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Décisions

Cass. civ., 23 février 1892

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mazeau

Rapporteur :

M. Faure-Biguet

Avocat général :

M. Desjardins

Avocat :

Me Sabatier

CA La Martinique, du 13 mars 1889

13 mars 1889

LA COUR :

Sur le premier moyen du pourvoi :

Attendu que la Société du Crédit foncier colonial a demandé à la cour d’appel de la Martinique de prononcer la nullité de la saisie-brandon qu’Aries et consorts ont pratiquée sur les récoltes du sieur de Lareinty, leur débiteur commun ; qu’elle a fondé sa prétention, notamment, sur ce que cette saisie ayant été opérée pendant le temps où la Société demanderesse était investie du séquestre des immeubles du sieur de Lareinty, conformément à l’art. 29 du décret du 28 févr. 1852, la disposition finale de l’art. 30 du même décret n’aurait pas permis aux défendeurs de procéder valablement à ladite saisie pendant le même temps ;

Mais attendu que si, en cas de retard du débiteur, les art. 29 et 30 précités autorisent la Société du Crédit foncier à se faire mettre en possession des immeubles qui leur sont hypothéqués, à en percevoir les fruits pendant la durée du séquestre et à en appliquer le montant a l’acquittement des annuités échues, l’art. 30 n’édicte pas la nullité des oppositions ou des saisies qui viendraient à être pratiquées sur ces mêmes fruits par d’autres créanciers ;

Que l’art. 30 décide seulement que la Société du Crédit foncier exerce les droits ci-dessus spécifiés nonobstant toute opposition ou saisie ;

Que ces expressions doivent être entendues en ce sens que les oppositions ou saisies des autres créanciers sont simplement paralysées, pendant la durée du séquestre, dans ceux de leurs effets légaux qui pourraient être contraires aux droits du Crédit foncier tels qu’ils sont définis par le même article ;

Attendu que la cour d’appel, en rejetant le moyen proposé par le Crédit foncier colonial, s’est bornée à déclarer que la saisie-brandon d’Aries et consorts était valable ;

Que la cour d’appel n’a pas dit que le Crédit foncier serait privé du droit de réaliser lui-même la récolte pour le compte de qui il appartiendrait ;

Qu’elle ne s’est pas expliquée davantage sur les conditions dans lesquelles Aries et consorts seraient admis à la distribution des deniers, questions que les conclusions des parties ne lui avaient pas soumises, et qui, dès lors, sont demeurées réservées ;

Que sa décision n’a donc porté aucune atteinte aux droits qui sont conférés à la Société demanderesse par les art. 29 et 30 précités ; d’où il suit que l’arrêt attaqué, en statuant comme il l’a fait, loin de violer aucune loi, s’est conformé, au contraire, aux principes de la matière ;

Sur le second moyen :

Attendu que le Crédit foncier colonial a demandé, en outre, la nullité de la saisie-brandon en se fondant sur ce que cette saisie n’aurait pu être valablement faite après la saisie immobilière résultant des commandements signifiés à sa requête, que toutefois il n’a pas articulé que ces commandements eussent été transcrits, circonstance qui seule eut été de nature, si elle avait été établie, à justifier la prétention de la Société demanderesse ;

Attendu que l’arrêt attaqué constate qu’il n’existait pas de saisie immobilière transcrite au moment où la saisie-brandon a été opérée ; que cette constatation justifie le rejet de ce second moyen, que la cour a virtuellement prononcé en rejetant la demande ; d’où il suit que l’arrêt attaqué, outre qu’il est suffisamment motivé, n’a violé aucun des articles de loi visés par le pourvoi ;

Par ces motifs, rejette.