Décisions
CA Paris, Pôle 5 - ch. 6, 23 octobre 2024, n° 22/14914
PARIS
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRAN'AISE
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2024
(n° , 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/14914 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGJQC
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Juillet 2022 - tribunal judiciaire de Bobigny - chambre 7 section 1 - RG n° 19/04051
APPELANTS
Monsieur [T] [O]
[Adresse 2]
[Localité 6]
Madame [M], [Y], [K] [X] épouse [O]
[Adresse 2]
[Localité 6]
S.C.I. ERTIVEL
[Adresse 7]
[Localité 10]
N°SIRET : 521 403 824
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentés Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de Paris, toque : K0065 Ayant pour avocat plaidant Me Clémentine DELMAS de la SELARL DELMAS ET ZURETTI AVOCATS, avocat au barreau de Meaux, toque : 97
INTIMÉE
S.A. CREDIT LOGEMENT
[Adresse 4]
[Localité 8]
N°SIRET : B 302 493 275
agissant poursuites et diligences de son directeur général domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Marie-hélène DUJARDIN, avocat au barreau de Paris, toque : D2153
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 09 Septembre 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Marc BAILLY, président de chambre
M. Vincent BRAUD, président de chambre
Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère chargée du rapport
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.
* * * * *
PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 8 août 2022 M. [T] [O], Mme [M] [X] épouse [O], et la société civile immobilière Ertivel, ont ensemble interjeté appel du jugement du tribunal judiciaire de Bobigny rendu le 7 juillet 2022 dans l'instance les opposant à la société Crédit Logement, et dont le dispositif est ainsi rédigé :
'Déclare recevable l'action engagée par la société Crédit Logement,
Dit que les actes de cautionnements de M. [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O] sont opposables par la société Crédit Logement,
Condamne solidairement la société ERTIVEL, M. [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O] à payer à la société Crédit Logement la somme de 172 831,54 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2019, dans la limite de la somme de 115 439,97 euros s'agissant de M. [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O],
Déboute la société Crédit Logement de sa demande de dommages et intérêts,
Déboute Monsieur [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O] de leur demande de dommages et intérêts,
Condamne solidairement la société ERTIVEL, M. [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O] à payer à la société Crédit Logement la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire,
Condamne solidairement la société ERTIVEL, M. [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O] à payer les dépens de l'instance, dont distraction au profit de Maître Alain CIEOL, avocat,
Rejette le surplus de toutes autres demandes.'
***
À l'issue de la procédure d'appel clôturée le 2 juillet 2024 les prétentions des parties s'exposent de la manière suivante.
Au dispositif de leurs dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 14 juin 2024, les appelants
présentent, en ces termes, leurs demandes à la cour :
'Vu les articles L. 332-1, L. 341-1 et L. 137-2 du Code de la consommation ;
Vu les articles 2293, 1343-5 du Code Civil ;
Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Vu les pièces versées aux débats ;
DECLARER recevables et bien fondés les appelants en leur recours,
Y faisant droit,
INFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté la société CREDIT LOGEMENT de sa demande de dommages et intérêts.
Statuant à nouveau,
DECLARER irrecevable parce que prescrite l'action de la société CREDIT LOGEMENT et ainsi la déclarer irrecevable en ses demandes ;
DEBOUTER la société CREDIT LOGEMENT de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
EXONERER les appelants de toute condamnation ;
JUGER que l'engagement de caution de Monsieur [T] [O] et de Madame [M] [O] était disproportionné au regard de leurs biens et revenus lors de la conclusion de l'acte de cautionnement le 3 juillet 2010 ;
JUGER et CONSTATER la décharge totale de l'engagement de caution de Monsieur [T] [O] et de Madame [M] [O] en garantie des engagements de la SCI ERTIVEL ;
JUGER que la société CREDIT LOGEMENT a incontestablement manqué à son obligation de devoir de conseil auprès des époux [O] ;
CONDAMNER la société CREDIT LOGEMENT à verser à Monsieur [O] [T] la somme de 1 500 € de dommages et intérêts pour son attitude causant un préjudice certain à M. [O] [T] ;
CONDAMNER la société CREDIT LOGEMENT à verser à Madame [O] [M] la
somme de 1 500 € de dommages et intérêts pour son attitude causant un préjudice certain à Mme [O] [M] ;
DECLARER nulles et non avenues la mise en demeure et la déchéance du terme du crédit par la BNP PARIBAS ;
A titre subsidiaire,
DECLARER forclose la société CREFIT LOGEMENT en ses prétentions fondées sur la quittance subrogative de 2014 ;
A titre infiniment subsidiaire,
DECLARER la dette de la SCI ERTIVEL auprès de la société CREDIT LOGEMENT à la
somme de 265 487,10 euros à la date du 10 décembre 2018 ;
JUGER que la société CREDIT LOGEMENT est déchue de son droit à intérêt car elle n'a pas respecté son obligation d'information annuelle de la caution ;
JUGER et LIMITER l'engagement de caution des époux [O] au 2/3 de la dette de la SCI ERTIVEL ;
JUGER et ACCORDER les plus larges délais de paiement à la SCI ERTIVEL, aux époux
[O] pour s'acquitter des montants mis à leur charge si la Cour d'Appel de Céans
devait rentrer en voie de condamnation à leur encontre ;
JUGER que l'échéance mensuelle de remboursement ne pourra pas excéder la somme de 300 euros / mois sur 23 mois, que la 24e échéance soldera le montant des condamnations ;
En tout état de cause,
CONDAMNER la société CREDIT LOGEMENT à verser aux époux [O] la somme
de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
CONDAMNER la société CREDIT LOGEMENT aux entiers dépens de la présente instance
d'appel.'
Au dispositif de ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 26 juin 2024, l'intimé
présente, en ces termes, ses demandes à la cour :
'Il est demandé à la Cour,
Vu le jugement rendu le 07/07/2022 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY,
Vu les articles 73, 74, 907 du Code de Procédure Civile
Vu les articles 2305 anciens et suivants du Code Civil,
De confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté le CREDIT LOGEMENT de sa demande de dommages et intérêts,
Et en conséquence,
JUGER la société CREDIT LOGEMENT recevable et bien fondée en ses demandes,
En conséquence,
CONDAMNER solidairement la société 'SCI ERTIVEL', Monsieur [T] [O] et Madame [M] [Y] [K] [X] épouse [O] à lui payer les sommes suivantes :
173 159,95 € montant de sa créance arrêtée au 22/07/2019, outre les intérêts au taux légal depuis la date du règlement par la société Crédit Logement, jusqu'à parfait paiement, et pour ce qui concerne Monsieur [T] [O] et Madame [M] [Y] [K] [X] épouse [O], dans la limite de la somme de 115 439,97 correspondant à 2/3 de la dette de la société SCI ERTIVEL.
Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté le CREDIT LOGEMENT de sa demande de
dommages et intérêts et ce faisant, les condamner à payer :
- 1.000,00 Euros, à titre de dommages et intérêts, sur le fondement de l'article 2305 al.3 ancien du Code Civil,
- 2.000,00 Euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux
entiers dépens,
Débouter purement et simplement la société 'SCI ERTIVEL', Monsieur [T] [O] et Madame [M] [Y] [K] [X] épouse [O] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
En tout état de cause, dire qu'à défaut par la société 'SCI ERTIVEL', Monsieur [T]
[O] et Madame [M] [Y] [K] [X] épouse [O] de respecter l'échéancier qui pourrait lui être accordé, la déchéance du terme interviendra, l'ensemble des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible, et la Société CREDIT LOGEMENT pourra reprendre l'exécution forcée du recouvrement de sa créance sans autres formalités.'
Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs conclusions précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
Suivant offre préalable émise le 18 juin 2010 et acceptée le 3 juillet suivant par l'emprunteur, la société BNP Paribas a consenti à la société civile immobilière Ertivel un prêt d'un montant de 325 000 euros destiné à financer l'acquisition avec travaux d'une maison à usage locatif, située [Adresse 5] (Seine-et-Marne). Ce prêt d'une durée de 22 ans a été stipulé au taux d'intérêt conventionnel fixe de 4,13 % l'an, et remboursable en 24 mensualités de 1 118,54 euros comportant intérêts et prime d'assurance, suivies de 240 mensualités de 2 073,02 euros chacune.
Par acte sous seing privé en date du 6 mai 2010, la société Crédit logement s'est portée caution de la société civile immobilière Ertivel à l'égard de la banque BNP Paribas au titre de ce prêt.
Par acte sous seing privé du 3 juillet 2010, M. [T] [O] et Mme [M] [X] épouse [O] se sont ensemble portés caution solidaire de la société civile immobilière Ertivel dans la limite de la somme de 422 500 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard, et pour la durée de 24 ans.
Selon quittance du 6 octobre 2014, la société BNP Paribas a reçu de la société Crédit logement la somme de 11 170 ,09 euros correspondant aux échéances du 7 février 2014 au 7 juillet 2014 (715,27 euros pour la première, 2 073,02 euros pour les suivantes, outre 89,72 euros de pénalités de retard).
Par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 11 mai 2018, la banque a envoyé à la société civile immobilière Ertivel et à chacun des époux [O], en se référant à un 'arrêt rendu le 23 mars 2018 par la Cour d'appel de Paris', une mise en demeure de lui régler, sous quinzaine, la somme de 34 974,30 euros au titre d'échéances restant impayées.
Puis par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 5 octobre 2018, la société BNP Paribas a prononcé la déchéance du terme, et mis en demeure la société civile immobilière Ertivel et chacun des époux [O] de lui régler sans délai la somme de 297 210,76 euros (43 264,62 euros au titre des échéances du 7 janvier 2017 au 7 septembre 2018, et intérêts de retard pour un montant de 2 449,81 euros, et 251 496,33 euros de capital restant dû).
Par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 18 septembre 2018 et du 29 octobre 2018, la société Crédit logement a informé la société civile immobilière Ertivel et chacun des époux [O] être intégralement subrogée dans les droits du prêteur initial et les a mis en demeure de lui rembourser les sommes payées pour leur compte.
Par courrier du 19 novembre 2018 la société civile immobilière Ertivel et MMme [O] ont avisé la société Crédit logement de ce qu'ils contestaient son intervention, au motif qu'il ne serait pas justifié de la subrogation de la société Crédit logement dans les droits du prêteur, et, se prévalant de 'procédures judiciaires toujours en cours', en raison des 'nombreux litiges' les opposant à la société BNP Paribas concernant notamment la déchéance du terme prononcée par la banque, l'imputation de leurs paiements, et 'la validité des actes de cautionnement'.
Selon quittance du 30 novembre 2018, la société BNP Paribas a reçu de la société Crédit logement la somme de 297 210,76 euros correspondant aux échéances du 7 janvier 2017 au 7 septembre 2018 (1 813,02 euros pour la première, 2 073,02 euros pour les suivantes) outre 2 449,81 euros d'intérêts de retard et un capital restant dû de 251 496,33 euros.
Sur cette somme MMme [O] effectueront plusieurs réglements entre les mains de la société Crédit logement ramenant leur dette à la somme de 173 159,95 euros selon décompte arrêté au 22 juillet 2019.
******
Les moyens et prétentions des parties sont à l'identique de ceux soumis au juge de première instance.
Sur la disproportion
En droit (selon les dispositions de l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 du code de la consommation) un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était lors de sa conclusion manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution au moment où celle-ci est appelée ne lui permette de faire face à son obligation.
La proportionnalité du cautionnement s'appréciera donc au 3 juillet 2010 date de l'engagement de caution de M. [T] [O] et Mme [M] [X] donné en garantie du prêt immobilier d'un montant de 325 000 euros consenti par la société BNP Paribas à la société civile immobilière Ertivel le 3 juillet 2010 en vue de financer l'acquisition d'une maison à usage locatif. Ce cautionnement a été souscrit dans la limite de la somme de 422 500 euros et pour la durée de 24 ans.
La preuve de la disproportion et de son caractère manifeste incombe alors à la caution, et non pas à la banque.
Pour exclure que l'engagement soit disproportionné le tribunal après avoir rappelé qu'en l'espèce, M. [T] [O] et Mme [M] [X] sont mariés sous le régime de la communauté, en sorte que l'ensemble de leur patrimoine et revenus doit être considéré pour l'appréciation de la proportionnalité du cautionnement critiqué, consenti à hauteur d'un montant de 422 500 euros, se réfère, à raison, à la synthèse déclarative du 8 mai 2010 dont il ressort notamment que MMme [O] percevaient à eux deux 86 040 euros de revenus dont 33 120 euros de revenus locatifs (étant propriétaires de deux appartements) soit 7 170 euros par mois.
À ces revenus s'ajoute la valeur des parts sociales et la créance en compte courant d'associé dont sont titulaires les cautions au sein de la société débitrice (ils ne joignent aucune pièce mais font état de parts sociales de 180 euros) et d'un bien immobilier de 270 000 euros dont un emprunt à déduire de 290 000 euros (soit - 19 820 euros) alors que leurs charges annuelles comprennent deux emprunts immobiliers et un emprunt à la consommation d'un montant de 24 818 euros soit 2 068 euros par mois.
MMme [O] ne déclarent aucune épargne en liquidités, mais leur patrimoine immobilier est constitué de deux appartements (d'une valeur brute de 480 000 euros pour l'un, et de 200 000 euros pour l'autre) et d'une maison (d'une valeur brute de 150 000 euros) soit un total de 830 000 euros, dont il convient de déduire l'encours de crédits existants soit 341 800 euros, en sorte que la valeur nette de leur patrimoine immobilier s'élève à 488 000 euros, sous réserve d'une décote pour logement occupé à appliquer (en fonction de paramètres non foumis). Par conséquent, les cautions disposent d'un patrimoine qui reste supérieur à leurs engagements dans la limite de la somme de 422 500 euros.
Il est de principe que la banque est en droit de se fier aux éléments recueillis sans être tenue de faire de vérification complémentaire dès lors que, comme au cas présent, la fiche de renseignements patrimoniale ne révèle en soi aucune anomalie ou incohérence, et en ce cas la caution déclarante n'est pas fondée à se prévaloir de revenus ou de charges qui seraient d'une autre réalité.
Pour seule critique de la décision les appelants présentent des écritures confuses, évoquant pêle mêle le 'devoir de conseil' de la société Crédit Logement et une disproportion manifeste de l'engagement de caution critiqué (...) évoquant tout à la fois obligation d'information, devoir de mise en garde, obligation de conseil, et s'abstenant de claire différenciation entre situation financière de la caution au jour de sa signature / au moment de l'appel en paiement. En définitive, les appelants ne livrent rien de probant ni convaincant pour contredire utilement les motifs du jugement, qui au demeurant sont à approuver comme exacts en droits et appropriés en faits.
La société Crédit logement souligne que les cautions omettent de prendre en compte la valeur des parts sociales de la société civile immobilière Ertivel et se gardent de communiquer la réalité de l'étendue de leur patrimoine, étant propriétaires de parts sociales dans plusieurs sociétés civiles immobilières.
Néanmoins il ressort des écritures mêmes de la société Crédit logement que les sociétés civiles immobilières citées ont été créées postérieurement au cautionnement, qui est du 3 juillet 2010, hormis la société civile immobilière Lys sise [Adresse 1] à [Localité 9], créée en mars 2004, au capital de 1 000 euros, dans laquelle M. [O] détient 150 parts sociales sur un total de 1 000 parts, société propriétaire d'un bien situé [Adresse 3] à [Localité 10] d'une superficie totale de 664 m² dont un immeuble composé de sept logements - ces divers points n'étant pas discutés par MMme [O].
Ainsi, les développements de la société Crédit logement pour leur essentiel importeraient seulement s'il fallait évaluer la capacité de la caution à s'acquitter de sa dette au jour où elle est appelée en paiement ce qui n'est pas le cas ici puisqu'aucune disproportion n'est mise en évidence au jour de la signature du cautionnement.
Il résulte de ces divers éléments que MMme [O] ne rapportent pas la preuve, qui leur incombe, de l'existence d'une disproportion manifeste du cautionnement critiqué, consenti à hauteur de 422 500 euros, eu égard à leurs patrimoine et revenus.
Le jugement est donc confirmé en ce que le tribunal est entré en voie de condamnation à l'égard de MMme [O], à ce titre.
Sur le recours de la société Crédit Logement
1- Le jugement déféré énonce que MMme [O] contestent à la société Crédit Logement le droit d'exercer son recours personnel au motif qu'elle fait preuve de déloyauté auprès de la société civile immobilière Ertivel en ne soulevant pas les exceptions dont elle avait connaissance et en privant celle-ci de sa faculté de contester les prétentions de la banque avant que ses biens ou liquidités ne soient bloqués. En cause d'appel MMme [O] se contentent en une seule phrase d'affirmer que 'L'exercice par la société Crédit Logement de son recours personnel, a porté préjudice aux personnes physiques [O] (...) par le 'manquement fautif commis par la société Crédit logement'.
L'article 2310 du code civil dispose que 'Lorsque plusieurs personnes ont cautionné un même débiteur pour une même dette, la caution qui a acquitté la dette, a recours contre les autres cautions, chacune pour sa part et portion ; Mais ce recours n'a lieu que lorsque la caution a payé dans l'un des cas énoncés en l'article précédent'.
Le recours entre cofidéjusseurs fondé sur l'article 2310 du code civil s'analyse en un recours personnel comparable à celui institué par l'article 2305 du même code.
Il est de principe que la caution est libre d'exercer ce recours personnel dès lors qu'elle a effectué le paiement entre les mains du créancier aux lieu et place de son cofidéjusseur, ainsi qu'il résulte de la quittance alors établie - en l'espèce celles du 6 octobre 2014 et du 30 novembre 2018.
Comme jugé par le tribunal MMme [O] ne caractérisent pas en quoi la société Crédit logement exerçant son recours aurait eu un comportement fautif leur portant préjudice.
Le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef.
2- Le recours entre cofidéjusseurs fondé sur l'article 2310 du code civil étant un recours personnel, la caution agissant sur ce fondement ne peut se voir opposer les fautes du prêteur dans la conclusion ou l'exécution du contrat de prêt, tel que le font MMme [O] se prévalant de l'irrégularité du prononcé de la déchéance du terme ' qui selon eux résulterait de l'irrégularité de la mise en demeure en date du 11 mai 2018 qui n'est pas intervenue en suite d'une défaillance de l'emprunteur au sens du paragraphe 'définition et conséquence de la défaillance' des conditions générales du prêt mais relève de l'exécution d'une décision de justice.
Au surplus, et comme relevé par le tribunal, la déchéance du terme est intervenue régulièrement : la société Crédit Logement produit au débat les mises en demeure préalables à la déchéance du terme envoyées par la banque à la société civile immobilière Ertivel et aux deux cautions ainsi que leurs accusés de réception, en suite de l'arrêt rendu à leur encontre les déboutant de l'intégralité de leurs demandes, mais en l'absence de réglement, ainsi que cela résulte d'un décompte adressé par la société BNP Paribas à la société Crédit logement ainsi que du courrier simple que la société Crédit logement a adressé à MMme [O] avant son règlement à la banque.
3- Le tribunal a exactement retenu que selon 2310 du code civil, lorsque plusieurs personnes ont cautionné un même débiteur pour une même dette, la caution qui a acquitté la dette, a un recours contre les autres cautions, dans la mesure où son propre paiement a excédé sa propre part de caution.
Entre cofidéjusseurs s'étant engagés à couvrir toute la dette, ce qui est précisément le cas d'espèce, le recours s'opèrera par parts viriles, en l'absence de dispositions conventionnelles spécifiques contraires.
Le jugement déféré ne peut qu'être confirmé en ce que le tribunal a jugé qu'en l'espèce il y a lieu de condamner solidairement la société Ertivel, M. [T] [O] et Mme [M] [X] épouse [O] à payer à la société Crédit Logement la somme de 172 831,54 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2019, dans la limite de la somme de 115 439,97 euros s'agissant de MMme [O].
Sur le défaut d'information des cautions
'À titre infiniment subsidiaire' MMme [O] demandent à la cour de juger que la société Crédit logement doit être déchue de son droit aux intérêts pour ne pas avoir respecté son obligation d'information annuelle à l'égard de la caution.
Le tribunal a retenu quant au manquement invoqué sur le fondement des articles 2293 du code civil et L. 341-l ancien du code de la consommation, que la société Crédit logement justifie de l'envoi par la banque, de lettres d'information des 16 février 2012, 12 février 2013, 11 février 2014, et d'une lettre du 24 mars 2014, par laquelle elle informait la société civile immobilière Ertivel de la déchéance du terme et de sa demande en paiement, si bien que le moyen tiré du défaut d'information par le créancier doit être rejeté.
Les appelants maintiennent qu'en référence aux dispositions des articles 2293 du code civil, L. 341-1 ancien du code de la consommation, L. 313-22 du code monétaire et financier, en l'espèce 'ni la BNP Paribas, ni le Crédit logement n'apportent la preuve du respect des dispositions susvisées ', et que c'est donc à tort que le premier juge a retenu que la société Crédit logement justifiait de l'envoi par la banque de lettres d'information. Par conséquent, la société Crédit logement doit être déboutée de ses demandes relatives aux intérêts de retard et autres frais réclamés à MMme [O].
Sur ce,
En droit, MMme [O] ne sont pas fondés à opposer à leur cofidéjusseur, la société Crédit logement, caution qui a payé, l'exception tirée du non respect par la banque de son obligation d'information annuelle due à la caution. En effet, ces obligations du prêteur à l'égard de la caution quant à l'évolution du montant de la dette, visent à permettre à la caution d'intervenir avant que celle-ci n'enfle exagérément, quitte à exercer ensuite le recours qui lui appartiendra à l'égard du débiteur principal. À l'égard de tiers, dont font partie les cofidéjusseurs, les cautions recherchées en paiement ne peuvent se prévaloir de tels manquements, s'agissant d'une exception qui leur est personnelle.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce que MMme [O] ont été déboutés de leur demande de déchéance, mais par des motifs substitués à ceux du premier juge.
Sur la demande en paiement de la société Crédit Logement
Sur la prescription
C'est à bon droit que le tribunal a considéré que la prescription applicable en l'espèce est nécessairement quinquennale, puisque la prescription biennale prévue par le code de la consommation ne profite qu'au consommateur personne physique, ce que n'est manifestement pas une société civile immobilière. De plus, contrairement à ce que soutiennent les appelants le caractère 'familial' de la société civile immobilière Ertivel n'ôte rien au fait qu'il ne s'agit pas d'un consommateur, ce qui emporte son exclusion des dispositions protectrices du code de la consommation, qui en droit, bénéficient, comme indiqué par le tribunal, aux seules personnes physiques.
Par conséquent, les appelants ne peuvent valablement soutenir que, le délai courant à compter du paiement, l'action serait prescrite pour la demande de la société Crédit logement fondée sur la quittance subrogative du 6 octobre 2014 puisque la société Crédit logement aurait dû agir dans les deux années qui ont suivi, soit avant le 6 octobre 2016, pour une assignation délivrée le 21 mars 2019.
Aussi, la société Crédit logement, à la requête de laquelle l'assignation a été délivrée par actes du 21 et 29 mars 2019, n'est pas prescrite en son action au regard de ses propres paiements intervenus le 6 octobre 2014 et le 30 novembre 2018, soit dans le délai de cinq ans précédant l'assignation.
Au surplus, le tribunal a, encore à raison, retenu que MMme [O] ont effectué des règlements, interruptifs de prescription, tel qu'il ressort du décompte du 22 juillet 2019 mentionnant en particulier un virement de 112 000 euros le 19 juillet 2019.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a dit l'action de Crédit logement non prescrite.
Sur le fond
Le tribunal relève que par les pièces justificatives idoines, notamment les quittances subrogatives, la société Crédit logement justifie avoir payé au prêteur :
- le 6 octobre 2014, la somme de 11 170,09 euros au titre des échéances du 7 février 2014 au7 juillet 2014 et des pénalités de retard,
- le 30 novembre 2018, la somme de 297 210,76 euros au titre des échéances du 7 janvier 2017 au 7 septembre 2018 et des pénalités de retard,
et que la société Crédit logement a droit en outre aux intérêts au taux légal à compter du jour de leur paiement.
Les appelants opposent que la quittance subrogative du 30 novembre 2018 est erronée, pour ne pas tenir compte des onze versements de la société civile immobilière Ertivel du 5 janvier 2017 au 7 février 2018, de 1 577,97 euros chacun, soit un montant total de 16 344,54 euros qui devra être imputé sur la somme de 172 831,54 euros réclamée par la société Crédit logement.
Pourtant, le tribunal a, exactement, retenu s'agissant des onze versements faits à la banque et dont la société Crédit logement n'aurait pas tenu compte, que la banque n'étant pas dans la cause il n'est pas possible aux appelants de solliciter l'imputation finale de cette somme à leur crédit.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce que la somme due à la société Crédit logement s'élève à 172 831,54 euros (déduction des frais de procédure de 328,41 euros) avec intérêt au taux légal à compter du 22 juillet 2019 dans la limite de la somme de 115 439,97 euros s'agissant de MMme [O] correspondant au 2/3 de la dette de la société civile immobilière Ertivel.
Sur la demande de dommages et intérêts de la société Crédit Logement
Le jugement déféré énonce que la société Crédit Logement n'apporte pas, à l'appui de sa demande de dommages et intérêts, la preuve d'un préjudice distinct du retard apporté au paiement de la créance, qui lui aurait été causé par la faute de la société civile immobilière Ertivel, ou/et de MMme [O].
Encore en appel, la société Crédit logement fait valoir que l'attitude de la société civile immobilière Ertivel, et de MMme [O], lui a causé un préjudice complémentaire, et l'a contrainte à engager des démarches rendues nécessaires par l'obstruction du débiteur à rembourser sa dette.
Ce disant la société Crédit logement ne caractérise pas mieux qu'en première instance, le préjudice dont elle sollicite réparation. Le jugement déféré sera donc confirmé également de ce chef.
Sur la demande de délais de paiement
Les appelants demandent à la cour de leur accorder les plus larges délais de paiement pour s'acquitter des montants mis à leur charge si la cour devait rentrer en voie de condamnation à leur encontre, de juger que l'échéance mensuelle de remboursement ne pourra pas excéder la somme de 300 euros / mois sur 23 mois, que la 24e échéance soldera le montant des condamnations. Ils expliquent avoir justifié de l'intégralité de leur patrimoine et revenus actuels. MMme [O] se disent de bonne foi et indiquent qu'ils ont cinq enfants à charge. Ils s'engagent en cas de retour à meilleur fortune à solder leur dette en priorité.
En vertu de l'article 1343-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Tel aménagement de la dette n'est envisageable que si son montant le permet eu égard aux facultés contributives du débiteur et si les propositions faites pour son apurement permettent à celui-ci de s'en acquitter dans le respect des droits du créancier. En outre, l'octroi d'un délai de paiement qui n'est pas de plein droit ne peut bénéficier qu'au débiteur de bonne foi.
La société Crédit logement souligne que MMme [O] ont déjà profité, du fait de la longueur de la procédure, d'un délai de paiement supérieur à deux années.
Surtout, MMme [O] sont encore à ce jour propriétaires immobiliers, et limitant à 300 euros par mois le montant de la somme qu'ils offrent de payer à leur créancier, ne font pas de proposition sérieuse de réglement de leur dette.
En l'état la demande de délai de paiement de MMme [O] et de la société civile immobilière Ertivel ne peut qu'être rejetée.
°°°°°
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Les appelants, partie qui succombe, supporteront la charge des dépens et ne peuvent prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche pour des raisons tenant à l'équité il y a lieu de faire droit à la demande de la société Crédit logement formulée sur ce même fondement pour la somme réclamée, de 2 000 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant dans les limites de l'appel,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Et y ajoutant :
DÉBOUTE M. [T] [O], Mme [M] [X] épouse [O], et la société civile immobilière Ertivel, de leur demande de délai de paiement ;
CONDAMNE in solidum M. [T] [O], Mme [M] [X] épouse [O], et la société civile immobilière Ertivel à payer à la société Crédit logement la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à raison des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
DÉBOUTE M. [T] [O], Mme [M] [X] épouse [O], et la société civile immobilière Ertivel de leur propre demande formulée sur ce même fondement ;
CONDAMNE M. [T] [O], Mme [M] [X] épouse [O], et la société civile immobilière Ertivel aux entiers dépens d'appel.
* * * * * *
Le greffier Le Président
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2024
(n° , 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/14914 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGJQC
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Juillet 2022 - tribunal judiciaire de Bobigny - chambre 7 section 1 - RG n° 19/04051
APPELANTS
Monsieur [T] [O]
[Adresse 2]
[Localité 6]
Madame [M], [Y], [K] [X] épouse [O]
[Adresse 2]
[Localité 6]
S.C.I. ERTIVEL
[Adresse 7]
[Localité 10]
N°SIRET : 521 403 824
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentés Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de Paris, toque : K0065 Ayant pour avocat plaidant Me Clémentine DELMAS de la SELARL DELMAS ET ZURETTI AVOCATS, avocat au barreau de Meaux, toque : 97
INTIMÉE
S.A. CREDIT LOGEMENT
[Adresse 4]
[Localité 8]
N°SIRET : B 302 493 275
agissant poursuites et diligences de son directeur général domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Marie-hélène DUJARDIN, avocat au barreau de Paris, toque : D2153
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 09 Septembre 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Marc BAILLY, président de chambre
M. Vincent BRAUD, président de chambre
Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère chargée du rapport
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.
* * * * *
PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 8 août 2022 M. [T] [O], Mme [M] [X] épouse [O], et la société civile immobilière Ertivel, ont ensemble interjeté appel du jugement du tribunal judiciaire de Bobigny rendu le 7 juillet 2022 dans l'instance les opposant à la société Crédit Logement, et dont le dispositif est ainsi rédigé :
'Déclare recevable l'action engagée par la société Crédit Logement,
Dit que les actes de cautionnements de M. [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O] sont opposables par la société Crédit Logement,
Condamne solidairement la société ERTIVEL, M. [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O] à payer à la société Crédit Logement la somme de 172 831,54 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2019, dans la limite de la somme de 115 439,97 euros s'agissant de M. [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O],
Déboute la société Crédit Logement de sa demande de dommages et intérêts,
Déboute Monsieur [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O] de leur demande de dommages et intérêts,
Condamne solidairement la société ERTIVEL, M. [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O] à payer à la société Crédit Logement la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire,
Condamne solidairement la société ERTIVEL, M. [T] [O] et Mme [X] [M] épouse [O] à payer les dépens de l'instance, dont distraction au profit de Maître Alain CIEOL, avocat,
Rejette le surplus de toutes autres demandes.'
***
À l'issue de la procédure d'appel clôturée le 2 juillet 2024 les prétentions des parties s'exposent de la manière suivante.
Au dispositif de leurs dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 14 juin 2024, les appelants
présentent, en ces termes, leurs demandes à la cour :
'Vu les articles L. 332-1, L. 341-1 et L. 137-2 du Code de la consommation ;
Vu les articles 2293, 1343-5 du Code Civil ;
Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Vu les pièces versées aux débats ;
DECLARER recevables et bien fondés les appelants en leur recours,
Y faisant droit,
INFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté la société CREDIT LOGEMENT de sa demande de dommages et intérêts.
Statuant à nouveau,
DECLARER irrecevable parce que prescrite l'action de la société CREDIT LOGEMENT et ainsi la déclarer irrecevable en ses demandes ;
DEBOUTER la société CREDIT LOGEMENT de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
EXONERER les appelants de toute condamnation ;
JUGER que l'engagement de caution de Monsieur [T] [O] et de Madame [M] [O] était disproportionné au regard de leurs biens et revenus lors de la conclusion de l'acte de cautionnement le 3 juillet 2010 ;
JUGER et CONSTATER la décharge totale de l'engagement de caution de Monsieur [T] [O] et de Madame [M] [O] en garantie des engagements de la SCI ERTIVEL ;
JUGER que la société CREDIT LOGEMENT a incontestablement manqué à son obligation de devoir de conseil auprès des époux [O] ;
CONDAMNER la société CREDIT LOGEMENT à verser à Monsieur [O] [T] la somme de 1 500 € de dommages et intérêts pour son attitude causant un préjudice certain à M. [O] [T] ;
CONDAMNER la société CREDIT LOGEMENT à verser à Madame [O] [M] la
somme de 1 500 € de dommages et intérêts pour son attitude causant un préjudice certain à Mme [O] [M] ;
DECLARER nulles et non avenues la mise en demeure et la déchéance du terme du crédit par la BNP PARIBAS ;
A titre subsidiaire,
DECLARER forclose la société CREFIT LOGEMENT en ses prétentions fondées sur la quittance subrogative de 2014 ;
A titre infiniment subsidiaire,
DECLARER la dette de la SCI ERTIVEL auprès de la société CREDIT LOGEMENT à la
somme de 265 487,10 euros à la date du 10 décembre 2018 ;
JUGER que la société CREDIT LOGEMENT est déchue de son droit à intérêt car elle n'a pas respecté son obligation d'information annuelle de la caution ;
JUGER et LIMITER l'engagement de caution des époux [O] au 2/3 de la dette de la SCI ERTIVEL ;
JUGER et ACCORDER les plus larges délais de paiement à la SCI ERTIVEL, aux époux
[O] pour s'acquitter des montants mis à leur charge si la Cour d'Appel de Céans
devait rentrer en voie de condamnation à leur encontre ;
JUGER que l'échéance mensuelle de remboursement ne pourra pas excéder la somme de 300 euros / mois sur 23 mois, que la 24e échéance soldera le montant des condamnations ;
En tout état de cause,
CONDAMNER la société CREDIT LOGEMENT à verser aux époux [O] la somme
de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
CONDAMNER la société CREDIT LOGEMENT aux entiers dépens de la présente instance
d'appel.'
Au dispositif de ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 26 juin 2024, l'intimé
présente, en ces termes, ses demandes à la cour :
'Il est demandé à la Cour,
Vu le jugement rendu le 07/07/2022 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY,
Vu les articles 73, 74, 907 du Code de Procédure Civile
Vu les articles 2305 anciens et suivants du Code Civil,
De confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté le CREDIT LOGEMENT de sa demande de dommages et intérêts,
Et en conséquence,
JUGER la société CREDIT LOGEMENT recevable et bien fondée en ses demandes,
En conséquence,
CONDAMNER solidairement la société 'SCI ERTIVEL', Monsieur [T] [O] et Madame [M] [Y] [K] [X] épouse [O] à lui payer les sommes suivantes :
173 159,95 € montant de sa créance arrêtée au 22/07/2019, outre les intérêts au taux légal depuis la date du règlement par la société Crédit Logement, jusqu'à parfait paiement, et pour ce qui concerne Monsieur [T] [O] et Madame [M] [Y] [K] [X] épouse [O], dans la limite de la somme de 115 439,97 correspondant à 2/3 de la dette de la société SCI ERTIVEL.
Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté le CREDIT LOGEMENT de sa demande de
dommages et intérêts et ce faisant, les condamner à payer :
- 1.000,00 Euros, à titre de dommages et intérêts, sur le fondement de l'article 2305 al.3 ancien du Code Civil,
- 2.000,00 Euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux
entiers dépens,
Débouter purement et simplement la société 'SCI ERTIVEL', Monsieur [T] [O] et Madame [M] [Y] [K] [X] épouse [O] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
En tout état de cause, dire qu'à défaut par la société 'SCI ERTIVEL', Monsieur [T]
[O] et Madame [M] [Y] [K] [X] épouse [O] de respecter l'échéancier qui pourrait lui être accordé, la déchéance du terme interviendra, l'ensemble des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible, et la Société CREDIT LOGEMENT pourra reprendre l'exécution forcée du recouvrement de sa créance sans autres formalités.'
Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs conclusions précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
Suivant offre préalable émise le 18 juin 2010 et acceptée le 3 juillet suivant par l'emprunteur, la société BNP Paribas a consenti à la société civile immobilière Ertivel un prêt d'un montant de 325 000 euros destiné à financer l'acquisition avec travaux d'une maison à usage locatif, située [Adresse 5] (Seine-et-Marne). Ce prêt d'une durée de 22 ans a été stipulé au taux d'intérêt conventionnel fixe de 4,13 % l'an, et remboursable en 24 mensualités de 1 118,54 euros comportant intérêts et prime d'assurance, suivies de 240 mensualités de 2 073,02 euros chacune.
Par acte sous seing privé en date du 6 mai 2010, la société Crédit logement s'est portée caution de la société civile immobilière Ertivel à l'égard de la banque BNP Paribas au titre de ce prêt.
Par acte sous seing privé du 3 juillet 2010, M. [T] [O] et Mme [M] [X] épouse [O] se sont ensemble portés caution solidaire de la société civile immobilière Ertivel dans la limite de la somme de 422 500 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard, et pour la durée de 24 ans.
Selon quittance du 6 octobre 2014, la société BNP Paribas a reçu de la société Crédit logement la somme de 11 170 ,09 euros correspondant aux échéances du 7 février 2014 au 7 juillet 2014 (715,27 euros pour la première, 2 073,02 euros pour les suivantes, outre 89,72 euros de pénalités de retard).
Par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 11 mai 2018, la banque a envoyé à la société civile immobilière Ertivel et à chacun des époux [O], en se référant à un 'arrêt rendu le 23 mars 2018 par la Cour d'appel de Paris', une mise en demeure de lui régler, sous quinzaine, la somme de 34 974,30 euros au titre d'échéances restant impayées.
Puis par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 5 octobre 2018, la société BNP Paribas a prononcé la déchéance du terme, et mis en demeure la société civile immobilière Ertivel et chacun des époux [O] de lui régler sans délai la somme de 297 210,76 euros (43 264,62 euros au titre des échéances du 7 janvier 2017 au 7 septembre 2018, et intérêts de retard pour un montant de 2 449,81 euros, et 251 496,33 euros de capital restant dû).
Par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 18 septembre 2018 et du 29 octobre 2018, la société Crédit logement a informé la société civile immobilière Ertivel et chacun des époux [O] être intégralement subrogée dans les droits du prêteur initial et les a mis en demeure de lui rembourser les sommes payées pour leur compte.
Par courrier du 19 novembre 2018 la société civile immobilière Ertivel et MMme [O] ont avisé la société Crédit logement de ce qu'ils contestaient son intervention, au motif qu'il ne serait pas justifié de la subrogation de la société Crédit logement dans les droits du prêteur, et, se prévalant de 'procédures judiciaires toujours en cours', en raison des 'nombreux litiges' les opposant à la société BNP Paribas concernant notamment la déchéance du terme prononcée par la banque, l'imputation de leurs paiements, et 'la validité des actes de cautionnement'.
Selon quittance du 30 novembre 2018, la société BNP Paribas a reçu de la société Crédit logement la somme de 297 210,76 euros correspondant aux échéances du 7 janvier 2017 au 7 septembre 2018 (1 813,02 euros pour la première, 2 073,02 euros pour les suivantes) outre 2 449,81 euros d'intérêts de retard et un capital restant dû de 251 496,33 euros.
Sur cette somme MMme [O] effectueront plusieurs réglements entre les mains de la société Crédit logement ramenant leur dette à la somme de 173 159,95 euros selon décompte arrêté au 22 juillet 2019.
******
Les moyens et prétentions des parties sont à l'identique de ceux soumis au juge de première instance.
Sur la disproportion
En droit (selon les dispositions de l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 du code de la consommation) un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était lors de sa conclusion manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution au moment où celle-ci est appelée ne lui permette de faire face à son obligation.
La proportionnalité du cautionnement s'appréciera donc au 3 juillet 2010 date de l'engagement de caution de M. [T] [O] et Mme [M] [X] donné en garantie du prêt immobilier d'un montant de 325 000 euros consenti par la société BNP Paribas à la société civile immobilière Ertivel le 3 juillet 2010 en vue de financer l'acquisition d'une maison à usage locatif. Ce cautionnement a été souscrit dans la limite de la somme de 422 500 euros et pour la durée de 24 ans.
La preuve de la disproportion et de son caractère manifeste incombe alors à la caution, et non pas à la banque.
Pour exclure que l'engagement soit disproportionné le tribunal après avoir rappelé qu'en l'espèce, M. [T] [O] et Mme [M] [X] sont mariés sous le régime de la communauté, en sorte que l'ensemble de leur patrimoine et revenus doit être considéré pour l'appréciation de la proportionnalité du cautionnement critiqué, consenti à hauteur d'un montant de 422 500 euros, se réfère, à raison, à la synthèse déclarative du 8 mai 2010 dont il ressort notamment que MMme [O] percevaient à eux deux 86 040 euros de revenus dont 33 120 euros de revenus locatifs (étant propriétaires de deux appartements) soit 7 170 euros par mois.
À ces revenus s'ajoute la valeur des parts sociales et la créance en compte courant d'associé dont sont titulaires les cautions au sein de la société débitrice (ils ne joignent aucune pièce mais font état de parts sociales de 180 euros) et d'un bien immobilier de 270 000 euros dont un emprunt à déduire de 290 000 euros (soit - 19 820 euros) alors que leurs charges annuelles comprennent deux emprunts immobiliers et un emprunt à la consommation d'un montant de 24 818 euros soit 2 068 euros par mois.
MMme [O] ne déclarent aucune épargne en liquidités, mais leur patrimoine immobilier est constitué de deux appartements (d'une valeur brute de 480 000 euros pour l'un, et de 200 000 euros pour l'autre) et d'une maison (d'une valeur brute de 150 000 euros) soit un total de 830 000 euros, dont il convient de déduire l'encours de crédits existants soit 341 800 euros, en sorte que la valeur nette de leur patrimoine immobilier s'élève à 488 000 euros, sous réserve d'une décote pour logement occupé à appliquer (en fonction de paramètres non foumis). Par conséquent, les cautions disposent d'un patrimoine qui reste supérieur à leurs engagements dans la limite de la somme de 422 500 euros.
Il est de principe que la banque est en droit de se fier aux éléments recueillis sans être tenue de faire de vérification complémentaire dès lors que, comme au cas présent, la fiche de renseignements patrimoniale ne révèle en soi aucune anomalie ou incohérence, et en ce cas la caution déclarante n'est pas fondée à se prévaloir de revenus ou de charges qui seraient d'une autre réalité.
Pour seule critique de la décision les appelants présentent des écritures confuses, évoquant pêle mêle le 'devoir de conseil' de la société Crédit Logement et une disproportion manifeste de l'engagement de caution critiqué (...) évoquant tout à la fois obligation d'information, devoir de mise en garde, obligation de conseil, et s'abstenant de claire différenciation entre situation financière de la caution au jour de sa signature / au moment de l'appel en paiement. En définitive, les appelants ne livrent rien de probant ni convaincant pour contredire utilement les motifs du jugement, qui au demeurant sont à approuver comme exacts en droits et appropriés en faits.
La société Crédit logement souligne que les cautions omettent de prendre en compte la valeur des parts sociales de la société civile immobilière Ertivel et se gardent de communiquer la réalité de l'étendue de leur patrimoine, étant propriétaires de parts sociales dans plusieurs sociétés civiles immobilières.
Néanmoins il ressort des écritures mêmes de la société Crédit logement que les sociétés civiles immobilières citées ont été créées postérieurement au cautionnement, qui est du 3 juillet 2010, hormis la société civile immobilière Lys sise [Adresse 1] à [Localité 9], créée en mars 2004, au capital de 1 000 euros, dans laquelle M. [O] détient 150 parts sociales sur un total de 1 000 parts, société propriétaire d'un bien situé [Adresse 3] à [Localité 10] d'une superficie totale de 664 m² dont un immeuble composé de sept logements - ces divers points n'étant pas discutés par MMme [O].
Ainsi, les développements de la société Crédit logement pour leur essentiel importeraient seulement s'il fallait évaluer la capacité de la caution à s'acquitter de sa dette au jour où elle est appelée en paiement ce qui n'est pas le cas ici puisqu'aucune disproportion n'est mise en évidence au jour de la signature du cautionnement.
Il résulte de ces divers éléments que MMme [O] ne rapportent pas la preuve, qui leur incombe, de l'existence d'une disproportion manifeste du cautionnement critiqué, consenti à hauteur de 422 500 euros, eu égard à leurs patrimoine et revenus.
Le jugement est donc confirmé en ce que le tribunal est entré en voie de condamnation à l'égard de MMme [O], à ce titre.
Sur le recours de la société Crédit Logement
1- Le jugement déféré énonce que MMme [O] contestent à la société Crédit Logement le droit d'exercer son recours personnel au motif qu'elle fait preuve de déloyauté auprès de la société civile immobilière Ertivel en ne soulevant pas les exceptions dont elle avait connaissance et en privant celle-ci de sa faculté de contester les prétentions de la banque avant que ses biens ou liquidités ne soient bloqués. En cause d'appel MMme [O] se contentent en une seule phrase d'affirmer que 'L'exercice par la société Crédit Logement de son recours personnel, a porté préjudice aux personnes physiques [O] (...) par le 'manquement fautif commis par la société Crédit logement'.
L'article 2310 du code civil dispose que 'Lorsque plusieurs personnes ont cautionné un même débiteur pour une même dette, la caution qui a acquitté la dette, a recours contre les autres cautions, chacune pour sa part et portion ; Mais ce recours n'a lieu que lorsque la caution a payé dans l'un des cas énoncés en l'article précédent'.
Le recours entre cofidéjusseurs fondé sur l'article 2310 du code civil s'analyse en un recours personnel comparable à celui institué par l'article 2305 du même code.
Il est de principe que la caution est libre d'exercer ce recours personnel dès lors qu'elle a effectué le paiement entre les mains du créancier aux lieu et place de son cofidéjusseur, ainsi qu'il résulte de la quittance alors établie - en l'espèce celles du 6 octobre 2014 et du 30 novembre 2018.
Comme jugé par le tribunal MMme [O] ne caractérisent pas en quoi la société Crédit logement exerçant son recours aurait eu un comportement fautif leur portant préjudice.
Le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef.
2- Le recours entre cofidéjusseurs fondé sur l'article 2310 du code civil étant un recours personnel, la caution agissant sur ce fondement ne peut se voir opposer les fautes du prêteur dans la conclusion ou l'exécution du contrat de prêt, tel que le font MMme [O] se prévalant de l'irrégularité du prononcé de la déchéance du terme ' qui selon eux résulterait de l'irrégularité de la mise en demeure en date du 11 mai 2018 qui n'est pas intervenue en suite d'une défaillance de l'emprunteur au sens du paragraphe 'définition et conséquence de la défaillance' des conditions générales du prêt mais relève de l'exécution d'une décision de justice.
Au surplus, et comme relevé par le tribunal, la déchéance du terme est intervenue régulièrement : la société Crédit Logement produit au débat les mises en demeure préalables à la déchéance du terme envoyées par la banque à la société civile immobilière Ertivel et aux deux cautions ainsi que leurs accusés de réception, en suite de l'arrêt rendu à leur encontre les déboutant de l'intégralité de leurs demandes, mais en l'absence de réglement, ainsi que cela résulte d'un décompte adressé par la société BNP Paribas à la société Crédit logement ainsi que du courrier simple que la société Crédit logement a adressé à MMme [O] avant son règlement à la banque.
3- Le tribunal a exactement retenu que selon 2310 du code civil, lorsque plusieurs personnes ont cautionné un même débiteur pour une même dette, la caution qui a acquitté la dette, a un recours contre les autres cautions, dans la mesure où son propre paiement a excédé sa propre part de caution.
Entre cofidéjusseurs s'étant engagés à couvrir toute la dette, ce qui est précisément le cas d'espèce, le recours s'opèrera par parts viriles, en l'absence de dispositions conventionnelles spécifiques contraires.
Le jugement déféré ne peut qu'être confirmé en ce que le tribunal a jugé qu'en l'espèce il y a lieu de condamner solidairement la société Ertivel, M. [T] [O] et Mme [M] [X] épouse [O] à payer à la société Crédit Logement la somme de 172 831,54 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2019, dans la limite de la somme de 115 439,97 euros s'agissant de MMme [O].
Sur le défaut d'information des cautions
'À titre infiniment subsidiaire' MMme [O] demandent à la cour de juger que la société Crédit logement doit être déchue de son droit aux intérêts pour ne pas avoir respecté son obligation d'information annuelle à l'égard de la caution.
Le tribunal a retenu quant au manquement invoqué sur le fondement des articles 2293 du code civil et L. 341-l ancien du code de la consommation, que la société Crédit logement justifie de l'envoi par la banque, de lettres d'information des 16 février 2012, 12 février 2013, 11 février 2014, et d'une lettre du 24 mars 2014, par laquelle elle informait la société civile immobilière Ertivel de la déchéance du terme et de sa demande en paiement, si bien que le moyen tiré du défaut d'information par le créancier doit être rejeté.
Les appelants maintiennent qu'en référence aux dispositions des articles 2293 du code civil, L. 341-1 ancien du code de la consommation, L. 313-22 du code monétaire et financier, en l'espèce 'ni la BNP Paribas, ni le Crédit logement n'apportent la preuve du respect des dispositions susvisées ', et que c'est donc à tort que le premier juge a retenu que la société Crédit logement justifiait de l'envoi par la banque de lettres d'information. Par conséquent, la société Crédit logement doit être déboutée de ses demandes relatives aux intérêts de retard et autres frais réclamés à MMme [O].
Sur ce,
En droit, MMme [O] ne sont pas fondés à opposer à leur cofidéjusseur, la société Crédit logement, caution qui a payé, l'exception tirée du non respect par la banque de son obligation d'information annuelle due à la caution. En effet, ces obligations du prêteur à l'égard de la caution quant à l'évolution du montant de la dette, visent à permettre à la caution d'intervenir avant que celle-ci n'enfle exagérément, quitte à exercer ensuite le recours qui lui appartiendra à l'égard du débiteur principal. À l'égard de tiers, dont font partie les cofidéjusseurs, les cautions recherchées en paiement ne peuvent se prévaloir de tels manquements, s'agissant d'une exception qui leur est personnelle.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce que MMme [O] ont été déboutés de leur demande de déchéance, mais par des motifs substitués à ceux du premier juge.
Sur la demande en paiement de la société Crédit Logement
Sur la prescription
C'est à bon droit que le tribunal a considéré que la prescription applicable en l'espèce est nécessairement quinquennale, puisque la prescription biennale prévue par le code de la consommation ne profite qu'au consommateur personne physique, ce que n'est manifestement pas une société civile immobilière. De plus, contrairement à ce que soutiennent les appelants le caractère 'familial' de la société civile immobilière Ertivel n'ôte rien au fait qu'il ne s'agit pas d'un consommateur, ce qui emporte son exclusion des dispositions protectrices du code de la consommation, qui en droit, bénéficient, comme indiqué par le tribunal, aux seules personnes physiques.
Par conséquent, les appelants ne peuvent valablement soutenir que, le délai courant à compter du paiement, l'action serait prescrite pour la demande de la société Crédit logement fondée sur la quittance subrogative du 6 octobre 2014 puisque la société Crédit logement aurait dû agir dans les deux années qui ont suivi, soit avant le 6 octobre 2016, pour une assignation délivrée le 21 mars 2019.
Aussi, la société Crédit logement, à la requête de laquelle l'assignation a été délivrée par actes du 21 et 29 mars 2019, n'est pas prescrite en son action au regard de ses propres paiements intervenus le 6 octobre 2014 et le 30 novembre 2018, soit dans le délai de cinq ans précédant l'assignation.
Au surplus, le tribunal a, encore à raison, retenu que MMme [O] ont effectué des règlements, interruptifs de prescription, tel qu'il ressort du décompte du 22 juillet 2019 mentionnant en particulier un virement de 112 000 euros le 19 juillet 2019.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a dit l'action de Crédit logement non prescrite.
Sur le fond
Le tribunal relève que par les pièces justificatives idoines, notamment les quittances subrogatives, la société Crédit logement justifie avoir payé au prêteur :
- le 6 octobre 2014, la somme de 11 170,09 euros au titre des échéances du 7 février 2014 au7 juillet 2014 et des pénalités de retard,
- le 30 novembre 2018, la somme de 297 210,76 euros au titre des échéances du 7 janvier 2017 au 7 septembre 2018 et des pénalités de retard,
et que la société Crédit logement a droit en outre aux intérêts au taux légal à compter du jour de leur paiement.
Les appelants opposent que la quittance subrogative du 30 novembre 2018 est erronée, pour ne pas tenir compte des onze versements de la société civile immobilière Ertivel du 5 janvier 2017 au 7 février 2018, de 1 577,97 euros chacun, soit un montant total de 16 344,54 euros qui devra être imputé sur la somme de 172 831,54 euros réclamée par la société Crédit logement.
Pourtant, le tribunal a, exactement, retenu s'agissant des onze versements faits à la banque et dont la société Crédit logement n'aurait pas tenu compte, que la banque n'étant pas dans la cause il n'est pas possible aux appelants de solliciter l'imputation finale de cette somme à leur crédit.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce que la somme due à la société Crédit logement s'élève à 172 831,54 euros (déduction des frais de procédure de 328,41 euros) avec intérêt au taux légal à compter du 22 juillet 2019 dans la limite de la somme de 115 439,97 euros s'agissant de MMme [O] correspondant au 2/3 de la dette de la société civile immobilière Ertivel.
Sur la demande de dommages et intérêts de la société Crédit Logement
Le jugement déféré énonce que la société Crédit Logement n'apporte pas, à l'appui de sa demande de dommages et intérêts, la preuve d'un préjudice distinct du retard apporté au paiement de la créance, qui lui aurait été causé par la faute de la société civile immobilière Ertivel, ou/et de MMme [O].
Encore en appel, la société Crédit logement fait valoir que l'attitude de la société civile immobilière Ertivel, et de MMme [O], lui a causé un préjudice complémentaire, et l'a contrainte à engager des démarches rendues nécessaires par l'obstruction du débiteur à rembourser sa dette.
Ce disant la société Crédit logement ne caractérise pas mieux qu'en première instance, le préjudice dont elle sollicite réparation. Le jugement déféré sera donc confirmé également de ce chef.
Sur la demande de délais de paiement
Les appelants demandent à la cour de leur accorder les plus larges délais de paiement pour s'acquitter des montants mis à leur charge si la cour devait rentrer en voie de condamnation à leur encontre, de juger que l'échéance mensuelle de remboursement ne pourra pas excéder la somme de 300 euros / mois sur 23 mois, que la 24e échéance soldera le montant des condamnations. Ils expliquent avoir justifié de l'intégralité de leur patrimoine et revenus actuels. MMme [O] se disent de bonne foi et indiquent qu'ils ont cinq enfants à charge. Ils s'engagent en cas de retour à meilleur fortune à solder leur dette en priorité.
En vertu de l'article 1343-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Tel aménagement de la dette n'est envisageable que si son montant le permet eu égard aux facultés contributives du débiteur et si les propositions faites pour son apurement permettent à celui-ci de s'en acquitter dans le respect des droits du créancier. En outre, l'octroi d'un délai de paiement qui n'est pas de plein droit ne peut bénéficier qu'au débiteur de bonne foi.
La société Crédit logement souligne que MMme [O] ont déjà profité, du fait de la longueur de la procédure, d'un délai de paiement supérieur à deux années.
Surtout, MMme [O] sont encore à ce jour propriétaires immobiliers, et limitant à 300 euros par mois le montant de la somme qu'ils offrent de payer à leur créancier, ne font pas de proposition sérieuse de réglement de leur dette.
En l'état la demande de délai de paiement de MMme [O] et de la société civile immobilière Ertivel ne peut qu'être rejetée.
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Sur les dépens et les frais irrépétibles
Les appelants, partie qui succombe, supporteront la charge des dépens et ne peuvent prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche pour des raisons tenant à l'équité il y a lieu de faire droit à la demande de la société Crédit logement formulée sur ce même fondement pour la somme réclamée, de 2 000 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant dans les limites de l'appel,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Et y ajoutant :
DÉBOUTE M. [T] [O], Mme [M] [X] épouse [O], et la société civile immobilière Ertivel, de leur demande de délai de paiement ;
CONDAMNE in solidum M. [T] [O], Mme [M] [X] épouse [O], et la société civile immobilière Ertivel à payer à la société Crédit logement la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à raison des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
DÉBOUTE M. [T] [O], Mme [M] [X] épouse [O], et la société civile immobilière Ertivel de leur propre demande formulée sur ce même fondement ;
CONDAMNE M. [T] [O], Mme [M] [X] épouse [O], et la société civile immobilière Ertivel aux entiers dépens d'appel.
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Le greffier Le Président