Décisions
CA Bordeaux, 1re ch. civ., 15 octobre 2024, n° 24/00819
BORDEAUX
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL DE BORDEAUX
1ère CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 15 OCTOBRE 2024
N° RG 24/00819 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-NUVH
SAS INTER-RIVES [Localité 3]
c/
Société INIZYS, anciennement dénommée Mutuelle SAMBO
Nature de la décision : AU FOND
SUR RENVOI DE CASSATION
Copie exécutoire délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : sur renvoi de cassation d'un arrêt rendu le 13 décembre 2023 (Pourvoi n° H 22-12.744) par la Chambre Commercial de la Cour de Cassation sur un arrêt rendu le 24 novembre 2021 (RG : 19/05242) par la de la Cour d'Appel de RENNES en suite d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de QUIMPER du 21 mai 2019 (RG : 18/00377), suivant déclaration de saisine en date du 22 février 2024
DEMANDERESSE :
SAS INTER-RIVES [Localité 3], immatriculée au RCS de BORDEAUX sous le n° 791 428 717, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]
Représentée par Maître Claire LE BARAZER de la SELARL AUSONE AVOCATS, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Christophe NICOLAS de la SELARL NICOLAS & ASSOCIES, avocat plaidant au barreau de PARIS
DEFENDERESSE :
Société INIZYS, anciennement dénommée Mutuelle SAMBO - Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 2]
Représentée par Maître Daniel LASSERRE de la SELAS ELIGE BORDEAUX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Delphine GICQUELAY de la SELARL D GICQUELAY, avocat plaidant au barreau de QUIMPER
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été examinée le 03 septembre 2024 en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Paule POIREL, Présidente
Madame Bérengère VALLEE, Conseiller
Madame Bénédicte LAMARQUE, Conseiller
Greffier lors des débats : POUESSEL Mélina, greffier placé
Greffier lors du prononcé : BONNET Séléna
Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
Les navires L'hirondelle et La gondole, appartenant à la société Keolis [Localité 3], sont assurés par la Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan (Sambo) dont le siège social est à [Localité 4].
Dans le cadre d'une délégation de service public, la société Keolis [Localité 3] s'est vue confier la gestion de l'exploitation du réseau des transports urbains de la personne comprenant un service de navette fluviale.
L'exécution de cette mission a été confiée à la SARL Inter-rives [Localité 3] pour une durée de 3 ans suivant un contrat d'armement du 31 janvier 2013.
Le 13 juin 2013, le navire La gondole subissait une avarie après avoir heurté le quai par son étrave ouvrant une brèche au-dessus de la ligne de flottaison. Ce sinistre était régulièrement déclaré à la compagnie d'assurance Sambo qui mandatait son expert, M. [X].
Le navire La gondole connaissait une nouvelle avarie, le 7 juillet 2013, par le heurt du navire avec un pilier de l'un des ponts de [Localité 3] provoquant une détérioration de la timonerie. Après avoir déclaré ce sinistre auprès de la compagnie d'assurance Sambo, la société Inter-rives, par courrier du 22 juillet 2013, renonçait finalement à toute sollicitation indemnitaire au titre du sinistre du 7 juillet 2013.
Le 1er septembre 2013, le navire L'hirondelle subissait également un sinistre lequel a été déclaré à la Sambo par la société Inter-rives.
La Sambo a refusé de couvrir le sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013 au motif que la barre était tenue par le matelot au moment du heurt, ainsi que le sinistre subi par le navire L'hirondelle le 1er septembre 2013 au motif que la réclamation était prescrite.
***
Par ordonnance du 24 mai 2014, le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux, saisi par une assignation de la Sambo, en date du 5 mars 2014, a ordonné une expertise et commis pour y procéder [P] [V].
Le rapport expertal a été déposé le 26 avril 2016.
Suivant un acte d'huissier de justice du 2 février 2017, la SARL Inter-rives [Localité 3] a fait assigner la Sambo devant le tribunal de grande instance de Bordeaux aux fins notamment de voir juger que la Sambo est tenue d'indemniser la SARL Inter-rives [Localité 3], en application des articles 1103 et 1231-1 du code civil, des préjudices subis pour les deux navires lui appartenant et ayant subi des avaries.
Par ordonnance du 23 janvier 2018, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Bordeaux s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Quimper.
Par jugement du 21 mai 2019, le tribunal de grande instance de Quimper a :
- débouté la SARL Inter-rives [Localité 3] de sa demande en paiement de la somme de 87 247,77 euros au titre des réparations du navire La gondole et du préjudice financier qui en est découlé à l'encontre de la Sambo,
- déclaré l'action en paiement au titre des réparations du navire L'hirondelle et pour résistance abusive à l'encontre de la Sambo irrecevable car prescrite,
- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires des parties,
- condamné la SARL Inter-rives [Localité 3] à payer à la Sambo la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SARL Inter-Rives [Localité 3] aux entiers dépens comprenant notamment les frais d'expertise judiciaire et dit qu'il pourra être fait application de l'article 699 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire du jugement.
La SARL Inter-rives a relevé appel de ce jugement par déclaration du 1er août 2019.
Par arrêt du 24 novembre 2021, la cour d'appel de Rennes a :
- confirmé le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
- débouté la société Inter-rives [Localité 3] de ses demandes en dommages et intérêts et en frais irrépétibles ;
- condamné la société Inter-rives [Localité 3] à payer à la société Sambo la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
- condamné la société Inter-rives [Localité 3] aux dépens.
La SARL Inter-rives a formé un pourvoi en cassation.
Par arrêt du 13 décembre 2023, la chambre commerciale de la Cour de cassation a :
- cassé, seulement en ce qu'il rejette la demande de la société Inter-rives [Localité 3] en paiement de la somme de 87 247,77 euros au titre des réparations du bateau La gondole et du préjudice financier qui en est découlé à l'encontre de la Société d'assurances mutuelles Bretagne Océan - SAMBO et statue sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 24 novembre 2021 par la cour d'appel de Rennes et renvoyé les parties devant la cour d'appel de Bordeaux,
- condamné la Société d'assurances mutuelles Bretagne Océan - SAMBO aux dépens,
- rejeté la demande formée par la Société d'assurances mutuelles Bretagne Océan - SAMBO sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée à payer à la société Inter-Rives la somme de 3 000 euros.
Pour statuer comme elle l'a fait, la Cour de cassation a considéré qu'en retenant que la société Inter-rives [Localité 3] ne justifiait pas que M. [Z], matelot en formation, était sous la surveillance de M. [C], capitaine, lors de sa manoeuvre ou que ce dernier l'assistait dans des conditions prévues à l'article 10-1 du décret du 23 juillet 1991, M. [Z] ayant dans un premier temps indiqué que M. [C] était à plusieurs mètres de lui dans l'espace dévolu aux passagers, puis ne pouvant plus préciser sa position, pour en déduire que ces fautes, qui doivent être qualifiées d'intentionnelles, justifient l'exclusion de garantie telle que prévue à l'article 3 du contrat d'assurance, la cour d'appel, en statuant par des motifs impropres à caractériser la volonté de la société Inter-rives [Localité 3] de créer le dommage tel qu'il est survenu, a violé l'article L.172-13 du code des assurances.
La SARL Inter-rives a saisi la cour d'appel de Bordeaux par déclaration du 22 février 2024 et par dernières conclusions déposées le 7 juin 2024, elle demande à la cour de :
- juger que le matelot [Z] était habilité à tenir la barre du navire La gondole sous la surveillance du capitaine [C] au moment du sinistre ;
- juger que la société Inter-rives [Localité 3] n'a commis aucune faute, ni aucune fraude la privant du bénéfice du contrat d'assurance conclu entre les parties ;
- juger que le contrat d'assurance n'a jamais été résilié ;
- juger que la Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan est tenue de couvrir le dommage subi par le navire La gondole le 13 juin 2013 en application du contrat d'assurance conclu entre les parties ;
- condamner en conséquence la Société Inizys anciennement dénommée Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan à payer à la société Inter-rives [Localité 3] la somme de 116 105.71 euros avec intérêts à taux légal à partir du 9 décembre 2013, date de la 1ère mise en demeure ;
- ordonner la capitalisation des intérêts,
- condamner la Société Inizys anciennement dénommée Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan à payer à la société Inter-rives [Localité 3] la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
- condamner la Société Inizys anciennement dénommée la Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan à payer à la société Inter-rives [Localité 3] la somme de 25 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions déposées le 23 mai 2024, la société d'assurances Inizys (anciennement dénommée Sambo) demande à la cour de :
A TITRE PRINCIPAL
- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
- débouter la société Inter-rives de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société Inter-rives à verser à la compagnie Inizys la somme de 25.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
A TITRE SUBSIDIAIRE
- réduire et fixer le préjudice matériel à la somme de 61 137.80€
- dire que le préjudice financier n'est nullement imputable à une faute de la compagnie Inizys et rejeter la demande,
- dire à titre subsidiaire qu'il sera fait application des franchises contractuelles sur les montants invoqués,
- condamner la société Inter-rives à verser à la SAMBO la somme de 25.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 3 septembre 2024.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 20 août 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I- Sur la portée de la cassation :
Selon les dispositions de l'article 623 du code de procédure civile, la cassation est totale ou partielle et selon l'article 624, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions de l'arrêt cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
Selon l'article 625 alinéa 1 du code de procédure civile, sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état elles se trouvaient avant l'arrêt cassé.
Avant l'arrêt de cassation, les parties se trouvaient en l'état d'un appel total interjeté par la société Inter-rives à l'encontre du jugement du tribunal de grande instance de Quimper qui avait débouté la demande en paiement par elle formulée à l'encontre de la SAMBO au titre du sinistre subi par le navire La gondole et déclaré prescrite l'action formée par elle au titre du sinistre subi par le navire L'hirondelle, l'avait condamnée au paiement d'une somme de 4.000 euros au titre de ses frais irrépétibles et aux dépens.
La cour d'appel de Rennes, par arrêt du 24 novembre 2021, a confirmé le jugement en toutes ses dispositions.
La Cour de cassation a limité la cassation aux dispositions de l'arrêt ayant rejeté la demande en paiement de la société Inter-rives [Localité 3] au titre des réparations du bateau La gondole et du préjudice financier qui en est découlé à l'encontre de la société d'assurances mutuelles Bretagne Océan -SAMBO.
Il s'ensuit que, nonobstant la demande de l'appelante tendant à l'infirmation du jugement entrepris 'en toutes ses dispositions', est définitive la disposition ayant déclaré prescrite l'action de la société Inter-rives [Localité 3] concernant le sinistre subi par le navire L'hirondelle. Seule reste en discussion l'action de la société Inter-rives [Localité 3] concernant le sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013.
II- Sur la garantie de la société Inizys (anciennement dénommée Sambo):
Le jugement dont appel a retenu que M. [Z], matelot qui tenait seul la barre du bateau au moment du sinistre, ne remplissait pas les conditions légales requises d'expérience professionnelle pour bénéficier d'une formation de navigation fluviale, ce que ne pouvaient ignorer, en leur qualité de professionnels, le capitaine, le responsable technique et le capitaine d'armement ayant autorisé M. [Z] à effectuer des manoeuvres sur le navire pour son entraînement à la conduite, ajoutant que les formalités administratives de délivrance d'un livret de formation n'avaient pas été accomplies et que ce document avait été renseigné rétroactivement, ce qui créait un doute sur la véracité des déclarations qui y sont portées. Le tribunal en a déduit que la société Inter-rives avait volontairement commis une faute faisant obstacle à la mise en oeuvre de la garantie de la compagnie d'assurance Sambo au titre des dommages subis par le navire La gondole. Il a en conséquence débouté la société Inter-rives de sa demande en paiement à ce titre.
La société Inter-rives considère n'avoir commis aucune faute dans le sinistre du 13 juin 2013, la barre du navire étant tenue par le matelot [Z] sous la surveillance du capitaine [C] conformément aux exigences légales et réglementaires en vigueur à l'époque du sinistre, soit le décret n°91-731 du 23 juillet 1991 relatif à l'équipage et à la conduite des bateaux circulant ou stationnant sur les eaux intérieures et l'arrêté du 19 décembre 2003 relatif à l'équipage et à la conduite des bateaux de navigation intérieure.
Elle explique que, concernant la possibilité pour M. [Z] de tenir la barre du navire, le tribunal a commis une confusion entre les conditions nécessaires pour suivre la formation pour obtenir le certificat de capacité de conduite de bateau de commerce et celles nécessaires pour se présenter à l'examen d'obtention de ce certificat. Elle précise que le matelot, qui souhaite obtenir le certificat de capacité de conduite de bateau de commerce, doit d'abord être formé à bord du bateau avant de passer l'examen.
Pour l'appelante, les conditions pour qu'un matelot puisse tenir la barre dans le cadre de sa formation sont, en vertu de l'article 1er de l'arrêté du 19 décembre 2003, d'une part, qu'il soit âgé de plus de 15 ans et d'autre part, qu'il soit sous la surveillance d'une personne titulaire du certificat de capacité pour conduire cette catégorie de bateau, ce qui était le cas en l'espèce. Elle conclut que le matelot [Z], qui était âgé de 35 ans, était autorisé à tenir la barre sous la surveillance du capitaine [C] dans le cadre de sa formation pratique pour obtenir le certificat de capacité à conduire des bateaux.
A l'argument de la SAMBO qui soutient que le matelot [Z] n'aurait pas dû tenir la barre car il n'était pas encore en possession du livret de formation sur lequel les heures de formation pratique du matelot doivent être inscrites, la société Inter-rives répond, d'une part, que l'arrêté précité du 19 décembre 2003 n'oblige pas le matelot en formation à avoir le livret de formation dès le début de la conduite accompagnée, d'autre part, que ce livret de formation est un simple document administratif qui sert à attester des heures de formation effectuées par le matelot au moment de sa présentation à l'examen et n'est en aucun cas un prérequis pour suivre la formation pratique, enfin et en tout état de cause, que M. [Z] était bien en conformité avec les obligations administratives relatives au livret de formation, celui-ci ayant été validé par l'autorité compétente moins d'un an après le début de sa formation pratique.
Elle précise que le capitaine [C] était parfaitement compétent et disposait de l'ensemble des titres professionnels et de l'expérience nécessaires pour tenir la barre du navire La gondole et assurer la formation de M. [Z].
Elle conclut que le sinistre ne résulte en aucun cas d'une faute de la société Inter-rives mais d'une simple erreur humaine, qui doit être couverte par la Sambo en sa qualité d'assureur du navire La gondole, ajoutant qu'en tout état de cause, la prétendue faute de la société Inter-rives ne peut en aucun cas être qualifiée d'inexcusable ou d'intentionnelle, de sorte que la Sambo, qui ne rapporte pas la preuve qui lui incombe du caractère intentionnel ou inexcusable de la faute, reste tenue de couvrir le dommage.
Elle relève que la formation d'un équipage à bord du navire fait partie d'une exploitation normale de celui-ci et qu'ainsi la Sambo ne peut revendiquer une résiliation du contrat d'assurance au regard de l'article L. 172-3 du code des assurances, soulignant enfin sa bonne foi.
Concluant à l'infirmation du jugement entrepris, la société Inter-rives sollicite la condamnation de l'assureur à lui payer la somme de 116.105,71 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2013, la capitalisation des intérêts, outre 25.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive.
La société Inizys (anciennement dénommée Sambo), intimée, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, faisant valoir que la société Inter-rives a commis de nombreuses fautes en lien direct avec la survenance du sinistre et pouvant être qualifiées de fautes inexcusables justifiant l'exclusion de garantie en application de l'article 3 des conditions particulières du contrat d'assurance liant les parties.
Plus précisément, elle reproche deux fautes à la société Inter rives :
- d'une part, le fait qu'à la date de l'évènement, soit le 13 juin 2013, le matelot [Z] n'était pas en possession d'un livret de formation ou de service, en violation de l'article R. 4231-7 du code des transports, ce livret ayant été délivré postérieurement à l'accident (le 9 septembre 2013) et rempli de manière frauduleuse a posteriori, ce dont l'assureur déduit que le matelot [Z] n'était pas habilité à tenir la barre du navire La gondole.
- d'autre part, le fait que lors de l'accident survenu le 13 juin 2013, le capitaine [C], préposé de la société Inter-rives, n'exerçait pas la veille nécessaire et maîtrisait mal la conduite du navire.
Elle estime que ces manquements constituent des fautes inexcusables dans la mesure où l'assuré ou son préposé à violé une ou plusieurs règles de navigation ou de sécurité tout en ayant conscience que ce manquement pouvait entraîner la survenance d'un dommage quel qu'il soit.
Enfin, elle invoque, sur le fondement de l'article L. 172-3 du code des assurances, la résiliation du contrat d'assurance au motif qu'alors que la formation du matelot [Z] à bord du navire constituait une aggravation sensible du risque, celle-ci n'avait pas été déclarée par la société Inter-rives à l'assureur.
Sur ce,
A- Sur l'exclusion de garantie (article L. L172-13 du code des assurances)
Le navire La gondole était assuré par la Sambo suivant un contrat d'assurance 'tous risques' du 20 juin 2013 avec effet au 20 mars 2013 et en navigation à compter du 30 avril 2013.
L'article 3 des conditions particulières du contrat d'assurance liant les parties renvoie à l'article 3 de l'imprimé du 1er janvier 1998 modifié le 1er janvier 2022 lequel prévoit que :
'Sont exclus de la garantie :
1°) Les dommages, les pertes, les recours de tiers et les dépenses résultant de:
(...)
- faute intentionnelle ou inexcusable de l'assuré ou de son personnel de direction, à savoir : directeurs, chefs d'agences, capitaine d'armement, chefs de services techniques.'
Aux termes de l'article L. 172-13 du code des assurances :
'Les risques assurés demeurent couverts, même en cas de faute de l'assuré ou de ses préposés terrestres, à moins que l'assureur n'établisse que le dommage est dû à un manque de soins raisonnables de la part de l'assuré pour mettre les objets à l'abri des risques survenus.
L'assureur ne répond pas des fautes intentionnelles ou inexcusables de l'assuré.'
En vertu de ce texte, l'assureur ne répond ni des fautes intentionnelles ou inexcusables de l'assuré, ni des dommages dus à un manque de soins raisonnables de sa part pour mettre les objets à l'abri des risques survenus.
Sur ce fondement, la société Inizys (anciennement dénommée Sambo) s'oppose à la garantie sollicitée par la société Inter-rives au titre du sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013, et invoque, à titre principal, deux fautes de son assurée, revêtant, selon elle, un caractère inexcusable qui suppose la conscience de la probabilité de la réalisation du risque.
Il incombe à l'assureur de démontrer, pour voir écarter sa garantie, la faute inexcusable de son assurée, ou toute autre cause d'exclusion.
En l'espèce, la société Inizys (anciennement dénommée Sambo) reproche deux fautes inexcusables à la société Inter rives :
- d'une part, le fait qu'à la date de l'évènement, soit le 13 juin 2013, le matelot [Z] n'était pas en possession d'un livret de formation ou de service, en violation de l'article R. 4231-7 du code des transports, ce livret ayant été délivré postérieurement à l'accident (le 9 septembre 2013) et rempli de manière frauduleuse a posteriori, ce dont l'assureur déduit que le matelot [Z] n'était pas habilité à tenir la barre du navire La gondole.
- d'autre part, le fait que lors de l'accident survenu le 13 juin 2013, le capitaine [C], préposé de la société Inter-rives, n'exerçait pas la veille nécessaire et maîtrisait mal la conduite du navire.
1- Sur la régularité de l'équipage du bateau La gondole le 13 juin 2013
L'article 5 du contrat d'armement, intitulé 'Personnel affecté au service', énonce que la société Inter-rives 'doit disposer constamment du personnel suffisant en nombre, qualification et formation pour assurer l'exploitation optimale du service et pour satisfaire l'ensemble de ses obligations. (...)
Les équipages sont constitués de deux personnes dont un capitaine titulaire de la licence de Patron Pilote.
Le Prestataire est responsable de la qualification de son personnel au regard de la réglementation des voies navigables et de sa compétence pour l'exécution du service, en particulier :
Compétence pour les manoeuvres sur un fleuve à forts courants
Parfaite connaissance de la zone d'exploitation
Connaissance des bateaux (conduite, exploitation, sécurité, entretien)
Formation à la gestion technique de bateaux à propulsion électrique
Maintien opérationnel des bateaux'
Selon l'article 2 du décret n°91-731 du 23 juillet 1991 relatif à l'équipage et à la conduite des bateaux circulant ou stationnant sur les eaux intérieures, applicable aux faits d'espèce :
'Tout bateau motorisé doit avoir en équipage le personnel nécessaire pour assurer sa marche et sa sécurité, suivant la nature du bateau, le lieu de sa navigation et les circonstances qui peuvent se présenter sur sa route.
Cet équipage comprend au moins :
1° Un conducteur, au sens de l'article 1. 02 du règlement général de police de la navigation intérieure annexé au décret du 21 septembre 1973 susvisé, âgé de plus de seize ans.
2° Un matelot susceptible de participer aux manoeuvres pour les bateaux de marchandises ou les péniches de plaisance lorsqu'ils naviguent en rivière ou sur les lacs, sauf dérogation prévue par les règlements particuliers pris en application du règlement général de police de la navigation intérieure ;
3° Les règles complémentaires relatives à la composition des équipages des bateaux de navigation intérieure sont fixées par arrêté du ministre chargé des transports.'
Il est constant que le 13 juin 2013, jour du sinistre, étaient à bord du navire La gondole, M. [C], capitaine et conducteur dudit navire et M. [Z], matelot.
M. [C] est titulaire du certificat de capacité de conduite de bateau de commerce de groupe A délivré le 2 décembre 2010 ainsi que de la licence de patron pilote A n°009. A la date du sinistre, M. [C] qui était salarié de la société Inter-rives, sous contrat à durée indéterminée, disposait des brevets/licences lui permettant d'exercer la fonction de capitaine à bord du navire La gondole.
De son côté, M. [Z] est titulaire du certificat d'initiation nautique n°10046140/1 délivré le 13 décembre 2010 (formation qui prépare aux fonctions de matelot), du certificat de formation de base de sécurité n°10046383/1 délivré le 17 décembre 2010 (perfectionnement et élargissement des compétences en matière de sécurité pour l'exercice de fonctions à bord des navires de commerce ou de plaisance armés avec un rôle d'équipage), ainsi que du permis de conduire 'les moteurs marins' n°100446152/1 délivré le 17 décembre 2010. A la date du sinistre, M. [Z], qui était salarié de la société Inter-rives, sous contrat à durée indéterminée, disposait de la formation et de brevets/licences lui permettant d'exercer la fonction de matelot à bord du navire La gondole.
Il se déduit de ces éléments qu'au jour du sinistre, l'équipage qui composait le navire La gondole était conforme aux dispositions précitées du décret du 23 juillet 1991, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté.
2- Sur le droit du matelot [Z] de tenir seul la barre au moment du sinistre
Il est constant qu'au moment de l'accident, M. [Z] tenait la barre du navire La gondole.
L'article 10 du décret n°91-731 du 23 juillet 1991, codifié à l'article R.4241-7 du code des transports, dispose :
'I. - Une personne peut tenir la barre d'un bateau de commerce sans être titulaire du certificat de capacité pour la conduite des bateaux de commerce, à condition d'être âgée de plus de quinze ans, d'être assistée du conducteur du bateau et d'être titulaire d'un livret de service ou d'un livret de formation prévus au I de l'article 11-3.'
L'article 11-3 I du même décret, devenu l'article R. 4231-5 du code des transports, dispose :
'I - Pour être admis à se présenter aux épreuves de l'examen en vue de l'obtention du certificat de capacité pour la conduite de bateaux de commerce, le candidat doit justifier d'une expérience professionnelle de quatre ans au minimum en qualité de membre d'équipage de pont d'un bateau de commerce.
L'expérience professionnelle est attestée par la présentation d'un livret de service ou d'un livret de formation, accompagné d'un document indiquant le statut au titre duquel le candidat a acquis cette expérience.
Le livret de service ou le livret de formation mentionne chacun des voyages au cours desquels le candidat a participé à la conduite du bateau.
Les informations portées sur le livret de service et le livret de formation et justifiant de l'expérience en navigation intérieure sont validées par l'autorité compétente'.
L'arrêté du 19 décembre 2003 relatif à l'équipage et à la conduite des bateaux de navigation intérieure prévoit en son article 1er que :
'La barre d'un bateau visé au premier alinéa du présent article peut être tenue par une personne âgée de plus de quinze ans non munie du certificat de capacité, si elle est accompagnée d'une personne titulaire dudit certificat de capacité, d'une carte de plaisance ou d'un titre de conduite reconnu équivalent et correspondant à la catégorie du bateau, qui assume la responsabilité de la conduite.'
En l'espèce, le matelot [Z] était, au moment du sinistre, âgé de 35 ans et assisté du capitaine [C], titulaire du certificat de capacité pour la conduite des bateaux de commerce.
La société Inizys soutient que M. [Z] n'aurait pas dû tenir la barre dès lors qu'il n'était pas en possession d'un titre justifiant de sa formation pratique.
Il est cependant versé aux débats le livret de formation du matelot [Z], n°1309153, où il apparaît que ce dernier a commencé sa formation de conducteur le 2 mai 2013.
Dans le chapitre dudit livret intitulé 'Informations et directives relatives à la tenue du livret de service ou de formation', il est mentionné ce qui suit :
'Qui a besoin d'un livret de service ou de formation'
Toute personne âgée de plus de quinze ans qui en qualité de membre d'équipage de pont souhaite acquérir l'expérience de la conduite indispensable pour se présenter à l'examen en vue de l'obtention du certificat de capacité pour la conduite des bateaux de commerce ou du certificat de capacité pour la conduite des bateaux de commerce ou du certificat de capacité de catégorie 'PB' et justifiant du statut au titre duquel elle acquière cette expérience. Le livret de service ou de formation permet de justifier des temps de navigation et des secteurs parcourus sur les voies d'eau. Il sera exigé lors de l'inscription à l'examen accompagné d'un certificat médical justifiant de l'aptitude physique et mentale du candidat à la conduite des bateaux concernés.
Quelles sont les obligations du titulaire du livret de service ou de formation'
Le titulaire du livret de service ou de formation est la personne au nom de laquelle le livret de service a été établi.
Il doit être remis au conducteur lors de la première prise de service et doit être présenté à l'autorité compétente au moins une fois par an à compter de la date à laquelle il a été établi afin qu'elle y inscrive son visa de contrôle.
Il est dans l'intérêt du titulaire de veiller à ce que les indications portées dans le livret de service ou de formation par le conducteur soient exactes et complètes.
Il est également dans son intérêt de faciliter le contrôle du livret de service ou de formation par l'autorité compétente. Si celle-ci constate que pour certains voyages les indications portées dans le livret de service sont incomplètes ou qu'elles donnent lieu à des doutes qui persistent au terme de la vérification, les voyages concernés ne peuvent être pris en compte lors du calcul du temps de navigation ou pour la justification de secteurs parcourus'.
S'il n'est guère contesté que le livret a été renseigné de façon rétroactive et remis à M. [Z] postérieurement à l'accident, il n'en demeure pas moins que les heures qui y sont déclarées, y compris celles effectuées le 13 juin 2013 à bord de La gondole sous le contrôle du capitaine [C], ont été certifiées par l'autorité compétente, l'inspection de la navigation ayant visé le livret de service de M. [Z] le 13 janvier 2014, soit moins d'un an après le début de sa formation, ce dont il se déduit que non seulement le temps d'apprentissage de M. [Z] a été validé mais aussi que celui-ci était bien en cours formation pratique au moment du sinistre.
Il résulte de l'ensemble des éléments qui précèdent qu'au regard des dispositions précitées du décret du 23 juillet 1991 et de l'arrêté du 19 décembre 2003 le 13 juin 2013, M. [Z] était habilité, le 13 juin 2013, dans le cadre de sa formation pratique pour obtenir le certificat de capacité à conduire des bateaux, à tenir la barre du navire La gondole, sous la surveillance du capitaine [C].
Aucune faute ne peut donc être reprochée à la société Inter-rives à ce titre.
3- Sur la compétence du capitaine [C]
La société Inizys, anciennement dénommée Sambo, fait valoir en appel l'incompétence du capitaine [C], lequel n'exerçait pas selon elle la veille nécessaire lors de l'accident survenu le 13 juin 2013. Elle en veut pour preuve les conclusions de l'expert judiciaire retenant la responsabilité technique du capitaine [C] dans l'origine du sinistre, ainsi que le bilan de formation des pilotes au cours de laquelle il était indiqué que M. [C] rencontrait des difficultés dans la prise en main du navire.
Ainsi que le relève la société Inter-rives, M. [C] disposait de l'ensemble des titres professionnels et de l'expérience nécessaires pour conduire le bateau La gondole et assurer la formation du matelot [Z], le capitaine [C] étant en effet titulaire du certificat de capacité de conduite de bateau de commerce Groupe A, délivré le 2 décembre 2010 et de la licence de patron-pilote A - n°009, l'expert judiciaire ajoutant que 'M. [C] est un batelier fluvial expérimenté qui a une très bonne connaissance d'une façon générale de la pratique de la conduite en eaux internes'.
Il est exact que l'expert judiciaire retient la 'quasi-entière responsabilité technique du capitaine [C] dans l'origine causale du sinistre', au motif qu'il revenait au capitaine, et à lui seul, de savoir apprécier le niveau réel des capacités personnelles du matelot [Z] et que le capitaine [C] aurait dû intégrer préalablement le fait que l'ergonomie du poste de barre du navire ne lui permettait pas une action correctrice simultanée sur la commande de barre utilisée à bâbord et sur les commandes moteurs situées à tribord, en sorte qu'il a mal analysé ce jour-là les risques encourus dans la situation donnée, a manqué de vigilance et n'a pas été en mesure de prévenir les conséquences des erreurs du matelot.
Cependant, l'expert ajoute que 'ce ne sont pas directement les capacités et l'expérience propres de M. [C] au pilotage qui sont en cause dans la genèse de l'avarie (...). Le sinistre a pour origine une mauvaise appréciation des risques de situation de la part du capitaine - seul maître de ses actes de commandement à bord - au moment spécifique et dans les circonstances particulières précédant l'accident, associée à une mauvaise maîtrise et à une mauvaise exécution des actions correctives à apporter dans l'urgence pour rattraper les erreurs commises par le matelot-apprenti et éviter le sinistre ce, malgré l'expérience professionnelle générale conséquente de M. [C] au poste de capitaine d'unité fluviales. L'origine du sinistre du 13/06/2013 n'est donc pas liée à l'incapacité ou à l'insuffisance de M. [C] lui-même en matière de pilotage.'
Il résulte de ce qui précède que la société Inter-rives n'a pas commis de faute en confiant la conduite du navire La gondole au capitaine [C], ce dernier disposant des titres et de l'expérience nécessaire, tant pour la conduite du navire que pour la formation du matelot [Z].
En outre, le manque de vigilance du capitaine [C], qui n'a pas été capable de corriger l'erreur du matelot en formation, constitue tout au plus une faute d'inattention et ne saurait en aucun cas être qualifié de faute délibérée avec conscience de la probabilité du dommage et son acceptation téméraire sans raison valable. La faute inexcusable invoquée par l'assureur, de nature à exclure la garantie, n'est donc pas caractérisée. La faute intentionnelle, qui implique la volonté de créer le dommage tel qu'il est survenu, n'est quant à elle ni alléguée, ni démontrée.
La société Inizys échoue en conséquence à rapporter la preuve qui lui incombe que les conditions de l'exclusion de garantie, tenant à l'existence d'une faute intentionnelle ou inexcusable, sont réunies.
B- Sur l'aggravation sensible du risque (article L. 172-3 du code des assurances)
L'article L. 172-3 du code des assurances dispose :
'Toute modification en cours de contrat, soit de ce qui a été convenu lors de sa formation, soit de l'objet assuré, d'où résulte une aggravation sensible du risque, entraîne la résiliation de l'assurance si elle n'a pas été déclarée à l'assureur dans les trois jours où l'assuré en a eu connaissance, jours fériés non compris, à moins que celui-ci n'apporte la preuve de sa bonne foi, auquel cas il est fait application des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 172-2.
Si cette aggravation n'est pas le fait de l'assuré, l'assurance continue, moyennant augmentation de la prime correspondant à l'aggravation survenue.
Si l'aggravation est le fait de l'assuré, l'assureur peut, soit résilier le contrat dans les trois jours à partir du moment où il en a eu connaissance, la prime lui étant acquise, soit exiger une augmentation de prime correspondant à l'aggravation survenue.'
La société Inizys, anciennement dénommée Sambo, reproche à la société Inter-rives de ne pas avoir porté à sa connaissance le fait que des formations seraient dispensées sur le navire La gondole, alors que de telles formations constituent une aggravation du risque au sens de l'article précité et auraient dû être déclarées à l'assureur. Faisant en outre valoir le manquement de l'appelante à son obligation de bonne foi, la société Inizys conclut à la perte des garanties de la société Inter-rives à la date du 5 mai 2013, date de la première prise de barre par le matelot [Z].
S'il peut être admis que l'initiation de matelots à la manoeuvre d'un navire constitue une aggravation sensible du risque et aurait dû, en conséquence, être déclarée à l'assureur, la société Inter-rives fait justement valoir sa bonne foi dès lors que la formation à la conduite de matelots à bord de navires est, comme le rappelle l'expert, un dispositif de droit, prévu dans les textes réglementaires et réputé connu des professionnels du secteur, notamment des assureurs, en sorte qu'elle a pu, en toute bonne foi, estimé qu'il n'était pas nécessaire de déclarer une telle formation à la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, société d'assurance spécialisée dans l'assurance maritime et fluviale.
L'article L. 172-3 du code des assurances prévoit qu'en cas d'absence de déclaration d'aggravation des risques, si l'assuré est de bonne foi, il convient d'appliquer l'article L. 172-2 du même code, lequel dispose : 'si l'assuré rapporte la preuve de sa bonne foi, l'assureur est, sauf stipulation plus favorable à l'égard de l'assuré, garant du risque proportionnellement à la prime perçue par rapport à celle qu'il aurait dû percevoir, sauf les cas où il établit qu'il n'aurait pas couvert les risques s'il les avait connus.'
En l'espèce, la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, se limite à opposer un refus de garantie et ne sollicite pas la réduction de l'indemnité d'assurance en fonction de la prime qui aurait dû être perçue par elle. En tout état de cause, elle ne rapporte pas la preuve qu'elle n'aurait pas couvert les risques si elle les avait connus, ni que la prime d'assurance aurait été plus élevée.
La société Inizys, anciennement dénommée Sambo, sera en conséquence tenue de garantir le sinistre subi le 13 juin 2013 par le navire La gondole. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.
C- Sur l'indemnisation
La société Inter-rives sollicite une indemnisation de 116.105,71 euros correspondant à un préjudice matériel de 72.485,66 euros et un préjudice financier de 54.967,90 euros, déduction faite de la franchise de 11.347,85 euros, outre une indemnité de 25.000 euros pour résistance abusive.
La société Inizys, anciennement Sambo, relève que le montant du préjudice matériel sollicité par l'appelante évolue à la hausse au fur et à mesure des procédures sans aucun motif légitime et réclame à ce qu'il soit réduit à la seule somme de 61.137,80 euros telle que présentée en première instance. Elle conclut en revanche au rejet de la demande formée au titre du préjudice financier, faisant valoir l'absence de preuve d'un quelconque lien de causalité entre les difficultés de trésorerie rencontrées par la société Inter-rives et le sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013.
Sur ce,
Il est constant qu'au jour du sinistre, le navire La gondole était assurée auprès de la compagnie Sambo en vertu d'un contrat d'assurance 'tous risques' pour les avaries inférieures à 1.000.000 euros.
1- Sur le préjudice matériel
Au soutien de sa demande, la société Inter-rives verse aux débats deux factures réglées par ses soins au titre des réparations effectuées sur le navire La gondole suite au sinistre du 13 juin 2013.
La première est une facture du Grand Port Maritime de [Localité 3] datée du 20 novembre 2013 de 12.885,02 euros HT ayant pour objet l'assèchement et la remise à flot du navire La gondole. Cette facture a été acquittée le 27 novembre 2013 par la société Inter-rives.
La seconde est une facture n°FC 1655 de l'entreprise Dubourdieu, datée du 15 octobre 2013, d'un montant de 59.600, 64 euros HT, acquitté le 25 novembre 2013, ayant pour objet la 'réparation de la Gondole suite à avarie du 13 juin 2013" et prévoyant les postes suivants : définition des procédures autorisant de souder la coque aluminium du bateau, définition des solutions structurelles permettant une réparation de la cash box, suivi des travaux, chaudronnerie, bureau Veritas, protection des oeuvres mortes, peinture oeuvres vives, électricité, remise en service des installations après travaux, remise en route, mécanique.
Ces montants ont été validés par l'expert judiciaire qui estime que compte tenu de 'la relative complexité technologique des apparaux de propulsion électriques de la navette La gondole qui rend les travaux de chaudronnerie lourds potentiellement dangereux, de l'organisation juridique relativement complexe d'un projet global de transport public de passagers, de la commande à un chantier constructeur agissant comme entrepreneur vis-à-vis du commanditaire mais faisant appel lui-même à une très large sous-traitance', le coût global des réparations correspondant à l'avarie du 13 juin 2013 n'est pas surévalué.
Au regard de ces éléments, c'est à bon droit que la société Inter-rives sollicite la somme de (59.600,64 + 12.885,02) = 72.485,66 euros en réparation du préjudice matériel subi par le navire La gondole le 13 juin 2013.
2- Sur le préjudice financier
La société Inter-rives soutient que l'absence de prise en charge du sinistre par l'assureur lui a causé un préjudice financier puisqu'elle a dû régler elle-même les factures de réparation du navire s'élevant à 72.485,66 euros HT pour pouvoir reprendre rapidement l'exploitation du navire La gondole, ces décaissements lui ayant occasionné un déficit de trésorerie l'obligeant à recourir à l'affacturage pour pouvoir payer ces factures de réparations, un relevé des factures d'affacturage étant versé aux débats.
Afin d'établir le lien de causalité entre les prestations d'affacturage invoquées et le débours de trésorerie, la société Inter-rives a produit devant l'expert judiciaire une attestation de son expert-comptable datée du 4 avril 2016, selon lequel 'la société Inter-rives [Localité 3] a décaissé les sommes suivantes au titre des réparations effectuées sur le bateau La gondole faisant suite à l'incident du 13 juin 2013 (...) Soit un décaissement correspondant à un total de 86.692,85 euros TTC soit 72.485,66 euros HT. Sur le plan de la trésorerie de l'entreprise, ces décaissements ont directement provoqué une dégradation de la trésorerie de la société. Ce retard de trésorerie a été financé à travers les services d'une société d'affacturage à compter du 1er janvier 2014. Ce service reste encore actif à ce jour. Afin d'évaluer la part du préjudice correspondante à ces décaissements ayant entraîné une dégradation de la trésorerie, nous avons retenu un taux moyen annuel de 7%. Le préjudice pour la société s'élève donc à : 72.485,66 € x 7% annuel = 5074 par an, soit 422,83 € par mois de retard. Les retards s'appliquent à partir du mois de décembre 2013, date à laquelle l'intégralité des factures a été acquittée, soit à ce jour un total de 28 mois de retard. Soit un préjudice global pour la société de 11.839,24 €.'
Sur cette base, l'expert retient la somme de 11.839,24 euros au titre du 'coût financier lié à la non indemnisation (à ce jour) du sinistre par l'assureur'.
La société Inter-rives fait valoir que dès lors que l'assureur n'a toujours pas réglé l'indemnité d'assurance, ce préjudice continue à courir et qu'à la date de ses dernières conclusions, son préjudice financier s'élève à 130 mois x 422,83 euros = 54.967,90 euros.
Cependant, outre le fait qu'il n'est pas démontré que le service d'affacturage a perduré postérieurement à avril 2016, la société Inizys souligne à raison que quand bien même le contrat d'affacturage mis en place en 2014 serait encore maintenu aujourd'hui, le lien de causalité entre les difficultés de trésorerie actuelles de l'entreprise Inter-rives et le sinistre du 13 juin 2013 ne serait pas établi, l'attestation de l'expert-comptable, datée du 4 avril 2016, étant particulièrement ancienne.
Au regard des éléments dont la cour dispose, le préjudice financier subi par la société Inter-rives sera fixé à la somme de 11.839,24 euros.
Le montant total du préjudice de la société Inter-rives s'élève donc à 72.485,66 + 11.839,24 = 84.324,90 euros. Il convient de déduire de cette somme la franchise contractuelle de 11.347,85 euros dont le montant n'est pas discuté.
Le préjudice indemnisable de la société Inter-rives, au titre du sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013 s'élève donc à la somme de 72.977,05 euros au paiement de laquelle la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, sera condamnée. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2013, date de présentation du courrier de mise en demeure. Les intérêts seront capitalisés, conformément à la demande.
3- Sur la résistance abusive
La société Inter-rives réclame la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, faisant valoir la particulière mauvaise foi de l'assureur qui refuse de couvrir les dommages depuis plus de 10 ans.
Il est constant que cette résistance ne peut donner lieu à indemnisation que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol.
En l'espèce, il n'est pas rapporté la preuve d'une telle faute de l'assureur, alors même que les demandes de celui-ci ont été accueillies en première instance. La société Inter-rives sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
III- Sur les dépens et les frais irrépétibles
Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. La société Inizys, anciennement Sambo, succombant principalement à l'instance, supportera la charge des dépens.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, la société Inizys, anciennement Sambo sera condamnée au paiement de la somme de 10.000 euros.
PAR CES MOTIFS
Statuant sur renvoi de cassation :
Infirme partiellement le jugement entrepris en ce qu'il déboute la société Inter-rives [Localité 3] de sa demande en paiement de la somme de 87 247,77 euros au titre des réparations du bateau La gondole et du préjudice financier qui en est découlé à l'encontre de la Société d'assurances mutuelles Bretagne Océan - Sambo - et en ce qu'il a statué sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau dans cette limite,
Condamne la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, à payer à la société Inter-rives [Localité 3] la somme de 72.977,05 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2013, au titre du sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013,
Ordonne la capitalisation des intérêts, pourvu qu'il s'agisse d'intérêts dûs au moins pour une année entière,
Déboute la société Inter-rives [Localité 3] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,
Condamne la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, à payer à la société Inter-rives [Localité 3] la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, aux entiers dépens.
Le présent arrêt a été signé par Madame Paule POIREL, présidente, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,
1ère CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 15 OCTOBRE 2024
N° RG 24/00819 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-NUVH
SAS INTER-RIVES [Localité 3]
c/
Société INIZYS, anciennement dénommée Mutuelle SAMBO
Nature de la décision : AU FOND
SUR RENVOI DE CASSATION
Copie exécutoire délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : sur renvoi de cassation d'un arrêt rendu le 13 décembre 2023 (Pourvoi n° H 22-12.744) par la Chambre Commercial de la Cour de Cassation sur un arrêt rendu le 24 novembre 2021 (RG : 19/05242) par la de la Cour d'Appel de RENNES en suite d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de QUIMPER du 21 mai 2019 (RG : 18/00377), suivant déclaration de saisine en date du 22 février 2024
DEMANDERESSE :
SAS INTER-RIVES [Localité 3], immatriculée au RCS de BORDEAUX sous le n° 791 428 717, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]
Représentée par Maître Claire LE BARAZER de la SELARL AUSONE AVOCATS, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Christophe NICOLAS de la SELARL NICOLAS & ASSOCIES, avocat plaidant au barreau de PARIS
DEFENDERESSE :
Société INIZYS, anciennement dénommée Mutuelle SAMBO - Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 2]
Représentée par Maître Daniel LASSERRE de la SELAS ELIGE BORDEAUX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Delphine GICQUELAY de la SELARL D GICQUELAY, avocat plaidant au barreau de QUIMPER
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été examinée le 03 septembre 2024 en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Paule POIREL, Présidente
Madame Bérengère VALLEE, Conseiller
Madame Bénédicte LAMARQUE, Conseiller
Greffier lors des débats : POUESSEL Mélina, greffier placé
Greffier lors du prononcé : BONNET Séléna
Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
Les navires L'hirondelle et La gondole, appartenant à la société Keolis [Localité 3], sont assurés par la Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan (Sambo) dont le siège social est à [Localité 4].
Dans le cadre d'une délégation de service public, la société Keolis [Localité 3] s'est vue confier la gestion de l'exploitation du réseau des transports urbains de la personne comprenant un service de navette fluviale.
L'exécution de cette mission a été confiée à la SARL Inter-rives [Localité 3] pour une durée de 3 ans suivant un contrat d'armement du 31 janvier 2013.
Le 13 juin 2013, le navire La gondole subissait une avarie après avoir heurté le quai par son étrave ouvrant une brèche au-dessus de la ligne de flottaison. Ce sinistre était régulièrement déclaré à la compagnie d'assurance Sambo qui mandatait son expert, M. [X].
Le navire La gondole connaissait une nouvelle avarie, le 7 juillet 2013, par le heurt du navire avec un pilier de l'un des ponts de [Localité 3] provoquant une détérioration de la timonerie. Après avoir déclaré ce sinistre auprès de la compagnie d'assurance Sambo, la société Inter-rives, par courrier du 22 juillet 2013, renonçait finalement à toute sollicitation indemnitaire au titre du sinistre du 7 juillet 2013.
Le 1er septembre 2013, le navire L'hirondelle subissait également un sinistre lequel a été déclaré à la Sambo par la société Inter-rives.
La Sambo a refusé de couvrir le sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013 au motif que la barre était tenue par le matelot au moment du heurt, ainsi que le sinistre subi par le navire L'hirondelle le 1er septembre 2013 au motif que la réclamation était prescrite.
***
Par ordonnance du 24 mai 2014, le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux, saisi par une assignation de la Sambo, en date du 5 mars 2014, a ordonné une expertise et commis pour y procéder [P] [V].
Le rapport expertal a été déposé le 26 avril 2016.
Suivant un acte d'huissier de justice du 2 février 2017, la SARL Inter-rives [Localité 3] a fait assigner la Sambo devant le tribunal de grande instance de Bordeaux aux fins notamment de voir juger que la Sambo est tenue d'indemniser la SARL Inter-rives [Localité 3], en application des articles 1103 et 1231-1 du code civil, des préjudices subis pour les deux navires lui appartenant et ayant subi des avaries.
Par ordonnance du 23 janvier 2018, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Bordeaux s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Quimper.
Par jugement du 21 mai 2019, le tribunal de grande instance de Quimper a :
- débouté la SARL Inter-rives [Localité 3] de sa demande en paiement de la somme de 87 247,77 euros au titre des réparations du navire La gondole et du préjudice financier qui en est découlé à l'encontre de la Sambo,
- déclaré l'action en paiement au titre des réparations du navire L'hirondelle et pour résistance abusive à l'encontre de la Sambo irrecevable car prescrite,
- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires des parties,
- condamné la SARL Inter-rives [Localité 3] à payer à la Sambo la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SARL Inter-Rives [Localité 3] aux entiers dépens comprenant notamment les frais d'expertise judiciaire et dit qu'il pourra être fait application de l'article 699 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire du jugement.
La SARL Inter-rives a relevé appel de ce jugement par déclaration du 1er août 2019.
Par arrêt du 24 novembre 2021, la cour d'appel de Rennes a :
- confirmé le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
- débouté la société Inter-rives [Localité 3] de ses demandes en dommages et intérêts et en frais irrépétibles ;
- condamné la société Inter-rives [Localité 3] à payer à la société Sambo la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
- condamné la société Inter-rives [Localité 3] aux dépens.
La SARL Inter-rives a formé un pourvoi en cassation.
Par arrêt du 13 décembre 2023, la chambre commerciale de la Cour de cassation a :
- cassé, seulement en ce qu'il rejette la demande de la société Inter-rives [Localité 3] en paiement de la somme de 87 247,77 euros au titre des réparations du bateau La gondole et du préjudice financier qui en est découlé à l'encontre de la Société d'assurances mutuelles Bretagne Océan - SAMBO et statue sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 24 novembre 2021 par la cour d'appel de Rennes et renvoyé les parties devant la cour d'appel de Bordeaux,
- condamné la Société d'assurances mutuelles Bretagne Océan - SAMBO aux dépens,
- rejeté la demande formée par la Société d'assurances mutuelles Bretagne Océan - SAMBO sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée à payer à la société Inter-Rives la somme de 3 000 euros.
Pour statuer comme elle l'a fait, la Cour de cassation a considéré qu'en retenant que la société Inter-rives [Localité 3] ne justifiait pas que M. [Z], matelot en formation, était sous la surveillance de M. [C], capitaine, lors de sa manoeuvre ou que ce dernier l'assistait dans des conditions prévues à l'article 10-1 du décret du 23 juillet 1991, M. [Z] ayant dans un premier temps indiqué que M. [C] était à plusieurs mètres de lui dans l'espace dévolu aux passagers, puis ne pouvant plus préciser sa position, pour en déduire que ces fautes, qui doivent être qualifiées d'intentionnelles, justifient l'exclusion de garantie telle que prévue à l'article 3 du contrat d'assurance, la cour d'appel, en statuant par des motifs impropres à caractériser la volonté de la société Inter-rives [Localité 3] de créer le dommage tel qu'il est survenu, a violé l'article L.172-13 du code des assurances.
La SARL Inter-rives a saisi la cour d'appel de Bordeaux par déclaration du 22 février 2024 et par dernières conclusions déposées le 7 juin 2024, elle demande à la cour de :
- juger que le matelot [Z] était habilité à tenir la barre du navire La gondole sous la surveillance du capitaine [C] au moment du sinistre ;
- juger que la société Inter-rives [Localité 3] n'a commis aucune faute, ni aucune fraude la privant du bénéfice du contrat d'assurance conclu entre les parties ;
- juger que le contrat d'assurance n'a jamais été résilié ;
- juger que la Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan est tenue de couvrir le dommage subi par le navire La gondole le 13 juin 2013 en application du contrat d'assurance conclu entre les parties ;
- condamner en conséquence la Société Inizys anciennement dénommée Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan à payer à la société Inter-rives [Localité 3] la somme de 116 105.71 euros avec intérêts à taux légal à partir du 9 décembre 2013, date de la 1ère mise en demeure ;
- ordonner la capitalisation des intérêts,
- condamner la Société Inizys anciennement dénommée Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan à payer à la société Inter-rives [Localité 3] la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
- condamner la Société Inizys anciennement dénommée la Société d'Assurances Mutuelles Bretagne-Océan à payer à la société Inter-rives [Localité 3] la somme de 25 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions déposées le 23 mai 2024, la société d'assurances Inizys (anciennement dénommée Sambo) demande à la cour de :
A TITRE PRINCIPAL
- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
- débouter la société Inter-rives de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société Inter-rives à verser à la compagnie Inizys la somme de 25.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
A TITRE SUBSIDIAIRE
- réduire et fixer le préjudice matériel à la somme de 61 137.80€
- dire que le préjudice financier n'est nullement imputable à une faute de la compagnie Inizys et rejeter la demande,
- dire à titre subsidiaire qu'il sera fait application des franchises contractuelles sur les montants invoqués,
- condamner la société Inter-rives à verser à la SAMBO la somme de 25.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 3 septembre 2024.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 20 août 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I- Sur la portée de la cassation :
Selon les dispositions de l'article 623 du code de procédure civile, la cassation est totale ou partielle et selon l'article 624, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions de l'arrêt cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
Selon l'article 625 alinéa 1 du code de procédure civile, sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état elles se trouvaient avant l'arrêt cassé.
Avant l'arrêt de cassation, les parties se trouvaient en l'état d'un appel total interjeté par la société Inter-rives à l'encontre du jugement du tribunal de grande instance de Quimper qui avait débouté la demande en paiement par elle formulée à l'encontre de la SAMBO au titre du sinistre subi par le navire La gondole et déclaré prescrite l'action formée par elle au titre du sinistre subi par le navire L'hirondelle, l'avait condamnée au paiement d'une somme de 4.000 euros au titre de ses frais irrépétibles et aux dépens.
La cour d'appel de Rennes, par arrêt du 24 novembre 2021, a confirmé le jugement en toutes ses dispositions.
La Cour de cassation a limité la cassation aux dispositions de l'arrêt ayant rejeté la demande en paiement de la société Inter-rives [Localité 3] au titre des réparations du bateau La gondole et du préjudice financier qui en est découlé à l'encontre de la société d'assurances mutuelles Bretagne Océan -SAMBO.
Il s'ensuit que, nonobstant la demande de l'appelante tendant à l'infirmation du jugement entrepris 'en toutes ses dispositions', est définitive la disposition ayant déclaré prescrite l'action de la société Inter-rives [Localité 3] concernant le sinistre subi par le navire L'hirondelle. Seule reste en discussion l'action de la société Inter-rives [Localité 3] concernant le sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013.
II- Sur la garantie de la société Inizys (anciennement dénommée Sambo):
Le jugement dont appel a retenu que M. [Z], matelot qui tenait seul la barre du bateau au moment du sinistre, ne remplissait pas les conditions légales requises d'expérience professionnelle pour bénéficier d'une formation de navigation fluviale, ce que ne pouvaient ignorer, en leur qualité de professionnels, le capitaine, le responsable technique et le capitaine d'armement ayant autorisé M. [Z] à effectuer des manoeuvres sur le navire pour son entraînement à la conduite, ajoutant que les formalités administratives de délivrance d'un livret de formation n'avaient pas été accomplies et que ce document avait été renseigné rétroactivement, ce qui créait un doute sur la véracité des déclarations qui y sont portées. Le tribunal en a déduit que la société Inter-rives avait volontairement commis une faute faisant obstacle à la mise en oeuvre de la garantie de la compagnie d'assurance Sambo au titre des dommages subis par le navire La gondole. Il a en conséquence débouté la société Inter-rives de sa demande en paiement à ce titre.
La société Inter-rives considère n'avoir commis aucune faute dans le sinistre du 13 juin 2013, la barre du navire étant tenue par le matelot [Z] sous la surveillance du capitaine [C] conformément aux exigences légales et réglementaires en vigueur à l'époque du sinistre, soit le décret n°91-731 du 23 juillet 1991 relatif à l'équipage et à la conduite des bateaux circulant ou stationnant sur les eaux intérieures et l'arrêté du 19 décembre 2003 relatif à l'équipage et à la conduite des bateaux de navigation intérieure.
Elle explique que, concernant la possibilité pour M. [Z] de tenir la barre du navire, le tribunal a commis une confusion entre les conditions nécessaires pour suivre la formation pour obtenir le certificat de capacité de conduite de bateau de commerce et celles nécessaires pour se présenter à l'examen d'obtention de ce certificat. Elle précise que le matelot, qui souhaite obtenir le certificat de capacité de conduite de bateau de commerce, doit d'abord être formé à bord du bateau avant de passer l'examen.
Pour l'appelante, les conditions pour qu'un matelot puisse tenir la barre dans le cadre de sa formation sont, en vertu de l'article 1er de l'arrêté du 19 décembre 2003, d'une part, qu'il soit âgé de plus de 15 ans et d'autre part, qu'il soit sous la surveillance d'une personne titulaire du certificat de capacité pour conduire cette catégorie de bateau, ce qui était le cas en l'espèce. Elle conclut que le matelot [Z], qui était âgé de 35 ans, était autorisé à tenir la barre sous la surveillance du capitaine [C] dans le cadre de sa formation pratique pour obtenir le certificat de capacité à conduire des bateaux.
A l'argument de la SAMBO qui soutient que le matelot [Z] n'aurait pas dû tenir la barre car il n'était pas encore en possession du livret de formation sur lequel les heures de formation pratique du matelot doivent être inscrites, la société Inter-rives répond, d'une part, que l'arrêté précité du 19 décembre 2003 n'oblige pas le matelot en formation à avoir le livret de formation dès le début de la conduite accompagnée, d'autre part, que ce livret de formation est un simple document administratif qui sert à attester des heures de formation effectuées par le matelot au moment de sa présentation à l'examen et n'est en aucun cas un prérequis pour suivre la formation pratique, enfin et en tout état de cause, que M. [Z] était bien en conformité avec les obligations administratives relatives au livret de formation, celui-ci ayant été validé par l'autorité compétente moins d'un an après le début de sa formation pratique.
Elle précise que le capitaine [C] était parfaitement compétent et disposait de l'ensemble des titres professionnels et de l'expérience nécessaires pour tenir la barre du navire La gondole et assurer la formation de M. [Z].
Elle conclut que le sinistre ne résulte en aucun cas d'une faute de la société Inter-rives mais d'une simple erreur humaine, qui doit être couverte par la Sambo en sa qualité d'assureur du navire La gondole, ajoutant qu'en tout état de cause, la prétendue faute de la société Inter-rives ne peut en aucun cas être qualifiée d'inexcusable ou d'intentionnelle, de sorte que la Sambo, qui ne rapporte pas la preuve qui lui incombe du caractère intentionnel ou inexcusable de la faute, reste tenue de couvrir le dommage.
Elle relève que la formation d'un équipage à bord du navire fait partie d'une exploitation normale de celui-ci et qu'ainsi la Sambo ne peut revendiquer une résiliation du contrat d'assurance au regard de l'article L. 172-3 du code des assurances, soulignant enfin sa bonne foi.
Concluant à l'infirmation du jugement entrepris, la société Inter-rives sollicite la condamnation de l'assureur à lui payer la somme de 116.105,71 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2013, la capitalisation des intérêts, outre 25.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive.
La société Inizys (anciennement dénommée Sambo), intimée, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, faisant valoir que la société Inter-rives a commis de nombreuses fautes en lien direct avec la survenance du sinistre et pouvant être qualifiées de fautes inexcusables justifiant l'exclusion de garantie en application de l'article 3 des conditions particulières du contrat d'assurance liant les parties.
Plus précisément, elle reproche deux fautes à la société Inter rives :
- d'une part, le fait qu'à la date de l'évènement, soit le 13 juin 2013, le matelot [Z] n'était pas en possession d'un livret de formation ou de service, en violation de l'article R. 4231-7 du code des transports, ce livret ayant été délivré postérieurement à l'accident (le 9 septembre 2013) et rempli de manière frauduleuse a posteriori, ce dont l'assureur déduit que le matelot [Z] n'était pas habilité à tenir la barre du navire La gondole.
- d'autre part, le fait que lors de l'accident survenu le 13 juin 2013, le capitaine [C], préposé de la société Inter-rives, n'exerçait pas la veille nécessaire et maîtrisait mal la conduite du navire.
Elle estime que ces manquements constituent des fautes inexcusables dans la mesure où l'assuré ou son préposé à violé une ou plusieurs règles de navigation ou de sécurité tout en ayant conscience que ce manquement pouvait entraîner la survenance d'un dommage quel qu'il soit.
Enfin, elle invoque, sur le fondement de l'article L. 172-3 du code des assurances, la résiliation du contrat d'assurance au motif qu'alors que la formation du matelot [Z] à bord du navire constituait une aggravation sensible du risque, celle-ci n'avait pas été déclarée par la société Inter-rives à l'assureur.
Sur ce,
A- Sur l'exclusion de garantie (article L. L172-13 du code des assurances)
Le navire La gondole était assuré par la Sambo suivant un contrat d'assurance 'tous risques' du 20 juin 2013 avec effet au 20 mars 2013 et en navigation à compter du 30 avril 2013.
L'article 3 des conditions particulières du contrat d'assurance liant les parties renvoie à l'article 3 de l'imprimé du 1er janvier 1998 modifié le 1er janvier 2022 lequel prévoit que :
'Sont exclus de la garantie :
1°) Les dommages, les pertes, les recours de tiers et les dépenses résultant de:
(...)
- faute intentionnelle ou inexcusable de l'assuré ou de son personnel de direction, à savoir : directeurs, chefs d'agences, capitaine d'armement, chefs de services techniques.'
Aux termes de l'article L. 172-13 du code des assurances :
'Les risques assurés demeurent couverts, même en cas de faute de l'assuré ou de ses préposés terrestres, à moins que l'assureur n'établisse que le dommage est dû à un manque de soins raisonnables de la part de l'assuré pour mettre les objets à l'abri des risques survenus.
L'assureur ne répond pas des fautes intentionnelles ou inexcusables de l'assuré.'
En vertu de ce texte, l'assureur ne répond ni des fautes intentionnelles ou inexcusables de l'assuré, ni des dommages dus à un manque de soins raisonnables de sa part pour mettre les objets à l'abri des risques survenus.
Sur ce fondement, la société Inizys (anciennement dénommée Sambo) s'oppose à la garantie sollicitée par la société Inter-rives au titre du sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013, et invoque, à titre principal, deux fautes de son assurée, revêtant, selon elle, un caractère inexcusable qui suppose la conscience de la probabilité de la réalisation du risque.
Il incombe à l'assureur de démontrer, pour voir écarter sa garantie, la faute inexcusable de son assurée, ou toute autre cause d'exclusion.
En l'espèce, la société Inizys (anciennement dénommée Sambo) reproche deux fautes inexcusables à la société Inter rives :
- d'une part, le fait qu'à la date de l'évènement, soit le 13 juin 2013, le matelot [Z] n'était pas en possession d'un livret de formation ou de service, en violation de l'article R. 4231-7 du code des transports, ce livret ayant été délivré postérieurement à l'accident (le 9 septembre 2013) et rempli de manière frauduleuse a posteriori, ce dont l'assureur déduit que le matelot [Z] n'était pas habilité à tenir la barre du navire La gondole.
- d'autre part, le fait que lors de l'accident survenu le 13 juin 2013, le capitaine [C], préposé de la société Inter-rives, n'exerçait pas la veille nécessaire et maîtrisait mal la conduite du navire.
1- Sur la régularité de l'équipage du bateau La gondole le 13 juin 2013
L'article 5 du contrat d'armement, intitulé 'Personnel affecté au service', énonce que la société Inter-rives 'doit disposer constamment du personnel suffisant en nombre, qualification et formation pour assurer l'exploitation optimale du service et pour satisfaire l'ensemble de ses obligations. (...)
Les équipages sont constitués de deux personnes dont un capitaine titulaire de la licence de Patron Pilote.
Le Prestataire est responsable de la qualification de son personnel au regard de la réglementation des voies navigables et de sa compétence pour l'exécution du service, en particulier :
Compétence pour les manoeuvres sur un fleuve à forts courants
Parfaite connaissance de la zone d'exploitation
Connaissance des bateaux (conduite, exploitation, sécurité, entretien)
Formation à la gestion technique de bateaux à propulsion électrique
Maintien opérationnel des bateaux'
Selon l'article 2 du décret n°91-731 du 23 juillet 1991 relatif à l'équipage et à la conduite des bateaux circulant ou stationnant sur les eaux intérieures, applicable aux faits d'espèce :
'Tout bateau motorisé doit avoir en équipage le personnel nécessaire pour assurer sa marche et sa sécurité, suivant la nature du bateau, le lieu de sa navigation et les circonstances qui peuvent se présenter sur sa route.
Cet équipage comprend au moins :
1° Un conducteur, au sens de l'article 1. 02 du règlement général de police de la navigation intérieure annexé au décret du 21 septembre 1973 susvisé, âgé de plus de seize ans.
2° Un matelot susceptible de participer aux manoeuvres pour les bateaux de marchandises ou les péniches de plaisance lorsqu'ils naviguent en rivière ou sur les lacs, sauf dérogation prévue par les règlements particuliers pris en application du règlement général de police de la navigation intérieure ;
3° Les règles complémentaires relatives à la composition des équipages des bateaux de navigation intérieure sont fixées par arrêté du ministre chargé des transports.'
Il est constant que le 13 juin 2013, jour du sinistre, étaient à bord du navire La gondole, M. [C], capitaine et conducteur dudit navire et M. [Z], matelot.
M. [C] est titulaire du certificat de capacité de conduite de bateau de commerce de groupe A délivré le 2 décembre 2010 ainsi que de la licence de patron pilote A n°009. A la date du sinistre, M. [C] qui était salarié de la société Inter-rives, sous contrat à durée indéterminée, disposait des brevets/licences lui permettant d'exercer la fonction de capitaine à bord du navire La gondole.
De son côté, M. [Z] est titulaire du certificat d'initiation nautique n°10046140/1 délivré le 13 décembre 2010 (formation qui prépare aux fonctions de matelot), du certificat de formation de base de sécurité n°10046383/1 délivré le 17 décembre 2010 (perfectionnement et élargissement des compétences en matière de sécurité pour l'exercice de fonctions à bord des navires de commerce ou de plaisance armés avec un rôle d'équipage), ainsi que du permis de conduire 'les moteurs marins' n°100446152/1 délivré le 17 décembre 2010. A la date du sinistre, M. [Z], qui était salarié de la société Inter-rives, sous contrat à durée indéterminée, disposait de la formation et de brevets/licences lui permettant d'exercer la fonction de matelot à bord du navire La gondole.
Il se déduit de ces éléments qu'au jour du sinistre, l'équipage qui composait le navire La gondole était conforme aux dispositions précitées du décret du 23 juillet 1991, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté.
2- Sur le droit du matelot [Z] de tenir seul la barre au moment du sinistre
Il est constant qu'au moment de l'accident, M. [Z] tenait la barre du navire La gondole.
L'article 10 du décret n°91-731 du 23 juillet 1991, codifié à l'article R.4241-7 du code des transports, dispose :
'I. - Une personne peut tenir la barre d'un bateau de commerce sans être titulaire du certificat de capacité pour la conduite des bateaux de commerce, à condition d'être âgée de plus de quinze ans, d'être assistée du conducteur du bateau et d'être titulaire d'un livret de service ou d'un livret de formation prévus au I de l'article 11-3.'
L'article 11-3 I du même décret, devenu l'article R. 4231-5 du code des transports, dispose :
'I - Pour être admis à se présenter aux épreuves de l'examen en vue de l'obtention du certificat de capacité pour la conduite de bateaux de commerce, le candidat doit justifier d'une expérience professionnelle de quatre ans au minimum en qualité de membre d'équipage de pont d'un bateau de commerce.
L'expérience professionnelle est attestée par la présentation d'un livret de service ou d'un livret de formation, accompagné d'un document indiquant le statut au titre duquel le candidat a acquis cette expérience.
Le livret de service ou le livret de formation mentionne chacun des voyages au cours desquels le candidat a participé à la conduite du bateau.
Les informations portées sur le livret de service et le livret de formation et justifiant de l'expérience en navigation intérieure sont validées par l'autorité compétente'.
L'arrêté du 19 décembre 2003 relatif à l'équipage et à la conduite des bateaux de navigation intérieure prévoit en son article 1er que :
'La barre d'un bateau visé au premier alinéa du présent article peut être tenue par une personne âgée de plus de quinze ans non munie du certificat de capacité, si elle est accompagnée d'une personne titulaire dudit certificat de capacité, d'une carte de plaisance ou d'un titre de conduite reconnu équivalent et correspondant à la catégorie du bateau, qui assume la responsabilité de la conduite.'
En l'espèce, le matelot [Z] était, au moment du sinistre, âgé de 35 ans et assisté du capitaine [C], titulaire du certificat de capacité pour la conduite des bateaux de commerce.
La société Inizys soutient que M. [Z] n'aurait pas dû tenir la barre dès lors qu'il n'était pas en possession d'un titre justifiant de sa formation pratique.
Il est cependant versé aux débats le livret de formation du matelot [Z], n°1309153, où il apparaît que ce dernier a commencé sa formation de conducteur le 2 mai 2013.
Dans le chapitre dudit livret intitulé 'Informations et directives relatives à la tenue du livret de service ou de formation', il est mentionné ce qui suit :
'Qui a besoin d'un livret de service ou de formation'
Toute personne âgée de plus de quinze ans qui en qualité de membre d'équipage de pont souhaite acquérir l'expérience de la conduite indispensable pour se présenter à l'examen en vue de l'obtention du certificat de capacité pour la conduite des bateaux de commerce ou du certificat de capacité pour la conduite des bateaux de commerce ou du certificat de capacité de catégorie 'PB' et justifiant du statut au titre duquel elle acquière cette expérience. Le livret de service ou de formation permet de justifier des temps de navigation et des secteurs parcourus sur les voies d'eau. Il sera exigé lors de l'inscription à l'examen accompagné d'un certificat médical justifiant de l'aptitude physique et mentale du candidat à la conduite des bateaux concernés.
Quelles sont les obligations du titulaire du livret de service ou de formation'
Le titulaire du livret de service ou de formation est la personne au nom de laquelle le livret de service a été établi.
Il doit être remis au conducteur lors de la première prise de service et doit être présenté à l'autorité compétente au moins une fois par an à compter de la date à laquelle il a été établi afin qu'elle y inscrive son visa de contrôle.
Il est dans l'intérêt du titulaire de veiller à ce que les indications portées dans le livret de service ou de formation par le conducteur soient exactes et complètes.
Il est également dans son intérêt de faciliter le contrôle du livret de service ou de formation par l'autorité compétente. Si celle-ci constate que pour certains voyages les indications portées dans le livret de service sont incomplètes ou qu'elles donnent lieu à des doutes qui persistent au terme de la vérification, les voyages concernés ne peuvent être pris en compte lors du calcul du temps de navigation ou pour la justification de secteurs parcourus'.
S'il n'est guère contesté que le livret a été renseigné de façon rétroactive et remis à M. [Z] postérieurement à l'accident, il n'en demeure pas moins que les heures qui y sont déclarées, y compris celles effectuées le 13 juin 2013 à bord de La gondole sous le contrôle du capitaine [C], ont été certifiées par l'autorité compétente, l'inspection de la navigation ayant visé le livret de service de M. [Z] le 13 janvier 2014, soit moins d'un an après le début de sa formation, ce dont il se déduit que non seulement le temps d'apprentissage de M. [Z] a été validé mais aussi que celui-ci était bien en cours formation pratique au moment du sinistre.
Il résulte de l'ensemble des éléments qui précèdent qu'au regard des dispositions précitées du décret du 23 juillet 1991 et de l'arrêté du 19 décembre 2003 le 13 juin 2013, M. [Z] était habilité, le 13 juin 2013, dans le cadre de sa formation pratique pour obtenir le certificat de capacité à conduire des bateaux, à tenir la barre du navire La gondole, sous la surveillance du capitaine [C].
Aucune faute ne peut donc être reprochée à la société Inter-rives à ce titre.
3- Sur la compétence du capitaine [C]
La société Inizys, anciennement dénommée Sambo, fait valoir en appel l'incompétence du capitaine [C], lequel n'exerçait pas selon elle la veille nécessaire lors de l'accident survenu le 13 juin 2013. Elle en veut pour preuve les conclusions de l'expert judiciaire retenant la responsabilité technique du capitaine [C] dans l'origine du sinistre, ainsi que le bilan de formation des pilotes au cours de laquelle il était indiqué que M. [C] rencontrait des difficultés dans la prise en main du navire.
Ainsi que le relève la société Inter-rives, M. [C] disposait de l'ensemble des titres professionnels et de l'expérience nécessaires pour conduire le bateau La gondole et assurer la formation du matelot [Z], le capitaine [C] étant en effet titulaire du certificat de capacité de conduite de bateau de commerce Groupe A, délivré le 2 décembre 2010 et de la licence de patron-pilote A - n°009, l'expert judiciaire ajoutant que 'M. [C] est un batelier fluvial expérimenté qui a une très bonne connaissance d'une façon générale de la pratique de la conduite en eaux internes'.
Il est exact que l'expert judiciaire retient la 'quasi-entière responsabilité technique du capitaine [C] dans l'origine causale du sinistre', au motif qu'il revenait au capitaine, et à lui seul, de savoir apprécier le niveau réel des capacités personnelles du matelot [Z] et que le capitaine [C] aurait dû intégrer préalablement le fait que l'ergonomie du poste de barre du navire ne lui permettait pas une action correctrice simultanée sur la commande de barre utilisée à bâbord et sur les commandes moteurs situées à tribord, en sorte qu'il a mal analysé ce jour-là les risques encourus dans la situation donnée, a manqué de vigilance et n'a pas été en mesure de prévenir les conséquences des erreurs du matelot.
Cependant, l'expert ajoute que 'ce ne sont pas directement les capacités et l'expérience propres de M. [C] au pilotage qui sont en cause dans la genèse de l'avarie (...). Le sinistre a pour origine une mauvaise appréciation des risques de situation de la part du capitaine - seul maître de ses actes de commandement à bord - au moment spécifique et dans les circonstances particulières précédant l'accident, associée à une mauvaise maîtrise et à une mauvaise exécution des actions correctives à apporter dans l'urgence pour rattraper les erreurs commises par le matelot-apprenti et éviter le sinistre ce, malgré l'expérience professionnelle générale conséquente de M. [C] au poste de capitaine d'unité fluviales. L'origine du sinistre du 13/06/2013 n'est donc pas liée à l'incapacité ou à l'insuffisance de M. [C] lui-même en matière de pilotage.'
Il résulte de ce qui précède que la société Inter-rives n'a pas commis de faute en confiant la conduite du navire La gondole au capitaine [C], ce dernier disposant des titres et de l'expérience nécessaire, tant pour la conduite du navire que pour la formation du matelot [Z].
En outre, le manque de vigilance du capitaine [C], qui n'a pas été capable de corriger l'erreur du matelot en formation, constitue tout au plus une faute d'inattention et ne saurait en aucun cas être qualifié de faute délibérée avec conscience de la probabilité du dommage et son acceptation téméraire sans raison valable. La faute inexcusable invoquée par l'assureur, de nature à exclure la garantie, n'est donc pas caractérisée. La faute intentionnelle, qui implique la volonté de créer le dommage tel qu'il est survenu, n'est quant à elle ni alléguée, ni démontrée.
La société Inizys échoue en conséquence à rapporter la preuve qui lui incombe que les conditions de l'exclusion de garantie, tenant à l'existence d'une faute intentionnelle ou inexcusable, sont réunies.
B- Sur l'aggravation sensible du risque (article L. 172-3 du code des assurances)
L'article L. 172-3 du code des assurances dispose :
'Toute modification en cours de contrat, soit de ce qui a été convenu lors de sa formation, soit de l'objet assuré, d'où résulte une aggravation sensible du risque, entraîne la résiliation de l'assurance si elle n'a pas été déclarée à l'assureur dans les trois jours où l'assuré en a eu connaissance, jours fériés non compris, à moins que celui-ci n'apporte la preuve de sa bonne foi, auquel cas il est fait application des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 172-2.
Si cette aggravation n'est pas le fait de l'assuré, l'assurance continue, moyennant augmentation de la prime correspondant à l'aggravation survenue.
Si l'aggravation est le fait de l'assuré, l'assureur peut, soit résilier le contrat dans les trois jours à partir du moment où il en a eu connaissance, la prime lui étant acquise, soit exiger une augmentation de prime correspondant à l'aggravation survenue.'
La société Inizys, anciennement dénommée Sambo, reproche à la société Inter-rives de ne pas avoir porté à sa connaissance le fait que des formations seraient dispensées sur le navire La gondole, alors que de telles formations constituent une aggravation du risque au sens de l'article précité et auraient dû être déclarées à l'assureur. Faisant en outre valoir le manquement de l'appelante à son obligation de bonne foi, la société Inizys conclut à la perte des garanties de la société Inter-rives à la date du 5 mai 2013, date de la première prise de barre par le matelot [Z].
S'il peut être admis que l'initiation de matelots à la manoeuvre d'un navire constitue une aggravation sensible du risque et aurait dû, en conséquence, être déclarée à l'assureur, la société Inter-rives fait justement valoir sa bonne foi dès lors que la formation à la conduite de matelots à bord de navires est, comme le rappelle l'expert, un dispositif de droit, prévu dans les textes réglementaires et réputé connu des professionnels du secteur, notamment des assureurs, en sorte qu'elle a pu, en toute bonne foi, estimé qu'il n'était pas nécessaire de déclarer une telle formation à la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, société d'assurance spécialisée dans l'assurance maritime et fluviale.
L'article L. 172-3 du code des assurances prévoit qu'en cas d'absence de déclaration d'aggravation des risques, si l'assuré est de bonne foi, il convient d'appliquer l'article L. 172-2 du même code, lequel dispose : 'si l'assuré rapporte la preuve de sa bonne foi, l'assureur est, sauf stipulation plus favorable à l'égard de l'assuré, garant du risque proportionnellement à la prime perçue par rapport à celle qu'il aurait dû percevoir, sauf les cas où il établit qu'il n'aurait pas couvert les risques s'il les avait connus.'
En l'espèce, la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, se limite à opposer un refus de garantie et ne sollicite pas la réduction de l'indemnité d'assurance en fonction de la prime qui aurait dû être perçue par elle. En tout état de cause, elle ne rapporte pas la preuve qu'elle n'aurait pas couvert les risques si elle les avait connus, ni que la prime d'assurance aurait été plus élevée.
La société Inizys, anciennement dénommée Sambo, sera en conséquence tenue de garantir le sinistre subi le 13 juin 2013 par le navire La gondole. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.
C- Sur l'indemnisation
La société Inter-rives sollicite une indemnisation de 116.105,71 euros correspondant à un préjudice matériel de 72.485,66 euros et un préjudice financier de 54.967,90 euros, déduction faite de la franchise de 11.347,85 euros, outre une indemnité de 25.000 euros pour résistance abusive.
La société Inizys, anciennement Sambo, relève que le montant du préjudice matériel sollicité par l'appelante évolue à la hausse au fur et à mesure des procédures sans aucun motif légitime et réclame à ce qu'il soit réduit à la seule somme de 61.137,80 euros telle que présentée en première instance. Elle conclut en revanche au rejet de la demande formée au titre du préjudice financier, faisant valoir l'absence de preuve d'un quelconque lien de causalité entre les difficultés de trésorerie rencontrées par la société Inter-rives et le sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013.
Sur ce,
Il est constant qu'au jour du sinistre, le navire La gondole était assurée auprès de la compagnie Sambo en vertu d'un contrat d'assurance 'tous risques' pour les avaries inférieures à 1.000.000 euros.
1- Sur le préjudice matériel
Au soutien de sa demande, la société Inter-rives verse aux débats deux factures réglées par ses soins au titre des réparations effectuées sur le navire La gondole suite au sinistre du 13 juin 2013.
La première est une facture du Grand Port Maritime de [Localité 3] datée du 20 novembre 2013 de 12.885,02 euros HT ayant pour objet l'assèchement et la remise à flot du navire La gondole. Cette facture a été acquittée le 27 novembre 2013 par la société Inter-rives.
La seconde est une facture n°FC 1655 de l'entreprise Dubourdieu, datée du 15 octobre 2013, d'un montant de 59.600, 64 euros HT, acquitté le 25 novembre 2013, ayant pour objet la 'réparation de la Gondole suite à avarie du 13 juin 2013" et prévoyant les postes suivants : définition des procédures autorisant de souder la coque aluminium du bateau, définition des solutions structurelles permettant une réparation de la cash box, suivi des travaux, chaudronnerie, bureau Veritas, protection des oeuvres mortes, peinture oeuvres vives, électricité, remise en service des installations après travaux, remise en route, mécanique.
Ces montants ont été validés par l'expert judiciaire qui estime que compte tenu de 'la relative complexité technologique des apparaux de propulsion électriques de la navette La gondole qui rend les travaux de chaudronnerie lourds potentiellement dangereux, de l'organisation juridique relativement complexe d'un projet global de transport public de passagers, de la commande à un chantier constructeur agissant comme entrepreneur vis-à-vis du commanditaire mais faisant appel lui-même à une très large sous-traitance', le coût global des réparations correspondant à l'avarie du 13 juin 2013 n'est pas surévalué.
Au regard de ces éléments, c'est à bon droit que la société Inter-rives sollicite la somme de (59.600,64 + 12.885,02) = 72.485,66 euros en réparation du préjudice matériel subi par le navire La gondole le 13 juin 2013.
2- Sur le préjudice financier
La société Inter-rives soutient que l'absence de prise en charge du sinistre par l'assureur lui a causé un préjudice financier puisqu'elle a dû régler elle-même les factures de réparation du navire s'élevant à 72.485,66 euros HT pour pouvoir reprendre rapidement l'exploitation du navire La gondole, ces décaissements lui ayant occasionné un déficit de trésorerie l'obligeant à recourir à l'affacturage pour pouvoir payer ces factures de réparations, un relevé des factures d'affacturage étant versé aux débats.
Afin d'établir le lien de causalité entre les prestations d'affacturage invoquées et le débours de trésorerie, la société Inter-rives a produit devant l'expert judiciaire une attestation de son expert-comptable datée du 4 avril 2016, selon lequel 'la société Inter-rives [Localité 3] a décaissé les sommes suivantes au titre des réparations effectuées sur le bateau La gondole faisant suite à l'incident du 13 juin 2013 (...) Soit un décaissement correspondant à un total de 86.692,85 euros TTC soit 72.485,66 euros HT. Sur le plan de la trésorerie de l'entreprise, ces décaissements ont directement provoqué une dégradation de la trésorerie de la société. Ce retard de trésorerie a été financé à travers les services d'une société d'affacturage à compter du 1er janvier 2014. Ce service reste encore actif à ce jour. Afin d'évaluer la part du préjudice correspondante à ces décaissements ayant entraîné une dégradation de la trésorerie, nous avons retenu un taux moyen annuel de 7%. Le préjudice pour la société s'élève donc à : 72.485,66 € x 7% annuel = 5074 par an, soit 422,83 € par mois de retard. Les retards s'appliquent à partir du mois de décembre 2013, date à laquelle l'intégralité des factures a été acquittée, soit à ce jour un total de 28 mois de retard. Soit un préjudice global pour la société de 11.839,24 €.'
Sur cette base, l'expert retient la somme de 11.839,24 euros au titre du 'coût financier lié à la non indemnisation (à ce jour) du sinistre par l'assureur'.
La société Inter-rives fait valoir que dès lors que l'assureur n'a toujours pas réglé l'indemnité d'assurance, ce préjudice continue à courir et qu'à la date de ses dernières conclusions, son préjudice financier s'élève à 130 mois x 422,83 euros = 54.967,90 euros.
Cependant, outre le fait qu'il n'est pas démontré que le service d'affacturage a perduré postérieurement à avril 2016, la société Inizys souligne à raison que quand bien même le contrat d'affacturage mis en place en 2014 serait encore maintenu aujourd'hui, le lien de causalité entre les difficultés de trésorerie actuelles de l'entreprise Inter-rives et le sinistre du 13 juin 2013 ne serait pas établi, l'attestation de l'expert-comptable, datée du 4 avril 2016, étant particulièrement ancienne.
Au regard des éléments dont la cour dispose, le préjudice financier subi par la société Inter-rives sera fixé à la somme de 11.839,24 euros.
Le montant total du préjudice de la société Inter-rives s'élève donc à 72.485,66 + 11.839,24 = 84.324,90 euros. Il convient de déduire de cette somme la franchise contractuelle de 11.347,85 euros dont le montant n'est pas discuté.
Le préjudice indemnisable de la société Inter-rives, au titre du sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013 s'élève donc à la somme de 72.977,05 euros au paiement de laquelle la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, sera condamnée. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2013, date de présentation du courrier de mise en demeure. Les intérêts seront capitalisés, conformément à la demande.
3- Sur la résistance abusive
La société Inter-rives réclame la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, faisant valoir la particulière mauvaise foi de l'assureur qui refuse de couvrir les dommages depuis plus de 10 ans.
Il est constant que cette résistance ne peut donner lieu à indemnisation que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol.
En l'espèce, il n'est pas rapporté la preuve d'une telle faute de l'assureur, alors même que les demandes de celui-ci ont été accueillies en première instance. La société Inter-rives sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
III- Sur les dépens et les frais irrépétibles
Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. La société Inizys, anciennement Sambo, succombant principalement à l'instance, supportera la charge des dépens.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, la société Inizys, anciennement Sambo sera condamnée au paiement de la somme de 10.000 euros.
PAR CES MOTIFS
Statuant sur renvoi de cassation :
Infirme partiellement le jugement entrepris en ce qu'il déboute la société Inter-rives [Localité 3] de sa demande en paiement de la somme de 87 247,77 euros au titre des réparations du bateau La gondole et du préjudice financier qui en est découlé à l'encontre de la Société d'assurances mutuelles Bretagne Océan - Sambo - et en ce qu'il a statué sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau dans cette limite,
Condamne la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, à payer à la société Inter-rives [Localité 3] la somme de 72.977,05 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2013, au titre du sinistre subi par le navire La gondole le 13 juin 2013,
Ordonne la capitalisation des intérêts, pourvu qu'il s'agisse d'intérêts dûs au moins pour une année entière,
Déboute la société Inter-rives [Localité 3] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,
Condamne la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, à payer à la société Inter-rives [Localité 3] la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Inizys, anciennement dénommée Sambo, aux entiers dépens.
Le présent arrêt a été signé par Madame Paule POIREL, présidente, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,