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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-5, 17 octobre 2024, n° 21/10962

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 21/10962

17 octobre 2024

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 17 OCTOBRE 2024

ac

N° 2024/ 324

N° RG 21/10962 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BH24P

[B] [G]

[Z] [G]

C/

[W] [H]

[K] [H]

S.A.S. OMNIVAR PISCINES

Copie exécutoire délivrée le :

à :

SCP CABINET BUVAT-TEBIEL

SELARL LX AIX EN PROVENCE

SELARL SELARL GREGORY KERKERIAN ET ASSOCIE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN en date du 22 Juin 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 17/05548.

APPELANTS

Monsieur [B] [G]

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Layla TEBIEL de la SCP CABINET BUVAT-TEBIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Pierre-Jean LAMBERT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Roland GRAS, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Madame [Z] [G]

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Layla TEBIEL de la SCP CABINET BUVAT-TEBIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Pierre-Jean LAMBERT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée Me Roland GRAS, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMÉS

Monsieur [W] [H]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Françoise BOULAN de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Philippe BARTHELEMY de la SCP BARTHELEMY-DESANGES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Madame [K] [H]

demeurant [Adresse 1]

représentée Me Françoise BOULAN de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Philippe BARTHELEMY de la SCP BARTHELEMY-DESANGES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

S.A.S. OMNIVAR PISCINES, société par actions simplifiées, dont le siège social est [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social

représentée par Me Grégory KERKERIAN de la SELARL SELARL GREGORY KERKERIAN ET ASSOCIE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Me Magatte DIOP, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Juin 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Octobre 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Octobre 2024

Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Les époux [H] propriétaires d'une villa située à [Localité 4] ont fait assigner le 30 septembre 2009 les époux [G], leurs voisins, au titre de troubles du voisinage résultant de la piscine située sur leur fonds.

Par décision du 16 juin 2011 le tribunal de grande instance de Draguignan a dit que Monsieur et Madame [G] sont à l'origine de troubles anormaux de voisinage subis par les époux [H], les a condamnés à titre provisionnel à régler aux époux [H] une somme de 3.000 euros, et a ordonné une expertise qui a été confiée à Monsieur [X].

Par arrêt du 12 octobre 2012 la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a confirmé le jugement du 16 juin 2011 seulement en ce qu'il a ordonné une mesure d'expertise et désigné Monsieur [X] pour y procéder, a augmenté les missions de l'Expert et a sursis à statuer sur les autres demandes et les demandes jusqu'au dépôt du rapport d'expertise, réservant les demandes ainsi que les dépens.

L'expert a déposé son rapport le 11 mai 2016.

Suivant acte d'huissier délivré le 19 juillet 2017 les époux [H] ont fait assigner les époux [G] aux fins d'homologation du rapport d'expertise.

Par décision du 22 juin 2021 le tribunal judiciaire de Draguignan a statué en ces termes :

- DÉBOUTE Monsieur [B] [G] et Madame [Z] [G], ainsi que la SAS Omnivar Piscines, de la fin de non-recevoir relative à la prescription de l'action de Monsieur [W] [H] et de Madame [K] [H] et de péremption

- CONDAMNE Monsieur [B] [G] et Madame [Z] [G] à réaliser les travaux propres à mettre un terme aux troubles anormaux du voisinage tels que préconisés par Monsieur [X] expert judiciaire, en page 21 du rapport d'expertise déposé le 11 mai 2016, dans un délai de trois mois suivant la signification du présent jugement, à l'issue duquel s'appliquera une astreinte de 100 euros par jour de retard, pendant une durée de quatre mois, aux termes de laquelle l'astreinte pourra être liquidée et une nouvelle astreinte pourra être prononcée,

- CONDAMNE la SAS Omnivar Piscines à garantir Monsieur [B] [G] et Madame [Z] [G] du coût des travaux propres à mettre un terme aux troubles anormaux du voisinage résultant du fonctionnement des ouvrages de la piscine, tels que préconisés par Monsieur [X] dans le rapport d'expertise déposée le 11 mai 2016,

- CONDAMNE Monsieur [B] [G] et Madame [Z] [G], à payer à M. [W] [H] et à Mme [K] [H] la somme de 6 000 euros au titre du préjudice résultant des troubles anormaux du voisinage,

- CONDAMNE Monsieur [B] [G] et Madame [Z] [G], à payer à M. [W] [H] et à Mme [K] [H] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- CONDAMNE Monsieur [B] [G] et Madame [Z] [G] aux entiers dépens de l'instance incluant les frais de l'expertise, et les honoraires de l'expert,

- DÉBOUTE les parties pour le surplus de leurs demandes,

- ORDONNE l'exécution provisoire en application de l'article 515 du code de procédure civile

Par acte du 20 juillet 2021 [B] [G] et [Z] [F] épouse [G] ont interjeté appel de la décision.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 25 février 2022, [B] [G] et [Z] [F] épouse [G] demandent à la cour de:

JUGER que l'instance initiale résultant de l'assignation du 16 octobre 2009 qui évoque des faits et troubles anormaux de voisinage constatés le 19 août 2008 qui a été suivie du jugement du Tribunal de Grande Instance de Draguignan du 16 juin 2011, réformé par arrêt de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence du 12 octobre 2012 qui a sursis à statuer jusqu'au dépôt du rapport de l'expert judiciaire qui a été déposé le 11 mai 2016, est affectée par la péremption d'instance telle qu'elle résulte des articles 386 et suivants du Code de Procédure Civile, faute d'avoir été reprise dans le délai de deux ans devant la Cour qui demeurait saisie de l'action initiale ensuite de l'arrêt du 12 octobre 2012.

JUGER que les troubles anormaux de voisinage dont les époux [H] se plaignent depuis le 19 août 2008 sont prescrits sur le fondement de l'article 2224 du Code Civil du fait qu'ils ont été dénoncés par assignation du 19 juillet 2017 signifiée au-delà du délai de prescription quinquennal.

INFIRMER le jugement du Tribunal Judiciaire de Draguignan du 22 juin 2021 en toutes ses dispositions du fait qu'il se fonde sur un rapport d'expertise judiciaire qui aboutit à des conclusions faites par l'expert judiciaire qui n'a pas personnellement constaté la réalité des désordres et l'anormalité des troubles de voisinage relatifs aux dommages sonores résultant de la piscine.

JUGER que l'expert judiciaire n'a nullement constaté l'anormalité de l'arrosage automatique et la réalité des nuisances évoquées, celui-ci ne faisant que se référer à des constats d'huissiers non contradictoires de 2008, 2009 et 2010 et inopposables aux époux [G]

REFORMER le jugement en ce qu'il a condamné Monsieur et Madame [G] sous astreinte à réaliser les travaux propres à mettre un terme aux troubles anormaux de voisinage tels que préconisés par l'expert judiciaire Monsieur [X] en page 21 du rapport d'expertise, c'est-à-dire :

- Remédier aux malfaçons concernant le bac tampon de la piscine générant des désordres acoustiques inexistants et non constatés de manière objective par l'expert ;

- Réaliser des travaux sur le réseau d'évacuation des eaux pluviales et de vidange de la piscine réalisé par le professionnel ;

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour déciderait de mettre à charge des époux [G] la réalisation de travaux et d'ouvrage résultant de l'intervention du professionnel la Société OMNIVAR PISCINES, appelée en cause devant le Tribunal de Grande Instance de Draguignan et devant la Cour,

CONDAMNER la Société OMNIVAR PISCINES à relever et garantir Monsieur et Madame [G] de l'intégralité du coût des travaux mis à leur charge mais, également, des éventuelles allocations de dommages et intérêts au titre des préjudices anormaux de voisinage bien que ceux-ci soient totalement contestés, en principal, intérêts et frais dans la mesure où les époux [G] se sont adressés à un professionnel qui leur doit garantie.

DEBOUTER les époux [H] et la Société OMNIVAR PISCINES de l'intégralité de leur appel incident, de leurs demandes, fins et conclusions.

CONDAMNER les époux [H] et la Société OMNIVAR PISCINES aux entiers dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 6 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 décembre 2021, [W] et [K] [H] demandent à la cour de :

STATUER ce que de droit sur la recevabilité de l'appel.

- CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a débouté époux [G] et la SAS OMNIVAR PISCINES de leur demande de prescription de l'action et de péremption de l'instance, comme étant non motivée et non fondée.

- JUGER qu'il n'y a pas lieu à critique du rapport d'expertise, celui-ci étant très circonstancié,

- CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a condamné Monsieur et Madame [G] sous astreinte à réaliser les travaux propres à mettre un terme aux troubles anormaux de voisinage tel que préconisés par l'expert Monsieur [X] page 21 du rapport d'expertise;

- CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a condamné Monsieur et Madame [G] à réaliser lesdits travaux dans un délai de trois mois selon la signification du présent jugement à l'issue duquel s'appliquera une astreinte de 100 € par jour de retard pour une durée de 4 mois, au terme de laquelle l'astreinte pourra être liquidée, une nouvelle astreinte prononcée, concernant les travaux à effectuer page 21 du rapport d'expertise

- CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a alloué des dommages et intérêts à Monsieur et Madame [H], en réparation de leur préjudice résultant du trouble anormal de voisinage et le REFORMER sur le montant des sommes allouées.

Statuant à nouveau,

- CONDAMNER les époux [G] à payer à Monsieur et Madame [H] la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice résultant du trouble anormal de voisinage.

- STATUER ce que de droit sur l'appel incident de la société OMNIVAR.

En tout état de cause,

- DEBOUTER les époux [G] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions au soutien de leur appel.

- CONDAMNER Monsieur et Madame [G], vu la longueur de la procédure et des frais engagés, à régler à Monsieur et Madame [H] une somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- CONDAMNER Monsieur et Madame [G] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Françoise BOULAN, membre de la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, Avocat associée aux offres de droit.

Par conclusions notifiées le 7 décembre 2021 la Sas Omnivar Piscines demande à la cour de :

REFORMER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de DRAGUIGNAN le 22 juin 2021 en ce qu'il a condamné la SAS OMNIVAR d'avoir à relever et garantir les époux [G] du coût des travaux propres à mettre un terme aux troubles anormaux du voisinage résultant du fonctionnement des ouvrages de la piscine.

Et statuant à nouveau,

DIRE ET JUGER que les opérations d'expertise judiciaire n'ont pas permis de déterminer si les bruits de la piscine excédaient les inconvénients normaux de voisinage.

Par conséquent,

DEBOUTER Madame [K] [H] et Monsieur [W] [H] de toutes leurs demandes fins et conclusions.

DEBOUTER Monsieur [B] [G] et Madame [Z] [G] de toute demande plus ample ou contraire.

Sur le surplus,

CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de DRAGUIGNAN le 22 juin 2021 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné la SAS OMNIVAR d'avoir à relever et garantir les époux [G] du coût des travaux propres à mettre un terme aux troubles anormaux du voisinage résultant du fonctionnement des ouvrages de la piscine.

DEBOUTER Monsieur [B] [G] et Madame [Z] [G] de toute demande plus ample ou contraire.

A titre subsidiaire,

LIMITER la condamnation de la SAS OMNIVAR à la somme de 2000€ au titre des préjudices subis par les époux [H].

En tout état de cause,

CONDAMNER Monsieur [B] [G] et Madame [Z] [G] d'avoir à payer la somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNER Monsieur [B] [G] et Madame [Z] [G] aux dépens de l'appel.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 4 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la péremption de l'instance

Aux termes des articles 386 et suivants du code de procédure civile l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans. La péremption peut être demandée par l'une quelconque des parties. Elle peut être opposée par voie d'exception à la partie qui accomplit un acte après l'expiration du délai de péremption. La péremption doit, à peine d'irrecevabilité, être demandée ou opposée avant tout autre moyen ; elle est de droit. Le juge peut la constater d'office après avoir invité les parties à présenter leurs observations. La péremption n'éteint pas l'action ; elle emporte seulement extinction de l'instance sans qu'on puisse jamais opposer aucun des actes de la procédure périmée ou s'en prévaloir.

[B] [G] et [Z] [F] épouse [G] soutiennent que le délai de péremption a été suspendu par l'arrêt du 12 octobre 2012 jusqu'au dépôt du rapport de l'expert (11 mai 2016) qui est l'évènement à partir duquel un nouveau délai a recommencé à courir, que les époux [H] n'ont pas ressaisi la Cour qui aurait dû l'être en continuation de l'arrêt du 12 octobre 2012 après le dépôt du rapport de l'expert judiciaire le 11 mai 2016 avant le 11 mai 2018, que les époux [G] ont été réassignés devant le Tribunal de Grande Instance de Draguignan par acte du 19 juillet 2017, dans le cadre d'une nouvelle instance, se fondant sur les faits dénoncés le 19 août 2008 et le 30 septembre 2009 dans leur assignation initiale du 16 octobre 2009.

Il sera relevé que l'instance introduite le 30 septembre 2009 a été suspendue par l'effet de l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 12 octobre 2012, que cet arrêt a seulement statué sur la mesure d'expertise avant dire droit et a sursis à statuer sur le fond.

À l'issue du dépôt du rapport d'expertise le 11 mai 2016, cette instance n'a pas été ré-enrôlée à la demande des parties, elle est donc atteinte par la péremption.

Toutefois, les époux [H] ont fait délivrer le 19 juillet 2017 une nouvelle assignation. Le fait que les époux [H] en première instance aient produit le rapport d'expertise ordonné dans l'instance périmée est sans incidence sur la recevabilité de leurs demandes qui se fondent sur l'examen de la pertinence des pièces produites. De même il n'a pas été statué sur leurs demandes présentées dans l'assignation délivrée en 2009 puisque celles-ci ont fait l'objet d'une décision de sursis à statuer.

En l'absence de jonction des procédures la procédure initiée en juillet 2017 n'est pas impactée par le déroulement de la procédure initiée en 2009.

La péremption d'instance n'est donc pas acquise s'agissant de la seconde procédure objet de l'appel. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la prescription

[W] [H] et [K] [M] épouse [H] fondent leur action au titre du trouble anormal du voisinage, qui relève des dispositions prévues par l'article 2224 du code civil selon lesquelles les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

L'article 389 du Code de procédure civile indique que la péremption n'éteint pas l'action mais emporte seulement extinction de l'instance en cours. Dès lors, les parties peuvent ressaisir le juge, sous réserve que leur action ne soit pas prescrite.

L'article 2240 du code civil énonce que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure.

L'article 2242 du même code précise que l'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance.

En l'espèce l'instance introduite le 30 septembre 2009 a interrompu le délai de prescription quinquennal jusqu'au caractère définitif de l'arrêt rendu le 12 octobre 2012. A compter de son caractère définitif, un nouveau délai d'action de 5 ans, indépendant du délai d'instance soumis à la péremption, a commencé à courir. La nouvelle instance fondée sur le trouble anormal du voisinage allégué depuis septembre 2009 n'est donc pas couverte par la prescription qui a été interrompue par l'assignation délivrée le 19 juillet 2017 soit avant l'expiration du nouveau délai de 5 ans.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur les demandes au titre du trouble anormal du voisinage

Il est admis que nul ne doit causer à autrui un trouble de voisinage. En effet, si l'article 544 du code civil confère le droit de jouir « de la manière la plus absolue » des choses dont on est propriétaire, leur usage ne peut cependant s'exercer en contrariété des lois et règlements, ni être source pour la propriété d'autrui, bénéficiant des mêmes prérogatives, d'un dommage excédant les inconvénients normaux du voisinage ; l'anormalité s'apprécie en fonction des circonstances locales, doit revêtir une gravité certaine et être établie par celui qui s'en prévaut.

S'agissant d'un régime de responsabilité autonome, fondé sur un fait objectif à l'exclusion de toute faute ou négligence, les dispositions de l'article 1240, lui sont inapplicables.

En l'espèce l'expert a constaté trois anomalies depuis le fonds des appelants :

' N°1 : l'écoulement des eaux de pluie vers la parcelle des époux [H],

' N°2 : des inondations dans la partie basse du terrain des époux [H] provenant du système de vidange des eaux de la piscine, ou des événements accidentels de débordement de la goulotte de la piscine

' N°3 : les émissions sonores provenant du bassin tampon de la piscine.

Contrairement à ce que soutiennent les appelants, l'expert a personnellement constaté que l'évacuation des eaux de vidange de la piscine s'effectue sur la propriété des époux [H], à travers des canalisations provenant du fonds des époux [G]. Il a également objectivé que le caniveau devant recueillir leurs eaux pluviales ne fonctionne pas.

Les écoulements subis sur le fonds [H] lors de l'utilisation de l'arrosage automatique n'ont pas effectivement été observés par l'expert mais celui-ci a pu apprécier la pertinence des photographies annexées aux constats d'huissiers de septembre 2009, octobre 2009, juillet 2010 et août 2010 avec la présentation des lieux pour suggérer la vraisemblance des écoulements. Il sera néanmoins observé qu'au cours de l'expertise judiciaire, la mise en route du système d'arrosage, dont la portée aurait été réduite, a conduit à la présence d'infiltrations d'eau sur le fonds [H]. Ce désordre est donc objectivé.

Enfin contrairement à ce que soutiennent les appelants, l'expert n'a pas qualifié le bruit provenant du local piscine d'anormal puisque celui-ci n'a pu effectuer aucune mesure sonore en l'absence d'intervention d'un sapiteur.

Compte tenu des conclusions de l'expert judiciaire et des constats d'huissiers produits aux débats il est établi que le fonds [H] subit des écoulements d'eau provenant notamment de la vidange des eaux de la piscine voisine, au moyen de canalisations que les appelants ont fait installer, outre des projections d'eau à l'occasion de l'arrosage de leur terrain, que ces désagréments outrepassent les inconvénients normaux du voisinage en ce qu'ils conduisent à faire subir des infiltrations d'eau endommageant le fonds [H] et nettement visible sur les photographies.

Bien que le fonds [H] se situe en aval du fonds [G] et soit tenu à ce titre de récupérer les eaux en sa provenance et de les canaliser, il a été constaté par l'expert que les époux [G] ont posé des canalisations de vidange de l'eau de piscine sur la propriété des époux [H]. Cet aménagement ne peut ni être considéré comme normal ni être tenu pour admissible au regard de la topographie des lieux et de la sujétion du fonds [H] au fonds supérieur.

En revanche l'anormalité résultant du bruit provoqué par le regard du bassin tampon n'est pas suffisamment caractérisée.

En conséquence, il conviendra de considérer qu'à l'exception du bruit du bassin tampon, l'anormalité des troubles résultant de l'évacuation des eaux pluviales et de vidange de la piscine est caractérisée.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné [W] [H] et [K] [M] épouse [H] à faire réaliser les travaux au titre du bac tampon et en ce qu'il a condamné [B] [G] et [Z] [F] épouse [G] à réaliser l'ensemble des travaux préconisés par l'expert en page 21 de son rapport.

S'agissant des mesures nécessaires à faire disparaître les troubles, l'expert a préconisé en page 21 de son rapport des travaux propres à y remédier et a relevé qu'aucune partie n'avait produit de devis en ce sens ni sollicité leur choix dans les options de travaux préconisés par l'expert.

En conséquence au titre de l'évacuation du caniveau en limite Sud-Est de la propriété des époux [G], ces derniers seront condamnés à remettre en fonctionnement le système d'évacuation des eaux pluviales du caniveau bétonné existant avant la pose des deux canalisations de diamètre 100 mm dans le mur mitoyen.

Au titre des eaux de vidange de la piscine, les époux [G] seront condamnés à créer un réseau enterré qui rejette ces eaux au réseau d'eaux pluviales tel que préconisé par la Mairie.

Ces condamnations seront assorties d'une obligation de faire sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans un délai de cinq mois à compter de la signification de la décision et durant une période de 6 mois, aux termes de laquelle l'astreinte pourra être liquidée et une nouvelle astreinte pourra être prononcée.

Sur l'appel en garantie

[B] [G] et [Z] [F] épouse [G] sollicitent d'être relevés et garantis par la SAS Omnivar qui a procédé à la construction de la piscine.

Selon le devis en date du 5 juillet 2007 la société Omnivar mentionne notamment que les canalisations seront enterrées. L'ouvrage construit par la société Omnivar a fait l'objet d'un procès verbal de réception le 18 avril 2008 et n'a fait l'objet d'aucune réserve, tandis qu'à l'exception du bac tampon aucune malfaçon n'a été relevée par l'expert au titre de l'ouvrage en tant que tel et des travaux de gros 'uvre.

Il est donc établi que la société Omnivar n'est pas intervenue sur le réseau d'eau pluvial dont le fonctionnement a été suspendu par la pose d'autres canalisations, et n'est pas davantage intervenue dans l'installation de canalisation conduisant à l'évacuation des eaux de vidange de la piscine sur le fonds [H].

Les désordres évoqués au titre du bruit causé par le bac tampon ne sont par ailleurs pas caractérisés.

En conséquence, en l'absence de faute démontrée dans l'édification de l'ouvrage en lien avec les troubles qualifiés d'anormaux, la demande de condamnation aux fins d'être relevés et garantis n'est pas fondée. Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur la demande indemnitaire reconventionnelle

[W] [H] et [K] [M] épouse [H] qui sollicitent que l'indemnisation allouée en première instance soit ajustée à la somme de 20.000 euros ne produisent aucun élément pertinent de nature à remettre en cause l'évaluation de leur préjudice. La demande sera rejetée et le jugement confirmé sur ce point.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement dans ses dispositions concernant les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

[B] [G] et [Z] [F] épouse [G] qui succombent seront condamnés aux dépens distraits au profit des avocats qui en font la demande et aux frais irrépétibles qu'il est inéquitable de laisser à la charge d'[W] [H] et [K] [M] épouse [H] et de la Sas Omnivar.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné [B] [G] et [Z] [F] épouse [G] à réaliser l'ensemble des travaux préconisés par l'expert en page 21 de son rapport, et en ce qu'il a condamné la Sas Omnivar à relever et garantir [B] [G] et [Z] [F] épouse [G] ;

Confirme le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Condamne [B] [G] et [Z] [F] épouse [G] à remettre en fonctionnement le système d'évacuation des eaux pluviales du caniveau bétonné existant avant la pose des deux canalisations de diamètre 100 mm dans le mur mitoyen au titre de l'évacuation du caniveau en limite Sud-Est de leur propriété, tel que préconisé par l'expert judiciaire en page 21 de son rapport, et ce dans un délai de cinq mois à compter de la signification de la décision ;

Condamne [B] [G] et [Z] [F] épouse [G] à créer un réseau enterré des eaux de vidange qui rejette ces eaux au réseau d'eaux pluviales tel que préconisé par la Mairie et tel que préconisé par l'expert judiciaire en page 21 de son rapport , et ce dans un délai de cinq mois à compter de la signification de la décision ;

Dit que faute pour [B] [G] et [Z] [F] épouse [G] de s'être exécutés dans les délais, ils seront condamnés à une astreinte de 100 euros par jour de retard durant une période de 6 mois, aux termes de laquelle l'astreinte pourra être liquidée et une nouvelle astreinte pourra être prononcée ;

Condamne [B] [G] et [Z] [F] épouse [G] aux entiers dépens d'appel qui seront distraits au profit de Maître Françoise BOULAN

Condamne [B] [G] et [Z] [F] épouse [G] à verser à [W] [H] et [K] [M] épouse [H] la somme de 5.000 euros et à la SAS Omnivar la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT