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Décisions

CA Dijon, 2e ch., 28 décembre 1891

DIJON

Arrêt

Autre

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Masson

Avocats :

Me Gouget, Me Toussaint

T. com. Châlon-sur-Saône, du 20 mai 1891

20 mai 1891

LA COUR

Attendu que la saisie n’a pas pour effet de transférer du saisi au saisissant la propriété des objets sur lesquels elle porte ;

Que, jusqu'au jour de la vente, la propriété de ces objets repose, en droit, sur la tète du saisi, de même que leur possession reste, en fait, entre ses mains ;

Que la mesure conservatoire dont ils sont frappés n’a d’autre conséquence que d’enlever au saisi la faculté d’en disposer au préjudice de ses créanciers ;

Attendu, dès lors, que c’est à tort que les premiers juges déclarent que le saisissant avait charge de prendre les mesures nécessaires pour la conservation de son gage ;

Attendu qu’il serait souverainement injuste de faire supporter au saisissant la conséquence d’avaries qu’il n’a, ni en droit, ni en fait, le moyen d’empêcher ;

Attendu que la loi, prévoyant précisément le cas où, par négligence ou mauvaise volonté, le saisi laisserait dépérir le gage de ses créanciers, a prescrit qu’il serait établi un gardien chargé de veiller à leur conservation ;

Attendu que le saisissant ne peut évidemment être rendu responsable des actes de ce gardien, au choix duquel il n’a eu aucune part, et qui est désigné par une disposition impérative du code de procédure (art. 628) ;

Qu’il y a donc lieu de faire ici l’application de la règle générale : res perit domino, et cela avec d’autant plus de raison, qu’il semble, d’après les documents de la cause, que c’est à la rigueur de l’hiver 1890-91 que doit être attribuée la perte des betteraves saisies sur Bonnamour, des conditions atmosphériques tout à fait exceptionnelles ayant rendu inefficaces les précautions qui suffisent d’ordinaire à assurer la conservation de ces légumes, circonstance qui constituerait un véritable cas de force majeure ;

Attendu, au surplus, qu’il n’échet, en l’état, d’examiner cette question, la faute, s’il venait à être démontré qu’il y en a eu une de commise, ne pouvant engager que la responsabilité du gardien, qui n’est pas en cause.