivantes :
- le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Argentan le 16 mars 2023 rectifié par jugement du 8 juin 2023 ;
- les ordonnances du juge de la mise en état du tribunal judiciaire du tribunal d'Argentan en date des 28 janvier 2021 et 3 mars 2022 ;
Rejette les demandes présentées par les parties sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ou de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la [14] aux dépens de la procédure d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. COLLET G. GUIGUESSON