Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 4 - ch. 11, 17 octobre 2024, n° 23/00074

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 23/00074

17 octobre 2024

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 17 OCTOBRE 2024

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/00074 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CG3LF

Décision déférée à la Cour : jugement du 25 octobre 2022 - tribunal judiciaire de Paris

RG n° 20/10795

APPELANTE

Madame [P] [C]

[Adresse 13]

[Localité 7] (CORSE)

Née le [Date naissance 8] 1984 à [Localité 12]

Représentée par Me Aïcha CONDE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0023

Ayant pour avocat plaidant Me Robin LECCIA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

MUTUELLE D'ASSURANCE DE L'ARTISANAT ET DES TRANSPORTS

[Adresse 9]

[Localité 10]

Représentée par Me Nicolas BARETY, avocat au barreau de PARIS, toque : C0041

Assistée par Me Adeline LEFEUVRE, avocat au barreau de PARIS

CPAM DE [Localité 14]

[Adresse 6]

[Localité 11]

Représentée par Me Stéphane FERTIER de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Nina TOUATI, présidente de chambre, et Mme Dorothée DIBIE, conseillère, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Dorothée DIBIE, conseillère

Mme Sylvie LEROY, conseillère

Greffier lors des débats : Mme Emeline DEVIN

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Nina TOUATI, présidente de chambre et par Emeline DEVIN, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Le 26 mai 2015, [Adresse 16] dans le [Localité 1] de [Localité 14], Mme [P] [C] qui circulait au guidon de son scooter, a été victime d'un accident de la circulation dans lequel était impliqué un véhicule taxi assuré auprès de la société Mutuelle d'assurance de l'artisanat et des transports (la société MAT).

Une expertise amiable contradictoire a été réalisée par le Docteur [E] [A], mandaté par la société MAT, et par le Docteur [L] [N], médecin conseil de Mme [C], qui ont établi leur rapport le 26 juin 2017.

Par actes d'huissier du 3 novembre 2020, Mme [C] a fait assigner la société MAT et la caisse primaire d'assurance maladie de Paris (la CPAM) devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir constater que son droit à indemnisation est intégral et d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices.

Par jugement du 25 octobre 2022, cette juridiction a :

- dit que Mme [C], conductrice victime au moment des faits, a commis une faute dans la survenance de l'accident, laquelle justifie de fixer son droit à indemnisation à hauteur de 80 % du préjudice subi,

- rejeté la demande d'expertise au titre du poste de préjudice de l'assistance tierce personne,

- condamné la société MAT à payer en deniers ou quittances, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, à Mme [C] en réparation des préjudices suivants les sommes (tenant compte de la réduction du droit à indemnisation) de :

* dépenses de santé actuelles : 1 856 euros

* frais divers : 1 536 euros

* assistance par tierce personne avant consolidation : 11 692,80 euros

* assistance par tierce personne après consolidation : 47 860,76 euros

* incidence professionnelle : 2 622,16 euros

* aménagement du véhicule : 3 777,36 euros

* logement adapté : 3 032,80 euros

* déficit fonctionnel temporaire : 5 988,60 euros

* souffrances endurées : 16 000 euros

* préjudice esthétique temporaire : 1 440 euros

* déficit fonctionnel permanent : 22 080 euros

* préjudice esthétique permanent : 3 200 euros

* préjudice d'agrément : 1 600 euros,

- débouté Mme [C] de ses demandes au titre des pertes de gains professionnels actuels, des pertes de gains professionnels futurs et des dépenses de santé futures,

- condamné la société MAT à payer en deniers ou quittances, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ses écritures signifiées le 2 août 2021, à la CPAM en réparation des préjudices suivants les sommes (tenant compte de la réduction du droit à indemnisation) de :

* dépenses de santé actuelles : 17 799,35 euros

* frais divers : 5 847,03 euros

* pertes de gains professionnels actuels (indemnités journalières) : 48 834,88 euros

* perte de gains professionnels futurs (indemnités journalières) : 12 426,08 euros

* incidence professionnelle (rente AT) : 37 377,84 euros,

- débouté la CPAM de ses demandes au titre des dépenses de santé futures,

- dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil pour les indemnités allouées à la CPAM uniquement,

- condamné solidairement la société MAT aux dépens et à payer à Mme [C] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à la CPAM la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la somme de 1 098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion,

- dit que l'avocat de la CPAM et Maître [J] [U], pourront, en ce qui les concernent, recouvrer sur les parties condamnées ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 14 décembre 2022, Mme [C] a interjeté appel du jugement en critiquant chacune de ses dispositions.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions de Mme [C], notifiées le le 10 mars 2023, aux termes desquelles, elle demande à la cour, au visa de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985, de :

A titre principal,

Sur le droit à indemnisation :

- réformer le jugement qui a retenu un droit à indemnisation à hauteur de 80 %,

- dire et juger qu'il n'est pas démontré par la société MAT que la victime aurait doublé par la droite, et aurait ainsi contrevenu à l'article R. 414-6 du code de la route,

- dire et juger qu'il n'est pas démontré par la société MAT que la victime aurait par ailleurs contrevenu à l'article R. 414-4 du code de la route, en ne s'assurant pas de pouvoir se déporter suffisamment du véhicule taxi, alors qu'il s'agissait d'un événement inattendu, imprévisible, compte tenu de l'ouverture soudaine de la portière d'un taxi qui n'avait pas le droit de s'arrêter à cet endroit, sans feu de détresse, ni le client d'ouvrir sa porte de ce côté-là de la chaussée et aurait ainsi (sic)

Par conséquent,

- dire et juger que Mme [C] n'a commis aucune faute au sens des articles R. 414-6 et R. 414-4 du code de la route, susceptible de limiter son droit à indemnisation,

- dire et juger que le droit à indemnisation de Mme [C] sera entier,

- condamner ainsi la société MAT à indemniser Mme [C] des sommes suivantes :

1) pour la tierce personne

- réformer le jugement, et condamner la société MAT à payer les sommes suivantes :

- 20 700 euros pour les 3 heures par jour pendant les périodes de gêne temporaire partielle de classe III

- 7 520 euros pour l'heure par jour pendant la période de gêne temporaire partielle de classe II

- 6 840 euros pour les 3 heures par semaine pour les grosses courses, les gros travaux ménagers jusqu'à la consolidation

- et à titre viager pour également 3 heures par semaine après consolidation, réformer le jugement et condamner la société MAT à payer les sommes suivantes :

- 11 700 euros pour la période échue

- 150 066,18 euros pour la période à échoir

2) pour le DFP à 12 %

- réformer le jugement et condamner la société MAT à payer la somme de 27 840 euros,

3) pour les souffrances endurées à 4,5/7

- réformer le jugement et condamner la société MAT à payer la somme de 25 000 euros,

4) pour la gêne temporaire totale et la gêne temporaire partielle ensemble

- confirmer le jugement et condamner la société MAT à régler la somme de 7 485,75 euros

5) pour le préjudice esthétique à 2,5/7

- réformer le jugement, et condamner la société MAT à payer les sommes suivantes :

- 6 000 euros pour le [préjudice esthétique] permanent

- 2 200 euros pour le [préjudice esthétique] temporaire

6) pour le préjudice lié au loisir

- réformer le jugement et condamner la société MAT à payer la somme de 5 000 euros,

7) pour les aménagements [du véhicule]

- réformer le jugement, et condamner la société MAT à payer les sommes suivantes :

- 4 500 euros correspondant au véhicule avec boîte automatique

- 221,70 euros au titre des frais d'immatriculation

8) pour le préjudice professionnel

- sur la perte de gains professionnels

- réformer le jugement et condamner la société MAT à payer la somme de 330 535,60 euros,

- sur l'incidence professionnelle (pénibilité station débout)

- réformer le jugement et condamner la société MAT à payer la somme de 150 000 euros

- dire et juger que la rente ne se déduit pas de ce poste de préjudice,

9) pour le préjudice de loyer

- réformer le jugement et condamner la société MAT à payer les sommes suivantes :

- 13 196 euros s'agissant du logement d'habitation,

- 2 250 euros s'agissant du parking véhicule

10) pour les frais d'emménagement

- réformer le jugement qui n'a rien prévu à cet égard, et condamner la société MAT à payer la somme de 2 473,26 euros,

11) pour les frais de déplacement et autres dépenses

- réformer le jugement qui n'a rien prévu à cet égard, et condamner la société MAT à payer les sommes suivantes :

- 4 127,92 euros au titre des taxis Uber

- 147 euros au titre des taxis parisiens

- 4 235 euros au titre des frais de thérapie

- 530 euros au titre des frais d'ostéopathie et de posturologie

- 63 euros de frais d'inscription à la piscine

- 790 euros pour la bague de fiançailles

- 240 euros pour le pantalon jean découpé

12) pour les frais d'assistance à expertise

- réformer le jugement qui n'a rien prévu à cet égard, et condamner la société MAT à payer les sommes suivantes : 1 920 euros,

13) sur l'article 700 du code de procédure civile

- confirmer la condamnation du tribunal à l'article 700 du code de procédure civile de première instance à hauteur de 2 500 euros, et aux dépens de première instance,

- y rajouter en cause d'appel, une condamnation à hauteur de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.

Vu les dernières conclusions de la société MAT, notifiées le 6 juin 2023, aux termes desquelles elle demande à la cour, au visa de la loi du 5 juillet 1985, de :

- infirmer le jugement rendu en ce qu'il a dit que Mme [C], conductrice au moment des faits, a commis une faute dans la survenance de l'accident, laquelle justifie de fixer son droit à indemnisation à hauteur de 80% du préjudice subi,

Statuant à nouveau,

- juger que les fautes commises par Mme [C] limitent son droit à indemnisation de moitié,

- donner acte à la société MAT de ce qu'elle propose de verser à Mme [C], tenant compte de la limitation à 50% de son droit à indemnisation, la somme totale de 66 802,40 euros ainsi ventilée :

- 1 160,00 euros au titre des dépenses de santé actuelles,

- 960 euros au titre des frais divers,

- 6 082,98 euros au titre de la tierce personne avant consolidation,

- 110,85 euros au titre des frais de véhicule adapté,

- 10 000 euros au titre de l'incidence professionnelle,

- 1 895,50 euros au titre des frais de logement adapté,

- 19 948,47 euros au titre de la tierce personne après consolidation,

- 3 483,75 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,

- 7 500 euros au titre des souffrances endurées,

- 900 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,

- 11 750 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

- 1 900 euros au titre du préjudice esthétique permanent

- 1 000 euros au titre du préjudice d'agrément

- débouter Mme [C] et la CPAM du surplus de leurs demandes,

A titre subsidiaire : sur l'assistance tierce personne,

- désigner tel médecin expert qu'il plaira, qui pourra se faire assister de tout spécialiste de son choix, avec pour mission de :

- convoquer les parties,

- faire communiquer tous documents utiles à sa mission,

- procéder à l'examen de Mme [C],

- indiquer, concernant l'accident survenu sur le 26 mai 2015 si l'assistance constante ou occasionnelle d'une tierce personne est ou a été nécessaire pour effectuer les démarches et plus généralement pour accomplir les actes de la vie quotidienne en précisant la nature de l'aide à prodiguer et sa durée quotidienne,

- communiquer un pré rapport aux parties en leur impartissant un délai raisonnable pour la production de leurs dires écrits auxquels il devra répondre dans son rapport définitif,

Pour le surplus,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [C] de ses demandes au titre des pertes de gains professionnels actuels, des pertes de gains professionnels futurs et des dépens de santé futures,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la CPAM de ses demandes au titre des dépenses de santé futures,

- condamner Mme [C] à verser à la société MAT la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [C] en tous les dépens dont distraction au profit de Maître Nicolas Barety, avocat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les conclusions de la CPAM, notifiées le 24 mai 2023, aux termes desquelles, elle demande à la cour, au visa de l'article L.454-1 du code de la sécurité sociale et de la loi 2006-1640 du 21 décembre 2006, de :

- déclarer la CPAM recevable et bien fondée en son appel incident formé à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 25 octobre 2022,

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 25 octobre 2022 en ce qu'il a :

- limité le remboursement de la créance de la CPAM à hauteur du droit à indemnisation de Mme [C], soit à hauteur de 80%, soit les sommes de :

- 17 799,35 euros au titre des dépenses de santé actuelles,

- 5 847,03 euros au titre des frais divers,

- 48 834,88 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels (indemnités journalières avant consolidation),

- 12 426,08 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs (indemnités journalières après consolidation),

- 37 377,84 euros au titre de l'incidence professionnelle (rente accident du travail),

- débouté la CPAM de ses demandes au titre des dépenses de santé futures,

Statuant à nouveau,

- constater que la créance définitive de la CPAM s'élève à la somme de 149 437,54 euros au titre des prestations en nature et en espèce, et frais de transport,

- fixer cette créance à cette somme,

- dire et juger que la CPAM a droit au remboursement de sa créance sur l'indemnité mise à la charge du tiers réparant l'atteinte à l'intégrité physique de la victime,

- dire qu'en application de la loi du 21 décembre 2006, le recours subrogatoire de la caisse devra s'exercer poste par poste sur les seules indemnités réparant les préjudices pris en charge par ses soins :

- les frais d'hospitalisation, les frais médicaux et assimilés versés avant consolidation doivent être imputés sur le poste de dépenses de santé actuelles,

- les frais d'hospitalisation, les frais médicaux et assimilés versés après consolidation doivent être imputés sur le poste de dépenses de santé futures,

- les frais de transport doivent être imputés sur le poste des frais divers,

- les indemnités journalières versées avant consolidation doivent être imputées sur les pertes de gains professionnels actuels,

- les indemnités journalières et arrérages échus de la rente accident du travail doivent être imputés sur les pertes de gains professionnels futurs et si besoin sur les postes d'incidence professionnelle et déficit fonctionnel permanent,

- fixer le poste de préjudice des dépenses de santé actuelles à une somme qui ne saurait être inférieure à 24 569,18 euros (22 249,18 euros pris en charge par la CPAM + 2 320 euros restés à la charge de la victime selon le jugement attaqué),

- fixer le poste de préjudice des dépenses de santé futures à une somme qui ne saurait être inférieure à 7 540,99 euros (2 775,99 euros pris en charge par la CPAM + 4 235 euros frais de thérapie + 530 euros frais d'ostéopathie sollicités par la victime),

- fixer le poste de préjudice frais divers à une somme qui ne saurait être inférieure à 7 308,79 euros (1 113,87 euros pris en charge par la CPAM + 4 127,92 euros, 147 euros et 1 920 euros sollicités par la victime au titre des frais de déplacement et des frais d'assistance à expertise),

- fixer le poste pertes de gains professionnels actuels à une somme qui ne saurait être inférieure à 240 000 euros, somme sur laquelle, il reviendra :

- à la CPAM la somme de 61 043,60 euros au titre des indemnités journalières versées avant consolidation,

- à Mme [C], le solde soit la somme de 178 956,40 euros,

- fixer le poste pertes de gains professionnels futurs à une somme qui ne saurait être inférieure à 165 674 euros, somme sur laquelle, il reviendra :

- à la CPAM la somme de 15 532,60 euros au titre des indemnités journalières versées post consolidation,

- à la CPAM la somme de 46 722,30 euros au titre de la rente accident du travail,

- à Mme [C], le solde soit la somme de 103 419,10 euros,

- condamné la société MAT à rembourser à la CPAM, l'intégralité de sa créance, soit la somme de 149 437,54 euros,

pour le surplus,

- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :

- assorti la condamnation aux intérêts au taux légal à compter du 2 août 2021,

- ordonné la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil,

- condamné la société MAT à verser à la CPAM la somme de 1 098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion,

- condamné la société MAT à verser à la CPAM la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- condamner la société MAT à payer à la CPAM, la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société MAT aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Stéphane Fertier, avocat au Barreau de Paris, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par note en délibéré du 21 mai 2024, la cour a invité les parties à conclure sur le moyen relevé d'office tiré de ce que dans l'hypothèse où elle retiendrait une limitation du droit à indemnisation de Mme [C], conformément à l'article 1252 devenu 1346-3 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales, et qu'en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence au tiers payeur subrogé, de sorte que le droit de préférence de Mme [C] sur la dette du tiers responsable a pour conséquence que son préjudice corporel, évalué poste par poste, doit être intégralement réparé pour chacun de ces postes dans la mesure de l'indemnité laissée à la charge du tiers responsable, et que le tiers payeur ne peut exercer son recours, le cas échéant, que sur le reliquat.

Par message du 27 mai 2024, la CPAM a indiqué s'en rapporter à justice quant au point soulevé par la cour.

Le 20 juin 2024, la société MAT a fait valoir que la méthode d'imputation de la créance du tiers payeur, exposée par la cour, était conforme à la jurisprudence en vigueur de la Cour de cassation, de sorte qu'elle n'avait pas d'observation particulière à faire valoir sur ce moyen.

Par message RPVA du 25 juin 2024, Mme [C] s'en est rapportée à la décision de la cour sur ce point.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le droit à indemnisation de Mme [C]

Le tribunal a limité le droit à indemnisation de Mme [C] à 80 % de ses préjudices en relevant que circulant entre les files de véhicules alors que le circulation était dense voire embouteillée, elle n'a pas respecté ses obligations de vigilance et de maîtrise.

Mme [C] conclut à l'infirmation du jugement et se prévaut d'un droit à indemnisation intégral.

Elle conteste toute faute de conduite, dont la preuve incombe à la société MAT, et souligne qu'elle ne dépassait pas le taxi qui était arrêté à sa gauche, alors qu'elle remontait, dans des conditions de circulation denses, une file de véhicules située à sa droite.

Elle soutient que l'ouverture de la portière par le passager du taxi caractérise un cas de force majeure et constituait un événement d'autant plus imprévisible que le taxi qui n'avait pas actionné ses feux de détresse, n'avait pas le droit de s'arrêter sur la gauche de la chaussée, ni le client d'ouvrir sa porte du coté de la voie de circulation.

La société MAT conclut à l'infirmation du jugement et sollicite une réduction du droit à indemnisation de Mme [C] de 50 %.

Elle se prévaut du procès-verbal établi par les services de police et de l'audition de Mme [C] pour établir que cette dernière, qui circulait entre deux files de véhicules à l'arrêt, a effectué un dépassement par la droite dangereux et sans se déporter suffisamment pour ne pas risquer de heurter l'usager qu'elle voulait dépasser en violation des articles R. 414-4 et R. 414-6 du code de la route.

La CPAM s'en rapporte à l'appréciation de la cour concernant l'éventuelle faute de la victime.

Sur ce, il résulte de l'article 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 que lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice.

En présence d'une telle faute, il appartient au juge d'apprécier si celle-ci a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages que ce conducteur a subi, en faisant abstraction du comportement des autres conducteurs.

Dans le cas de l'espèce, il incombe à la société MAT de caractériser les fautes de conduite qu'elle invoque à l'encontre de Mme [C].

Il résulte du procès verbal établi par les services de police que l'accident est survenu en plein jour dans la [Adresse 16] dans le [Localité 2], rue à sens unique, composée de trois voies de circulation rectilignes, dont un couloir réservé aux autobus, alors que la visibilité était bonne, et la chaussée sèche et non obstruée.

Concernant les circonstances de l'accident, les services de police précisent que « (A) [le taxi] qui se trouve sur la voie la plus à gauche de la chaussée dépose un client au niveau du [Adresse 3] (..), ce dernier ouvre la porte du taxi côté chaussée, à ce moment là (B) [Mme [C]] qui circule entre les deux voies percute (A) (...) » ce qui correspond tant aux déclarations du chauffeur de taxi selon lesquelles « à l'arrêt mon client est descendu du véhicule côté droit. Une jeune fille en scooter a percuté la portière arrière droite du véhicule », qu'au schéma établi par les services de police.

En outre, Mme [C] a précisé lors de son audition, dans les suites de l'accident : « c'était les embouteillages, je circulais entre les deux files de voitures arrêtées ».

Il résulte ainsi de l'ensemble de ces éléments convergents, que Mme [C] circulait en scooter entre deux files ininterrompues de véhicules à l'arrêt, à savoir la file de gauche où se trouvait le taxi, et la file du milieu, et qu'au moment des faits, Mme [C] entreprenait de dépasser par la droite le véhicule de type taxi en violation des dispositions de l'article R. 414-6 du code de la route.

Il est également établi tant par les circonstances de l'accident, que par les dégâts constatés sur le côté droit du taxi, que Mme [C] a percuté, lorsqu'elle l'a doublé, la portière qu'ouvrait le client, de sorte qu'en ne se déportant pas suffisamment pour ne pas risquer de heurter le véhicule qu'elle voulait dépasser, elle a méconnu les exigences de l'article R. 414-4 du code de la route.

En outre, il ressort tant des déclarations du chauffeur du taxi - « à l'arrêt mon client est descendu du véhicule côté droit » - que celles de Mme [C] que le taxi était à l'arrêt au moment du choc.

Or le fait que, dans une rue de [Localité 14], un client puisse sortir d'un taxi arrêté ne saurait constituer un événement imprévisible et irrésistible susceptible de caractériser un cas de force quand bien même le taxi n'aurait pas actionné ses feux de détresse.

Compte tenu de la nature et de la gravité des fautes de conduite retenues à l'encontre de Mme [C], lesquelles ont contribué à la réalisation de son préjudice, il y a lieu, de réduire son droit à indemnisation de 50 %.

Il incombe ainsi à la société MAT, qui ne dénie pas sa garantie, d'indemniser les préjudices subis par Mme [C] à hauteur de 50 %.

Le jugement sera infirmé.

Sur le préjudice corporel de Mme [C]

Les Docteurs [A] et [N] ont indiqué dans leur rapport amiable contradictoire du 26 juin 2017 que Mme [C] a présenté à la suite de l'accident survenu le 26 mai 2015, un traumatisme du gros orteil gauche avec lésion unguéale et une fracture fermée des deux os de la jambe gauche, tiers distal, associée à une fracture métaphysaire proximale du péroné et qu'elle conserve comme séquelles des douleurs étagées du membre inférieur gauche, un enraidissement de la cheville gauche, une bonne récupération de la paralysie du sciatique poplité externe avec toutefois la persistance d'une discrète parésie sur les releveurs et une hypoesthésie de la jambe gauche qui entraînent une limitation des déplacements, une impossibilité de courir, une gêne pour la pratique des escaliers, une diminution de la force de releveurs sur le gros orteil, les difficultés pour se tenir sur la pointe des pieds et une station debout prolongée pénible ainsi que des troubles psychologiques qui se sont amendés mais qui persistent.

Ils ont conclu ainsi qu'il suit :

- date de consolidation : 26 mai 2017

- « gêne temporaire totale » du :

- 26 mai 2015 au 30 mai 2015

- 22 février 2016 au 27 février 2016

- « gêne temporaire partielle » au taux de :

- 50 % (classe III) du :

- 31 mai 2015 au 21 février 2016

- 28 février 2016 au 15 mai 2016

- 25 % (classe II) du 16 mai 2016 au 26 mai 2017

- atteinte à l'intégrité physique et psychologique : 12 %,

- souffrances endurées : 4,5/7

- dommage esthétique temporaire : 2,5/7

- dommage esthétique définitif : 2,5/7 (cicatrice + boiterie)

- frais futurs : pas de frais futurs prévisibles de façon certaine,

- retentissement des séquelles sur le plan professionnel : les experts s'accordent pour dire que sont imputables à l'accident une limitation des déplacements, une station debout prolongée pénible rendant très difficile une activité d'agent immobilier, notamment à [Localité 14]. La blessée est apte, par contre, à une activité sédentaire,

- arrêt temporaire des activités professionnelles imputable du 26 mai 2015 au 24 octobre 2016. Les experts s'accordent pour dire que l'intéressée est apte à une activité purement sédentaire à compter du 24 octobre 2016 mais qu'au-delà, il persistait un retentissement professionnel qui est décrit ci-dessous et qui persiste après consolidation,

- retentissement sur les activités de loisir : arrêt de la course à pied imputable à l'accident, limitation des mouvements des membres inférieurs pour la gymnastique en salle,

- tierce personne : il y a une divergence d'appréciation de retentissement sur les gestes dits essentiels de la vie quotidienne.

Pour le Docteur [A], la blessée ayant indiqué qu'elle avait pu maintenir une autonomie complète dans ce cadre, il avait proposé 4 heures par semaine depuis l'accident jusqu'au 15 janvier 2017 ; à partir du 15 janvier 2017, et après consolidation, il retient exclusivement une impossibilité de monter sur un escabeau (susceptible de générer de façon ponctuelle une aide pour le lavage des carreaux notamment).

Pour le Docteur [N], médecin conseil de Mme [C], justifiant d'une difficulté à réaliser les dix gestes de la vie quotidienne, il propose 3 heures par jour pendant les périodes de gêne temporaire partielle de classe III et 1 heure par jour pendant la période de gêne temporaire partielle de classe II. Il propose ensuite 3 heures par semaine pour les grosses courses, les gros travaux ménagers jusqu'à consolidation et après consolidation à titre viager,

- aménagement : prise en charge du surcoût de la boîte automatique lors de l'acquisition d'un nouveau véhicule.

Leur rapport constitue sous les amendements qui suivent, une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime née le [Date naissance 8] 1984, de son activité professionnelle antérieure à l'accident, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage et de ce qu'il résulte de l'article L.434-2 du code de la sécurité sociale que la rente versée à la victime d'un accident du travail indemnise les pertes de gains professionnels futurs et l'incidence professionnelle de l'incapacité, mais non le déficit fonctionnel permanent.

Par ailleurs, M. [H] [F] s'étant vu attribuer une rente d'accident du travail par la CPAM à compter du 15 novembre 2019, il convient de relever qu'eu égard à sa finalité de réparation d'une incapacité permanente de travail, qui lui est assignée à l'article L. 431-1 du code de la sécurité sociale, et à son mode de calcul, en fonction du salaire de référence défini à l'article L 434-2 du même code, la rente d'accident du travail doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident, c'est-à-dire ses pertes de gains professionnels futurs et l'incidence professionnelle de l'incapacité et que dès lors, le recours exercé par une caisse de sécurité sociale au titre d'une telle rente ne saurait s'exercer que sur ces deux postes de préjudice et non sur le poste de préjudice personnel du déficit fonctionnel permanent que cette rente ne répare pas (Assemblée plénière de la Cour de cassation, 20 janvier 2023, pourvois n° 20-23.673 et n°21-23.947).

Par ailleurs, selon l'article 31, alinéa 2, de la loi du 5 juillet 1985, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été indemnisée qu'en partie ; en ce cas, la victime peut exercer ses droits contre le responsable, pour ce qui lui reste dû, par préférence au tiers payeur dont elle n'a reçu qu'une indemnisation partielle.

Dans le cas d'une limitation du droit à indemnisation de la victime, le droit de préférence de celle-ci sur la dette du tiers responsable a pour conséquence que son préjudice corporel, évalué poste par poste, doit être intégralement réparé pour chacun de ces postes dans la mesure de l'indemnité laissée à la charge du tiers responsable, et que le tiers payeur ne peut exercer son recours, le cas échéant, que sur le reliquat.

Compte tenu de la réduction du droit à indemnisation de Mme [C], il convient de faire application de son droit de préférence par rapport au tiers payeurs, ce moyen, relevé d'office par la cour, ayant été soumis à la discussion préalable des parties.

Par ailleurs, l'évaluation du dommage doit être faite au moment où la cour statue ; et le barème de capitalisation utilisé sera celui publié par la Gazette du palais du 31 octobre 2022 au taux d'intérêts 0 % et qui est le plus approprié en l'espèce pour s'appuyer sur les données démographiques et économiques les plus pertinentes.

Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Dépenses de santé actuelles

Ce poste de préjudice vise à indemniser l'ensemble des dépenses de santé, incluant les frais d'hospitalisation, médicaux et pharmaceutiques, exposés avant la date de la consolidation.

Mme [C] sollicite au titre des « frais de déplacement et autres dépenses » :

- 4 127,92 euros au titre des frais de taxi Uber,

- 147 euros au titre des frais de taxis parisiens,

- 4 235 euros au titre des frais de prise en charge par une psychologue clinicienne,

- 530 euros au titre des frais d'ostéopathie et de posturologie,

- 63 euros de frais d'inscription à la piscine,

- 790 euros pour la bague de fiançailles,

- 240 euros pour le pantalon jean découpé.

Les sommes réclamées au titre des frais de transport (taxi Uber et taxis parisiens), des frais d'inscription à la piscine et de la dégradation de ses biens personnels (bague de fiançailles et pantalon jean) à la suite de l'accident qui relèvent des frais divers seront examinés à ce titre.

Seules constituent des dépenses de santé :

- la somme de 1 760 euros au titre des frais de prise en charge par une psychologue clinicienne à raison de 32 séances à 55 euros entre le 12 juillet 2016 et le 26 avril 2017 et de 2 475 pour 45 séances du 3 mai 2017 au 14 décembre 2017 soit un total de 4 235 euros,

- les frais d'ostéopathie et de posturologie à hauteur de 530 euros.

Par ailleurs, il convient de distinguer parmi ces dépenses, celles engagées avant la date de consolidation qui relèvent du poste des dépenses de santé actuelles et celles postérieures à cette date qui seront examinées au titre des dépenses de santé futures.

Il résulte de la quittance établie par Mme [K] [T], psychologue clinicienne, qu'entre le 12 juillet 2016 et le 26 avril 2017, Mme [C] est venue la consulter 32 fois et que chaque séance est rémunérée à hauteur de 55 euros ; dès lors, la somme de 1 760 euros (32 séances x 55 euros) sollicitée par Mme [C], et à laquelle ne s'oppose pas la société MAT est justifiée.

En outre, il résulte également de cette quittance que Mme [C] a consulté Mme [T] 13 fois entre le 3 mai 2017 et 14 décembre 2017 dont une fois le 3 mai 2017 puis à partir du 1er juin 2017. Dès lors, au regard de la date de consolidation, il convient également de retenir au titre de ce poste de préjudice, la séance du 3 mai 2017 ; les autres séances relevant des dépenses de santé futures.

Il sera ainsi alloué au titre de la prise en charge par une psychologue clinicienne antérieure à la consolidation et restée à la charge de Mme [C], la somme totale de 1 815 euros (1 760 euros + 55 euros).

Mme [C] justifie également de consultations d'ostéopathie, entre le 3 août 2016 et 26 mai 2017, pour un montant total de 290 euros [(2 x 65 euros) + (2 x 80 euros)] non contestée par la société MAT, les autres consultations invoquées par Mme [C] étant postérieures à la date de consolidation.

Le montant des dépenses de santé restées à charge pour la période antérieure à la consolidation s'élève ainsi à la somme totale de 2 105 euros (1 815 euros + 290 euros).

Par ailleurs, il résulte de la notification définitive des débours de la CPAM en date du 15 mars 2021 ainsi que de l'attestation d'imputabilité, que cet organisme a pris en charge au titre des frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques et d'appareillage antérieurs à la date de consolidation, et imputables à l'accident du 26 mai 2015, la somme de 22 249,18 euros, à laquelle il convient d'ajouter celle de 1 113,87 euros correspondant aux frais de transport pour la période du 3 août 2015 au 5 avril 2016, qui constituent, s'agissant de transports médicalisés ou réalisés sur prescription médicale, des dépenses de santé.

La créance de la CPAM au titre des frais de santé actuels s'élève ainsi à la somme de 23 363,05 euros (22 249,18 euros + 1 113,87 euros).

Le poste de préjudice des dépenses de santé actuelles s'établit ainsi à la somme totale de 25 468,05 euros (23 363,05 euros + 2 015 euros).

Compte tenu de la réduction du droit à indemnisation de Mme [C], il convient de faire application de son droit de préférence par rapport au tiers payeurs.

Dans le cas de l'espèce, la fraction des dépenses de santé imputables à l'accident, non compensée par les prestations servies par la CPAM, soit la somme de 2 105 euros est inférieure à la dette d'indemnisation incombant à la société MAT, laquelle après application de la réduction du droit à indemnisation de 50 %, s'élève la somme de 12 734,02 euros [(25 468,05 euros x 50 %].

Il en résulte que la somme de 2 105 euros revient à Mme [C] par préférence au tiers payeur, le recours de la CPAM ne pouvant s'exercer que sur le reliquat soit sur la somme de 10 629,02 euros (12 734,02 euros - 2 105 euros).

Le jugement sera infirmé.

- Frais divers

Ce poste comprend tous les frais susceptibles d'être exposés par la victime directe avant la date de consolidation de ses blessures et qui sont imputables à l'accident à l'origine du dommage corporel qu'elle a subi.

Mme [C] sollicite les sommes de :

- 1 920 euros au titre des frais d'assistance à expertise par son médecin conseil,

- au titre des frais de transport :

- 4 127,92 euros pour ses déplacements médicaux et quotidiens (achat de courses),

- 147 euros de frais de taxis parisiens,

- 63 euros au titre des frais d'inscription à la piscine en vue de sa rééducation,

- au titre de ses biens personnels :

- 790 euros correspondant au coût d'achat de sa bague de fiançailles perdue au moment du choc,

- 240 euros au titre du coût d'achat du jean découpé au service des urgences.

La société MAT acquiesce à la demande Mme [C] concernant les frais d'assistance à l'expertise, sous réserve de la limitation de son droit à indemnisation, et sollicite le rejet de ses autres demandes.

La CPAM se prévaut d'une créance de 1 113,87 euros au titre des frais de transport du 3 août 2015 au 5 avril 2016, demande sur laquelle il a été précédemment statué au titre des dépenses de santé actuelles.

Sur les honoraires du médecin conseil

Au regard des factures du Docteur [N] des 21 novembre 2016 et 14 juin 2017 à hauteur de 960 euros chacune, il sera alloué à Mme [C] la somme de 1 920 euros (960 euros x 2) au titre des honoraires du médecin conseil qui constituent une dépense rendue nécessaire par le fait dommageable.

Sur les frais de transport

Mme [C] sollicite au titre des frais de transport la somme totale de 4 274,92 euros (4 127,92 euros + 147 euros).

La société MAT, qui conteste cette demande, fait valoir que les reçus produits ne permettent pas de déterminer les trajets effectués ni leur lien avec l'accident et ajoute que ceux qui sont postérieurs au 29 avril 2016 ne sont pas justifiés dans la mesure où Mme [C] a affirmé se déplacer en véhicule Smart depuis cette date.

Elle fait également valoir que la CPAM a versé la somme de 1 113,87 euros à Mme [C] au titre de ses frais de transport.

Sur ce, Mme [C] verse aux débats un historique des courses auprès de la société Uber du 20 août 2015 au 2 juin 2017 ainsi que 7 factures de taxi.

Il résulte du parcours de soins de la victime décrit dans le rapport d'expertise, que de nombreux trajets, tels que ceux des 12 août 2015, 20 octobre 2015, 9 novembre 2015 ou 21 mars 2017 ont été effectués pour se rendre à des rendez-vous médicaux de sorte qu'au regard des pièces communiquées, la cour est en mesure de fixer les frais de transport de Mme [C] rendus nécessaires par l'accident à la somme de 1 250 euros.

Sur les frais d'inscription à la piscine

Mme [C] sollicite la somme de 63 euros au titre des frais d'inscription à la piscine en vue de sa rééducation.

La société MAT s'oppose à la demande. Elle soutient que la pièce versée aux débats est illisible et ne permet pas de vérifier le montant sollicité.

Sur ce, la preuve des frais exposés incombe à Mme [C] qui produit aux débats une pièce n° 28 intitulée sur le bordereau de pièces communiquées « les frais d'inscription à la piscine » et qui est totalement illisible.

La cour l'a alors invitée par message RPVA du 17 mai 2024, adressé dans le cadre du délibéré, à produire une copie plus lisible de cette pièce, demande qui est demeurée sans réponse.

Dès lors, en l'absence de preuve des frais invoqués et de leur lien avec l'accident, il ne sera pas fait droit à la demande de Mme [C] à ce titre.

Sur les frais vestimentaires et la bague de fiançailles

Mme [C] sollicite les sommes de 240 euros au titre des frais de remplacement du jean découpé aux service des urgences et de 790 euros au titre des frais liés à l'achat d'une bague de fiançailles perdue lors de l'accident.

La société MAT conteste les demandes. Elle constate que Mme [C] ne verse pas aux débats de justificatif d'achat du jean et qu'elle ne justifie pas de la propriété de la bague de fiançailles, ni qu'elle la portait lors de cet accident.

En ce qui concerne le jean, il est indéniable que la chute du scooter lors de l'accident, qui a occasionné une blessure à la jambe gauche de Mme [C], a endommagé les vêtements qu'elle portait et particulièrement son pantalon dont la cour est en mesure d'évaluer le coût de remplacement à la somme de 200 euros.

En revanche, il n'est pas démontré que Mme [C] portait une bague de fiançailles le jour de l'accident ce qui n'est d'ailleurs pas mentionné dans l'enquête de police. Elle ne justifie pas ainsi de la perte de ce bijoux lors de l'accident.

***

Le poste de préjudice des frais divers s'établit ainsi à la somme de 3 370 euros (1 920 euros + 1 250 euros + 200 euros) et il revient à Mme [C] la somme de 1 685 euros après application de la réduction de 50 % de son droit à indemnisation.

- Frais de véhicule adapté avant consolidation

Le tribunal a alloué à Mme [C] la somme de 3 777,36 euros correspondant à l'achat d'un véhicule avec boîte de vitesses automatique après application de la réduction de son droit à indemnisation qu'il a fixée à 20 %.

Mme [C] sollicite la confirmation du jugement à l'exception de la réduction de son droit à indemnisation.

Elle fait valoir qu'elle ne se déplaçait qu'en scooter avant l'accident, de sorte qu'elle a été contrainte d'acquérir, le 29 avril 2016, un véhicule comportant une boîte de vitesses automatique de série. Elle sollicite le remboursement du prix d'acquisition du véhicule à hauteur de 4 500 euros auquel s'ajoute la somme de 221,70 euros au titre des frais d'immatriculation.

En réponse à l'argumentation de la société MAT, elle expose que ne disposant pas d'un véhicule avant l'accident, elle ne peut justifier d'aucun frais d'aménagement d'une boîte de vitesses automatique.

La société MAT conclut à la réformation du jugement et offre à Mme [C] la somme de 110,85 euros après application de la réduction de son droit indemnisation de 50 %.

Elle s'oppose à la demande formée au titre du coût d'acquisition du véhicule.

Elle soutient que Mme [C] ne produit aucun justificatif relatif aux frais d'aménagement du véhicule qui seuls peuvent donner lieu à indemnisation.

Elle fait également valoir qu'en l'absence de preuve de paiement, Mme [C] ne produit aucun élément probant quant au coût d'acquisition du véhicule et que l'attestation de son ancien propriétaire n'est pas efficiente dans la mesure où elle ne répond pas aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile.

Sur ce, si la demande de Mme [C] portant sur des frais d'acquisition d'un véhicule avant la date de consolidation de son état, relève en principe des frais divers, elle sera par souci de clarté, examinée sous un poste de préjudice dédié.

Les experts ont conclu à la nécessité d'une boîte de vitesses automatique lors de l'acquisition d'un nouveau véhicule.

Madame [C] produit, à l'appui de sa demande, une déclaration de cession d'un véhicule de marque Smart, le 29 avril 2016, le certificat d'immatriculation au nom de M. [S] [D] de ce véhicule barré avec la mention « vendue le 29 avril 2016 » et une attestation sur l'honneur de M. [D] certifiant avoir vendu un véhicule Smart à Mme [C] pour un montant de 4 500 euros le 29 avril 2016.

Il résulte de ces éléments précis et concordants que Mme [C] a acquis le 29 avril 2016 un véhicule au prix de 4 500 euros dont il n'est pas contesté qu'il comporte une boîte de vitesses automatique.

Dès lors, dans la mesure où Mme [C] ne disposait pas d'un véhicule automobile, il sera fait droit à sa demande de remboursement du prix d'acquisition d'un véhicule équipé d'une boîte de vitesses automatique, achat rendu nécessaire par les séquelles de l'accident, qui ne représente pas une dépense somptuaire.

Il convient également de faire droit à sa demande relative aux frais de mise en service du véhicule, à hauteur de 221,70 euros, qui sont nécessaires et justifiés par la production de l'impression de la demande de carte grise en ligne effectuée par Mme [C] le 11 mai 2016.

Il sera ainsi alloué à Mme [C] la somme de 2 360,85 euros [( 4 500 euros + 221,70 euros) x 50 %] au regard de la réduction de son droit indemnisation.

Le jugement sera infirmé.

- Frais de logement adapté avant consolidation

Le tribunal a alloué Mme [C] à ce titre la somme de 3 032,80 euros en tenant compte d'une réduction de son droit à indemnisation de 20 %.

Mme [C] conclut à l'infirmation du jugement.

Elle expose avoir dû quitter l'appartement situé au quatrième étage sans ascenseur, qu'elle occupait à titre gratuit avant l'accident, pour loger, à la sortie de l'hôpital, dans un hôtel pendant trois jours puis dans un logement loué via la plate-forme Airbnb pendant 31 jours avant de louer, auprès d'une connaissance, un appartement situé dans un immeuble équipé d'un ascenseur jusqu'à la fin de l'année 2015 puis de prendre à bail un nouveau logement dépendant d'un immeuble avec ascenseur situé [Adresse 5].

Elle sollicite ainsi les sommes suivantes :

- 15 696 euros au titre des frais d'hôtel, de logement Airbnb et de loyer jusqu'à la date de consolidation,

- 2 250 euros au titre des frais de location d'un parking situé à l'adresse du [Adresse 4] à [Localité 14] dans la mesure où elle ne pouvait plus se déplacer à pied,

- 2 429,26 euros au titre des frais d'aménagement de l'appartement loué [Adresse 15],

- 44 euros de frais de suivi de courrier de l'ancienne adresse à la nouvelle.

La société MAT conclut à l'infirmation du jugement et offre la somme de 1 895,50 euros après réduction du droit à indemnisation de Mme [C] à hauteur de 50 %.

Elle ne conteste pas le montant des frais d'hôtel et de location via le site Airbnb mais conclut au rejet de la demande de Mme [C] au titre des frais de location auprès d'une connaissance au motif qu'elle ne verse aucune pièce justificative ainsi que des frais de location d'un appartement à partir de 2016 dans la mesure où les experts n'ont pas retenu la nécessité pour Mme [C] de changer de logement.

Elle s'oppose également à la demande formulée pour le parking au motif que Mme [C] n'établit pas que la location de ce parking est en lien avec ses séquelles.

Concernant les frais d'aménagement, la société MAT soutient qu'il n'est pas établi que les dépenses concernant des meubles effectuées par Mme [C] sont en lien avec ses séquelles et rappelle que les experts n'ont pas retenu la nécessité d'un déménagement.

Sur ce, si la demande de Mme [C] portant sur des frais de logement exposés avant la date de consolidation de son état, relève en principe des frais divers, elle sera, par souci de clarté, examinée sous un poste de préjudice dédié.

Il résulte de l'attestation de M. [X] [R], accompagnée de sa carte d'identité, qu'au moment de l'accident Mme [C] était hébergée à titre gratuit dans un studio de 12 m² situé au 4ème étage d'un immeuble dépourvu d'ascenseur.

Au regard des conséquences de l'accident qui ont nécessité le port d'un plâtre jusqu'au 22 juillet 2015 avec béquilles, Mme [C] ne pouvait plus habiter son appartement, de sorte que les frais d'hôtel du 2 juin 2015 dont elle produit une facture de 478 euros et ceux d'une location d'un logement via le site Internet Airbnb du 3 juin 2015 au 30 juin 2015 pour un coût de 3 313 euros, dont elle justifie également, sont en lien avec l'accident et lui seront alloués.

Il ressort du rapport d'expertise que le compte rendu de consultation du 30 septembre 2015 retrouve une raideur de la cheville et que la radiographie, alors pratiquée, évoque une algodystrophie étant précisé par les experts que pendant cette période, la blessée n'avait qu'un appui très partiel et continuait à utiliser des béquilles et ce au moins jusqu'à l'examen de janvier 2016, le rapport ajoutant que « l'intéressée a poursuivi l'utilisation d'une canne jusqu'au 15 janvier 2017 » et qu'elle conserve comme séquelles une gêne pour la pratique des escaliers.

Il résulte ainsi de l'ensemble de ces éléments, l'impossibilité pour Mme [C] de regagner le domicile qu'elle occupait à titre gratuit avant les faits et la nécessité de louer un nouveau logement équipé d'un ascenseur ou situé au rez-de-chaussée.

Elle produit une attestation de Mme [Z] [Y] du 6 avril 2020, accompagnée de sa carte d'identité, précisant lui avoir loué un appartement situé [Adresse 5], du 2 novembre 2015 au mois de janvier 2020 moyennant un loyer mensuel de 865 euros jusqu'au 1er novembre 2017 et de 870,63 euros ensuite.

Il est ainsi établi que Mme [C], qui a été contrainte d'exposer des frais de loyer alors qu'elle était logée gratuitement par son employeur, justifie d'un préjudice s'élevant à la somme de 16'435 euros, correspondant à 19 mois de loyers entre novembre 2015 et mai 2017, période à laquelle elle limite sa demande.

Les frais d'hôtel, de logement Airbnb et de loyer jusqu'à la date de consolidation, s'élèvent ainsi à la somme totale de 20'226 euros (478 euros + 3 313 euros + 16'435 euros ) qui sera ramenée à 15 696 euros pour rester dans la limite de la demande.

Concernant la prise en charge des frais de location d'un parking, que Mme [C] sollicite jusqu'à la date de consolidation, elle produit un document en date du 17 février 2020 signé par M. [W] [I] précisant lui avoir loué un parking situé [Adresse 5], pour un loyer mensuel de 125 euros du mois de février 2016 au mois de février 2020 ainsi que le contrat de location du parking établi le 17 février 2016.

Or, il résulte des documents produits par Mme [C] qu'elle a fait l'acquisition d'un véhicule, rendue nécessaire par les lésions et séquelles de l'accident, le 29 avril 2016, de sorte qu'il convient d'indemniser ses frais de location de parking à compter du mois de mai 2016 jusqu'au mois de mai 2017.

Au regard du loyer mensuel de 125 euros stipulé dans ce document, les frais de parking du 1er mai 2016 à la fin du mois de mai 2017 s'élèvent à la somme de 1 625 euros (125 euros x 13 mois).

Concernant les frais d'aménagement du logement du [Adresse 5], Mme [C] produit des factures d'un magasin de meubles, du 1er février 2016, à hauteur de 2 248,76 euros et d'une enseigne de bricolage, du 3 février 2016, à hauteur de 180,50 euros. L'attestation précitée de Mme [Y] du 6 avril 2020 ne permettant pas de déterminer si l'appartement loué à Mme [C] était vide ou meublé, il n'est pas justifié que l'achat de meubles et de matériels de bricolage en février 2016, plus de trois mois après la date d'entrée dans les lieux le 2 novembre 2015, constituaient des dépenses rendues nécessaires par l'accident.

Il ne sera dès lors pas fait droit à sa demande d'indemnisation à hauteur de 2 429,26 euros.

Il convient, en revanche d'indemniser les frais de suivi de courrier d'un montant justifié de 44 euros au vu de la commande effectuée auprès de la poste, dès lors que Mme [C] a été contrainte de quitter le logement qu'elle occupait gracieusement à la suite de l'accident.

Compte tenu de la réduction de son droit à indemnisation de 50 %, la société MAT sera condamnée à payer à Mme [C] au titre des frais de logement adapté, la somme totale de 8'682,50 euros [50 % (15 696 euros + 1 625 euros + 44 euros)].

Le jugement sera infirmé.

- Assistance temporaire de tierce personne

Ce poste vise à indemniser, pendant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident jusqu'à la consolidation, le coût pour la victime de la présence nécessaire, de manière temporaire, d'une tierce personne à ses côtés pour l'assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d'autonomie. Il ne se limite pas aux seuls actes essentiels de la vie courante.

Le tribunal a alloué la somme de 11 692,80 euros sur la base d'un taux horaire de 18 euros de l'heure et en se fondant sur les conclusions du rapport du Docteur [V] et a rejeté la demande d'expertise complémentaire.

Mme [C] sollicite, en infirmation du jugement, la somme totale de 35 060 euros sur la base d'un taux horaire de 20 euros et des conclusions du Docteur [N]. Elle conteste la pertinence de la consultation non contradictoire du Docteur [V], rédigée à la demande de la société MAT, uniquement sur des pièces que celle-ci lui a communiquées à son insu et qui recherche un compromis ne reflétant pas la réalité de son besoin de tierce personne.

La société MAT offre, en infirmation du jugement, la somme de 6 082,98 euros après réduction du droit à indemnisation de 50 % et sur la base des conclusions du Docteur [V] et d'un coût horaire de 15 euros. A titre subsidiaire, si la cour estime que le rapport établi par le Docteur [V] est insuffisant, elle sollicite la désignation d'un médecin expert avec pour mission de se prononcer sur la tierce personne.

Sur ce, la nécessité de la présence auprès de Mme [C] d'une tierce personne pour l'aider dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, suppléer sa perte d'autonomie n'est pas contestée en son principe mais est discutée dans son étendue et dans son coût.

En l'espèce, comme le relèvent les conclusions du rapport d'expertise, les analyses des deux experts divergent quant à l'appréciation du retentissement de l'accident sur les gestes dits essentiels de la vie quotidienne.

« Pour le Docteur [A], médecin conseil de la société d'assurance, la blessée ayant indiqué qu'elle avait pu maintenir une autonomie complète dans ce cadre, il avait proposé 4 heures par semaine depuis l'accident jusqu'au 15 janvier 2017 ; à partir du 15 janvier 2017 (...) il retient exclusivement une impossibilité de monter sur un escabeau (susceptible de générer de façon ponctuelle une aide pour le lavage des carreaux notamment).

Pour le Docteur [N], médecin conseil de Mme [C], justifiant d'une difficulté à réaliser les dix gestes de la vie quotidienne, il propose 3 heures par jour pendant les périodes de gêne temporaire partielle de classe III et 1 heure par jour pendant la période de gêne temporaire partielle de classe II jusqu'au 15 janvier 2017, date d'abandon de la canne anglaise. Il propose ensuite 3 heures par semaine pour les grosses courses, les gros travaux ménagers jusqu'à consolidation (...) ».

Se fondant sur ce désaccord concernant l'évaluation de la tierce personne, la société MAT a sollicité auprès du Docteur [V] une consultation « médico-légale ». Dans un document du 19 juillet 2017, ce praticien a retenu « en classe III : 1h30 par jour, en classe II : 5 heures par semaine, en classe I : 3 heures par semaine ». Néanmoins, cette analyse unilatérale réalisée uniquement sur pièces, sans examen clinique de Mme [C], ne saurait emporter la conviction de la cour.

En revanche, il résulte du rapport d'expertise amiable contradictoire des Docteurs [A] et [N] que Mme [C] a présenté à la suite de l'accident, un traumatisme du gros orteil gauche avec lésion unguéale et une fracture fermée deux os de la jambe gauche, tiers distal associée à une fracture métaphysaire proximale du péroné. Les experts précisent également qu'elle a été opérée dans les suites de l'accident pour enclouage centro-médullaire verrouillé du tibia gauche, a été hospitalisée jusqu'au 30 mai 2015, a porté un plâtre jusqu'au 22 juillet 2015, qu'à l'ablation du plâtre, il a été constaté une paralysie du sciatique poplité externe et une algodystrophie, que l'évolution a été marquée par une absence de consolidation osseuse qui a motivé la poursuite des cannes béquilles, que le diagnostic de pseudarthrose a été posé en octobre 2015 avec une indication à une décortication greffe et que l'intervention a été réalisée au cours d'une hospitalisation du 22 au 27 février 2016 suivie d'une immobilisation plâtrée. Qu'elle n'a alors pu reprendre un appui avec deux béquilles que le 15 mai 2016 et jusqu'au 3 août 2016, date à laquelle elle a pu utiliser une seule béquille dont elle se servait toujours le jour de l'expertise sachant que la canne anglaise a été abandonnée le 15 janvier 2017.

Il est également relevé par les experts que « elle a eu des difficultés pendant les périodes de non appui pour s'habiller et faire sa toilette ce qui lui prenait beaucoup de temps » et « qu'elle n'a pu réaliser aucune tâche ménagère jusqu'à ce jour [le 14 juin 2017, jour de l'expertise], le ménage étant réalisé par une de ses amies ».

Ces éléments sont suffisamment précis et circonstanciés pour permettre à la cour de statuer sur le besoin en aide humaine de Mme [C] avant la date de consolidation, qui ne se limite pas aux gestes essentiels de la vie quotidienne, sans avoir recours à la désignation d'un expert.

Au vu des éléments qui précèdent, il convient d'évaluer le besoin d'assistance par une tierce personne de Mme [C] avant consolidation de la manière suivante :

- 3 heures par jour du 31 mai 2015 au 21 février 2016 et du 28 février 2016 au 15 mai 2016, périodes de gène temporaire partielle au taux de 50 %,

- 1 heure par jour du 16 mai 2016 au 15 janvier 2017, date de l'abandon de la canne anglaise,

- 3 heures par semaine pour les grosses courses, les gros travaux ménagers du 16 janvier 2017 jusqu'à la date de consolidation.

En application du principe de la réparation intégrale et quelles que soient les modalités choisies par la victime, le tiers responsable est tenu d'indemniser le recours à cette aide humaine indispensable qui ne saurait être réduit en cas d'aide familiale ni subordonné à la production des justificatifs des dépenses effectuées.

Eu égard à la nature de l'aide requise et du handicap qu'elle est destinée à compenser l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire de 20 euros sur une année de 365 jours.

L'indemnité de tierce personne s'établit ainsi de la manière suivante :

- pour la période du 31 mai 2015 au 21 février 2016

* 3 heures x 267 jours x 20 euros = 16'020 euros

- pour la période du 28 février 2016 au 15 mai 2016

* 3 heures x 78 jours x 20 euros = 4'680 euros

- pour la période du 16 mai 2016 au 15 janvier 2017

* 1 heure x 245 jours x 20 euros = 4 900 euros

- pour la période du 16 janvier 2017 au 26 mai 2017

* 3 heures x 18,16 semaines x 20 euros = 1 089,60 euros

Soit un total de 26 689,60 euros.

Il sera ainsi alloué la somme de 13'344,80 euros à Mme [C] au regard de la réduction de son droit à indemnisation de 50 %.

Le jugement sera infirmé.

- Perte de gains professionnels actuels

La perte de gains professionnels actuels indemnise une incapacité temporaire spécifique concernant les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évaluée au regard de la preuve d'une perte effective de revenus.

Le tribunal a débouté Mme [C] de sa demande et a réduit, au regard de la réduction du droit à indemnisation de la victime qu'elle a fixée à 20 %, les sommes allouées à la CPAM à 48 834,88 euros dans le cadre de la perte de gains professionnels actuels.

Mme [C] sollicite, en infirmation du jugement, la somme totale de 330 535,60 euros (234 861,60 euros du 26 mai 2015 au 8 janvier 2018 et 95 674 euros du 8 janvier 2018 au 31 mai 2019) au titre de sa perte de gains professionnels sans distinguer les pertes de gains professionnels actuels et futurs.

Elle expose qu'au moment de l'accident, le 26 mais 2015, elle exerçait la fonction de chargée de développement au titre d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la société [X] [R] France, le 1er avril 2015, moyennant une rémunération constituée d'un salaire de 2 500 euros bruts et de commissions à hauteur de 10 % des droits d'entrée à chaque signature de contrat d'un nouveau franchisé [X] [R] Immobilier, qu'elle estime à 7 500 euros par mois. Elle précise que pendant ses 2 mois d'activité, elle a fait signer 11 franchisés de sorte qu'elle a perçu des commissions à hauteur de 21'250 euros. Elle estime ainsi son revenu mensuel à 10 000 euros bruts.

Elle ajoute qu'elle exerçait également, depuis le mois de mai 2010 l'activité d'agent immobilier pour sa propre société, la société Get up immo SARL, dont le chiffre d 'affaires entre les mois de septembre 2014 à mai 2015 s'est élevé à la somme de 75 131 euros, et qu'elle n'a pas pu poursuivre cette activité à compter de l'accident.

La société MAT conclut à la confirmation du jugement et distingue la perte de gains professionnels actuels de la perte de gains professionnels futurs.

Elle précise qu'au jour de l'accident, Mme [C] était en période d'essai. Sa rémunération était fixée avec une partie fixe d'un montant mensuel brut de 2 500 euros, une partie variable basée sur un pourcentage mensuel de 10 % du chiffre d'affaires hors taxes et hors ristournes encaissé par la société au titre des droits d'entrée et licence de marque et que son employeur avait accepté de lui garantir, jusqu'au 31 décembre 2015, un salaire minimal mensuel de 3 250 euros bruts.

Elle fait valoir que Mme [C] ne rapporte pas la preuve des commissions mensuelles de 7 500 euros qu'elle invoque, de sorte que le revenu de 10'000 euros bruts par mois est purement hypothétique. Elles se fonde ainsi sur le salaire minimum garanti par l'employeur à hauteur de 3 250 euros bruts et en déduit qu'au regard des sommes perçues par Mme [C] de la CPAM et de son employeur, elle ne justifie d'aucune perte de gains imputable à l'accident pour la période préalable à la date de consolidation.

La CPAM conclut à la réformation du jugement et sollicite que soit fixée la perte de gains professionnels avant consolidation de Mme [C] à la somme de 240 000 euros sur laquelle il convient d'imputer les indemnités journalières qu'elle lui a servies du 28 mai 2015 au 26 mai 2017 à hauteur de 61 043,60 euros.

Sur ce, il résulte du contrat de travail à durée indéterminée conclut par Mme [C] avec la société [X] [R] France, avec effet au 1er avril 2015, qu'elle a été engagée par cette société en qualité de chargé de développement junior, sa principale fonction consistant à négocier sur l'ensemble du territoire national, des contrats de licence de marque pour le compte de la société [X] [R] France ce qui inclut la prospection avec un objectif, pour l'exercice 2015, de 16 contrats de licence de marque signés avant le 31 décembre 2015.

Les experts ont retenu un arrêt temporaire des activités professionnelles imputable à l'accident entre le 26 mai 2015 et le 24 octobre 2016, estimant qu'au-delà de cette date, Mme [C] était apte à une activité purement sédentaire.

Toutefois, il ressort des arrêts de travail produits et de l'avis d'inaptitude du médecin du travail établi le 10 janvier 2018 que Mme [C] ne pouvait reprendre son activité antérieure de chargée de développement en raison de son état de santé et qu'elle a été déclarée apte à une reprise d'activité au sein de la société [X] [R] France sur un poste de chargée d'animation et de formation qu'elle a occupé à compter du 8 janvier 2018 ainsi qu'il résulte de l'avenant au contrat initial de travail.

Il est ainsi établi que la cessation temporaire d'activité de Mme [C] entre le 24 octobre 2016 et le 26 mai 2017, date de la consolidation, est imputable à l'accident, nonobstant l'avis des experts amiables qui ne lie pas la cour.

Il est ainsi démontré l'existence d'une perte de gains professionnels actuels entre la date de l'accident et celle de la consolidation.

Au titre de la rémunération, le contrat prévoit un salaire fixe mensuel brut forfaitaire de 2 500 euros payable sur 12 mois outre « une rémunération variable consistant en un pourcentage mensuel sur le chiffre d'affaires hors taxes et hors ristournes encaissé par la société au titre des droits d'entrée des contrats de licence de marque conclus par son intermédiaire, étant précisé que par chiffre d'affaires hors taxes et hors ristournes, il faut entendre le montant hors taxes des honoraires encaissés par la société, après déduction des ristournes extérieures éventuelles, des frais éventuels de contentieux et précontentieux. Cette rémunération variable sera calculée sur le barème suivant : 10 % du chiffre d'affaires hors taxes et hors ristournes encaissé mensuellement au titre des droits d'entrée/licence de marque. Cette rémunération variable sera versée à la salariée le mois suivant l'encaissement du chiffre d'affaires hors taxes et hors ristournes correspondant ».

Il est également précisé que « à titre exceptionnel, la société [X] [R] France accepte d'accorder à Mme [C] pour la période allant de sa date d'entrée dans la société au 31 décembre 2015, une garantie de salaire globale mensuelle minimale de 3 250 euros bruts. En conséquence, pendant la période considérée, la société [X] [R] France versera si nécessaire, une avance mensuelle, compensable sur la rémunération variable revenant ultérieurement à Mme [C], de façon que sa rémunération brute mensuelle globale, partie fixe incluse ne soit pas inférieure à 3 250 euros bruts (...)».

Mme [C] verse aux débats une attestation en date du 20 septembre 2019, de M. [M] [G], président de la société [X] [R] France, rédigée sur le papier à en-tête de la société, précisant qu'elle « a perçu au titre de la période de travail effectif qui a précédé son accident du travail, à savoir du 1er avril 2015 (date de son embauche en CDI) jusqu'au 26 mai 2015 (date de son accident du travail), une rémunération variable d'un montant de 21'250 euros bruts versés sur la période du 1er mai 2015 au 31 décembre 2016 ». Cette attestation est corroborée par les « commissions » figurant sur les fiches de paie produites de sorte qu'il convient de retenir qu'au cours de la période pendant laquelle elle a travaillé avant l'accident, soit du 1er avril 2015 au 26 mai 2015, Mme [C] a perçu des commissions pour un montant brut de 21'250 euros qui lui ont été versées de manière différée, à l'encaissement des honoraires liés aux contrats de licence de marque conclus par son intermédiaire, comme le prévoit son contrat de travail.

Néanmoins, la perception de commissions à un niveau équivalent à celui antérieur à l'accident, excédant la somme minimale garantie par le contrat de travail, étant par nature aléatoire, la perte de la rémunération qui y est associée ne peut s'analyser qu'en une perte de chance de gains qui n'est invoquée ni par Mme [C], ni par la CPAM, subrogée dans ses droits, et dont il n'est pas demandé l'indemnisation.

Dès lors, la perte de gains professionnels actuels entièrement consommée de Mme [C] se limite à la rémunération minimale garantie, telle qu'elle figure dans son contrat de travail, soit la somme mensuelle de 3 250 euros bruts, incluant le salaire fixe forfaitaire de 2 500 euros et la somme garantie au titre de la rémunération variable de 750 euros par mois (3 250 euros - 2 500 euros).

Il résulte de la fiche de paie de Mme [C] du 1er avril 2015, mois précédent l'accident, qu'elle a perçu ce salaire de 3 250 euros bruts, ce qui représente selon cette fiche de paie un salaire net de 2 506,35 euros.

Il en résulte que la perte de gains de Mme [C] du 26 mai 2015 au 26 mai 2017 est de 2 506,35 euros x 24 mois = 60 152,40 euros nets.

Il résulte des fiches de paie versées aux débats qu'à la suite de l'accident, Mme [C] a perçu de son employeur, des avances sur commission d'un montant de 750 euros bruts qui ont été maintenues au-delà du 31 décembre 2015, ainsi que les commissions excédant cette rémunération variable résultant de l'activité déployée antérieurement au fait dommageable ; en revanche, l'employeur a déduit les salaires de base correspondant aux périodes d'absence de la salariée à la suite de l'accident.

Le montant des avances sur commissions qui ont été maintenues et dont il convient de tenir compte s'élève à la somme de 18 000 euros (750 euros x 24 mois).

La perte de revenus de Mme [C], avant imputation de la créance de la CPAM, pour la période du 26 mai 2015 au 26 mai 2017 représente ainsi une somme de 42 152,40 euros (60 152,40 euros - 18 000 euros), étant observé que concernant les revenus procurés par son activité de gérante de la société Get up immo SARL, qu'elle n'a pu poursuivre après son accident, Mme [C] ne formule aucune demande, et que la CPAM ne justifie d'aucune prestation servie au titre de cette activité.

Compte tenu de la réduction de 50 % du droit à indemnisation de [C], la dette de la société MAT s'établit à la somme 21 076,40 euros (42 152,40 euros x 50 %).

Il ressort de la notification des débours définitifs de la CPAM du 15 mars 2021 que Mme [C] a bénéficié d'indemnités journalières d'un montant de 61 043,60 euros entre le 28 mai 2015 et le 26 mai 2017 soit antérieurement à la consolidation.

Ces indemnités journalières ayant permis d'indemniser totalement la perte de gains professionnels de Mme [C] avant application de la réduction de son droit à indemnisation, aucune somme ne revient à cette dernière et la somme de 21 076 euros revient à la CPAM.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il débouté Mme [C] de ses demandes au titre de la perte de gains professionnels actuels et infirmé sur la somme revenant à la CPAM.

Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)

- Dépenses de santé futures

Ce poste vise les frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques et assimilés, même occasionnels mais médicalement prévisibles, rendus nécessaires par l'état pathologique de la victime après la consolidation et incluent les frais liés soit à l'installation de prothèses soit à la pose d'appareillages spécifiques nécessaires afin de suppléer le handicap physiologique.

Le tribunal a débouté Mme [C] et la CPAM de leurs demandes en relevant que l'expert n'a pas retenu de frais futurs.

La société MAT sollicite la confirmation du jugement.

Mme [C] sollicite sous une rubrique intitulée « sur les frais de déplacement et autres dépenses » la somme de 2 475 euros au titre d'une prise en charge par une psychologue clinicienne.

Elle sollicite également, comme il l'a été précédemment relevé, sans distinction suivant la date de consolidation, des frais d'ostéopathie et de posturologie.

Sur ce, les experts ont conclu « pas de frais futurs prévisibles de façon certaine » tout en retenant par ailleurs des « troubles psychologiques qui se sont amendés mais qui persistent », il en résulte que le suivi psychologique de Mme [C] après la consolidation est justifié et en lien avec l'accident.

La quittance de Mme [K] [T], psychologue clinicienne, produite par Mme [C] porte sur une somme totale de 2 475 euros relative à 13 séances de 55 euros chacune du 3 mai 2017 au 28 novembre 2017 « + 32 séances précédentes » soit « 45 séances x 55 euros ».

Or, 33 séances ont déjà été indemnisées à hauteur de 1 815 euros au titre des dépenses de santé actuelles, de sorte qu'il sera alloué à Mme [C] la somme de 660 euros (12 x 55 euros) correspondant à la prise en charge des 12 séances, postérieures à la consolidation, du 1er juin 2017 au 28 novembre 2017 qui n'ont pas été préalablement indemnisées.

Par ailleurs, la société MAT n'a pas contesté, en leur principe, les frais de consultations d'ostéopathie restés à la charge de Mme [C] dont elle a offert l'indemnisation au titre du poste des dépenses de santé actuelles. Or, à ce titre, Mme [C] n'a été précédemment indemnisée que d'une partie des frais de consultations d'ostéopathie - celle dont la date est antérieure à la consolidation - à hauteur de 290 euros.

Il résulte des factures versées aux débats que Mme [C] a également effectué trois séances d'ostéopathie postérieurement à la date de consolidation (les 4 septembre 2017, 16 juin 2018 et 13 mars 2019) de 80 euros chacune, soit la somme totale de 240 euros (3x80 euros).

Les dépenses de santé futures demeurant à la charge de Mme [C] s'élèvent ainsi à la somme de 900 euros (660 euros + 240 euros).

Il résulte de la notification définitive des débours de la CPAM en date du15 mars 2021 que cet organisme a pris en charge après la réalisation de l'expertise amiable des frais hospitaliers, des frais médicaux (consultations de rééducation), des frais pharmaceutiques et des frais d'appareillage, pour un montant de 2 775,99 euros, dont l'imputabilité à l'accident est suffisamment établie par l'attestation du médecin conseil du service du contrôle médical, médecin indépendant vis de la CPAM.

Le poste des dépenses de santé futures s'établit ainsi à la somme totale de 3 675,99 euros (2 775,99 euros + 900 euros)

Compte tenu de la réduction du droit à indemnisation de Mme [C], il convient de faire application du droit de préférence de la victime.

Dans le cas de l'espèce, la fraction des dépenses de santé futures imputables à l'accident, non compensée par les prestations servies par la CPAM, soit la somme de 900 euros est inférieure à la dette d'indemnisation incombant à la société MAT, laquelle après application de la réduction du droit à indemnisation de 50 %, s'élève la somme de 1 838 euros (3 675,99 euros x 50 %).

Il en résulte que la somme de 900 euros revient à Mme [C] par préférence au tiers payeur, le recours de la CPAM ne pouvant s'exercer que sur le reliquat, soit la somme de 938 euros (1 838 euros - 900 euros).

Le jugement sera infirmé.

- Assistance permanente par tierce personne

Ce poste vise à indemniser, postérieurement à la consolidation, le coût pour la victime de la présence nécessaire, de manière définitive, d'une tierce personne à ses côtés pour l'assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d'autonomie.

La nécessité de la présence auprès de Mme [C] d'une tierce personne postérieurement à la consolidation pour l'aider dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité et suppléer sa perte d'autonomie n'est pas contestée dans son principe mais reste discutée dans son étendue et dans son coût.

Le tribunal a alloué la somme de 47 860,76 euros sur la base d'un taux horaire de 20 euros de l'heure et en fonction des conclusions du rapport du Docteur [V].

Mme [C] sollicite, en infirmation du jugement, la somme totale de 161 766,18 euros sur la base d'un taux horaire de 20 euros et des conclusions du Docteur [N]. Elle conteste également sur ce point la pertinence de la consultation non contradictoire du Docteur [V].

La société MAT offre, en infirmation du jugement, la somme de 6 082,98 euros après réduction du droit à indemnisation de 50 % et sur la base des conclusions du Docteur [V] et d'un coût horaire de 15 euros. A titre subsidiaire, si la cour estimait que le rapport établi par le Docteur [V] est insuffisant, elle sollicite la désignation d'un médecin expert avec pour mission de se prononcer sur la tierce personne.

Sur ce, comme le relèvent les conclusions du rapport d'expertise, les analyses des deux experts divergent quant à l'appréciation du retentissement de l'accident sur les gestes dits essentiels de la vie quotidienne : le Docteur [A], médecin conseil de la société d'assurance, retient après consolidation, exclusivement une impossibilité de monter sur un escabeau (susceptible de générer de façon ponctuelle une aide pour le lavage des carreaux notamment) tandis que le Docteur [N], médecin conseil de Mme [C], propose 3 heures par semaine pour les grosses courses, les gros travaux ménagers à titre viager.

Se fondant sur ce désaccord concernant l'évaluation de la tierce personne, la société MAT a sollicité auprès du Docteur [V] une consultation « médico-légale ». Dans un document du 19 juillet 2017, il a retenu une aide humaine à titre viager d'une heure par semaine. Néanmoins, cette analyse unilatérale réalisée uniquement sur pièces, sans examen clinique de Mme [C], ne saurait emporter la conviction de la cour.

En revanche, il résulte du rapport d'expertise amiable contradictoire des Docteurs [A] et [N] que Mme [C] conserve comme séquelles des douleurs étagées du membre inférieur gauche, un enraidissement de la cheville gauche, une bonne récupération de la paralysie du sciatique poplité externe avec toutefois la persistance d'une discrète parésie sur les releveurs et une hypoesthésie de la jambe gauche qui entraînent une limitation des déplacements, une impossibilité de courir, une gêne pour la pratique des escaliers, une diminution de la force des releveurs sur le gros orteil, les difficultés pour se tenir sur la pointe des pieds et une station debout prolongée pénible.

Ces éléments sont suffisamment précis et circonstanciés pour permettre à la cour de statuer sur le besoin pérenne en aide humaine de Mme [C] sans avoir recours à la désignation d'un expert.

Au regard des séquelles que conserve Mme [C], il convient d'évaluer son besoin d'assistance permanente par une tierce personne à 3 heures par semaine pour les grosses courses, les gros travaux ménagers comme proposé par le Docteur [N].

En application du principe de la réparation intégrale, le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance permanente par une tierce personne ne saurait être réduit en raison du caractère familial de l'aide apportée ni subordonné à la justification de dépenses effectives.

Eu égard à la nature de l'aide requise et du handicap qu'elle est destinée à compenser l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire de 20 euros sur une année de 365 jours ou 52 semaines.

L'indemnité de tierce personne permanente s'établit ainsi de la manière suivante :

- pour la période du 27 mai 2017 (lendemain de la date de consolidation) jusqu'à la date de la liquidation

* 3 heures x 52 semaines x 7,4 ans x 20 euros = 23 088 euros

- pour la période échoir par capitalisation selon l'euro de rente viagère prévu par le barème de capitalisation retenu par la cour une femme âgée de 40 ans à la date de la liquidation

* 3 heures x 52 semaines x 20 euros x 45,754 = 142 752,48 euros

Soit un total de 165'840,48 euros.

Il sera ainsi alloué la somme de 82'920,24 euros à Mme [C] au regard de la réduction de son droit à indemnisation de 50 %.

Le jugement sera infirmé.

- Perte de gains professionnels futurs

Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.

Il peut inclure dans certaines circonstances les pertes de droit à la retraite, même si celles-ci constituent en principe une composante de l'incidence professionnelle.

Le tribunal a débouté Mme [C] de sa demande et a fixé, au regard de la réduction du droit à indemnisation de la victime de 20 % qu'il a retenue, les sommes revenant à la CPAM au titre des indemnités journalières postérieures à la consolidation à la somme de 12 466,08 euros.

Comme il l'a été précédemment exposé, Mme [C] se prévaut d'une perte de gains professionnels jusqu'au 31 mai 2019 dont elle sollicite l'indemnisation à hauteur de la somme de 330 535,60 euros sans distinguer entre les pertes de gains professionnels actuels et futurs.

Concernant la période postérieure à la consolidation, elle précise qu'elle n'a pu retravailler au sein de la société [X] [R] immobilier que le 8 janvier 2018, en qualité de chargée d'animation et de formation, pour un salaire mensuel de 4 106 euros bruts mais sans commission.

Elle précise qu'elle a été déclarée inapte à son ancien poste de chargée de développement par le médecin du travail « le 10 janvier 2019 » [en réalité le 10 janvier 2018], et apte à ses nouvelles fonctions sédentaires d'animatrice et formatrice.

Elle ajoute qu'en raison d'une nouvelle intervention chirurgicale le 21 mars 2019 pour retrait du matériel d'ostéosynthèse ayant donné lieu à un arrêt de travail d'une durée indéteminée, elle a signé avec la société [X] [R] immobilier une rupture conventionnelle du contrat de travail avec effet au 31 mai 2019.

La société MAT conclut à la confirmation du jugement.

Elle fait valoir que Mme [C] ne rapporte pas la preuve des commissions mensuelles de 7 500 euros qu'elle invoque, de sorte que le revenu de 10'000 euros bruts par mois est purement hypothétique et qu'il y a donc lieu de se fonder sur le salaire minimum garanti par l'employeur à hauteur de 3 250 euros bruts.

Faisant observer que les revenus de Mme [C], au titre de l'année 2018, s'élèvent à 47 433,56 euros suivant le cumul net imposable figurant sur le bulletin de salaire de décembre 2018, soit un revenu net mensuel de 3 952,79 euros, et que pour les mois de janvier et de février 2019, elle a perçu un salaire net respectivement de 3 400,73 euros et 3 451,11 euros, elle en déduit que Mme [C] dont les revenus ont augmenté, ne justifie pas d'une perte de gains professionnels futurs.

La CPAM conclut à la réformation du jugement et sollicite que la perte de gains professionnels après consolidation de Mme [C] soit fixée à la somme de 240 000 euros (calculée en fonction d'une perte de 10 000 euros par mois) sur laquelle il convient d'imputer les indemnités journalières qu'elle lui a servies à hauteur de 15 532,60 euros et la rente accident du travail de 46 722,30 euros.

Sur ce, il convient d'observer qu'il n'est invoqué par Mme [C] et la CPAM, subrogée dans ses droits, une perte de gains professionnels futurs que jusqu'au 31 mai 2019.

Il y a lieu de distinguer la période du 27 mai 2017 au 7 janvier 2018, période pendant laquelle Mme [C] était toujours en arrêt de travail consécutivement à l'accident et la période du 8 janvier 2018 au 31 mai 2019 au cours de laquelle Mme [C] a bénéficié d'un changement de poste et occupé la fonction de chargé d'animation et de formation.

Concernant la première période, si Mme [C] fonde sa demande sur une perte de rémunération de 10 000 euros par mois liée à l'absence de possibilité de percevoir un salaire de base et des commissions, la perception de commissions excédant la somme minimale garantie par le contrat de travail étant par nature aléatoire, la perte de la rémunération qui y est associée en raison de l'accident ne peut s'analyser qu'en une perte de chance de gains qui n'est invoquée ni par Mme [C], ni par la CPAM, subrogée dans ses droits, et dont il n'est pas demandé l'indemnisation.

La perte de gains professionnels entièrement consommée de Mme [C] se limite ainsi à la rémunération minimale garantie telle qu'elle figure dans son contrat de travail soit la somme mensuelle de 3 250 euros bruts, incluant le salaire fixe forfaitaire de 2 500 euros et la somme garantie au titre de la rémunération variable de 750 euros par mois (3 250 euros - 2 500 euros) soit la somme de 2 506,35 euros nets précédemment retenue.

Dès lors, la perte de gains de Mme [C] du 27 mai 2017 au 7 janvier 2018 est de :

* 2 506,35 euros x 7,4 mois = 18 547 euros nets.

Il résulte des fiches de paie versées aux débats qu'à la suite de l'accident, Mme [C] a perçu de son employeur, des avances sur commission d'un montant de 750 euros bruts qui ont été maintenues au-delà du 31 décembre 2015, ainsi que les commissions excédant cette rémunération variable résultant de l'activité déployée antérieurement au fait dommageable ; en revanche, l'employeur a déduit les salaires de base correspondant aux périodes d'absence de la salariée à la suite de l'accident.

Le montant des avances sur commissions qui ont été maintenues et dont il convient de tenir compte s'élève à la somme de 5 550 euros (750 euros x 7,4 mois).

La perte de revenus de Mme [C], avant imputation de la créance de la CPAM, pour la période du 27 mai 2017 au 7 janvier 2018 représente ainsi une somme de 12'997 euros (18 547 euros - 5 550 euros).

Concernant la période du 8 janvier 2018 au 31 mai 2019, Mme [C] a bénéficié d'un changement de poste pour occuper la fonction de chargé d'animation et de formation, cette modification étant justifiée par les séquelles de l'accident dans la mesure où le médecin du travail a émis, le 10 janvier 2018, un avis d'inaptitude « au poste de chargé développement » avec aptitude « à la reprise sur le poste de chargée animation-formation ».

Il résulte de l'avenant au contrat de travail que le salaire mensuel brut forfaitaire de Mme [C] est de 4 106 euros jusqu'au 31 mai 2018 et de 4 483 euros à compter du 1er juin 2018, soit un montant supérieur à la somme de 3 250 euros bruts perçus avant l'accident, de sorte que Mme [C] ne justifie pas d'une perte de revenus pendant cette période.

Le poste de perte de gains professionnels futurs s'établit ainsi à la somme totale de 12'997 euros.

Compte tenu de la réduction de 50 % du droit à indemnisation de Mme [C], la dette de la société MAT s'établit à la somme 6 498,50 euros (12'997 euros x 50 %).

Il ressort de la notification des débours définitifs de la CPAM du 15 mars 2021 que Mme [C] a bénéficié d'indemnités journalières versées postérieurement à la date de consolidation pour un montant de 15 532,60 euros ainsi que d'une rente d'accident du travail dont les arrérages échus s'élèvent au 15 janvier 2021 à la somme de 3 843,36 euros, et le capital représentatif des arrérages à échoir représente la somme de 42 878,94 euros.

En application de l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985, il convient d'imputer ces prestations sur ce poste de dommage qu'elles ont vocation à réparer.

Les indemnités journalières post-consolidation ayant permis d'indemniser totalement la perte de gains professionnels de Mme [C] avant application de la réduction de son droit à indemnisation, aucune somme ne revient à cette dernière et la somme de 6 498,50 euros revient à la CPAM.

Il reste à imputer sur le poste de l'incidence professionnelle qu'elle a vocation à réparer la rente d'accident du travail dont les arrérages échus et le capital représentatif des arrérages à échoir s'élèvent à la somme de 46 722,30 euros.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [C] de ses demandes au titre de la perte de gains professionnels futurs et infirmé sur la somme revenant à la CPAM.

- Incidence professionnelle

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap ; il inclut les frais de reclassement professionnel, de formation ou de changement de poste, la perte de retraite que la victime va devoir supporter en raison de son handicap et la dévalorisation sociale ressentie par la victime du fait de son exclusion définitive du monde du travail.

Le tribunal a accordé la somme de 40 000 euros à Mme [C] après réduction de son droit à indemnisation qu'il a fixée à 20 %. Il lui a ainsi alloué la somme de 2 622,16 euros après déduction de la rente accident du travail versée par la CPAM à laquelle il a accordé la somme de 37 377,84 euros.

Mme [C] conclut à la réformation du jugement et sollicite la somme de 150 000 euros. Elle se prévaut des conclusions de l'expertise qui a retenu une pénibilité dans la station debout ce qui limite ses activités professionnelles d'agent immobilier ou toute autre activité qui nécessite une station debout. Elle ajoute être désormais cantonnée à un poste sédentaire qui ne correspondait pas à ses aspirations professionnelles. Elle renvoie à la jurisprudence de la Cour de cassation du 20 janvier 2023 concernant la déduction de la rente accident du travail servie par la CPAM.

La société MAT conclut à l'infirmation du jugement et offre à Mme [C] la somme de 10 000 euros, après réduction de son droit à indemnisation de 50 %, dont il convient de déduire la rente versée par la CPAM. Elle fait valoir que Mme [C] ne justifie pas de sa situation professionnelle actuelle.

La CPAM sollicite l'imputation du reliquat de la rente accident du travail de 46 722,30 euros sur le poste d'incidence professionnelle.

Sur ce, il ressort de l'expertise que Mme [C] conserve comme séquelles des douleurs étagées du membre inférieur gauche, un enraidissement de la cheville gauche, une bonne récupération de la paralysie du sciatique poplité externe avec toutefois la persistance d'une discrète parésie sur les releveurs et une hypoesthésie de la jambe gauche qui entraînent une limitation des déplacements, une impossibilité de courir, une gêne pour la pratique des escaliers, une diminution de la force de releveurs sur le gros orteil, les difficultés pour se tenir sur la pointe des pieds et une station debout prolongée pénible.

Les deux experts amiables s'accordent d'ailleurs pour reconnaître que « sont imputables à l'accident une limitation des déplacements, une station debout prolongée pénible rendant très difficile une activité d'agent immobilier, notamment à [Localité 14]. La blessée est apte, par contre, à une activité sédentaire » ce que confirme l'avis du médecin du travail du 10 janvier 2018 qui a déclaré Mme [C] « inapte au poste de chargé développement » mais « apte à la reprise sur le poste de chargée animation-formation ».

Il est d'ailleurs avéré que Mme [C] a bénéficié d'un reclassement sur un poste sédentaire au mois de janvier 2018.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les séquelles de l'accident limitent l'accès de Mme [C] aux professions qui exigent une station debout prolongée et des déplacements la contraignant à exercer une profession sédentaire ce qui caractérise une incidence professionnelle et qu'elles induisent une pénibilité et une fatigabilité accrues dans l'exercice de toute profession y compris sédentaire.

Ces composantes de l'incidence professionnelle justifient compte tenu de l'âge de Mme [C] au moment de la consolidation de l'accident (40 ans) et de sa profession antérieure qu'elle ne peut plus exercer, une indemnisation à hauteur de 80 000 euros.

Compte tenu de la réduction de 50 % du droit à indemnisation de Mme [C], la dette de la société MAT au titre de ce poste de préjudice est de 40 000 euros.

Comme rappelé plus haut, il convient d'imputer sur ce poste de préjudice qu'elle a indemnisé, la rente d'accident du travail servie à Mme [C] dont les arrérages échus et le capital des représentatif des arrérages à échoir s'élèvent à la somme totale de 46 722,30 euros.

Dans le cas de l'espèce, la fraction du poste de préjudice lié à l'incidence professionnelle, non compensée par la rente d'accident du travail, soit la somme de 33 277,70 euros (80 000 euros - 46 722,30 euros) est inférieure à la dette d'indemnisation incombant à la société MAT.

Il en résulte que la somme de 33 277,70 euros revient à Mme [C] par préférence au tiers payeur, le recours de la CPAM ne pouvant s'exercer que sur le reliquat, soit la somme de 6 722,30 euros (40 000 euros - 33 277,70 euros).

Le jugement sera infirmé.

Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice a pour objet d'indemniser l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident jusqu'à la consolidation. Cette incapacité fonctionnelle totale ou partielle correspond aux périodes d'hospitalisation de la victime et inclut la perte de la qualité de la vie et des joies usuelles de l'existence et le préjudice d'agrément et le préjudice sexuel pendant l'incapacité temporaire.

Le tribunal a alloué à Mme [C] la somme de 5 988,60 euros après réduction de son droit à indemnisation qu'il a retenue à hauteur de 20 %.

Mme [C] conclut à la confirmation du jugement qui a évalué ce poste de préjudice à la somme de 7 485,75 euros sur la base d'une indemnité journalière de 27 euros.

La société MAT conclut à l'infirmation du jugement et évalue ce poste de préjudice à la somme de 6 937,50 euros sur une base journalière d'indemnisation de 25 euros. Elle offre ainsi la somme de 3 468,75 euros après réduction du droit à indemnisation de la victime de 50 %.

Sur ce, eu égard à l'incapacité fonctionnelle subie par Mme [C] et aux troubles apportés à ses conditions d'existence avant la date de consolidation, ce poste de préjudice sera calculé, conformément à sa demande, sur une base journalière de 27 euros pour les périodes de déficit fonctionnel total et proportionnellement pour les périodes de déficit fonctionnel partiel.

Le déficit fonctionnel temporaire doit ainsi être évalué comme suit :

- 297 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire total du 26 mai 2015 au 30 mai 2015 et du 22 février 2016 au 27 février 2016 (11 jours x 27 euros)

- 4 657,50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % du 31 mai 2015 au 21 février 2016 et du 28 février 2016 au 15 mai 2016 (345 jours x 27 euros x 50 %)

- 2 531,25 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel à 25 % du 16 mai 2016 au 26 mai 2017 ( 375 jours x 27 euros x 25 %)

soit une somme totale de 7'485,75 euros.

Il sera ainsi alloué la somme de 3'742,87 euros à Mme [C] au regard de la réduction de son droit à indemnisation de 50 %.

Le jugement sera infirmé.

- Souffrances endurées

Ce poste comprend l'indemnisation de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à dire du jour de l'accident jusqu'à celui de la consolidation.

Le tribunal a évalué ce poste de préjudice à la somme de 20 000 euros de sorte qu'il a alloué à Mme [C] la somme de 5 988,60 euros après réduction de son droit à indemnisation qu'il a fixée à 20 %.

Mme [C] sollicite, en infirmation du jugement, la somme de 25 000 euros.

La société MAT évalue, en infirmation du jugement, ce poste de préjudice à la somme de 15 000 euros de sorte qu'elle offre la somme de 7 500 euros après réduction du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 50 %.

Sur ce, il y a lieu de tenir compte pour évaluer ce poste de préjudice, coté 4,5/ 7 par les experts, de l'importance du traumatisme initial, des souffrances physiques et psychiques induites par les différentes lésions et par les deux interventions chirurgicales successives, de l'algodystrophie, des nombreuses séances de rééducation fonctionnelles et des répercussions de l'accident sur le plan psychologique.

Au vu de ces éléments, ce poste de préjudice a été justement évalué à la somme de 20 000 euros par les premiers juges.

Il sera alloué à Mme [C] la somme de 10 000 euros au regard de la réduction de son droit à indemnisation de 50 %.

Le jugement sera infirmé.

- Préjudice esthétique temporaire

Le tribunal a évalué ce poste de préjudice à la somme de 1 800 euros de sorte qu'il a alloué à Mme [C] la somme de 1 440 euros après réduction de son droit à indemnisation qu'il a fixée à 20 %.

Mme [C] sollicite, en infirmation du jugement, la somme de 2 200 euros.

La société MAT propose d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 1 800 euros de sorte qu'elle offre, après réduction du droit à indemnisation de 50 %, la somme de 900 euros.

Sur ce, le préjudice esthétique indemnise les atteintes physiques et plus généralement l'altération de l'apparence physique de la victime avant la date de consolidation.

Ce poste de préjudice, coté 2,5/7 par les experts, est caractérisé par le port d'un plâtre du 27 mai 2015 au 22 juillet 2015 puis du 27 février au 6 avril 2016 avec utilisation de cannes béquilles puis à partir du 3 août 2016 d'une béquille.

Au vu de ces éléments, il convient d'évaluer ce préjudice à la somme de 1 800 euros de sorte qu'il sera alloué à Mme [C] la somme de 900 euros au regard de la réduction de son droit à indemnisation de 50 %.

Le jugement sera infirmé.

Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent

Ce poste de préjudice vise à indemniser, pour la période postérieure à la consolidation, les atteintes aux fonctions physiologiques, les souffrances chroniques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiales et sociales.

Le tribunal a évalué ce poste de préjudice à la somme de 27 600 euros de sorte qu'il a alloué à Mme [C] la somme de 22 080 euros au regard de la réduction du droit à indemnisation de la victime de 20 % qu'il a retenue.

Mme [C] conclut à l'infirmation du jugement et sollicite la somme de 27 840 euros.

La société MAT offre la somme de 11 750 euros après réduction du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 50 %.

Sur ce, les experts ont retenu un taux de déficit fonctionnel permanent de 12 % après avoir relevé que Mme [C] conservait comme séquelles des douleurs étagées du membre inférieur gauche, un enraidissement de la cheville gauche, une bonne récupération de la paralysie du sciatique poplité externe avec toutefois la persistance d'une discrète parésie sur les releveurs et une hypoesthésie de la jambe gauche ainsi que des troubles psychologiques qui se sont amendés mais qui persistent.

Au vu des séquelles constatées, des douleurs persistantes et des troubles induits dans les conditions d'existence de Mme [C], qui était âgée de 32 ans à la date de consolidation, il convient d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 27 600 euros.

Par ailleurs, comme exposé précédemment, la rente d'accident du travail ne répare pas le poste de préjudice lié au déficit fonctionnel permanent sur lequel elle ne peut être imputée.

Compte tenu de la réduction du droit à indemnisation de Mme [C] de 50 %, il lui sera alloué la somme de 13 800 euros.

Le jugement sera infirmé.

- Préjudice esthétique permanent

Ce poste de dommage cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l'apparence physique pour la période postérieure à la consolidation.

Le tribunal a évalué ce poste de préjudice à la somme de 4 000 euros de sorte qu'il a alloué à Mme [C] la somme de 3 200 euros après réduction de son droit à indemnisation qu'il a fixée à 20 %.

Mme [C] sollicite, en infirmation du jugement, la somme de 2 200 euros.

La société MAT propose d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 3 800 euros de sorte qu'elle offre, après réduction du droit à indemnisation de 50 %, la somme de 1 900 euros.

Sur ce, les experts ont évalué à 2,5/7 ce préjudice en relevant qu'à l'examen clinique on retrouvait sur le plan esthétique une cicatrice d'introduction du clou, de la face antérieure du genou de 6 cm de long, rosée, une autre de verrouillage paratubérositaire interne de 12 cm aux mêmes caractéristiques ainsi que deux cicatrices de verrouillage cruciformes supra-malléolaires internes, une cicatrice traumatique, bord externe, tiers moyen de la cuisse gauche sous la forme d'une zone un peu dépigmentée en mozaïque, ovalaire à grand axe horizontal de 6 cm sur 2 cm, une cicatrice d'intervention chirurgicale de la jambe gauche, tiers inférieur, vertical, se terminant au cou-de-pied, de 12 cm de long, un peu pigmentée, souple, plane, non adhérente avec matériel sous-jacent et enfin, une cicatrice de greffe en crête iliaque, antéro-supérieure gauche de 6 cm aux mêmes caractéristiques.

Au vu de ces éléments, le préjudice esthétique permanent sera évalué à la somme de 4 000 euros de sorte qu'il sera alloué à Mme [C] la somme de 2 000 euros au regard de la réduction de son droit à indemnisation de 50 %.

Le jugement sera infirmé.

- Préjudice d'agrément

Au regard de l'offre de la société MAT, le tribunal a alloué à Mme [C] la somme de 1 600 euros au regard de la réduction du droit à indemnisation de la victime de 20 % qu'il a retenue.

Mme [C] conclut à l'infirmation et sollicite une indemnisation à hauteur de 5 000 euros. Elle soutient avoir été contrainte d'arrêter la plupart des sports comme le footing et même la simple promenade qu'elle doit limiter à une vingtaine de minutes.

La société MAT offre la somme de 1 000 euros après réduction du droit à indemnisation de la victime de 50 %. Elle fait valoir que Mme [C] ne produit aucune pièce à l'appui de sa demande.

Sur ce, le préjudice d'agrément est constitué par l'impossibilité pour la victime de continuer de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs et inclut la limitation de la pratique antérieure.

Si les experts retiennent un « arrêt de la course à pied imputable à l'accident, limitation des mouvements des membres inférieurs pour la gymnastique en salle », Mme [C] ne rapporte pas d'éléments de preuve (attestations ou autres) permettant de caractériser la pratique régulière d'activités spécifiques sportives ou de loisirs antérieurement à l'accident, de sorte qu'elle ne justifie d'aucun préjudice d'agrément.

Toutefois, compte tenu de l'offre formulée par la société MAT, il lui sera alloué la somme de 1 000 euros après application de la réduction du droit à indemnisation de 50 %.

Le jugement sera infirmé.

Sur les demandes de la CPAM

La CPAM sollicite le remboursement de l'entièreté de sa créance, soit la somme de 149 437,54 euros.

Elle conclut également à la confirmation du jugement en ce qu'il a assorti la condamnation d'intérêts au taux légal à compter du 2 août 2021, ordonné la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil et condamné la société MAT à lui verser la somme de 1 098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Sur ce, il résulte des développements qui précèdent qu'il revient à la CPAM au titre de son recours subrogatoire après imputation sur les postes de préjudice que ses prestations ont indemnisé la somme totale de 45 863,82 euros, se décomposant comme suit :

- au titre des dépenses de santé antérieures à la consolidation : 10 629,02 euros

- au titre de la perte de gains professionnels actuels : 21 076 euros

au titre des dépenses de santé postérieures à la consolidation : 938 euros

- au titre de la perte de gains professionnels futurs : 6 498,50 euros

- au titre de l'incidence professionnelle : 6 722,30 euros.

La société MAT sera condamnée à payer cette somme à la CPAM, outre les intérêts au taux légal à compter de la demande en justice, soit à compter du 2 août 2021, date de notification de ses premières conclusions devant le tribunal.

Le jugement sera infirmé sur le montant des sommes revenant à la CPAM.

Il y a lieu de dire que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil de sorte que le jugement sera confirmé sur ce point.

S'agissant de l'indemnité forfaitaire de gestion, il résulte de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale qu'en contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement de ses débours, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit du fonds national des accidents du travail de l'organisme national d'assurance maladie.

Selon ce même texte, le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum et d'un montant minimum révisés annuellement par arrêtés des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget.

Aux termes de l'arrêté du 4 décembre 2020, les montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 109 euros et 1 098 euros.

Dans le cas de l'espèce, le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion est de 1 098 euros.

Le jugement qui a condamné la société MAT au paiement de cette indemnité sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.

La société MAT qui est tenue à indemnisation supportera la charge des dépens d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité commande d'allouer une indemnité de 2 500 euros à Mme [C] et celle de 1 500 euros à la CPAM au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour et de rejeter la demande de la société MAT formulée au même titre.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Et dans les limites de l'appel,

- Infirme le jugement sauf :

- en ce qu'il a rejeté la demande d'expertise au titre du poste de préjudice de l'assistance tierce personne,

- en ce qu'il a débouté Mme [P] [C] de ses demandes au titre de la perte de gains professionnels actuels et de la perte de gains professionnels futurs,

- en ce qu'il a condamné la société mutuelle d'assurance de l'artisanat et des transports à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 14] la somme de 1 098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion,

- en ce qu'il a dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil pour les indemnités allouées à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 14],

- en ce qui concerne ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Dit que Mme [P] [C] a commis des fautes de conduite justifiant la réduction de son droit à indemnisation de 50 %,

- Condamne la société mutuelle d'assurance de l'artisanat et des transports à payer à Mme [P] [C] les sommes suivantes, provisions et sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement non déduites, avec les intérêts au taux légal à compter du jugement à concurrence des sommes allouées par celui-ci et à compter du présent arrêt pour le surplus au titre des préjudices ci-après :

- dépenses de santé actuelles : 2 105 euros

- frais divers : 1 685 euros

- assistance temporaire de tierce personne : 13'344,80 euros

- dépenses de santé futures : 900 euros

- assistance permanente par une tierce personne : 82'920,24 euros

- incidence professionnelle : 33 277,70 euros

- frais de véhicule adapté : 2 360,85 euros

- frais de logement adapté : 8'682,50 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 3'742,87 euros

- souffrances endurées : 10 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : 900 euros

- déficit fonctionnel permanent : 13 800 euros,

- préjudice esthétique permanent : 2 000 euros

- préjudice d'agrément : 1 000 euros

- Condamne la société mutuelle d'assurance de l'artisanat et des transports à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 14] la somme de 45 863,82 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 2 août 2021 et dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil,

- Condamne sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la société mutuelle d'assurance de l'artisanat et des transports à payer à Mme [P] [C] la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- Condamne sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la société mutuelle d'assurance de l'artisanat et des transports à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 14] la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- Déboute la société mutuelle d'assurance de l'artisanat et des transports de sa demande au titre de ses propres frais irrépétibles exposés.

- Condamne la société mutuelle d'assurance de l'artisanat et des transports aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE