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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-5, 10 octobre 2024, n° 21/05881

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 21/05881

10 octobre 2024

-COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 10 OCTOBRE 2024

ac

N° 2024/ 319

Rôle N° RG 21/05881 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHJ5D

[K] [Z] épouse [V]

C/

[W] [X] épouse [F]

Syndic. de copro. [Adresse 9] C/O COGEFIM FOUQUE [Adresse 9] - [Localité 10]

S.A.R.L. CABINET DEVICTOR

S.A.R.L. IMMOBILIERE [P]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELARL PROVANSAL D'JOURNO GUILLET & ASSOCIÉS

SELARL MICHEL LAO

Me Christian BELLAIS

SCP FOURNIER & ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 16 Février 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 15/02893.

APPELANTE

Madame [K] [Z] épouse [V]

demeurant [Adresse 5] - [Localité 4]

représentée par Me Nicolas SIROUNIAN de la SELARL PROVANSAL D'JOURNO GUILLET & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEES

Madame [W] [X] épouse [F]

demeurant [Adresse 9] - [Localité 10]

représentée par Me Michel LAO de la SELARL MICHEL LAO, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Alexandrine ARSENTO, avocat au barreau de MARSEILLE

Syndicat des copropriétaires [Adresse 1] dont le siège social est [Adresse 6] - [Localité 3] , représenté par son syndic en exercice la société COGEFIM FOUQUE [Adresse 9] - [Localité 10]

représenté par Me Christian BELLAIS, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A.R.L. CABINET DEVICTOR, dont le siège social est [Adresse 8] - [Localité 2], représenté par son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

représentée par Me Pascal FOURNIER de la SCP FOURNIER & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Marie-Laure DELFAU DE BELFORT, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A.R.L. IMMOBILIERE [P] dont le siège social est [Adresse 7] [Localité 4] prise en la personne de son représentant légal domicilié es-qualité audit siège

représentée par Me François ROSENFELD de la SCP CABINET ROSENFELD & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Ruth RIQUELME, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 11 Juin 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2024,

Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 14 mars 2003, [K] [Z] épouse [V] a fait l'acquisition d'un appartement situé au 1er étage d'un immeuble en copropriété situé [Adresse 9].

Subissant des infiltrations [W] [X] épouse [F], titulaire d'un bail commercial pour un local situé en rez-de-chaussée de l'immeuble, a obtenu par ordonnance de référé du 11 janvier 2013 la désignation d'un expert judiciaire.

L'expert a déposé son rapport le 24 novembre 2014 duquel il ressort notamment que les infiltrations subies dans le local de Mme [F] sont la conséquence d'un défaut d'étanchéité des joints et de la bonde de fond de la douche installée dans l'appartement de [K] [Z] épouse [V] et que ces infiltrations entraînent un affaissement du plancher de la salle d'eau, mais également des parties communes.

Par décision du 16 février 2021 le tribunal judiciaire de Marseille a :

- déclaré recevable l'action de Madame [W] [X] épouse [F],

- condamné Madame [K] [V] à payer au Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 9] [Localité 10] la somme de 18.084€ TTC au titre des travaux de reprises, mis hors de cause la SARL CABINET DEVICTOR et rejeté toutes les demandes dirigées contre la SARL CABINET DEVICTOR,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 9] [Localité 10] à payer à Madame [W] [X] épouse [F] la somme de 32.920 € en réparation des préjudices financiers et de perte de chance de revenus de gérance,

- débouté Madame [V] de son appel en garantie dirigé contre la SARL IMMOBILIERE FRANK, rejeté toutes les demandes formées à l'encontre de la SARL IMMOBILIERE FRANK,

- condamné Madame [K] [V] à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 9] [Localité 10] la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Madame [K] [V] à payer à Madame [W] [X] épouse [F] la somme de 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Madame [K] [V] à payer à la SARL CABINET DEVICTOR la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Madame [K] [V] aux entiers dépens de l'instance qui comprendront les frais d'expertise judiciaire mais en ce non compris les frais d'exécution forcée.

Pour statuer en ce sens le tribunal a considéré que les infiltrations apparues dans l'établissement de restauration de Mme [F] trouvent leurs origines dans l'état des joints de la douche et la dégradation de la bonde du receveur de la salle d'eau de l'appartement de Mme [V], que sa responsabilité est engagée sur le fondement de l'article 1242 du code civil ; qu'aucun retard dans la réparation du sinistre n'est imputable au syndic Cabinet Devictor, que Mme [F] justifie de sa qualité de commerçante exploitante à la date du sinistre, que la connaissance du sinistre par Mme [V] doit être fixée à juillet 2011, que l'agence Frank en charge du suivi de la location du bien de Mme [V] n'avait pas de mandat de gestion de ce bien et qu'aucun manquement ne lui est imputable dans la gestion du sinistre.

Par jugement du 15 juin 2021 le tribunal judiciaire de Marseille a rectifié la décision en condamnant Madame [K] [Z] épouse [V], en lieu et place du syndicat des copropriétaires, à régler à Madame [W] [X] épouse [F] la somme de 32.920,00€.

Par acte des 20 avril et 25 juin 2021 [K] [Z] épouse [V] a interjeté appel de la décision. Les deux instances d'appel ont fait l'objet d'une décision de jonction le 8 juillet 2021.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 13 juin 2022 [K] [Z] épouse [V] demande à la cour de:

Infirmer le jugement rendu le 16 février 2021 par le Tribunal Judiciaire de Marseille sauf en ce que les premiers juges ont débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] [Localité 10] de sa demande en réparation de son préjudice de jouissance, et Madame [W] [X] épouse [F] de sa demande d'exécution de travaux sous astreinte, au besoin par substitution de motif en raison de son irrecevabilité, et réparation de son préjudice commercial, économique et de jouissance.

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Débouter le syndicat des copropriétaires de l'Immeuble situé [Adresse 9] ' [Localité 10] ainsi que Madame [W] [X] épouse [F] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de Madame [K] [Z], épouse [V].

À titre subsidiaire,

Débouter le syndicat des copropriétaires de l'Immeuble situé [Adresse 9] ' [Localité 10] ainsi que Madame [W] [X], épouse [F], de leurs demandes injustifiées et limiter à 50 % la responsabilité de Madame [K] [Z] épouse [V].

Débouter le Syndicat des Copropriétaires de l'Immeuble situé [Adresse 9] '[Localité 10] de ses demandes injustifiées, et limiter son indemnisation aux seuls travaux de reprise du plancher séparant le 1er étage du rez-de-chaussée de l'immeuble.

Condamner la Société IMMOBILIERE FRANK à relever et garantir indemne Madame [K] [Z] épouse [V] de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre.

En toute hypothèse,

Condamner tout succombant à régler à Madame [K] [Z], épouse [V] la somme de 5 000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamner tout succombant aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit Me Nicolas SIROUNIAN

[K] [Z] épouse [V] fait valoir :

- que l'action de Mme [F] est fondée sur l'article 1242 du code civil ;

- que selon l'expert « l'entretien des joints est censé être à la charge des locataires »

- qu'elle n'a jamais occupé les lieux qui étaient donnés en location ;

- qu'il ne peut être considéré que Madame [K] [Z] épouse [V] détenait la garde de la douche à l'origine des infiltrations litigieuses, alors que la défaillance de cet équipement résulte d'un défaut de réparation à la charge des différents locataires qui se sont succédés au sein de son appartement ;

- que l'expert indique que la défaillance de la bonde de fond ne concerne que la propriétaire;

- qu'il n'a constaté aucune fuite de la bonde ;

- qu'immédiatement après son acquisition de l'appartement litigieux, Madame [K] [Z] épouse [V] a fait procéder à la réfection intégrale de la salle de bains par la Société NEM BTP.

- qu'elle a informé le 10 août 2005 le syndicat des copropriétaires alors en exercice, la société CABINET DEVICTOR, d'un affaissement du plancher de l'appartement au niveau du séjour, des WC et du couloir, mais aucune suite n'a jamais été réservée à cette réclamation.

- que ce n'est que le 28 juillet 2011 que Madame [K] [Z] épouse [V] a eu connaissance du sinistre et de ce que celui-ci trouverait son origine dans une fuite provenant de la salle de bains de son appartement.

- que dès le 12 août 2011 elle a fait effectuer les réparations nécessaires de l'étanchéité du bac à douche.

- que la société CABINET DEVICTOR, syndic en exercice au moment de l'apparition des désordres, a entrepris par erreur des démarches auprès de Monsieur [D], propriétaire d'un bien étranger au sinistre ;

- que le devis produit par le syndicat des copropriétaires en première instance provenant de la société Nem Btp ne concerne pas les infiltrations ;

- que le lien causal entre les infiltrations dénoncées d'une part, et l'affaissement du plancher d'autre part, n'est absolument pas établi.

- que les infiltrations n'affectaient que la réserve du local donné en location à Madame [W] [X] épouse [F] et ne concernaient donc qu'une partie de celui-ci, de sorte que l'activité de cette dernière pouvait parfaitement être poursuivie.

- que la suspension de son activité résulte uniquement du défaut de conformité de son établissement au regard du règlement de copropriété ;

- que la réclamante ne peut tout à la fois réclamer l'indemnisation de sa perte de chance de donner en location gérance son fonds et percevoir les redevances y afférentes, puis, solliciter le remboursement des loyers et charges commerciales exposés sur la même période, alors que ces charges auraient précisément été réglées à la faveur des revenus de la location-gérance ;

- que s'agissant précisément de la perte de chance de consentir une location-gérance, son quantum, évalué à la somme de 182.240,00€, ne repose que sur de simples attestations établies par le propre expert-comptable de Madame [W] [X] épouse [F] ;

- que l'entretien, incombant au locataire, devait être constaté et signalé lors des visites effectuées pour la mise en place d'un nouveau locataire, que la Société IMMOBILIERE FRANK n'a jamais appelé l'attention de Madame [K] [Z] épouse [V] sur ce point.

- qu'elle est intervenue en qualité de professionnel de l'immobilier au profit d'une bailleresse profane, et se trouvait ainsi tenue d'une obligation de diligence et d'un devoir de conseil à l'égard de son mandant ;

- que le défaut d'assurance des locataires s'est révélé extrêmement préjudiciable en ce qu'il n'a pas permis une prise en charge rapide du sinistre ;

Par conclusions notifiées le 30 mars 2023 [W] [X] épouse [F] demande à la cour de ;

CONFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé Madame [V] responsable du préjudice subi par Madame [F] et condamné Madame [V] à l'indemniser de son préjudice financier et de perte de chance de revenus de gérance sauf s'agissant du quantum des préjudices retenus à réévaluer et réactualiser.

INFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame [F] de sa demande sous astreinte d'exécution de travaux et de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice commercial, économique et de jouissance.

STATUANT A NOUVEAU :

CONDAMNER Madame [V] ou tout succombant à verser à Madame [F] la somme totale de 102.741 € au titre de son préjudice financier.

o 90.240 € au titre de son préjudice financier constitué par les loyers commerciaux. [Somme des loyers à devoir arrêter en mars 2023 et à parfaire au jour du jugement].

o 12.501,00 € au titre du préjudice financier constitué par les charges commerciales engagées.

CONDAMNER Madame [V] ou tout succombant à verser à Madame [F] la somme de 182.240,00 € au titre de la perte de chance de revenu de gérance non encaissés.

CONDAMNER Madame [V] ou tout succombant à verser à Madame [F] la somme de 70.000,00 € au titre du préjudice commercial, économique et de jouissance, subi.

CONDAMNER Madame [V] ou tout succombant sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à procéder à la remise en état du local commercial loué par Madame [F] sis [Adresse 9] [Localité 10] et mettre fin aux préjudices subis.

A TITRE SUBSIDIAIRE

Si par impossible la Cour de céans viendrait à considérer Madame [V] comme non responsable des désordres. Il conviendra de condamner le responsable alors désigné à indemniser l'ensemble des préjudices de Madame [F] tels que décris au PRINCIPAL.

EN TOUT ETAT DE CAUSE

CONDAMNER Madame [V] ou tout succombant à verser à Madame [F] la somme de 7.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

CONDAMNER Madame [V] ou tout succombant aux entiers dépens.

Elle indique :

- que depuis le 15 Avril 2010, elle a déclaré un premier sinistre et notifié à l'ensemble des parties en présence des infiltrations d'eau puis l'effondrement de son plafond, qu'aucune reprise n'a été faite au sein de son local commercial ;

- que le rapport d'expertise judiciaire permet de constater que les infiltrations d'eau touchent la réserve mais également la salle de restauration, la cuisine ouverte qui jouxte ladite réserve et que le faux plafond s'est d'ailleurs écroulé en partie sur les plaques de cuissons.

- qu'elle a conclu un bail commercial en date du 16 octobre 2008 pour un loyer mensuel de 640 euros auprès de la SCI JB TON ;

- qu'elle est gérante de la Sarl Snack 2 Lvk ;

- que le fait que Madame [F] ait été radiée du registre du commerce et des sociétés en 2015 n'emporte aucun effet sur son obligation à la dette découlant du bail commercial vis-à-vis de son bailleur et a fortiori du préjudice découlant des loyers payés et à devoir ;

- que les charges sont calculées à compter du mois de mai 2010, l'arrêt de l'exploitation datant d'avril 2010

- qu'elle est locataire des murs mais propriétaire de son fonds de commerce,

- qu'elle a conclu un contrat de location gérance avec M.[Y] [B] au prix de 1.340 € HT en date du 25 juin 2009 ;

- que le contrat de gérance a été résilié le 30 novembre 2009

- que du fait du sinistre, elle n'a pu redonner en location-gérance son snack.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 21 mai 2024 la Sas Cabinet Devictor demande à la cour de :

CONFIRMER le Jugement déféré en ce qu'il a mis hors de cause la S.A.S. CABINET DEVICTOR et Rejeté toutes les demandes dirigées contre la S.A.S. CABINET DEVICTOR ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

DIRE ET JUGER que les conséquences dommageables des infiltrations dans les parties communes constatées sont limitées à la somme de 8.910 € TTC.

DEBOUTER le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] ' [Localité 10] représenté par son Syndic de toute demande formée à l'encontre de la SARL CABINET DEVICTOR.

Subsidiairement,

CONDAMNER Madame [K] [V] à relever la SAS CABINET DEVICTOR indemne de toute condamnation éventuelle.

CONDAMNER tout succombant à la somme de 2.500 € par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle réplique:

- qu'elle a été le Syndic de la copropriété de l'immeuble [Adresse 9] à [Localité 10] jusqu'au 7 mai 2012 date à laquelle elle a démissionné.

- que concernant les parties communes objets de la demande du Syndicat des copropriétaires, Monsieur [I] a été saisi uniquement de la question de l'affaissement du plancher au niveau du palier du 1er étage et de la base du mur saturée d'eau de l'extérieur de l'appartement [V] ;

- qu'aucune description des désordres en parties communes n'a été donnée par l'Expert judiciaire dans son rapport définitif déposé le 24 novembre 2014,

- que l'étude du devis de l'entreprise NEMBTP versée en pièce n°4 par le Syndicat, correspondait au ravalement complet de la cage d'escalier.

- que sur la somme de 18.084 € TTC même en prenant en compte la réfection du plafond du rez-de-chaussée, seuls correspondent à la reprise des conséquences des infiltrations constatées par l'Expert judiciaire en parties communes les postes suivants du devis NEMBTP qui seuls pouvaient être pris en compte : - les points n°1 à 1.1.2 du devis (« tomettes » et « réfection complète du palier 1er étage avec travaux ci-dessus plus remplacement des enfustages ») pour 1750 € HT soit 1925 € TTC - les points 1.2.1 à 1.2.3 et 1.2.5 pour 6.350 € HT soit 6.985 € TTC ;

- que le Cabinet DEVICTOR n'encourt aucune responsabilité dans la défectuosité d'une partie privative au titre du fléchissement allégué par Mme [V] en 2005, sans lien avec le dégât des eaux ;

- que dès le mois d'août 2011, et avant l'expertise judiciaire, Monsieur [V] contacté par le Syndic, avait fait réparer une cause du sinistre, à savoir un robinet fuyard, s'agissant d'une fuite à débit constant puisqu'il s'agissait de celui de la chasse d'eau ;

- que L'Expert judiciaire qui fut désigné en janvier 2013 a constaté dès sa première réunion d'expertise du 14 mars 2013 l'état déplorable de la salle de bains de l'appartement [V] en dépit des réparations qu'elle indique avoir fait en 2011 ;

Par conclusions notifiées le 7 octobre 2021 la Sarl Immobiliere [P] demande à la cour de

- Confirmer le jugement ;

- Condamner Mme [V] à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens distraits au profit de Me François Rosenfeld.

Elle réplique :

- que Mme [V] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un mandat de gestion ;

- que l'acte d'engagement de propriétaire du 3 août 2004 versé aux débats n'est pas un mandat de gestion mais une preuve de l'obligation au paiement de Mme [V] en contrepartie pour le suivi de la location ;

- que ce document indique qu'elle n'est mandatée que pour assurer le suivi de la location à l'exclusion de la gérance locative,

- qu'en application de l'article 1103 du code civil elle n'a pas à intervenir dans la gestion du bien ;

- que les pièces produites démontrent que Mme [V] a conservé la gestion de son bien (contrat de bail, attestations locatives) ;

Le syndicat des copropriétaires, assigné à personne et qui a constitué avocat, n'a pas conclu. En application des dispositions de l'article 469 du code de procédure civile sera qualifié de contradictoire.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

sur les demandes formées à l'encontre de [K] [Z] épouse [V]

* sur la détermination des désordres

[W] [X] épouse [F] se fonde sur les dispositions de l'article 1242 du code civil qui prévoit qu'on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde, et soutient que le rapport d'expertise démontre que les infiltrations subies dans son local proviennent exclusivement de l'appartement appartenant à [K] [Z] épouse [V] .

Le rapport d'expertise judiciaire constate que des infiltrations se produisent dans la réserve du local loué à Mme [F], que la base du mur de la réserve est saturée d'eau, qu'une fuite sur la douche de l'appartement de Mme [V] perdure, que la structure du plancher de l'appartement est atteinte, que la quantité d'eau qui s'y est infiltrée est importante, que si le réseau de l'appartement ne présente aucune fuite, les joints du bac à douche sont plus qu'usagés et permettent à l'eau de pénétrer dans le plancher.

Lors de ces visites en 2012 et 2013, l'expert judiciaire a constaté que les joints de la douche ne sont toujours pas étanches, alors même que la partie appelante soutient avoir fait réaliser des travaux en août 2011. Le document qu'elle produit pour soutenir cette affirmation concerne toutefois un devis pour des travaux de plomberie sans production d'une facture y afférente.

Il conclut que l'origine des désordres, à savoir les infiltrations dans le local commercial et l'affaissement du plancher du premier étage, provient d'un défaut d'étanchéité des joints et de la bonde de fond de la douche installée dans l'appartement de [K] [Z] épouse [V].

Le moyen soulevé par la partie appelante au titre de la responsabilité du locataire dans l'entretien des joints de douche est inopérant puisque [K] [Z] épouse [V] en sa qualité de propriétaire des lieux est responsable du bien dont elle a la garde. Celle-ci dispose si elle le souhaite d'une action récursoire à l'encontre des locataires présents dans les lieux au moment de la survenance des dégâts, sans que cette circonstance ne soit exclusive de sa responsabilité en sa qualité de propriétaire des murs, et sans que celle-ci ne soit conditionnée à la souscription par ses locataires d'une assurance habitation.

[K] [Z] épouse [V] soutient également ne pas avoir été informée de l'existence du désordre subi dans le local en rez-de-chaussée.

Le premier rapport d'expertise amiable réalisé par le cabinet Polyexpert le 12 juillet 2010 énonce que les infiltrations semblent provenir d'une défaillance des joints d'étanchéité de la douche de l'appartement sus-jacent occupé par Mme [M], locataire de M.[D]. Toutefois il n'est pas contesté que la localisation du siège des désordres s'est avérée erronée puisque le bien loué par M.[D] ne présentait en réalité aucun désordre, selon les correspondances échangées entre les parties.

Il est indiqué dans le rapport d'expertise judiciaire que Mme [F] reconnaît ne pas avoir informé Mme [V] de ce désordre et ne pas avoir prévenu le syndic. Il n'est donc pas démontré que le sinistre que Mme [F] a déclaré à son assureur le 15 avril 2010 a été porté à la connaissance de Mme [V].

En revanche, Mme [V] a participé aux opérations d'expertise du second rapport amiable menées par le cabinet Eurexo en 2011 et 2012, et a donc été informée de ces constatations. Par suite, elle ne démontre pas avoir effectivement réalisé des travaux de reprise de l'étanchéité des joints de la douche, ceux-ci présentant toujours un mauvais état lors de la tenue de l'expertise judiciaire entre 2012 et 2013. Elle ne peut donc arguer d'une absence de connaissance des causes du sinistre qui s'est renouvelé depuis 2010.

Enfin, Mme [V] produit une facture de travaux en date du 6 juin 2003 relative à la réfection de la salle de bains et argue que le fléchissement du plancher existait avant les infiltrations et a été déclaré par lettre recommandée le 16 août 2005 au syndic le cabinet De Victor, de sorte que celui-ci ne peut résulter d'infiltrations provenant de sa salle de bain rénovée deux ans plus tôt. Il n'est pas contesté par le syndic en charge de la gestion de l'immeuble à l'époque qu'aucune intervention n'a été mise en 'uvre sur ce point. Pour autant aucune pièce versée aux débats ne permet de constater la réalité de cette situation en 2005 ni sa cause. Il n'est donc pas permis de considérer que le fléchissement constaté par le rapport d'expertise soit étranger aux infiltrations provenant de l'appartement de la partie appelante.

Pour l'ensemble de ces raisons, il sera retenu que le bien appartenant à [K] [Z] épouse [V] a engendré des infiltrations à l'origine des désordres subis tant par [W] [X] épouse [F] que par le syndicat des copropriétaires, qu'en sa qualité de propriétaire du bien elle en est objectivement responsable de plein droit tandis qu'elle ne rapporte la preuve d'aucune cause exonératoire. Le jugement sera confirmé sur ce point.

* sur les demandes indemnitaires présentées par Mme [F]

S'agissant des travaux de reprise dans les parties communes, Mme [V] conteste le montant de celui retenu par l'expert en indiquant que certaines lignes du devis de l'entreprise NemBtp d'un montant de 18.084 euros ne sont pas en lien avec la reprise des désordres en partie commune.

L'expert a effectivement relevé que le point 2.1 d'un montant de 150 euros , correspondant aux tomettes du deuxième et troisième étage, est étranger au litige mais que le devis ne mentionnait pas le changement du bac de douche préconisé, et dont le montant est fixé par l'expert à 150 euros. Il en conclut que le devis NemBtp est donc adapté à la reprise des désordres.

Mme [V] ne produit pour sa part aucune pièce permettant de remettre en cause cette évaluation. Il conviendra en conséquence de confirmer le jugement sur ce point.

S'agissant des sommes sollicitées par Mme [F], celle-ci soutient qu'en raison des infiltrations elle ne peut plus exploiter et faire exploiter le local depuis le départ de son locataire le 30 novembre 2009.

Mme [F] produit le bail commercial qu'elle a conclu avec la Sci JB Ton le 16 octobre 2008 pour un loyer mensuel de 640 euros et le contrat de location gérance conclu avec M. [Y] [B] le 25 juin 2009 pour un montant de 1.340 euros HT, et soutient que le locataire gérant a quitté les lieux suite aux infiltrations. Elle ne produit pour autant aucune pièce permettant officiellement de constater la date de résiliation du contrat de location gérance et ses motifs. Cette remarque a également été formulée par l'expert judiciaire lors de l'évaluation des préjudices financiers sollicités par l'intéressée. Ainsi lors du dépôt du rapport d'expertise Mme [F] n'a produit aucune pièce permettant d'imputer le départ du locataire gérant aux infiltrations constatées.

Dans la correspondance du 30 décembre 2013, M.[Y] précise avoir résilié le contrat de location gérance le 30 novembre 2009 en raison du dégât des eaux. Cette correspondance n'est toutefois pas probante puisqu'elle n'est pas accompagnée d'une pièce d'identité permettant de vérifier l'identité de son auteur et n'est étayée par aucune pièce corroborant la situation dénoncée. Ce d'autant que le premier sinistre officiellement déclaré est fixé au 15 avril 2010 dans le rapport d'expertise du cabinet Polyexpert, donc sans relation avec la situation évoquée en 2009. [W] [X] épouse [F] échoue ainsi à caractériser le lien entre les désordres subis et la cessation de l'exploitation du local commercial.

Les attestations établies par le cabinet comptable Imex sont également peu déterminantes puisqu'elles ne mentionnent pas que celles-ci concernent précisément le local objet du litige et l'activité y afférente, et qu'elles ne font que mentionner les charges dues au titre du contrat de bail dont il n'est pas contesté qu'il n'a fait l'objet d'aucune résiliation entre les parties.

Ces éléments ne permettent pas d'affirmer que les infiltrations constatées dans la réserve, en dehors de l'espace de restauration, ont empêché de manière permanente et depuis avril 2010 la poursuite d'une activité commerciale.

Les seules demandes concernent celles de Mme [F] au titre de son préjudice financier constitué par les loyers commerciaux, celui constitué par les charges commerciales engagées, celui au titre de la perte de chance de revenu de gérance non encaissé et celui au titre du préjudice commercial, économique et de jouissance subi.

Si Mme [F] ne produit aucune pièce suffisamment probante pour caractériser l'existence deu préjudice commercial et économique en lien avec les désordres, en revanche les photographies versées aux débats permettent de caractériser l'existence d'un trouble de jouissance résultant de la présence d'eau dans sa cuisine. En conséquence le jugement qui a condamné [K] [Z] épouse [V] à lui verser la somme de 32.920 € en réparation des préjudices financiers et de perte de chance de revenus de gérance sera infirmé et Mme [F] sera uniquement indemnisée de son préjudice de jouissance à hauteur de 5.000 euros.

Enfin s'agissant de la demande présentée par Mme [F] au titre de l'exécution des travaux sous astreinte, celle-ci ne peut être favorablement accueillie puisqu'elle est locataire des lieux et est par ailleurs soumise à une procédure d'expulsion initiée par son propriétaire. Le jugement sera confirmé sur ce point.

* sur la demande de relevé et garantie

[K] [Z] épouse [V] soutient que l'agence Immobilière [P] a manqué à ses obligations de conseil en n'exigeant pas des locataires une preuve de la souscription d'une assurance habitation et en ne signalant pas lors des états des lieux de sortie l'état dégradé des joints de la douche.

Les parties sont liées par un acte d'engagement de propriétaire du 3 août 2004 versé aux débats sur lequel il est expressément mentionné qu'il ne s'agit pas d'un mandat de gestion mais uniquement d'une intervention au titre de la délivrance de reçu de paiement des loyers. Ce document indique donc qu'elle ne dispose d'un mandat que pour assurer le suivi de la location à l'exclusion de la gérance locative. Les baux versés en procédure démontrent par ailleurs que l'appelante a effectivement conservé la gestion locative en concluant directement les baux avec les locataires et en produisant les attestations locatives.

En l'absence de mandat démontrant le périmètre élargi de la gestion confiée à l'agence immobilière, l'appelante échoue à caractériser les manquements reprochés. Le jugement sera confirmé sur ce point.

sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient d'infirmer le jugement entrepris dans ses dispositions concernant les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

[K] [Z] épouse [V] qui succombe principalement sera condamnée aux dépens, avec distraction au profit de Maître François Rosenfeld, et aux frais irrépétibles qu'il est inéquitable de laisser à la charge de la Sarl Cabinet Devictor et de la Sarl Immobilière [P]. Les autres demandes présentées à ce titre seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné [K] [Z] épouse [V] à verser à [W] [X] épouse [F] la somme de 32.920 € en réparation des préjudices commercial , économique et de perte de chance de revenus de gérance et sur les condamnations au titre des frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau

Condamne [K] [Z] épouse [V] à verser à [W] [X] épouse [F] la somme de 5.000 euros au titre du trouble de jouissance ;

Confirme le jugement pour le surplus ;

Condamne [K] [Z] épouse [V] aux entiers dépens distraits au profit de Maître François Rosenfeld ;

Condamne [K] [Z] épouse [V] à verser à la Sas cabinet Devictor la somme de 2.000 euros, à la Sarl Immobilière [P] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT