Décisions
CA Paris, Pôle 1 - ch. 10, 10 octobre 2024, n° 23/10594
PARIS
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRAN'AISE
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10
ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2024
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/10594 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHZMY
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Mai 2023- Juge de l'exécution d'AUXERRE- RG n° 22/00413
APPELANTS
Monsieur [R] [W] [C]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Avocat plaidant :
Maître Christian VIGNET
Avocat au Barreau d'AUXERRE
Membre de la SCP AVOCATS VIGNET ASSOCIES
Madame [I] [O] épouse [C]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Avocat plaidant :
Maître Christian VIGNET
Avocat au Barreau d'AUXERRE
Membre de la SCP AVOCATS VIGNET ASSOCIES
INTIMÉS
Monsieur [P] [K]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Frédéric LEPRETRE, avocat au barreau d'AUXERRE
Madame [Y] [K]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Frédéric LEPRETRE, avocat au barreau d'AUXERRE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 septembre 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Bénédicte Pruvost, président, chargé du rapport et Madame Valérie Distinguin, conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Bénédicte Pruvost, président de chambre
Madame Caherine Lefort, conseiller
Madame Valérie Distinguin, conseiller
GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire Grospellier
ARRÊT
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Bénédicte Pruvost, président et par Monsieur Grégoire Grospellier, greffier, présent lors de la mise à disposition.
******
Par acte notarié du 26 février 2014, M. [R] [C] et Mme [I] [O], épouse [C], ont vendu à M. [P] [K] et Mme [Y] [B], épouse [K], une maison d'habitation sise à [Localité 4] (89), [Adresse 3] et [Adresse 5], moyennant le prix de 300.000 euros, payable en 240 mensualités de 1250 euros, ce à compter du 10 mars 2014 et jusqu'au 10 février 2034, outre indexation annuelle sur l'indice du coût de la construction.
Le 14 décembre 2021, les époux [K] ont revendu le bien immobilier susvisé. Ils s'étaient acquitté de la dernière mensualité indexée le 10 novembre 2021. Après échanges entre les notaires respectifs des parties, les époux [K] ont adressé au notaire des époux [C] le 22 mars 2022 un virement de 183.868,64 euros, comprenant le solde du prix de vente sans indexation, outre la mensualité de décembre 2021.
Un litige est apparu entre les parties sur la méthode de calcul du reliquat restant dû sur le prix de vente fixé par l'acte authentique du 26 février 2014.
Par acte d'huissier du 28 avril 2022, déclarant agir sur le fondement de la copie exécutoire de l'acte notarié susvisé, les époux [C] ont fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes des époux [K] ouverts auprès de la Banque Populaire de Bourgogne Franche-Comté, pour paiement de la somme de 30.791,33 euros. Cette saisie a été dénoncée aux époux [K] le 29 avril suivant.
Par acte d'huissier du 30 mai 2022, les époux [K] ont fait assigner les époux [C] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Auxerre aux fins d'annulation et de mainlevée de la saisie-attribution du 28 avril 2022.
Par jugement du 11 mai 2023, le juge de l'exécution a :
rejeté l'exception d'incompétence matérielle ;
ordonné la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 28 avril 2022 ;
dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamné les époux [C] aux dépens.
Pour statuer ainsi, le juge de l'exécution a retenu sa compétence au motif que s'il ne peut, sous prétexte d'interpréter la décision dont l'exécution est poursuivie, en modifier les dispositions précises, il lui appartient d'en fixer le sens ; que l'acte notarié sur le fondement duquel agissent les époux [C] soulève une difficulté d'interprétation ayant une incidence directe sur la régularité de la saisie-attribution pratiquée.
Au fond, il a entendu interpréter l'acte notarié à la lumière des dispositions de l'article 1188 du code civil et de l'avis du CRIDON du 3 mars 2022. Il a écarté l'indexation du solde du prix de vente, motifs pris du silence de la clause contractuelle et de l'esprit général du contrat et, de ce fait, a prononcé la nullité de la saisie-attribution fondée sur l'application de cette indexation.
Par déclaration du 14 juin 2023, les époux [C] ont formé appel de ce jugement.
Par conclusions signifiées le 29 juillet 2023, ils demandent à la cour de :
infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
et statuant à nouveau,
à titre principal,
déclarer le juge de l'exécution incompétent,
en conséquence,
renvoyer les parties à mieux se pourvoir,
à titre subsidiaire,
débouter les époux [K] de leur demande de nullité de ladite saisie-attribution ;
à titre plus subsidiaire,
valider la saisie-attribution pratiquée le 28 avril 2022,
débouter les époux [K] de toutes leurs demandes,
en tout état de cause,
condamner les époux [K] à leur payer la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par ordonnance du 21 septembre 2023, non déférée à la cour, les conclusions remises au greffe par les époux [K] le 8 septembre 2023 ont été déclarées irrecevables.
MOTIFS
Sur la compétence du juge de l'exécution
Les appelants soutiennent que le juge de l'exécution est incompétent pour statuer en l'espèce, comme ne pouvant connaître des demandes tendant à remettre en cause un titre exécutoire ou la validité des droits et obligations des parties qui en découlent ; qu'il ne dispose pas des pouvoirs pour modifier ni même compléter les dispositions du titre exécutoire. Ils se prévalent de l'avis, à leur sens suffisant, du CRIDON, qui proposait deux modes de calcul intégrant tous deux une indexation.
Aux termes de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.
Par ailleurs l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que le juge de l'exécution ne peut pas modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites.
Il est de jurisprudence constante (Civ. 2e, 22 mars 2012, n°11-13.915 ; Civ. 2e, 7 avr. 2016, n°15-17.298) que, si le juge de l'exécution ne peut pas modifier les dispositions de la décision de justice servant de fondement aux poursuites, en revanche il doit interpréter en tant que de besoin cette décision pour en fixer le sens, dans le cadre de la contestation qui s'élève à l'occasion de l'exécution forcée.
En l'occurrence, le titre exécutoire n'est pas une décision de justice mais un acte notarié. Cependant la même solution doit être retenue dès lors que la contestation s'est élevée à l'occasion de l'exécution forcée de cet acte notarié, sous réserve pour le juge de l'exécution de se limiter à l'interprétation de ce titre, à l'exclusion de toute modification.
D'ailleurs l'avis du CRIDON délivré le 3 mars 2022 à la requête du notaire des appelants (pièce n°3 des appelants) est le suivant : « En tout état de cause, compte tenu de la rédaction de la stipulation objet de votre demande, le choix de la méthode de calcul soulève une question d'interprétation, qui devrait, à défaut de faire l'objet d'un accord entre les parties afin de correspondre au mieux de leur volonté, être tranché judiciairement. » (caractères gras ajoutés par la cour)
Le jugement sera donc confirmé en ce que le juge de l'exécution a rejeté l'exception d'incompétence matérielle.
Sur la régularité de la saisie-attribution
Ensuite, les appelants font valoir que le juge de l'exécution ne pouvait pas prononcer la nullité de la mesure de saisie-attribution alors que l'article 114 du code de procédure civile exige, en cas de vice de forme, la démonstration d'un grief qui n'est pas allégué en l'espèce, et que ni les époux [K] ni le juge de l'exécution n'indiquent en quoi la saisie-attribution pourrait être frappée d'une nullité de fond au sens de l'article 117 du même code.
Mais en l'espèce, le juge de l'exécution était saisi d'une contestation portant sur l'existence de la créance résultant de l'indexation prévue au titre exécutoire sur le fondement duquel était pratiquée la saisie-attribution, et non pas sur la régularité de l'acte de saisie. En effet, l'article L. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution exige du créancier entendant faire pratiquer une saisie-attribution qu'il soit muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible. Et si, aux termes de l'article 649 du code de procédure civile, la nullité des actes d'huissier de justice est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure, soit les articles 112 à 121 du code de procédure civile, la nullité de la saisie-attribution n'a pas été retenue ici par le premier juge comme sanctionnant la violation d'une règle de procédure mais pour défaut de créance liquide et exigible résultant du titre exécutoire. Le moyen soulevé sur ce fondement est donc inopérant.
Ensuite, c'est à juste titre que le premier juge a donné mainlevée de la saisie-attribution dans le dispositif de son jugement, après avoir constaté, dans ses motifs, la nullité de la saisie pour défaut de créance liquide et exigible, la mainlevée étant la conséquence de la nullité de la mesure, sans qu'il y ait contradiction entre les motifs et le dispositif.
Sur le bien fondé de la mainlevée de la saisie-attribution
Enfin, les appelants soutiennent que, dans l'acte authentique, les parties ont nécessairement entendu tenir compte d'une éventuelle dévaluation de la monnaie dans le temps, laquelle commande que le solde du prix à régler lors de la libération de l'acquéreur par anticipation soit réévalué en fonction de l'indice contractuellement convenu.
La clause litigieuse, stipulée à l'acte notarié du 26 février 2014, est rédigée comme suit à :
« La présente vente est consentie et acceptée moyennant le prix de TROIS CENT MILLE EUROS (300 000,00 €)
Lequel prix l'acquéreur s'oblige à payer en l'étude du notaire soussigné au plus tard le 10 février 2034 au moyen de 240 mensualités constantes de MILLE DEUX CENT CINQUANTE EUROS (1 250,00€), la première payable le 10 mars 2014 et la dernière le 10 février 2034 indexées annuellement sur l'indice du coût de la construction qui commenceront à courir à compter de ce jour, payables le 10 de chaque mois.
Le paiement de la partie atermoyée se fera aux conditions ordinaires en pareille matière et notamment aux conditions suivantes :
1°/(...)
2°/L'acquéreur pourra se libérer par anticipation, en totalité ou par fractions, mais par somme non inférieure à 15.000 euros.
Tous paiements par anticipation s'imputeront sur la dernière fraction à échoir du solde du prix. »
La cour adopte les motifs pertinents du premier juge, lequel a interprété ce titre exécutoire à la lumière des dispositions de l'article 1188 du code civil, au regard du silence de l'acte et de l'esprit général du contrat, en estimant que si la clause d'indexation a certes pour objectif de prémunir le vendeur contre la dépréciation monétaire, celui-ci ne la subit plus en cas de remboursement anticipé, de sorte que l'indexation n'a pas vocation à s'appliquer sur le solde du prix de vente acquitté par anticipation. La cour ajoute que juger le contraire reviendrait précisément à compléter le titre exécutoire sur l'applicabilité de l'indexation en cas de remboursement anticipé, et non plus seulement à l'interpréter.
Sur les demandes accessoires
L'issue du litige commande de confirmer le jugement entrepris sur les dispositions accessoires et de condamner les appelants aux dépens d'appel, enfin de rejeter leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Et y ajoutant,
Déboute M. [R] [C] et Mme [I] [O], épouse [C], de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [R] [C] et Mme [I] [O], épouse [C], aux dépens d'appel.
Le greffier, Le président,
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10
ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2024
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/10594 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHZMY
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Mai 2023- Juge de l'exécution d'AUXERRE- RG n° 22/00413
APPELANTS
Monsieur [R] [W] [C]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Avocat plaidant :
Maître Christian VIGNET
Avocat au Barreau d'AUXERRE
Membre de la SCP AVOCATS VIGNET ASSOCIES
Madame [I] [O] épouse [C]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Avocat plaidant :
Maître Christian VIGNET
Avocat au Barreau d'AUXERRE
Membre de la SCP AVOCATS VIGNET ASSOCIES
INTIMÉS
Monsieur [P] [K]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Frédéric LEPRETRE, avocat au barreau d'AUXERRE
Madame [Y] [K]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Frédéric LEPRETRE, avocat au barreau d'AUXERRE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 septembre 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Bénédicte Pruvost, président, chargé du rapport et Madame Valérie Distinguin, conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Bénédicte Pruvost, président de chambre
Madame Caherine Lefort, conseiller
Madame Valérie Distinguin, conseiller
GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire Grospellier
ARRÊT
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Bénédicte Pruvost, président et par Monsieur Grégoire Grospellier, greffier, présent lors de la mise à disposition.
******
Par acte notarié du 26 février 2014, M. [R] [C] et Mme [I] [O], épouse [C], ont vendu à M. [P] [K] et Mme [Y] [B], épouse [K], une maison d'habitation sise à [Localité 4] (89), [Adresse 3] et [Adresse 5], moyennant le prix de 300.000 euros, payable en 240 mensualités de 1250 euros, ce à compter du 10 mars 2014 et jusqu'au 10 février 2034, outre indexation annuelle sur l'indice du coût de la construction.
Le 14 décembre 2021, les époux [K] ont revendu le bien immobilier susvisé. Ils s'étaient acquitté de la dernière mensualité indexée le 10 novembre 2021. Après échanges entre les notaires respectifs des parties, les époux [K] ont adressé au notaire des époux [C] le 22 mars 2022 un virement de 183.868,64 euros, comprenant le solde du prix de vente sans indexation, outre la mensualité de décembre 2021.
Un litige est apparu entre les parties sur la méthode de calcul du reliquat restant dû sur le prix de vente fixé par l'acte authentique du 26 février 2014.
Par acte d'huissier du 28 avril 2022, déclarant agir sur le fondement de la copie exécutoire de l'acte notarié susvisé, les époux [C] ont fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes des époux [K] ouverts auprès de la Banque Populaire de Bourgogne Franche-Comté, pour paiement de la somme de 30.791,33 euros. Cette saisie a été dénoncée aux époux [K] le 29 avril suivant.
Par acte d'huissier du 30 mai 2022, les époux [K] ont fait assigner les époux [C] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Auxerre aux fins d'annulation et de mainlevée de la saisie-attribution du 28 avril 2022.
Par jugement du 11 mai 2023, le juge de l'exécution a :
rejeté l'exception d'incompétence matérielle ;
ordonné la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 28 avril 2022 ;
dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamné les époux [C] aux dépens.
Pour statuer ainsi, le juge de l'exécution a retenu sa compétence au motif que s'il ne peut, sous prétexte d'interpréter la décision dont l'exécution est poursuivie, en modifier les dispositions précises, il lui appartient d'en fixer le sens ; que l'acte notarié sur le fondement duquel agissent les époux [C] soulève une difficulté d'interprétation ayant une incidence directe sur la régularité de la saisie-attribution pratiquée.
Au fond, il a entendu interpréter l'acte notarié à la lumière des dispositions de l'article 1188 du code civil et de l'avis du CRIDON du 3 mars 2022. Il a écarté l'indexation du solde du prix de vente, motifs pris du silence de la clause contractuelle et de l'esprit général du contrat et, de ce fait, a prononcé la nullité de la saisie-attribution fondée sur l'application de cette indexation.
Par déclaration du 14 juin 2023, les époux [C] ont formé appel de ce jugement.
Par conclusions signifiées le 29 juillet 2023, ils demandent à la cour de :
infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
et statuant à nouveau,
à titre principal,
déclarer le juge de l'exécution incompétent,
en conséquence,
renvoyer les parties à mieux se pourvoir,
à titre subsidiaire,
débouter les époux [K] de leur demande de nullité de ladite saisie-attribution ;
à titre plus subsidiaire,
valider la saisie-attribution pratiquée le 28 avril 2022,
débouter les époux [K] de toutes leurs demandes,
en tout état de cause,
condamner les époux [K] à leur payer la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par ordonnance du 21 septembre 2023, non déférée à la cour, les conclusions remises au greffe par les époux [K] le 8 septembre 2023 ont été déclarées irrecevables.
MOTIFS
Sur la compétence du juge de l'exécution
Les appelants soutiennent que le juge de l'exécution est incompétent pour statuer en l'espèce, comme ne pouvant connaître des demandes tendant à remettre en cause un titre exécutoire ou la validité des droits et obligations des parties qui en découlent ; qu'il ne dispose pas des pouvoirs pour modifier ni même compléter les dispositions du titre exécutoire. Ils se prévalent de l'avis, à leur sens suffisant, du CRIDON, qui proposait deux modes de calcul intégrant tous deux une indexation.
Aux termes de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.
Par ailleurs l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que le juge de l'exécution ne peut pas modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites.
Il est de jurisprudence constante (Civ. 2e, 22 mars 2012, n°11-13.915 ; Civ. 2e, 7 avr. 2016, n°15-17.298) que, si le juge de l'exécution ne peut pas modifier les dispositions de la décision de justice servant de fondement aux poursuites, en revanche il doit interpréter en tant que de besoin cette décision pour en fixer le sens, dans le cadre de la contestation qui s'élève à l'occasion de l'exécution forcée.
En l'occurrence, le titre exécutoire n'est pas une décision de justice mais un acte notarié. Cependant la même solution doit être retenue dès lors que la contestation s'est élevée à l'occasion de l'exécution forcée de cet acte notarié, sous réserve pour le juge de l'exécution de se limiter à l'interprétation de ce titre, à l'exclusion de toute modification.
D'ailleurs l'avis du CRIDON délivré le 3 mars 2022 à la requête du notaire des appelants (pièce n°3 des appelants) est le suivant : « En tout état de cause, compte tenu de la rédaction de la stipulation objet de votre demande, le choix de la méthode de calcul soulève une question d'interprétation, qui devrait, à défaut de faire l'objet d'un accord entre les parties afin de correspondre au mieux de leur volonté, être tranché judiciairement. » (caractères gras ajoutés par la cour)
Le jugement sera donc confirmé en ce que le juge de l'exécution a rejeté l'exception d'incompétence matérielle.
Sur la régularité de la saisie-attribution
Ensuite, les appelants font valoir que le juge de l'exécution ne pouvait pas prononcer la nullité de la mesure de saisie-attribution alors que l'article 114 du code de procédure civile exige, en cas de vice de forme, la démonstration d'un grief qui n'est pas allégué en l'espèce, et que ni les époux [K] ni le juge de l'exécution n'indiquent en quoi la saisie-attribution pourrait être frappée d'une nullité de fond au sens de l'article 117 du même code.
Mais en l'espèce, le juge de l'exécution était saisi d'une contestation portant sur l'existence de la créance résultant de l'indexation prévue au titre exécutoire sur le fondement duquel était pratiquée la saisie-attribution, et non pas sur la régularité de l'acte de saisie. En effet, l'article L. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution exige du créancier entendant faire pratiquer une saisie-attribution qu'il soit muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible. Et si, aux termes de l'article 649 du code de procédure civile, la nullité des actes d'huissier de justice est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure, soit les articles 112 à 121 du code de procédure civile, la nullité de la saisie-attribution n'a pas été retenue ici par le premier juge comme sanctionnant la violation d'une règle de procédure mais pour défaut de créance liquide et exigible résultant du titre exécutoire. Le moyen soulevé sur ce fondement est donc inopérant.
Ensuite, c'est à juste titre que le premier juge a donné mainlevée de la saisie-attribution dans le dispositif de son jugement, après avoir constaté, dans ses motifs, la nullité de la saisie pour défaut de créance liquide et exigible, la mainlevée étant la conséquence de la nullité de la mesure, sans qu'il y ait contradiction entre les motifs et le dispositif.
Sur le bien fondé de la mainlevée de la saisie-attribution
Enfin, les appelants soutiennent que, dans l'acte authentique, les parties ont nécessairement entendu tenir compte d'une éventuelle dévaluation de la monnaie dans le temps, laquelle commande que le solde du prix à régler lors de la libération de l'acquéreur par anticipation soit réévalué en fonction de l'indice contractuellement convenu.
La clause litigieuse, stipulée à l'acte notarié du 26 février 2014, est rédigée comme suit à :
« La présente vente est consentie et acceptée moyennant le prix de TROIS CENT MILLE EUROS (300 000,00 €)
Lequel prix l'acquéreur s'oblige à payer en l'étude du notaire soussigné au plus tard le 10 février 2034 au moyen de 240 mensualités constantes de MILLE DEUX CENT CINQUANTE EUROS (1 250,00€), la première payable le 10 mars 2014 et la dernière le 10 février 2034 indexées annuellement sur l'indice du coût de la construction qui commenceront à courir à compter de ce jour, payables le 10 de chaque mois.
Le paiement de la partie atermoyée se fera aux conditions ordinaires en pareille matière et notamment aux conditions suivantes :
1°/(...)
2°/L'acquéreur pourra se libérer par anticipation, en totalité ou par fractions, mais par somme non inférieure à 15.000 euros.
Tous paiements par anticipation s'imputeront sur la dernière fraction à échoir du solde du prix. »
La cour adopte les motifs pertinents du premier juge, lequel a interprété ce titre exécutoire à la lumière des dispositions de l'article 1188 du code civil, au regard du silence de l'acte et de l'esprit général du contrat, en estimant que si la clause d'indexation a certes pour objectif de prémunir le vendeur contre la dépréciation monétaire, celui-ci ne la subit plus en cas de remboursement anticipé, de sorte que l'indexation n'a pas vocation à s'appliquer sur le solde du prix de vente acquitté par anticipation. La cour ajoute que juger le contraire reviendrait précisément à compléter le titre exécutoire sur l'applicabilité de l'indexation en cas de remboursement anticipé, et non plus seulement à l'interpréter.
Sur les demandes accessoires
L'issue du litige commande de confirmer le jugement entrepris sur les dispositions accessoires et de condamner les appelants aux dépens d'appel, enfin de rejeter leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Et y ajoutant,
Déboute M. [R] [C] et Mme [I] [O], épouse [C], de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [R] [C] et Mme [I] [O], épouse [C], aux dépens d'appel.
Le greffier, Le président,