Décisions
CA Aix-en-Provence, ch. 1-5, 10 octobre 2024, n° 21/07814
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-5
ARRÊT AU FOND
DU 10 OCTOBRE 2024
qc
N° 2024/ 320
Rôle N° RG 21/07814 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHQTL
[Y] [B]
[H] [V] épouse [B]
C/
[U] [K]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
SELARL LX AIX EN PROVENCE
Me Philippe BRUZZO
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de proximité de FREJUS en date du 30 Novembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 11-18-1227.
APPELANTS
Monsieur [Y] [B]
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Marine CHARPENTIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Rémy CERESIANI de l'ASSOCIATION D'AVOCATS MASCARAS CERESIANI - LES AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Madame [H] [V] épouse [B]
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Marine CHARPENTIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Rémy CERESIANI de l'ASSOCIATION D'AVOCATS MASCARAS CERESIANI - LES AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIME
Monsieur [U] [K]
demeurant [Adresse 2] (AUTRICHE)
représenté par Me Philippe BRUZZO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
substituée par Raphaël ESCONDEUR, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 11 Juin 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Marc MAGNON, Président
Madame Patricia HOARAU, Conseiller
Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2024,
Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
[Y] [B] et [H] [V] épouse [B] sont propriétaires d'un bien à usage d'habitation situé dans le lotissement [Adresse 3] à [Localité 4]. [U] [K] est quant à lui propriétaire d'un bien immobilier situé en contrebas.
Soutenant subir une perte de vue liée à la hauteur des végétaux provenant de sa propriété, [Y] [B] et [H] [V] épouse [B] l'ont fait assigner par acte du 21 novembre 2018 devant le tribunal de proximité de Fréjus.
Par décision du 30 novembre 2020, le tribunal de proximité de Fréjus a débouté les époux [B] de leurs demandes, débouté M.[K] de ses demandes reconventionnelles et condamné les époux [B] aux dépens.
Pour statuer en ce sens le tribunal a considéré que l'article 13 du règlement du lotissement ne prescrit aucune règle relative à la hauteur des plantations, que la règle prévue au titre des plantations concerne les nouvelles plantations et non celles préexistantes, que sur la base du cahier des charges il n'est pas démontré par les époux [B] que les haies en limite séparative sont de nature à obstruer la vue mer, que sur le fondement du trouble anormal du voisinage la vue mer depuis la propriété [B] est lointaine et limitée indépendamment de la végétation, que s'agissant de la demande reconventionnelle aucun abus d'ester en justice n'est démontré.
Par acte du 26 mai 2021 [Y] [B] et [H] [V] épouse [B] ont interjeté appel de la décision.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 mai 2024 [Y] [B] et [H] [V] épouse [B] demandent à la cour sur le fondement des articles 544 et 651 du Code Civil, de l'article 13 du règlement du lotissement, de l'article 13.3 du cahier des charges de:
REFORMER le jugement du Tribunal de Proximité de FREJUS du 30 décembre 2020 en ses dispositions ayant :
- débouté les époux [B] de l'ensemble de leurs demandes,
- condamné les époux [B] aux dépens.
CONDAMNER Monsieur [U] [G] [K] à rabattre les arbres et arbustes obstruant la vue mer et notamment :
- les branches basses du pin parasol,
- un faux poivrier, des figuiers, des mimosas,
- des oliviers et des cyprès,
- des sujets à palmes plantés autour des palmiers,
- des sujets à grandes palmes.
et ce sous astreinte d'une somme de 100 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir.
ET Si Besoin avant dire droit
DESIGNER tel expert qu'il plaira à la Cour de nommer avec pour mission :
- venir sur les lieux,
- prendre connaissance des actes et pièces des parties,
- comptabiliser les arbres et arbustes co-plantés sur le fonds [K],
- préciser la date de plantation des arbres et arbustes,
- déterminer quels sont les arbres et arbustes co-plantés sur le fonds [K] obstruant la vue mer des époux [B],
- donner au Tribunal tous éléments permettant aux époux [B] de récupérer la vue mer,
- de tout dresser pré-rapport et rapport.
EN TOUT ETAT DE CAUSE,
CONDAMNER Monsieur [U] [G] [K] à régler à Monsieur et Madame [B] une somme de 8 000 € au visa de l'article 700 du CPC.
CONDAMNER Monsieur [U] [G] [K] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Romain CHERFILS, Membre de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, Avocats associés, aux offres de droit.
[Y] [B] et [H] [V] épouse [B] font valoir :
- que dès leur acquisition en 1995 le bien possédait une vue mer ;
- que selon le constat d'huissier du 16 juin 2021, cette vue a disparu,
- que M.[K] a acquis son lot en 2014, que depuis les constats d'Huissier d'août 2015, d'avril 2017, d'août 2018 et de juin 2021 démontrent l'évolution incessante de la végétation non entretenue sur le fonds [K] ;
- qu'ils ont fait réaliser leur maison par un architecte renommé, avec un objectif très précis afin qu'elle profite de larges ouvertures sur la mer environnante tout en se fermant du voisinage immédiat pour préserver l'intimité ;
- que cet architecte conçoit des maisons dites d'Architecte Naturelle en relation directe avec la Nature et les paysages.
- que la vue sur la mer est un élément particulièrement important pour eux en ce qu'ils ont fait de cette vue un point culminant de leur construction.
- que le trouble est particulièrement caractérisé ;
- que s'il est vrai qu'il n'existe pas de droit à la vue mer, celle-ci constitue un attrait essentiel de cette zone d'habitation dans laquelle sont implantées les constructions ;
- que les témoins et les professionnels de l'immobilier affirment que la création de l'écran végétal opaque entraîne une réelle perte de l'intérêt et de la valeur de leur propriété ;
- que concernant l'article 13 du règlement du lotissement, les propriétaires s'engagent à maintenir sur leurs terrains une densité minimale d'un arbre à haute futaie par are de superficie, et compte tenu de la faible pente du domaine, les propriétaires doivent éviter de planter des arbres susceptibles de gêner les « vues mer » de leur voisin en amont.
- que concernant l'article 13.3 du cahier des charges ils démontrent que la haie co-plantée sur le fonds [K] est d'une hauteur supérieure à 2 mètres.
Par décision du 5 mai 2023, le conseiller de la mise en état a déclaré [U] [K], assigné à personne et qui a constitué avocat, irrecevable à conclure.
En application des dispositions de l'article 469 du code de procédure civile l'arrêt sera qualifié de contradictoire.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 mai 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les demandes principales
[Y] [B] et [H] [V] épouse [B] invoquent trois fondements au soutien de leurs demandes, soit au titre du règlement du lotissement, au titre de l'article 13-3 du cahier des charges et au titre du trouble anormal du voisinage.
L'article 13 du règlement du lotissement indique que « les arbres existants sur les lots, à l'exception de ceux dont la réalisation des constructions entraînera l'abattage, devront être obligatoirement conservés. Les arbres abattus devront immédiatement être remplacés à raison d'un pour un. Les propriétaires des lots devront maintenir ou planter sur leur terrain une densité minimum de 1 arbre à haute futaie par are de superficie. Les plantations devront être réalisées au plus tard à la saison la plus favorable qui suivra la fin des travaux de construction. Compte tenu des faibles pentes du domaine les propriétaires éviteront de planter des arbres susceptibles de gêner les vues mer éventuelles de leurs voisins en amont ».
Il s'évince de la rédaction de ce paragraphe que les propriétaires du lotissement sont tenus de conserver les arbres existants, de garantir une implantation minimale de végétaux sur leurs lots, de préserver la vue mer, mais sans qu'aucune disposition ne soit imposée ou opposable au titre de la hauteur des arbres, de l'élagage des arbres existants ou nouveaux.
Les appelants ne rapportent pas la preuve que les arbres litigieux aient été plantés depuis l'acquisition de [U] [K] en décembre 2014 et seraient donc soumis aux restrictions fixées par le règlement. Au contraire le constat d'huissier réalisé à leur demande dès le 26 août 2015 démontre que la végétation etait déjà présente sur le lot de l'intimé, et que les arbres par leurs hauteurs ne peuvent résolument avoir été plantés en décembre 2014.
Ce moyen est donc inopérant pour considérer que la densité de végétation présente sur le fonds de l'intimé méconnaisse les prescriptions du règlement du lotissement.
L'article 13-3 du cahier des charges du lotissement prévoit notamment que les haies qui seraient implantées par les colotis, de façon à former écran avec les lots voisins, ne pourront par leur hauteur (limitée à 2 mètres) priver de la vue les constructions avoisinantes.
Comme l'a relevé le premier juge, l'obstruction alléguée par les demandeurs sur la base des constats d'huissiers qu'ils ont fait réaliser depuis leur fonds les 26 août 2015, 5 avril 2017, 22 août 2018, 15 mai 2020 et 16 juin 2020 ne permettent pas de caractériser que les haies méconnaissent les dispositions de cet article et présenteraient une hauteur supérieure à deux mètres. Ces haies au demeurant basses ne peuvent être considérées comme obstruant la vue mer. Ce moyen sera également rejeté.
Enfin sur le fondement du trouble anormal du voisinage, il est admis que nul ne doit causer à autrui un trouble de voisinage, que si l'article 544 du code civil confère le droit de jouir « de la manière la plus absolue » des choses dont on est propriétaire, leur usage ne peut cependant s'exercer en contrariété des lois et règlements, ni être source pour la propriété d'autrui, bénéficiant des mêmes prérogatives, d'un dommage excédant les inconvénients normaux du voisinage ; l'anormalité s'apprécie en fonction des circonstances locales, doit revêtir une gravité certaine et être établie par celui qui s'en prévaut.
S'agissant d'un régime de responsabilité autonome, fondé sur un fait objectif à l'exclusion de toute faute ou négligence, les dispositions de l'article 1240, lui sont inapplicables.
Les photographies émanant des constats d'huissiers permettent de constater que le bien des appelants se situe loin de la mer, en position élevée, dans un secteur comprenant plusieurs habitations entourées de végétation hétérogène comprenant des arbres, des arbustes, des haies, différentes plantations .
L'implantation de la maison retenue par l'architecte pour optimiser le cadrage des ouvertures avec la vue mer ne signifie pas que celle-ci disposait d'une vue panoramique sur la mer, en tenant compte de la présence de végétaux sur les parcelles, telle que prescrite par le règlement du lotissement.
Or celle-ci demeure en dépit de la présence des arbres sur le fonds litigieux, comme cela résulte des photographies versées aux débats.
Par ailleurs, les appelants ne rapportent pas la preuve que la vue mer dont ils disposent depuis la construction en 1995 a diminué depuis l'acquisition de la parcelle de l'intimé en 2014, les attestations produites en ce sens ne permettant pas d'étayer précisément l'étendue de la vue revendiquée.
Ainsi, les appelants ne peuvent justifier d'un droit acquis immuable à une vue panoramique vers la mer compte tenu de la configuration des lieux en hauteur dans un secteur urbanisé, nécessitant de maintenir une végétation dense, et en retrait d'un autre fonds, et ce alors même qu'ils disposent d'une vue mer partielle.
Les appelants sollicitent désormais l'organisation d'une mesure d'expertise aux fins de comptabiliser le nombre d'arbres plantés sur le fonds voisin et de procéder à leurs datations. En application des dispositions de l'article 146 du code de procédure civile la mesure d'expertise n'est pas destinée à suppléer la carence des parties. Compte tenu des pièces qu'ils ont en mesure de produire et qui conduisent la Cour à disposer de suffisamment d'éléments objectifs de la situation des lieux, il n'apparaît pas nécessaire de recourir à ce type de mesure. La demande sera rejetée.
En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties ; il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur ce point.
Sur les demandes accessoires
En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement dans ses dispositions concernant les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.
[Y] [B] et [H] [V] épouse [B] qui succombent seront condamnés aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant,
Déboute [Y] [B] et [H] [V] épouse [B] de leur demande d'expertise ;
Condamne [Y] [B] et [H] [V] épouse [B] aux entiers dépens d'appel ;
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Chambre 1-5
ARRÊT AU FOND
DU 10 OCTOBRE 2024
qc
N° 2024/ 320
Rôle N° RG 21/07814 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHQTL
[Y] [B]
[H] [V] épouse [B]
C/
[U] [K]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
SELARL LX AIX EN PROVENCE
Me Philippe BRUZZO
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de proximité de FREJUS en date du 30 Novembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 11-18-1227.
APPELANTS
Monsieur [Y] [B]
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Marine CHARPENTIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Rémy CERESIANI de l'ASSOCIATION D'AVOCATS MASCARAS CERESIANI - LES AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Madame [H] [V] épouse [B]
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Marine CHARPENTIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Rémy CERESIANI de l'ASSOCIATION D'AVOCATS MASCARAS CERESIANI - LES AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIME
Monsieur [U] [K]
demeurant [Adresse 2] (AUTRICHE)
représenté par Me Philippe BRUZZO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
substituée par Raphaël ESCONDEUR, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 11 Juin 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Marc MAGNON, Président
Madame Patricia HOARAU, Conseiller
Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2024,
Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
[Y] [B] et [H] [V] épouse [B] sont propriétaires d'un bien à usage d'habitation situé dans le lotissement [Adresse 3] à [Localité 4]. [U] [K] est quant à lui propriétaire d'un bien immobilier situé en contrebas.
Soutenant subir une perte de vue liée à la hauteur des végétaux provenant de sa propriété, [Y] [B] et [H] [V] épouse [B] l'ont fait assigner par acte du 21 novembre 2018 devant le tribunal de proximité de Fréjus.
Par décision du 30 novembre 2020, le tribunal de proximité de Fréjus a débouté les époux [B] de leurs demandes, débouté M.[K] de ses demandes reconventionnelles et condamné les époux [B] aux dépens.
Pour statuer en ce sens le tribunal a considéré que l'article 13 du règlement du lotissement ne prescrit aucune règle relative à la hauteur des plantations, que la règle prévue au titre des plantations concerne les nouvelles plantations et non celles préexistantes, que sur la base du cahier des charges il n'est pas démontré par les époux [B] que les haies en limite séparative sont de nature à obstruer la vue mer, que sur le fondement du trouble anormal du voisinage la vue mer depuis la propriété [B] est lointaine et limitée indépendamment de la végétation, que s'agissant de la demande reconventionnelle aucun abus d'ester en justice n'est démontré.
Par acte du 26 mai 2021 [Y] [B] et [H] [V] épouse [B] ont interjeté appel de la décision.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 mai 2024 [Y] [B] et [H] [V] épouse [B] demandent à la cour sur le fondement des articles 544 et 651 du Code Civil, de l'article 13 du règlement du lotissement, de l'article 13.3 du cahier des charges de:
REFORMER le jugement du Tribunal de Proximité de FREJUS du 30 décembre 2020 en ses dispositions ayant :
- débouté les époux [B] de l'ensemble de leurs demandes,
- condamné les époux [B] aux dépens.
CONDAMNER Monsieur [U] [G] [K] à rabattre les arbres et arbustes obstruant la vue mer et notamment :
- les branches basses du pin parasol,
- un faux poivrier, des figuiers, des mimosas,
- des oliviers et des cyprès,
- des sujets à palmes plantés autour des palmiers,
- des sujets à grandes palmes.
et ce sous astreinte d'une somme de 100 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir.
ET Si Besoin avant dire droit
DESIGNER tel expert qu'il plaira à la Cour de nommer avec pour mission :
- venir sur les lieux,
- prendre connaissance des actes et pièces des parties,
- comptabiliser les arbres et arbustes co-plantés sur le fonds [K],
- préciser la date de plantation des arbres et arbustes,
- déterminer quels sont les arbres et arbustes co-plantés sur le fonds [K] obstruant la vue mer des époux [B],
- donner au Tribunal tous éléments permettant aux époux [B] de récupérer la vue mer,
- de tout dresser pré-rapport et rapport.
EN TOUT ETAT DE CAUSE,
CONDAMNER Monsieur [U] [G] [K] à régler à Monsieur et Madame [B] une somme de 8 000 € au visa de l'article 700 du CPC.
CONDAMNER Monsieur [U] [G] [K] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Romain CHERFILS, Membre de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, Avocats associés, aux offres de droit.
[Y] [B] et [H] [V] épouse [B] font valoir :
- que dès leur acquisition en 1995 le bien possédait une vue mer ;
- que selon le constat d'huissier du 16 juin 2021, cette vue a disparu,
- que M.[K] a acquis son lot en 2014, que depuis les constats d'Huissier d'août 2015, d'avril 2017, d'août 2018 et de juin 2021 démontrent l'évolution incessante de la végétation non entretenue sur le fonds [K] ;
- qu'ils ont fait réaliser leur maison par un architecte renommé, avec un objectif très précis afin qu'elle profite de larges ouvertures sur la mer environnante tout en se fermant du voisinage immédiat pour préserver l'intimité ;
- que cet architecte conçoit des maisons dites d'Architecte Naturelle en relation directe avec la Nature et les paysages.
- que la vue sur la mer est un élément particulièrement important pour eux en ce qu'ils ont fait de cette vue un point culminant de leur construction.
- que le trouble est particulièrement caractérisé ;
- que s'il est vrai qu'il n'existe pas de droit à la vue mer, celle-ci constitue un attrait essentiel de cette zone d'habitation dans laquelle sont implantées les constructions ;
- que les témoins et les professionnels de l'immobilier affirment que la création de l'écran végétal opaque entraîne une réelle perte de l'intérêt et de la valeur de leur propriété ;
- que concernant l'article 13 du règlement du lotissement, les propriétaires s'engagent à maintenir sur leurs terrains une densité minimale d'un arbre à haute futaie par are de superficie, et compte tenu de la faible pente du domaine, les propriétaires doivent éviter de planter des arbres susceptibles de gêner les « vues mer » de leur voisin en amont.
- que concernant l'article 13.3 du cahier des charges ils démontrent que la haie co-plantée sur le fonds [K] est d'une hauteur supérieure à 2 mètres.
Par décision du 5 mai 2023, le conseiller de la mise en état a déclaré [U] [K], assigné à personne et qui a constitué avocat, irrecevable à conclure.
En application des dispositions de l'article 469 du code de procédure civile l'arrêt sera qualifié de contradictoire.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 mai 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les demandes principales
[Y] [B] et [H] [V] épouse [B] invoquent trois fondements au soutien de leurs demandes, soit au titre du règlement du lotissement, au titre de l'article 13-3 du cahier des charges et au titre du trouble anormal du voisinage.
L'article 13 du règlement du lotissement indique que « les arbres existants sur les lots, à l'exception de ceux dont la réalisation des constructions entraînera l'abattage, devront être obligatoirement conservés. Les arbres abattus devront immédiatement être remplacés à raison d'un pour un. Les propriétaires des lots devront maintenir ou planter sur leur terrain une densité minimum de 1 arbre à haute futaie par are de superficie. Les plantations devront être réalisées au plus tard à la saison la plus favorable qui suivra la fin des travaux de construction. Compte tenu des faibles pentes du domaine les propriétaires éviteront de planter des arbres susceptibles de gêner les vues mer éventuelles de leurs voisins en amont ».
Il s'évince de la rédaction de ce paragraphe que les propriétaires du lotissement sont tenus de conserver les arbres existants, de garantir une implantation minimale de végétaux sur leurs lots, de préserver la vue mer, mais sans qu'aucune disposition ne soit imposée ou opposable au titre de la hauteur des arbres, de l'élagage des arbres existants ou nouveaux.
Les appelants ne rapportent pas la preuve que les arbres litigieux aient été plantés depuis l'acquisition de [U] [K] en décembre 2014 et seraient donc soumis aux restrictions fixées par le règlement. Au contraire le constat d'huissier réalisé à leur demande dès le 26 août 2015 démontre que la végétation etait déjà présente sur le lot de l'intimé, et que les arbres par leurs hauteurs ne peuvent résolument avoir été plantés en décembre 2014.
Ce moyen est donc inopérant pour considérer que la densité de végétation présente sur le fonds de l'intimé méconnaisse les prescriptions du règlement du lotissement.
L'article 13-3 du cahier des charges du lotissement prévoit notamment que les haies qui seraient implantées par les colotis, de façon à former écran avec les lots voisins, ne pourront par leur hauteur (limitée à 2 mètres) priver de la vue les constructions avoisinantes.
Comme l'a relevé le premier juge, l'obstruction alléguée par les demandeurs sur la base des constats d'huissiers qu'ils ont fait réaliser depuis leur fonds les 26 août 2015, 5 avril 2017, 22 août 2018, 15 mai 2020 et 16 juin 2020 ne permettent pas de caractériser que les haies méconnaissent les dispositions de cet article et présenteraient une hauteur supérieure à deux mètres. Ces haies au demeurant basses ne peuvent être considérées comme obstruant la vue mer. Ce moyen sera également rejeté.
Enfin sur le fondement du trouble anormal du voisinage, il est admis que nul ne doit causer à autrui un trouble de voisinage, que si l'article 544 du code civil confère le droit de jouir « de la manière la plus absolue » des choses dont on est propriétaire, leur usage ne peut cependant s'exercer en contrariété des lois et règlements, ni être source pour la propriété d'autrui, bénéficiant des mêmes prérogatives, d'un dommage excédant les inconvénients normaux du voisinage ; l'anormalité s'apprécie en fonction des circonstances locales, doit revêtir une gravité certaine et être établie par celui qui s'en prévaut.
S'agissant d'un régime de responsabilité autonome, fondé sur un fait objectif à l'exclusion de toute faute ou négligence, les dispositions de l'article 1240, lui sont inapplicables.
Les photographies émanant des constats d'huissiers permettent de constater que le bien des appelants se situe loin de la mer, en position élevée, dans un secteur comprenant plusieurs habitations entourées de végétation hétérogène comprenant des arbres, des arbustes, des haies, différentes plantations .
L'implantation de la maison retenue par l'architecte pour optimiser le cadrage des ouvertures avec la vue mer ne signifie pas que celle-ci disposait d'une vue panoramique sur la mer, en tenant compte de la présence de végétaux sur les parcelles, telle que prescrite par le règlement du lotissement.
Or celle-ci demeure en dépit de la présence des arbres sur le fonds litigieux, comme cela résulte des photographies versées aux débats.
Par ailleurs, les appelants ne rapportent pas la preuve que la vue mer dont ils disposent depuis la construction en 1995 a diminué depuis l'acquisition de la parcelle de l'intimé en 2014, les attestations produites en ce sens ne permettant pas d'étayer précisément l'étendue de la vue revendiquée.
Ainsi, les appelants ne peuvent justifier d'un droit acquis immuable à une vue panoramique vers la mer compte tenu de la configuration des lieux en hauteur dans un secteur urbanisé, nécessitant de maintenir une végétation dense, et en retrait d'un autre fonds, et ce alors même qu'ils disposent d'une vue mer partielle.
Les appelants sollicitent désormais l'organisation d'une mesure d'expertise aux fins de comptabiliser le nombre d'arbres plantés sur le fonds voisin et de procéder à leurs datations. En application des dispositions de l'article 146 du code de procédure civile la mesure d'expertise n'est pas destinée à suppléer la carence des parties. Compte tenu des pièces qu'ils ont en mesure de produire et qui conduisent la Cour à disposer de suffisamment d'éléments objectifs de la situation des lieux, il n'apparaît pas nécessaire de recourir à ce type de mesure. La demande sera rejetée.
En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties ; il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur ce point.
Sur les demandes accessoires
En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement dans ses dispositions concernant les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.
[Y] [B] et [H] [V] épouse [B] qui succombent seront condamnés aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant,
Déboute [Y] [B] et [H] [V] épouse [B] de leur demande d'expertise ;
Condamne [Y] [B] et [H] [V] épouse [B] aux entiers dépens d'appel ;
LE GREFFIER LE PRESIDENT