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CA Chambéry, 2e ch., 24 octobre 2024, n° 22/00700

CHAMBÉRY

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CA Chambéry n° 22/00700

24 octobre 2024

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Jeudi 24 Octobre 2024

N° RG 22/00700 - N° Portalis DBVY-V-B7G-G7BP

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ANNECY en date du 16 Mars 2022, RG 20/00788

Appelant

M. [G] [S]

né le 03 Novembre 1952 à [Localité 8] (MAROC), demeurant [Adresse 4]

Représenté par la SELARL FRANCINA AVOCATS, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

Intimées

Mme [T] [E]

née le 10 Juin 1976 à [Localité 5], demeurant [Adresse 3]

Représentée par Me Celia ROUSSEY, avocat au barreau d'ANNECY

S.A.R.L. DEFIM - CASAM EXPERTISES dont le siège social est sis [Adresse 2] - prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Evelyne LACORDAIRE, avocat au barreau de CHAMBERY

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COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 25 juin 2024 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière présente à l'appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré ,

Et lors du délibéré, par :

- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente

- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,

- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

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EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte notarié du 20 décembre 2017, M. [G] [S] a acquis de Mme [T] [E], au prix de 254 400 euros, un local à usage de bureau (lot 26), un parking double P24-25 (lot 45) et un parking simple P26 (lot 46) au sein de la copropriété '[Adresse 7]' située [Adresse 1] et [Adresse 6] à [Localité 5].

L'appartement acquis était équipé d'une chaudière à gaz. Un diagnostic annexé à l'acte de vente, établi par la Sarl Defim-Casam Expertises le 1er février 2017, attestait de la conformité de l'installation.

Un litige est ultérieurement né entre les parties, M. [S] se plaignant de défauts concernant la chaudière et de l'impossibilité d'user du parking double P24-25 (lot 45) pour y stationner 2 véhicules.

C'est dans ces conditions que, par actes des 27 et 30 juillet 2020, M. [S] a fait assigner Mme [E] et la Sarl Defim-Casam Expertises devant le tribunal judiciaire en vue d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices.

Par jugement contradictoire du 16 mars 2022, le tribunal judiciaire d'Annecy a :

- rejeté l'exception de nullité de l'assignation,

- débouté M. [G] [S] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné M. [G] [S] à payer à Mme [E] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [G] [S] à payer à la Sarl Defim-Casam Expertises la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [G] [S] aux entiers dépens de l'instance.

Par acte du 21 avril 2022, M. [S] a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 17 mai 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [S] demande à la cour de :

- infirmer dans son intégralité le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

- condamner in solidum Mme [E] et la Sarl Defim-Casam Expertises à lui payer la somme de 2 781, 07 euros à titre des dommages et intérêts correspondant au remboursement des frais de remplacement de la chaudière,

- condamner Mme [E] à lui payer la somme de 15 000 euros à titre des dommages et intérêts correspondant au prix de la place de parking manquante,

- condamner Mme [E] à lui payer la somme de 2 000 euros à titre des dommages et intérêts pour mauvaise foi et déloyauté,

- condamner in solidum Mme [E] et la Sarl Defim-Casam Expertises à lui payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum Mme [E] et la Sarl Defim-Casam Expertises aux entiers dépens, y compris ceux de première instance, dont distraction au profit de la Selarl Francina avocat, représentée par Me Francina, sur son affirmation de droit.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 11 octobre 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la Sarl Defim-Casam Expertises demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- déclarer irrecevable la demande formée par M. [S] à son encontre, en application de l'article 564 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire,

- rejeter la demande formée par M. [S] à son encontre en l'absence de toute faute délictuelle dans l'élaboration de son diagnostic,

En tout état de cause,

- condamner M. [S] à lui verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le même aux entiers dépens de l'instance.

* Mme [E] a constitué avocat le 9 mai 2022.

Toutefois, par ordonnance du 6 avril 2023, le conseiller de la mise en état de la 2ème section de la chambre civile de la cour d'appel de Chambéry a déclaré irrecevable comme tardive les conclusions transmises au soutien de ses intérêts.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande dirigée contre Sarl Defim-Casam Expertises

L'article 564 du code de procédure civile prévoit, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, que les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

L'article 565 du même code précise toutefois que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

En l'espèce, la Sarl Defim-Casam Expertises excipe de l'irrecevabilité de la demande indemnitaire dirigée contre elle par M. [S] en ce que cette demande, fondée sur la garantie des vices cachés en première instance, s'avère articulée à hauteur d'appel sur la responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle de l'entreprise.

Or, il échet de constater que la nature de la demande, quoique articulée autour d'un moyen nouveau, demeure identique de sorte que la Sarl Defim-Casam Expertises n'est pas fondée à relever l'irrecevabilité de celle-ci.

Sur la demande indemnitaire présentée au titre de l'emplacement de parking double P24-25 (lot 45)

Selon l'article 1604 du code civil, l'obligation de délivrance conforme constitue le devoir, pour le vendeur, de transporter la chose convenue avec l'acquéreur en sa puissance et possession, ce dernier n'étant aucunement tenu d'accepter une chose différente de celle qu'il a commandé.

Par ailleurs, en vertu des dispositions des articles 1641 et 1642 du code civil, le vendeur est garant des vices cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui en diminuent tellement l'usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus.

Il appartient à l'acquéreur d'établir l'existence d'un défaut inhérent à la chose vendue, étant rappelé que seul un défaut de nature à affecter gravement l'usage de la chose peut justifier la mise en 'uvre de la garantie. De plus, l'acheteur doit rapporter la preuve du caractère occulte du défaut et de son antériorité au transfert des risques, le vendeur n'étant pas tenu des vices apparents dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

Dans l'hypothèse où l'existence d'un vice caché antérieur à la vente est retenu, l'article 1644 du code civil offre la possibilité à l'acheteur d'opter pour l'exercice d'une action rédhibitoire ou estimatoire.

M. [S] soutient en l'espèce, à titre principal, que Mme [E] a manqué à son obligation de délivrance conforme en cédant le bien immobilier qui lui appartenait en ce que l'emplacement référencé P24-P25, constituant le lot 45, ne permet le stationnement que d'un seul véhicule.

Il résulte, d'une part, de l'acte de vente notarié et, d'autre part, des plans annexés que l'acquéreur acquiert au titre du lot 45 'au deuxième étage du bâtiment, à l'air libre sur la dalle du 1er étage, un parking double P24 et P25', lesdites places étant individualisées et matérialisées sur le plan annexé à l'acte de vente.

Or, il s'avère constant que l'emplacement litigieux ne permet le stationnement que d'un seul véhicule, Mme [E] ayant notamment sollicité de ce fait le syndic de copropriété par courrier du 25 avril 2012 en vue de faire modifier l'état descriptif de division en minorant le nombre de tantièmes attachés à ce lot.

Aussi donc, faute pour la venderesse d'appeler l'attention de l'acheteur, au moyen de toute mention utile dans le compromis de vente et/ou dans l'acte notarié subséquent, force est de constater que M. [S] pouvait légitimement s'attendre à pouvoir stationner 2 véhicules sur le lot 45 au regard de sa désignation de sorte que la venderesse a manifestement manqué à son obligation de délivrance conforme lors de la cession du lot.

L'avis de valeur produit par M. [S] permet de fixer le prix d'un emplacement de parking, situé à l'adresse susvisée, à une valeur moyenne de 14 000 euros.

Dans ces conditions, Mme [E] doit être condamnée à lui verser cette somme.

Sur la demande indemnitaire présentée au titre de la défectuosité de la chaudière

Mettant en exergue la résiliation du contrat d'entretien par la société Engie Home Service selon courrier du 9 mai 2019, M. [S] excipe en premier lieu d'un manquement par la venderesse à son obligation de délivrance conforme et, subsidiairement, de la garantie des vices cachés attachée à la chaudière, tout en recherchant la responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle de la Sarl Defim-Casam Expertises laquelle a procédé au diagnostic de cet équipement préalablement à la signature du compromis de vente (rapport du 1er février 2017).

Il échet toutefois de constater que les trois défauts visés dans le courrier précité sont relatifs aux équipements communs de la copropriété ('alvéole technique gaz commune' et 'conduit de cheminée collectif') et ne s'avèrent corroborés par aucun élément d'ordre technique de nature étayer le courrier sommaire produit par l'appelant. Au surplus, aucun document normatif n'est visé ou produit pour justifier de la non-conformité ou du dysfonctionnement de l'installation. Aucun indice ne permet davantage de dater l'apparition du défaut allégué alors-même que deux périodes de chauffe (hiver 2017/2018 et hiver 2018/2019), et potentiellement deux périodes d'entretien, se écoulées entre la vente et le courrier susvisé.

Il est par ailleurs constant que la Sarl Defim-Casam Expertises était en charge de réaliser un diagnostic technique du chauffage équipant l'appartement vendu, sa mission n'étant pas étendue à l'ensemble de l'installation de la copropriété. Aucun manquement à un devoir spécifique d'information ou de conseil ne peut lui être demandé à ce titre.

Dès lors, M. [S] sera débouté de l'ensemble des demandes fondées sur la défectuosité de la chaudière.

Sur la demande indemnitaire présentée contre Mme [E] au titre d'un manquement au devoir de bonne foi et de loyauté dans la négociation

Au titre d'un manquement à son devoir de loyauté et de bonne foi dans la négociation, M. [S] sollicite la condamnation de Mme [E] à lui verser une somme complémentaire de 2 000 euros.

L'appelant ne justifie pour autant d'aucun préjudice distinct de celui réparé par la condamnation de Mme [E] à lui payer la somme de 14 000 euros pour le manquement à son obligation de délivrance conforme, étant précisé que M. [S] a été débouté de ses demandes relatives à la défectuosité de la chaudière.

Dans ces conditions, il y a lieu de le débouter de sa demande d'indemnisation complémentaire.

Sur les demandes annexes

Mme [E], qui succombe en principal, est condamnée aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la Selarl Francina avocat s'agissant des frais dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

Mme [E] est en outre condamnée à verser la somme de 2 000 euros à M. [S] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [S], qui succombe en ses demandes dirigées contre la Sarl Defim-Casam Expertises, est condamné à lui verser 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,

Réforme partiellement la décision déférée mais statuant à nouveau sur le tout pour davantage de clarté,

Rejette l'exception d'irrecevabilité soulevée par la Sarl Defim-Casam Expertises,

Condamne Mme [T] [E] à payer la somme de 14 000 euros à M. [G] [S] au titre de l'absence de délivrance conforme du lot 45 cédé selon acte notarié du 20 décembre 2017,

Déboute M. [G] [S] du surplus de ses demandes indemnitaires,

Condamne Mme [T] [E] aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la Selarl Francina avocat s'agissant des frais dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision,

Condamne Mme [T] [E] à payer la somme de 2 000 euros à M. [G] [S] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [G] [S] à payer la somme de 2 000 euros à la Sarl Defim-Casam Expertises au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi prononcé publiquement le 24 octobre 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.

La Greffière La Présidente

Co pies : 24/10/2024

la SELARL FRANCINA AVOCATS

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Me Celia ROUSSEY

Me Evelyne LACORDAIRE

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