Décisions
CA Aix-en-Provence, ch. 2-4, 9 octobre 2024, n° 24/01885
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 2-4
ARRÊT AU FOND
DU 09 OCTOBRE 2024
N° 2024/213
Rôle N° RG 24/01885 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BMSL4
[U] [W] [Z] [Y]
C/
[E] [B] veuve [Y]
[G] [Y]
[M] [L] [T] [Y]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Marine DA CUNHA
Me Fanny KESTER
Décision déférée à la Cour :
Jugement de procédure accélérée au fond du Tribunal judiciaire d'Aix en Provence en date du 30 Janvier 2024 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 23/00797.
APPELANTE
Madame [U] [W] [Z] [Y]
née le [Date naissance 3] 1979 à [Localité 21], demeurant [Adresse 1] - [Localité 13]
représentée par Me Marine DA CUNHA de l'AARPI AUDAX AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Madame [E] [B] veuve [Y]
née le [Date naissance 6] 1960 à [Localité 15], demeurant [Adresse 12] - [Localité 23]
représentée par Me Fanny KESTER, avocat au barreau de MARSEILLE
Monsieur [G] [Y]
né le [Date naissance 5] 1986 à [Localité 21], demeurant [Adresse 14] - [Localité 2]
représenté par Me Fanny KESTER, avocat au barreau de MARSEILLE
Monsieur [M] [L] [T] [Y]
né le [Date naissance 3] 1979 à [Localité 21], demeurant [Adresse 4] - [Localité 16] (Etats Unis)
défaillant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 11 Septembre 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Pascale BOYER, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
Madame Michèle JAILLET, Présidente
Madame Nathalie BOUTARD, Conseillère
Mme Pascale BOYER, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Fabienne NIETO.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Octobre 2024.
ARRÊT
Défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Octobre 2024,
Signé par Madame Michèle JAILLET, Présidente et Mme Fabienne NIETO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé du litige
[X] [Y] a eu trois enfants de son union avec Madame [D] soit :
- [M] [Y]
- [U] [Y], jumelle du premier
- [G] [Y]
[X] [Y] et [E] [B] se sont mariés à [Localité 23] (BOUCHES du RHONE) le [Date mariage 11] 2003 sous le régime de la séparation de biens par contrat préalable.
[M] [Y] a épousé la fille de [E] [B] issue d'une précédente union et ils vivent aux Etats-Unis.
[X] [Y] a organisé la répartition de son patrimoine par testament authentique en date du 16 novembre 2016, reçu par Maître [P] [A] notaire à [Localité 21].
Par cet acte, il a légué à son épouse survivante :
- la quotité disponible la plus large permise par la loi sur ses biens de Corse
- L'usufruit seulement de l'ensemble des parts sociales dans chaque société dans laquelle il serait associé à son décès,
- La pleine propriété de l'ensemble de ses biens mobiliers (avoirs bancaires, placements, voitures, meubles) .
Il a légué à ses enfants ses bijoux à parts égales.
Il a désigné ses deux fils comme légataires à part égale de ses biens immobiliers chacun pour moitié.
Il a légué à sa fille la nue-propriété des parts sociales des sociétés dont son épouse sera usufruitière.
[X] [Y] était notamment propriétaire :
- de parts sociales des sociétés [20], [22] et de la SCI [19],
- d'une quote-part indivise d'une propriété située à [Localité 18] dont ses parents étaient usufruitiers et
- de la moitié de deux villas jumelles situées à [Localité 17] sur un terrain acquis avec [E] [B] les 30 et 31 août 2002.
Au mois d'octobre 2018, [X] [Y], se sachant malade, a signé des compromis de vente des biens immobiliers appartenant aux sociétés qu'il animait.
La gérance de ces sociétés a été transférée à [E] [B].
[X] [Y] est décédé le [Date décès 7] 2018, laissant pour lui succéder son épouse, [E] [B], et les trois enfants issus de sa précédente union.
La déclaration de succession a été déposée au mois de novembre 2019.
Les ventes des actifs des sociétés animées par le défunt et de l'immeuble de [Localité 18] et la vente et la distribution aux légataires des biens de CORSE ont donné lieu à des oppositions et différends.
[U] [Y] a notamment formé opposition à la distribution du prix de vente des biens de [Localité 17] entre les mains du notaire chargé de la vente.
[E] [B] a contesté cette opposition devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Marseille le 6 août 2021, lequel, par une ordonnance du 8 novembre 2021, a jugé infondée l'opposition de [U] [Y] à la distribution du prix de vente des maisons de [Localité 17] entre ses frères et [E] [Y]. Cette décision a été confirmée par la cour d'appel d'AIX EN PROVENCE le 5 mai 2022.
Le 21 septembre 2021, [U] [Y] avait fait assigner [E] [B], [M] [Y] et [G] [Y] devant le tribunal judiciaire d'AIX EN PROVENCE en partage de la succession de son père.
Le 21 novembre 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'AIX EN PROVENCE a annulé l'assignation en partage pour violation des règles procédurales par assignation des défendeurs à domicile qu'ils n'ont pas élu. La juge a précisé que cette signification irrégulière était délibérée afin de pouvoir invoquer une instance en cours devant le juge des référés. Il a déclaré irrecevable l'action de [U] [Y] pour défaut de diligences en vue d'un partage amiable.
[E] [B] et [G] [Y] ont fait assigner, le 25 mai 2023, [U] [Y], en présence de [M] [Y], devant le président du tribunal judiciaire d'AIX EN PROVENCE aux fins d'obtenir la désignation d'un mandataire successoral chargé notamment de représenter la succession dans les instances des sociétés.
Par jugement réputé contradictoire du 30 janvier 2024 rendu selon la procédure accélérée au fond, auquel le présent se réfère pour plus ample exposé des faits et des prétentions des parties, le président du tribunal judiciaire d'AIX EN PROVENCE a, notamment :
- Désigné Monsieur [G] [Y], en qualité de mandataire successoral à la succession de feu Monsieur [X] [Y], décédé à [Localité 21] le [Date décès 7] 2018
- Dit que Monsieur [G] [X] [Y], ès-qualités de mandataire successoral, représentera la succession de feu Monsieur [X] [Y] aux assemblées générales ordinaires et extraordinaires des sociétés suivantes:
- SARL [22], société à responsabilité limitée au capital de 1 000 Euros, immatriculée au RCS d'Aix-en-Provence sous le N° [N° SIREN/SIRET 10] dont le siège social est à [Localité 23] ' [Adresse 12]
- SAS [20], société par actions simplifiée au capital de 40 000 euros immatriculée au RCS d'Aix-en-Provence sous le N°[N° SIREN/SIRET 9], dont le siège social est à [Localité 23] - [Adresse 12]
- SCI [19], société civile immobilière au capital de 244 000 Euros immatriculée au RCS d'Aix-en Provence sous le N° [N° SIREN/SIRET 8], dont le siège social est à [Localité 23] ' [Adresse 12]
- Dit que Monsieur [G] [Y], ès-qualités de mandataire successoral, exercera les droits de vote attachés aux parts sociales et actions dépendant de la succession de feu Monsieur [X] [Y] notamment sur toute délibération soumise aux associées/actionnaires des Sociétés susvisées et notamment:
- L'approbation des comptes des sociétés SARL [22], SAS [20] et SCI [19] et le quitus donné à la gérante des SARL [22], SAS [20] et SCI [19] pour sa gestion,
- La dissolution anticipée et la liquidation des SARL [22], SAS [20] et SCI [19] ou la continuation des dites sociétés (nonobstant des pertes supérieures à la moitié du capital social s'agissant de la SARL [22] et la SAS [20]);
- Débouté Madame [U] [Y] de toutes ses demandes
- Condamné Madame [U] [Y] à payer à Madame [E] [B] veuve [Y] et Monsieur [G] [Y] la somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile
- Condamné Madame [U] [Y] aux dépens.
Ce jugement a été signifié le 6 février 2024 et le 23 février 2024 par acte annulant le précédent à [U] [Y].
Par déclaration par voie électronique du 14 février 2024, [U] [Y] a formé appel contre la décision.
Le 14 mars 2024, l'appelante a été avisée de la fixation de l'affaire selon la procédure à bref délai à l'audience du 11 septembre 2024.
Elle a fait signifier la déclaration d'appel, l'avis de fixation à bref délai et la sommation de constituer avocat à [E] [B] [Y] le 20 mars 2024 à personne, à [G] [Y] le 20 mars 2024 par remise à l'étude et a adressé à [M] [Y] ces documents par remise à l'entité requise américaine le 23 mars 2024.
Par ses premières conclusions du 14 avril 2024, l'appelante demande à la cour de :
- RECEVOIR Madame [U] [Y] en son appel et le déclarer bien fondé
- RÉFORMER la décision entreprise rendue
Statuant à nouveau :
A TITRE PRINCIPAL:
- DÉBOUTER Madame [E] [B] et Monsieur [G] [Y] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions
- ORDONNER une mesure de médiation et à cette fin désigner tel médiateur qu'il plaira à Madame ou Monsieur le Président du Tribunal Judiciaire d'Aix en Provence, avec pour mission de rechercher avec les indivisaires une solution au différend successoral qui les opposent concernant les sociétés SARL [22] , SAS [20], SCI [19]
A TITRE SUBSIDIAIRE : Si par extraordinaire, il n'était pas fait droit à la demande de médiation
- DÉSIGNER tel mandataire successoral qu'il plaira à Madame ou Monsieur le Président du Tribunal Judiciaire d'Aix en Provence, autre qu'un membre de l'hoirie [Y], avec pour mission de rechercher avec les indivisaires une solution au différend successoral qui les opposent concernant les sociétés SARL [22] SAS [20], SCI [19]
EN TOUT ETAT :
- ORDONNER la communication des documents sociaux, comptables et conventions réglementées afférents aux sociétés SARL [22], SCI [19], [20], Clamm, sous astreinte de 100 euros par jours de retard et document
- ORDONNER la désignation d'un mandataire successoral ;
- CONDAMNER Madame [E] [Y] et Monsieur [G] [Y] à la somme de 10.000 euros en réparation des préjudices subis par Madame [U] [Y]
- CONDAMNER Madame [E] [Y] et Monsieur [G] [Y] à payer à Madame [U] [Y] la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
[E] [B] et [G] [Y] ont constitué avocat le 16 avril 2024.
Le 23 avril 2024, le conseil de l'appelante a communiqué au conseil des intimés ses conclusions notifiées au greffe le 14 avril 2024.
L'appelante leur a notifié ses conclusions le 24 avril 2024.
Le 15 mai 2024, les intimés ont communiqué leurs conclusions. Ils réclament que la cour :
- CONFIRME le jugement de procédure accélérée au fond rendu le 30 janvier 2024 par Monsieur le Président du Tribunal Judicaire d'Aix-en-Provence et ce en toutes ses dispositions.
Y ajoutant en cause d'appel,
- CONDAMNE Madame [U] [Y] au paiement d'une amende civile dont le montant est laissé à l'appréciation de la Cour ;
- CONDAMNE Madame [U] [Y] à payer à Madame [E] [B] veuve [Y] et à Monsieur [G] [Y] une somme de deux mille (2 000) Euros chacun à titre des dommages et intérêts en réparation du lourd préjudice en particulier moral par eux subis à raison de cet appel purement abusif et de l'acharnement de Madame [U] [Y] à blesser et nuire.
- CONDAMNE Madame [U] [Y] à payer à Madame [E] [B] veuve [Y] et Monsieur [G] [Y] pris ensemble une somme globale de cinq mille (5 000) Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel ;
- CONDAMNE Madame [U] [Y] aux entiers dépens d'appel , distraits au profit de Maître Fanny KESTER, sur ses affirmations de droit.
Le 12 juin 2024 par message électronique les intimés constitués ont soulevé la caducité de l'appel pour absence de signification de la déclaration d'appel à l'intimé non constitué.
La clôture de la procédure a été prononcée le 3 juillet 2024.
Le 5 septembre 2024, un nouveau conseil s'est constitué au lieu et place de celui de l'appelante.
Le 6 septembre 2024, l'appelante a communiqué de nouvelles conclusions avec demande de révocation de l'ordonnance de clôture figurant dans le corps de ses conclusions.
Sur le fond, elle maintient sa demande de réformation de l'intégralité des chefs du jugement en les listant.
Elle maintient ses prétentions en suggérant le nom d'un mandataire successoral tiers à la famille et elle liste les documents sociaux dont elle sollicite la communication sous astreinte.
Les intimés par conclusions du 9 septembre 2024, ont soulevé l'irrecevabilité des nouvelles écritures et se sont opposés à la révocation.
Par conclusions en réponse du 10 septembre 2024, l'appelante a répliqué aux moyens et arguments invoqués par les intimés pour s'opposer à la révocation.
Selon des écritures transmises le 11 septembre 2024 avant le début de l'audience, elle a complété le dispositif de ses conclusions en y ajoutant la demande à la cour de « prononcer le rabat de la clôture ».
Motifs de la décision
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées.
Sur la question de la révocation de l'ordonnance de clôture
En raison de la date de la déclaration d'appel antérieure au 1er septembre 2024, , les anciens textes de la procédure d'appel sont applicables.
Les articles 907, 802 et 803 du code de procédure civile prévoient qu'après la clôture les nouvelles écritures sont irrecevables d'office à l'exception notamment des conclusions aux fins de révocation de l'ordonnance de clôture. Il en ressort également que la décision de clôture de ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.
L'appelante soutient qu'elle a eu connaissance à la fin du mois d'août 2024 grâce à une veille sur les publications du registre du commerce et des sociétés des assemblées d'associés qui ont eu lieu le 26 juillet 2024 et par lesquelles ont été décidées la dissolution anticipée de la société [22] et de la SCI [19] et de la désignation de Madame [B] en qualité de liquidateur et de la continuation de la société [20] malgré la perte de capitaux propres.
Elle ajoute qu'elle a découvert aussi le dépôt auprès du registre du commerce et des sociétés d'actes très anciens de nature à augmenter le passif des sociétés.
Elle précise qu'elle devait être convoquée aux assemblées en qualité de propriétaire indivise de parts, malgré la désignation d'un mandataire successoral.
Elle soutient que ces éléments prouvent l'incompétence de [G] [Y] dans son rôle de mandataire successoral .
Les intimés indiquent que [U] [Y] a été convoquée le 5 juin 2024 aux assemblées générales qui se sont tenues pendant l'été et ' invoquent l'exécution provisoire de la décision du 30 janvier 2024.
Ils rappellent que l'appelante n'a pas contesté en appel l'exécution provisoire de la décision de première instance.
Ils soutiennent que ces faits ne sont pas nouveaux.
L'appelante en réponse conteste la convocation et soutient qu'il n'en est pas justifié. Elle ajoute que l'exécution provisoire de la décision désignant un mandataire successoral ne dispense pas de la convocation des autres associés.
Elle ajoute que le mandataire successoral désigné n'a pas reçu pour mission de procéder à des dépôts d'actes anciens destinés à masquer une créance de la succession sur la SCI [19].
Elle soutient que madame [B] a attendu la clôture de la procédure en appel pour tenir les assemblées afin d'empêcher tout débat sur leur validité.
La question de la validité des assemblées qui se seraient tenues le 26 juillet 2024 ne relève pas de l'appel de la décision ayant autorisé la prise de ces décisions par un mandataire successoral.
Il convient donc de rejeter la demande de révocation de l'ordonnance de clôture.
En conséquence, les conclusions sur le fond et les nouvelles pièces de l'appelante et des intimés postérieures à la date de la clôture sont déclarées irrecevables.
Sur la question de la caducité de l'appel
Il est soulevé l'absence de justification de la signification à [M] [Y] de la déclaration d'appel et des conclusions d'appelant.
Toutefois dans le dossier remis à la cour [U] [Y] justifie de l'envoi à l'entité américaine requise le 25 mars 2024 de l'acte de signification de la déclaration d'appel accompagnée de la sommation d'avoir à constituer avocat dans le cadre de la procédure à bref délai avec reproduction des textes applicables.
La formalité prévue par l'article 905-1 du code de procédure civile a été accomplie.
La caducité de l'appel n'est donc pas encourue.
Sur la qualification de la décision
Il n'est pas justifié par les pièces produites que [M] [Y] a eu connaissance à personne de la signification de la déclaration d'appel, il n'a pas constitué avocat.
En application de l'article 474 du code de procédure civile, auquel renvoie l'article 749 du même code, la décision non susceptible d'appel sera rendue par défaut.
Sur l'étendue de la saisine de la cour
Il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.
Les demandes de 'donner acte' sont dépourvues de tout enjeu juridique et ne constituent pas des prétentions au succès desquels les parties pourraient avoir un intérêt légitime à agir au sens de l'article 4 du code de procédure civile.
Ne constituent pas, par conséquent, des prétentions au sens de l'article sus-cité du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir 'constater' ou 'donner acte' ou encore à 'prendre acte' de sorte que la cour n'a pas à y répondre.
Il n'y a donc pas lieu de reprendre ni d'écarter dans le dispositif du présent arrêt les demandes tendant à 'constater que' ou 'dire que ' telles que figurant dans le dispositif des conclusions des parties, lesquelles portent sur des moyens ou éléments de fait relevant des motifs et non des chefs de décision devant figurer dans la partie exécutoire de l'arrêt.
L'article 9 du code de procédure civile dispose qu''il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention' et que l'article 954 du même code, dans son alinéa 1er, impose notamment aux parties de formuler expressément ses prétentions et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée 'avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et leur numérotation'.
En application de cet article, la cour n'est saisie que des prétentions figurant dans le dispositif des conclusions des parties.
Par ailleurs l'effet dévolutif de l'appel implique que la cour connaisse des faits survenus au cours de l'instance d'appel et depuis le jugement déféré et statue sur tous les éléments qui lui sont produits même s'ils ne se sont révélés à la connaissance des parties qu'en cours d'instance d'appel.
En l'espèce, le jugement est critiqué en toutes ses dispositions.
Sur la désignation du mandataire successoral
L'appelante dénonce les conditions dans lesquelles son père aurait signé trois compromis de vente des biens immobiliers détenus par la société SARL [22] au mois d'octobre 2018, soit seulement un mois avant son décès alors qu'il suivait un protocole de soins palliatifs.
Elle conteste les circonstances dans lesquelles il a désigné Madame [E] [B] mandataire social desdites sociétés le 6 novembre 2018, soit quelques jours avant son décès.
Elle conteste être à l'origine du blocage dans le fonctionnement des sociétés du fait de son absence aux assemblées générales. Elle rappelle que [E] [B], en qualité de mandataire social, disposait du pouvoir de faire désigner un mandataire ad hoc ou successoral pour que les titulaires de parts indivises puissent être représentés aux assemblées générales malgré son absence.
Elle ajoute qu'elle était en droit de s'opposer aux décisions proposées dans le cadre des assemblées des associés et actionnaire car elle n'a pas eu communication des comptes sociaux et des conventions conclues entre les sociétés et [E] [B].
Elle ajoute que les assemblées d'associés se tenaient dans la maison familiale dont l'accès lui a été interdit pendant 15 ans et que les autres associés ont refusé l'accès à l'huissier de justice qu'elle avait mandaté.
Elle dénonce l'alliance judiciaire de la veuve et de son frère [G] qui ont exercé sur elle des pressions pour signer les actes définitifs de vente et l'alliance maritale de son frère [M] avec [E] [B].
Elle soutient que les intimés n'ont pas saisi le président du tribunal pour faire ordonner le dépôt de la déclaration de succession.
Elle réplique qu'elle a répondu immédiatement à la demande de signature d'un mandat de vente de la maison de [Localité 18] ; qu'elle a fait diligence en vue de la vente du terrain de [Localité 18] et de l'immeuble de [Localité 17] en effectuant les démarches nécessaires entre deux jours et 20 jours après leur demande.
Elle soutient qu'elle est légitime à s'opposer à la répartition des prix de vente car elle fait valoir, dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial, une créance de la succession envers sa belle-mère concernant le financement des constructions.
Elle fait état de sa volonté de sortir sereinement de l'indivision et d'une rupture familiale ainsi que de la procédure initiée en 2021 aux fins de partage.
Elle fait état de la complexité de la situation des sociétés dont il n'est pas certain qu'elles n'ont plus d'actif. Elle rappelle que la veuve de son père n'a pas mis à l'ordre du jour la dissolution des sociétés avant la procédure accélérée au fond.
Elle en déduit que la désignation de [G] [Y] comme mandataire successoral serait contraire à l'intérêt de la succession et lui serait préjudiciable.
Les intimés soutiennent que l'appelante utilise cette procédure pour régler des comptes et exposer des ranc'urs sans élaborer de raisonnement juridique pour justifier son opposition à la désignation de son frère comme mandataire successoral.
Ils indiquent qu'elle n'articule aucun moyen ou argument juridique fondé pour s'opposer à cette désignation qui recueille la faveur de l'ensemble des autres héritiers.
Ils indiquent que les sociétés qui ne disposent plus d'actifs doivent être dissoutes puis liquidées.
Ils ajoutent que, le 12 avril 2023, après avoir refusé de se présenter aux assemblées d'associés et ainsi empêché la dissolution des trois sociétés sans activité depuis plusieurs années, elle a refusé de désigner un mandataire commun.
Ils indiquent qu'elle ne s'est pas présentée en l'étude du notaire lors de la réunion en vue d'approuver le projet de partage le 2 février 2024.
L'article 813-1 du Code Civil dispose que : « Le juge peut désigner toute personne qualifiée, physique ou morale, en qualité de mandataire successoral, à l'effet d'administrer provisoirement la succession en raison de l'inertie, de la carence ou de la faute d'un ou de plusieurs héritiers dans cette administration, de leur mésentente, d'une opposition d'intérêts entre eux ou de la complexité de la situation successorale».
Les nombreux documents produits aux débats par les parties révèlent que le règlement de la succession de [X] [Y] connaît des retards dus à l'opposition de [U] [Y] qui a conduit au dépôt tardif de la déclaration de succession, en raison du refus de [U] [Y] sans motif ; à un retard de plusieurs mois dans la vente des biens des sociétés [22] et [19] dont les compromis de vente avaient été signés par [X] [Y], alors gérant, au début du mois d'octobre 2018 ; à un retard dans la vente des biens de Corse et dans la distribution de son prix alors qu'il appartenait en indivision au défunt et à son épouse et que son prix apportait des liquidités à la succession dans l'optique d'assurer l'égalité du partage.
Elle a aussi conduit à un retard de plusieurs années dans la vente du bien de [Localité 18] qui appartenait en indivision au défunt et à ses frères et s'urs alors que son père en détenait l'usufruit mais ne pouvait s'y maintenir et avait besoin de liquidités pour assurer son relogement.
En outre, en raison de l'opposition de [U] [Y] à la désignation de son frère [G] comme mandataire représentant l'indivision, titulaire des parts sociales de leur père dans les assemblées des sociétés [19], [20] et [22], ces sociétés dépourvues de recettes et qui doivent continuer à supporter des charges, ont connu des difficultés financières.
Pourtant [U] [Y] n'expose aucun motif précis pour expliquer la méfiance envers son frère [G] à l'exception du fait qu'il est le beau-fils de [E] [B] alors qu'elle en est elle-même la belle-fille et que ce lien ne résulte que de l'alliance.
Elle ne fait état d'aucun fait précis mais seulement de soupçons sur les circonstances dans lesquelles ont été décidées la vente des actifs des sociétés et le changement de gérance avant le décès de son père.
Elle invoque dans ses conclusions la maladie de son père et a contesté les conditions dans lesquelles les promesses de vente ont été signées par son père et la gérance octroyée à [E] [B] et elle produit des documents médicaux à cet effet. Toutefois, elle n'a pas agi en annulation de l'assemblée du 6 novembre 2018 ou des compromis de vente signés par son père.
Elle a fait valoir devant le juge des référés et dans les plaintes déposées que [E] [B] aurait profité des avoirs de son père avant son décès avec la complicité de Maître [A] en admettant ne posséder aucune preuve de ces allégations.
Elle a systématiquement retardé les actes de disposition nécessaires au prétexte d'un défaut d'information en sollicitant plusieurs fois les mêmes documents au profit de plusieurs notaires et avocats successifs qu'elle a mandatés.
En outre, elle n'a pas répondu à la demande de vente des biens de [Localité 18], en conditionnant son accord à la remise de divers objets sans opposer de raison à sa contestation à la vente. Elle a par la suite, sollicité leur attribution dans le cadre d'un partage sans formuler de proposition précise et détaillée permettant aux autres indivisaires qui n'y étaient pas opposés, d'y répondre.
Elle ne fait valoir aucun motif pour s'opposer à l'approbation des comptes des sociétés. Elle ne produit aucune pièce dont il résulterait que la situation décrite ne correspond pas à la réalité.
Si les convocations aux assemblées de 2019 ne contenaient pas, à l'ordre du jour, la dissolution des sociétés et leur liquidation, les assemblées ne pouvaient valablement avoir lieu à compter de 2020 en raison de l'absence de mandataire de l'indivision titulaire des parts sociales ayant appartenu à leur père.
[U] [Y] ne s'est pas proposée pour représenter l'indivision dans les assemblées d'associés alors que ce mandat pouvait lui permettre de disposer de toutes les informations et communications de pièces nécessaires.
La mésentente entre [U] [Y] et les autres héritiers entraîne un blocage des opérations de partage.
En outre, la nature des missions du mandataire successoral ne nécessite pas de recourir à un mandataire professionnel.
Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement critiqué en toutes ses dispositions.
Sur la demande de communication de documents sociaux
L'appelante soutient que son droit à l'information en tant qu'associée des sociétés ayant appartenu à son père a été bafoué.
Elle précise qu'elle souhaite avoir connaissance des comptes sociaux détaillés des sociétés SARL [22], SCI [19] et [20], ainsi que des conventions réglementées conclues entre les sociétés et [E] [B] en sa qualité de dirigeante.
Elle expose que ces conventions auraient dû faire l'objet d'une approbation voire, d'une autorisation par l'assemblée générale annuelle des sociétés.
Les intimés soutiennent qu'elle ne s'est pas présentée à plusieurs assemblées d'associés et qu'elle a été destinataire annuellement des rapports de gestion et des liasses comptables des sociétés, ainsi que des autres documents et actes de cession auxquels elle pouvait accéder par un serveur dédié.
Ils soutiennent qu'il n'existe pas de convention réglementée entre la gérante et les sociétés. Ils ajoutent que les sociétés n'ont plus d'activité depuis 4 ans.
L'article L.223-19 du Code de commerce dispose que : « Le gérant ou, s'il en existe un, le commissaire aux comptes, présente à l'assemblée ou joint aux documents communiqués aux associés en cas de consultation écrite, un rapport sur les conventions intervenues directement ou par personnes interposées entre la société et l'un de ses gérants ou associés. L'assemblée statue sur ce rapport. Le gérant ou l'associé intéressé ne peut prendre part au vote et ses parts ne sont 12 pas prises en compte pour le calcul du quorum et de la majorité. Toutefois, s'il n'existe pas de commissaire aux comptes, les conventions conclues par un gérant non associé sont soumises à l'approbation préalable de l'assemblée. »
L'article L. 223-26 du Code de commerce prévoit que « Le rapport de gestion, l'inventaire et les comptes annuels établis par les gérants, sont soumis à l'approbation des associés réunis en assemblée, dans le délai de six mois à compter de la clôture de l'exercice sous réserve de prolongation de ce délai par décision de justice. Si l'assemblée des associés n'a pas été réunie dans ce délai, le ministère public ou toute personne intéressée peut saisir le président du tribunal compétent statuant en référé afin d'enjoindre, le cas échéant sous astreinte, aux gérants de convoquer cette assemblée ou de désigner un mandataire pour y procéder.
Les documents visés à l'alinéa précédent, le texte des résolutions proposées ainsi que le cas échéant, le rapport des commissaires aux comptes, les comptes consolidés et le rapport sur la gestion du groupe sont communiqués aux associés dans les conditions et délais déterminés par décret en Conseil d'Etat. Toute délibération, prise en violation des dispositions du présent alinéa et du décret pris pour son application, peut être annulée. »
Les intimés produisent les courriers recommandés adressés à [U] [Y] les 7 mars 2019 et 13 juin 2019 contenant convocation aux assemblées des trois sociétés avec communication des comptes annuels et du rapport spécial de la gérante.
Elle a reçu également le 22 mars 2023 une convocation aux assemblées des sociétés [22], [19] et [20] comportant les comptes annuels, les textes des résolutions et le rapport de gérance.
Le commissaire aux comptes n'a pas réalisé de rapport sur les conventions unissant la gérante à la société et [E] [B] soutient qu'il n'existe aucune convention de ce type.
Il convient en conséquence de juger que [U] [Y] a reçu les communications exigées par ces textes et la décision de rejet de sa demande de communication sera confirmée.
Sur la demande de dommages-intérêts de l'appelante
De même qu'en première instance, l'appelante présente une demande de réparation. Elle soutient qu'elle a enduré pendant 4 ans des pressions constantes aux fins d'approuver des actes de disposition importants sans pouvoir bénéficier des informations comptables nécessaires à la compréhension des enjeux et des conséquences, ce qui l'a plongée dans un état d'anxiété l'ayant conduite à consulter.
Les intimés soutiennent que c'est [U] [Y] qui retarde abusivement les opérations de partage depuis 5 ans. Ils rappellent son inertie et ses oppositions non justifiées aux actes de vente des actifs et de distribution de prix.
Ils indiquent qu'elle s'est opposée à la nomination de son frère comme mandataire successoral sans motif juridique et seulement afin de présenter des griefs personnels.
Ils soutiennent que [U] [Y] porte des accusations à leur encontre en ce qui concerne les événements antérieurs au décès de son père alors qu'elle n'a jamais contesté en justice la validité des actes accomplis à cette époque.
Ils indiquent qu'elle s'est elle-même mis à part de la famille et n'était notamment pas présente pendant la grave maladie de son père.
Le premier juge a rejeté cette demande au motif que [U] [Y] ne prouvait pas des préjudices subis mais seulement ressentis.
Toutefois, statuant dans le cadre de la procédure accélérée au fond, les pouvoirs du président sont limités aux mesures prévues par les textes cités dans l'article 1380 du code de procédure civile en matière de partage.
Le président ne détient pas dans le cadre de cette procédure spécifique le pouvoir de statuer sur une demande en réparation pour des motifs extérieurs à ceux de la procédure elle-même.
Or, en l'espèce, [U] [Y] dénonce le comportement de ses co-héritiers pendant toute la durée des opérations préalables au partage de la succession.
Il convient, en conséquence, de réformer la décision de première instance de ce chef et de déclarer irrecevable devant le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond la demande de dommages-intérêts de [U] [Y].
Sur la demande de dommages-intérêts des intimés
Les intimés demandent réparation du lourd préjudice en particulier moral par eux subis à raison de l'appel purement abusif et de l'acharnement de [U] [Y] à blesser et nuire.
La cour saisie d'un appel contre une décision du président statuant selon la procédure accélérée au fond ne dispose pas de plus de pouvoirs que ce dernier qui sont limités par l'article 1380 du code de procédure civile à certaines demandes.
Celle concernant les dommages et intérêts en raison de l'abus de procédure n'en fait pas partie.
Il convient en conséquence de déclarer d'office irrecevable la demande de ce chef.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
La décision de première instance n'est pas remise en cause sur le fond.
Il convient donc de confirmer la décision du premier juge concernant les dépens et les frais irrépétibles de procédure.
En ce qui concerne la procédure d'appel, [U] [Y] qui succombe devra supporter les entiers dépens.
Elle devra aussi verser aux intimés ensemble la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure qu'il est inéquitable de laisser à leur charge.
Sur l'amende civile
L' article 32-1 du code de procédure civile dispose que : « Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile et à indemniser son contradicteur ».
L'exercice d'une voie de recours constitue un droit pour tout justiciable à ce que sa cause soit entendue par un juge. Il ne dégénère en abus que s'il est mu par la seule volonté de nuire ou dans un but dilatoire.
[U] [Y], dans la continuité de son attitude depuis le décès de son père, s'est opposée à la désignation de son frère en qualité de mandataire successoral sans faire état de motifs précis et circonstanciés, faisant valoir uniquement des interrogations et soupçons non étayés.
Elle a formé appel de la décision de première instance sans apporter d'éléments supplémentaires pour fonder son opposition et sans solliciter l'arrêt de l'exécution provisoire.
Il ressort des circonstances de la cause décrites dans le corps de la présente décision que son opposition et son appel sont manifestement dilatoires.
Elle sera dès lors condamnée à régler une amende civile de 5000 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant après débats publics par mise à disposition au greffe, par défaut et en dernier ressort :
Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture du 3 juillet 2024 ;
Déclare irrecevables les conclusions sur le fond et les pièces communiquées par les parties postérieurement à la clôture du 3 juillet 2024 ;
Réforme la décision critiquée en ce qu'elle a rejeté la demande de dommages-intérêts de [U] [Y] ;
Statuant à nouveau de ce chef,
Déclare irrecevable la demande de dommages-intérêts présentée devant le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond ;
Confirme le jugement pour le surplus de ses chefs soumis à la cour ;
Y ajoutant,
Déclare irrecevable la demande de dommages et intérêts présentée devant la cour statuant en appel d'une procédure accélérée au fond ;
Condamne Madame [U] [Y] aux dépens d'appel ;
Condamne Madame [U] [Y] à verser à Madame [E] [B] veuve [Y] et Monsieur [G] [Y] ensemble la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure ;
Condamne Madame [U] [Y] à régler une amende civile de 5000 euros ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
La greffière La présidente
Chambre 2-4
ARRÊT AU FOND
DU 09 OCTOBRE 2024
N° 2024/213
Rôle N° RG 24/01885 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BMSL4
[U] [W] [Z] [Y]
C/
[E] [B] veuve [Y]
[G] [Y]
[M] [L] [T] [Y]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Marine DA CUNHA
Me Fanny KESTER
Décision déférée à la Cour :
Jugement de procédure accélérée au fond du Tribunal judiciaire d'Aix en Provence en date du 30 Janvier 2024 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 23/00797.
APPELANTE
Madame [U] [W] [Z] [Y]
née le [Date naissance 3] 1979 à [Localité 21], demeurant [Adresse 1] - [Localité 13]
représentée par Me Marine DA CUNHA de l'AARPI AUDAX AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Madame [E] [B] veuve [Y]
née le [Date naissance 6] 1960 à [Localité 15], demeurant [Adresse 12] - [Localité 23]
représentée par Me Fanny KESTER, avocat au barreau de MARSEILLE
Monsieur [G] [Y]
né le [Date naissance 5] 1986 à [Localité 21], demeurant [Adresse 14] - [Localité 2]
représenté par Me Fanny KESTER, avocat au barreau de MARSEILLE
Monsieur [M] [L] [T] [Y]
né le [Date naissance 3] 1979 à [Localité 21], demeurant [Adresse 4] - [Localité 16] (Etats Unis)
défaillant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 11 Septembre 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Pascale BOYER, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
Madame Michèle JAILLET, Présidente
Madame Nathalie BOUTARD, Conseillère
Mme Pascale BOYER, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Fabienne NIETO.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Octobre 2024.
ARRÊT
Défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Octobre 2024,
Signé par Madame Michèle JAILLET, Présidente et Mme Fabienne NIETO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé du litige
[X] [Y] a eu trois enfants de son union avec Madame [D] soit :
- [M] [Y]
- [U] [Y], jumelle du premier
- [G] [Y]
[X] [Y] et [E] [B] se sont mariés à [Localité 23] (BOUCHES du RHONE) le [Date mariage 11] 2003 sous le régime de la séparation de biens par contrat préalable.
[M] [Y] a épousé la fille de [E] [B] issue d'une précédente union et ils vivent aux Etats-Unis.
[X] [Y] a organisé la répartition de son patrimoine par testament authentique en date du 16 novembre 2016, reçu par Maître [P] [A] notaire à [Localité 21].
Par cet acte, il a légué à son épouse survivante :
- la quotité disponible la plus large permise par la loi sur ses biens de Corse
- L'usufruit seulement de l'ensemble des parts sociales dans chaque société dans laquelle il serait associé à son décès,
- La pleine propriété de l'ensemble de ses biens mobiliers (avoirs bancaires, placements, voitures, meubles) .
Il a légué à ses enfants ses bijoux à parts égales.
Il a désigné ses deux fils comme légataires à part égale de ses biens immobiliers chacun pour moitié.
Il a légué à sa fille la nue-propriété des parts sociales des sociétés dont son épouse sera usufruitière.
[X] [Y] était notamment propriétaire :
- de parts sociales des sociétés [20], [22] et de la SCI [19],
- d'une quote-part indivise d'une propriété située à [Localité 18] dont ses parents étaient usufruitiers et
- de la moitié de deux villas jumelles situées à [Localité 17] sur un terrain acquis avec [E] [B] les 30 et 31 août 2002.
Au mois d'octobre 2018, [X] [Y], se sachant malade, a signé des compromis de vente des biens immobiliers appartenant aux sociétés qu'il animait.
La gérance de ces sociétés a été transférée à [E] [B].
[X] [Y] est décédé le [Date décès 7] 2018, laissant pour lui succéder son épouse, [E] [B], et les trois enfants issus de sa précédente union.
La déclaration de succession a été déposée au mois de novembre 2019.
Les ventes des actifs des sociétés animées par le défunt et de l'immeuble de [Localité 18] et la vente et la distribution aux légataires des biens de CORSE ont donné lieu à des oppositions et différends.
[U] [Y] a notamment formé opposition à la distribution du prix de vente des biens de [Localité 17] entre les mains du notaire chargé de la vente.
[E] [B] a contesté cette opposition devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Marseille le 6 août 2021, lequel, par une ordonnance du 8 novembre 2021, a jugé infondée l'opposition de [U] [Y] à la distribution du prix de vente des maisons de [Localité 17] entre ses frères et [E] [Y]. Cette décision a été confirmée par la cour d'appel d'AIX EN PROVENCE le 5 mai 2022.
Le 21 septembre 2021, [U] [Y] avait fait assigner [E] [B], [M] [Y] et [G] [Y] devant le tribunal judiciaire d'AIX EN PROVENCE en partage de la succession de son père.
Le 21 novembre 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'AIX EN PROVENCE a annulé l'assignation en partage pour violation des règles procédurales par assignation des défendeurs à domicile qu'ils n'ont pas élu. La juge a précisé que cette signification irrégulière était délibérée afin de pouvoir invoquer une instance en cours devant le juge des référés. Il a déclaré irrecevable l'action de [U] [Y] pour défaut de diligences en vue d'un partage amiable.
[E] [B] et [G] [Y] ont fait assigner, le 25 mai 2023, [U] [Y], en présence de [M] [Y], devant le président du tribunal judiciaire d'AIX EN PROVENCE aux fins d'obtenir la désignation d'un mandataire successoral chargé notamment de représenter la succession dans les instances des sociétés.
Par jugement réputé contradictoire du 30 janvier 2024 rendu selon la procédure accélérée au fond, auquel le présent se réfère pour plus ample exposé des faits et des prétentions des parties, le président du tribunal judiciaire d'AIX EN PROVENCE a, notamment :
- Désigné Monsieur [G] [Y], en qualité de mandataire successoral à la succession de feu Monsieur [X] [Y], décédé à [Localité 21] le [Date décès 7] 2018
- Dit que Monsieur [G] [X] [Y], ès-qualités de mandataire successoral, représentera la succession de feu Monsieur [X] [Y] aux assemblées générales ordinaires et extraordinaires des sociétés suivantes:
- SARL [22], société à responsabilité limitée au capital de 1 000 Euros, immatriculée au RCS d'Aix-en-Provence sous le N° [N° SIREN/SIRET 10] dont le siège social est à [Localité 23] ' [Adresse 12]
- SAS [20], société par actions simplifiée au capital de 40 000 euros immatriculée au RCS d'Aix-en-Provence sous le N°[N° SIREN/SIRET 9], dont le siège social est à [Localité 23] - [Adresse 12]
- SCI [19], société civile immobilière au capital de 244 000 Euros immatriculée au RCS d'Aix-en Provence sous le N° [N° SIREN/SIRET 8], dont le siège social est à [Localité 23] ' [Adresse 12]
- Dit que Monsieur [G] [Y], ès-qualités de mandataire successoral, exercera les droits de vote attachés aux parts sociales et actions dépendant de la succession de feu Monsieur [X] [Y] notamment sur toute délibération soumise aux associées/actionnaires des Sociétés susvisées et notamment:
- L'approbation des comptes des sociétés SARL [22], SAS [20] et SCI [19] et le quitus donné à la gérante des SARL [22], SAS [20] et SCI [19] pour sa gestion,
- La dissolution anticipée et la liquidation des SARL [22], SAS [20] et SCI [19] ou la continuation des dites sociétés (nonobstant des pertes supérieures à la moitié du capital social s'agissant de la SARL [22] et la SAS [20]);
- Débouté Madame [U] [Y] de toutes ses demandes
- Condamné Madame [U] [Y] à payer à Madame [E] [B] veuve [Y] et Monsieur [G] [Y] la somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile
- Condamné Madame [U] [Y] aux dépens.
Ce jugement a été signifié le 6 février 2024 et le 23 février 2024 par acte annulant le précédent à [U] [Y].
Par déclaration par voie électronique du 14 février 2024, [U] [Y] a formé appel contre la décision.
Le 14 mars 2024, l'appelante a été avisée de la fixation de l'affaire selon la procédure à bref délai à l'audience du 11 septembre 2024.
Elle a fait signifier la déclaration d'appel, l'avis de fixation à bref délai et la sommation de constituer avocat à [E] [B] [Y] le 20 mars 2024 à personne, à [G] [Y] le 20 mars 2024 par remise à l'étude et a adressé à [M] [Y] ces documents par remise à l'entité requise américaine le 23 mars 2024.
Par ses premières conclusions du 14 avril 2024, l'appelante demande à la cour de :
- RECEVOIR Madame [U] [Y] en son appel et le déclarer bien fondé
- RÉFORMER la décision entreprise rendue
Statuant à nouveau :
A TITRE PRINCIPAL:
- DÉBOUTER Madame [E] [B] et Monsieur [G] [Y] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions
- ORDONNER une mesure de médiation et à cette fin désigner tel médiateur qu'il plaira à Madame ou Monsieur le Président du Tribunal Judiciaire d'Aix en Provence, avec pour mission de rechercher avec les indivisaires une solution au différend successoral qui les opposent concernant les sociétés SARL [22] , SAS [20], SCI [19]
A TITRE SUBSIDIAIRE : Si par extraordinaire, il n'était pas fait droit à la demande de médiation
- DÉSIGNER tel mandataire successoral qu'il plaira à Madame ou Monsieur le Président du Tribunal Judiciaire d'Aix en Provence, autre qu'un membre de l'hoirie [Y], avec pour mission de rechercher avec les indivisaires une solution au différend successoral qui les opposent concernant les sociétés SARL [22] SAS [20], SCI [19]
EN TOUT ETAT :
- ORDONNER la communication des documents sociaux, comptables et conventions réglementées afférents aux sociétés SARL [22], SCI [19], [20], Clamm, sous astreinte de 100 euros par jours de retard et document
- ORDONNER la désignation d'un mandataire successoral ;
- CONDAMNER Madame [E] [Y] et Monsieur [G] [Y] à la somme de 10.000 euros en réparation des préjudices subis par Madame [U] [Y]
- CONDAMNER Madame [E] [Y] et Monsieur [G] [Y] à payer à Madame [U] [Y] la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
[E] [B] et [G] [Y] ont constitué avocat le 16 avril 2024.
Le 23 avril 2024, le conseil de l'appelante a communiqué au conseil des intimés ses conclusions notifiées au greffe le 14 avril 2024.
L'appelante leur a notifié ses conclusions le 24 avril 2024.
Le 15 mai 2024, les intimés ont communiqué leurs conclusions. Ils réclament que la cour :
- CONFIRME le jugement de procédure accélérée au fond rendu le 30 janvier 2024 par Monsieur le Président du Tribunal Judicaire d'Aix-en-Provence et ce en toutes ses dispositions.
Y ajoutant en cause d'appel,
- CONDAMNE Madame [U] [Y] au paiement d'une amende civile dont le montant est laissé à l'appréciation de la Cour ;
- CONDAMNE Madame [U] [Y] à payer à Madame [E] [B] veuve [Y] et à Monsieur [G] [Y] une somme de deux mille (2 000) Euros chacun à titre des dommages et intérêts en réparation du lourd préjudice en particulier moral par eux subis à raison de cet appel purement abusif et de l'acharnement de Madame [U] [Y] à blesser et nuire.
- CONDAMNE Madame [U] [Y] à payer à Madame [E] [B] veuve [Y] et Monsieur [G] [Y] pris ensemble une somme globale de cinq mille (5 000) Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel ;
- CONDAMNE Madame [U] [Y] aux entiers dépens d'appel , distraits au profit de Maître Fanny KESTER, sur ses affirmations de droit.
Le 12 juin 2024 par message électronique les intimés constitués ont soulevé la caducité de l'appel pour absence de signification de la déclaration d'appel à l'intimé non constitué.
La clôture de la procédure a été prononcée le 3 juillet 2024.
Le 5 septembre 2024, un nouveau conseil s'est constitué au lieu et place de celui de l'appelante.
Le 6 septembre 2024, l'appelante a communiqué de nouvelles conclusions avec demande de révocation de l'ordonnance de clôture figurant dans le corps de ses conclusions.
Sur le fond, elle maintient sa demande de réformation de l'intégralité des chefs du jugement en les listant.
Elle maintient ses prétentions en suggérant le nom d'un mandataire successoral tiers à la famille et elle liste les documents sociaux dont elle sollicite la communication sous astreinte.
Les intimés par conclusions du 9 septembre 2024, ont soulevé l'irrecevabilité des nouvelles écritures et se sont opposés à la révocation.
Par conclusions en réponse du 10 septembre 2024, l'appelante a répliqué aux moyens et arguments invoqués par les intimés pour s'opposer à la révocation.
Selon des écritures transmises le 11 septembre 2024 avant le début de l'audience, elle a complété le dispositif de ses conclusions en y ajoutant la demande à la cour de « prononcer le rabat de la clôture ».
Motifs de la décision
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées.
Sur la question de la révocation de l'ordonnance de clôture
En raison de la date de la déclaration d'appel antérieure au 1er septembre 2024, , les anciens textes de la procédure d'appel sont applicables.
Les articles 907, 802 et 803 du code de procédure civile prévoient qu'après la clôture les nouvelles écritures sont irrecevables d'office à l'exception notamment des conclusions aux fins de révocation de l'ordonnance de clôture. Il en ressort également que la décision de clôture de ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.
L'appelante soutient qu'elle a eu connaissance à la fin du mois d'août 2024 grâce à une veille sur les publications du registre du commerce et des sociétés des assemblées d'associés qui ont eu lieu le 26 juillet 2024 et par lesquelles ont été décidées la dissolution anticipée de la société [22] et de la SCI [19] et de la désignation de Madame [B] en qualité de liquidateur et de la continuation de la société [20] malgré la perte de capitaux propres.
Elle ajoute qu'elle a découvert aussi le dépôt auprès du registre du commerce et des sociétés d'actes très anciens de nature à augmenter le passif des sociétés.
Elle précise qu'elle devait être convoquée aux assemblées en qualité de propriétaire indivise de parts, malgré la désignation d'un mandataire successoral.
Elle soutient que ces éléments prouvent l'incompétence de [G] [Y] dans son rôle de mandataire successoral .
Les intimés indiquent que [U] [Y] a été convoquée le 5 juin 2024 aux assemblées générales qui se sont tenues pendant l'été et ' invoquent l'exécution provisoire de la décision du 30 janvier 2024.
Ils rappellent que l'appelante n'a pas contesté en appel l'exécution provisoire de la décision de première instance.
Ils soutiennent que ces faits ne sont pas nouveaux.
L'appelante en réponse conteste la convocation et soutient qu'il n'en est pas justifié. Elle ajoute que l'exécution provisoire de la décision désignant un mandataire successoral ne dispense pas de la convocation des autres associés.
Elle ajoute que le mandataire successoral désigné n'a pas reçu pour mission de procéder à des dépôts d'actes anciens destinés à masquer une créance de la succession sur la SCI [19].
Elle soutient que madame [B] a attendu la clôture de la procédure en appel pour tenir les assemblées afin d'empêcher tout débat sur leur validité.
La question de la validité des assemblées qui se seraient tenues le 26 juillet 2024 ne relève pas de l'appel de la décision ayant autorisé la prise de ces décisions par un mandataire successoral.
Il convient donc de rejeter la demande de révocation de l'ordonnance de clôture.
En conséquence, les conclusions sur le fond et les nouvelles pièces de l'appelante et des intimés postérieures à la date de la clôture sont déclarées irrecevables.
Sur la question de la caducité de l'appel
Il est soulevé l'absence de justification de la signification à [M] [Y] de la déclaration d'appel et des conclusions d'appelant.
Toutefois dans le dossier remis à la cour [U] [Y] justifie de l'envoi à l'entité américaine requise le 25 mars 2024 de l'acte de signification de la déclaration d'appel accompagnée de la sommation d'avoir à constituer avocat dans le cadre de la procédure à bref délai avec reproduction des textes applicables.
La formalité prévue par l'article 905-1 du code de procédure civile a été accomplie.
La caducité de l'appel n'est donc pas encourue.
Sur la qualification de la décision
Il n'est pas justifié par les pièces produites que [M] [Y] a eu connaissance à personne de la signification de la déclaration d'appel, il n'a pas constitué avocat.
En application de l'article 474 du code de procédure civile, auquel renvoie l'article 749 du même code, la décision non susceptible d'appel sera rendue par défaut.
Sur l'étendue de la saisine de la cour
Il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.
Les demandes de 'donner acte' sont dépourvues de tout enjeu juridique et ne constituent pas des prétentions au succès desquels les parties pourraient avoir un intérêt légitime à agir au sens de l'article 4 du code de procédure civile.
Ne constituent pas, par conséquent, des prétentions au sens de l'article sus-cité du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir 'constater' ou 'donner acte' ou encore à 'prendre acte' de sorte que la cour n'a pas à y répondre.
Il n'y a donc pas lieu de reprendre ni d'écarter dans le dispositif du présent arrêt les demandes tendant à 'constater que' ou 'dire que ' telles que figurant dans le dispositif des conclusions des parties, lesquelles portent sur des moyens ou éléments de fait relevant des motifs et non des chefs de décision devant figurer dans la partie exécutoire de l'arrêt.
L'article 9 du code de procédure civile dispose qu''il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention' et que l'article 954 du même code, dans son alinéa 1er, impose notamment aux parties de formuler expressément ses prétentions et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée 'avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et leur numérotation'.
En application de cet article, la cour n'est saisie que des prétentions figurant dans le dispositif des conclusions des parties.
Par ailleurs l'effet dévolutif de l'appel implique que la cour connaisse des faits survenus au cours de l'instance d'appel et depuis le jugement déféré et statue sur tous les éléments qui lui sont produits même s'ils ne se sont révélés à la connaissance des parties qu'en cours d'instance d'appel.
En l'espèce, le jugement est critiqué en toutes ses dispositions.
Sur la désignation du mandataire successoral
L'appelante dénonce les conditions dans lesquelles son père aurait signé trois compromis de vente des biens immobiliers détenus par la société SARL [22] au mois d'octobre 2018, soit seulement un mois avant son décès alors qu'il suivait un protocole de soins palliatifs.
Elle conteste les circonstances dans lesquelles il a désigné Madame [E] [B] mandataire social desdites sociétés le 6 novembre 2018, soit quelques jours avant son décès.
Elle conteste être à l'origine du blocage dans le fonctionnement des sociétés du fait de son absence aux assemblées générales. Elle rappelle que [E] [B], en qualité de mandataire social, disposait du pouvoir de faire désigner un mandataire ad hoc ou successoral pour que les titulaires de parts indivises puissent être représentés aux assemblées générales malgré son absence.
Elle ajoute qu'elle était en droit de s'opposer aux décisions proposées dans le cadre des assemblées des associés et actionnaire car elle n'a pas eu communication des comptes sociaux et des conventions conclues entre les sociétés et [E] [B].
Elle ajoute que les assemblées d'associés se tenaient dans la maison familiale dont l'accès lui a été interdit pendant 15 ans et que les autres associés ont refusé l'accès à l'huissier de justice qu'elle avait mandaté.
Elle dénonce l'alliance judiciaire de la veuve et de son frère [G] qui ont exercé sur elle des pressions pour signer les actes définitifs de vente et l'alliance maritale de son frère [M] avec [E] [B].
Elle soutient que les intimés n'ont pas saisi le président du tribunal pour faire ordonner le dépôt de la déclaration de succession.
Elle réplique qu'elle a répondu immédiatement à la demande de signature d'un mandat de vente de la maison de [Localité 18] ; qu'elle a fait diligence en vue de la vente du terrain de [Localité 18] et de l'immeuble de [Localité 17] en effectuant les démarches nécessaires entre deux jours et 20 jours après leur demande.
Elle soutient qu'elle est légitime à s'opposer à la répartition des prix de vente car elle fait valoir, dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial, une créance de la succession envers sa belle-mère concernant le financement des constructions.
Elle fait état de sa volonté de sortir sereinement de l'indivision et d'une rupture familiale ainsi que de la procédure initiée en 2021 aux fins de partage.
Elle fait état de la complexité de la situation des sociétés dont il n'est pas certain qu'elles n'ont plus d'actif. Elle rappelle que la veuve de son père n'a pas mis à l'ordre du jour la dissolution des sociétés avant la procédure accélérée au fond.
Elle en déduit que la désignation de [G] [Y] comme mandataire successoral serait contraire à l'intérêt de la succession et lui serait préjudiciable.
Les intimés soutiennent que l'appelante utilise cette procédure pour régler des comptes et exposer des ranc'urs sans élaborer de raisonnement juridique pour justifier son opposition à la désignation de son frère comme mandataire successoral.
Ils indiquent qu'elle n'articule aucun moyen ou argument juridique fondé pour s'opposer à cette désignation qui recueille la faveur de l'ensemble des autres héritiers.
Ils indiquent que les sociétés qui ne disposent plus d'actifs doivent être dissoutes puis liquidées.
Ils ajoutent que, le 12 avril 2023, après avoir refusé de se présenter aux assemblées d'associés et ainsi empêché la dissolution des trois sociétés sans activité depuis plusieurs années, elle a refusé de désigner un mandataire commun.
Ils indiquent qu'elle ne s'est pas présentée en l'étude du notaire lors de la réunion en vue d'approuver le projet de partage le 2 février 2024.
L'article 813-1 du Code Civil dispose que : « Le juge peut désigner toute personne qualifiée, physique ou morale, en qualité de mandataire successoral, à l'effet d'administrer provisoirement la succession en raison de l'inertie, de la carence ou de la faute d'un ou de plusieurs héritiers dans cette administration, de leur mésentente, d'une opposition d'intérêts entre eux ou de la complexité de la situation successorale».
Les nombreux documents produits aux débats par les parties révèlent que le règlement de la succession de [X] [Y] connaît des retards dus à l'opposition de [U] [Y] qui a conduit au dépôt tardif de la déclaration de succession, en raison du refus de [U] [Y] sans motif ; à un retard de plusieurs mois dans la vente des biens des sociétés [22] et [19] dont les compromis de vente avaient été signés par [X] [Y], alors gérant, au début du mois d'octobre 2018 ; à un retard dans la vente des biens de Corse et dans la distribution de son prix alors qu'il appartenait en indivision au défunt et à son épouse et que son prix apportait des liquidités à la succession dans l'optique d'assurer l'égalité du partage.
Elle a aussi conduit à un retard de plusieurs années dans la vente du bien de [Localité 18] qui appartenait en indivision au défunt et à ses frères et s'urs alors que son père en détenait l'usufruit mais ne pouvait s'y maintenir et avait besoin de liquidités pour assurer son relogement.
En outre, en raison de l'opposition de [U] [Y] à la désignation de son frère [G] comme mandataire représentant l'indivision, titulaire des parts sociales de leur père dans les assemblées des sociétés [19], [20] et [22], ces sociétés dépourvues de recettes et qui doivent continuer à supporter des charges, ont connu des difficultés financières.
Pourtant [U] [Y] n'expose aucun motif précis pour expliquer la méfiance envers son frère [G] à l'exception du fait qu'il est le beau-fils de [E] [B] alors qu'elle en est elle-même la belle-fille et que ce lien ne résulte que de l'alliance.
Elle ne fait état d'aucun fait précis mais seulement de soupçons sur les circonstances dans lesquelles ont été décidées la vente des actifs des sociétés et le changement de gérance avant le décès de son père.
Elle invoque dans ses conclusions la maladie de son père et a contesté les conditions dans lesquelles les promesses de vente ont été signées par son père et la gérance octroyée à [E] [B] et elle produit des documents médicaux à cet effet. Toutefois, elle n'a pas agi en annulation de l'assemblée du 6 novembre 2018 ou des compromis de vente signés par son père.
Elle a fait valoir devant le juge des référés et dans les plaintes déposées que [E] [B] aurait profité des avoirs de son père avant son décès avec la complicité de Maître [A] en admettant ne posséder aucune preuve de ces allégations.
Elle a systématiquement retardé les actes de disposition nécessaires au prétexte d'un défaut d'information en sollicitant plusieurs fois les mêmes documents au profit de plusieurs notaires et avocats successifs qu'elle a mandatés.
En outre, elle n'a pas répondu à la demande de vente des biens de [Localité 18], en conditionnant son accord à la remise de divers objets sans opposer de raison à sa contestation à la vente. Elle a par la suite, sollicité leur attribution dans le cadre d'un partage sans formuler de proposition précise et détaillée permettant aux autres indivisaires qui n'y étaient pas opposés, d'y répondre.
Elle ne fait valoir aucun motif pour s'opposer à l'approbation des comptes des sociétés. Elle ne produit aucune pièce dont il résulterait que la situation décrite ne correspond pas à la réalité.
Si les convocations aux assemblées de 2019 ne contenaient pas, à l'ordre du jour, la dissolution des sociétés et leur liquidation, les assemblées ne pouvaient valablement avoir lieu à compter de 2020 en raison de l'absence de mandataire de l'indivision titulaire des parts sociales ayant appartenu à leur père.
[U] [Y] ne s'est pas proposée pour représenter l'indivision dans les assemblées d'associés alors que ce mandat pouvait lui permettre de disposer de toutes les informations et communications de pièces nécessaires.
La mésentente entre [U] [Y] et les autres héritiers entraîne un blocage des opérations de partage.
En outre, la nature des missions du mandataire successoral ne nécessite pas de recourir à un mandataire professionnel.
Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement critiqué en toutes ses dispositions.
Sur la demande de communication de documents sociaux
L'appelante soutient que son droit à l'information en tant qu'associée des sociétés ayant appartenu à son père a été bafoué.
Elle précise qu'elle souhaite avoir connaissance des comptes sociaux détaillés des sociétés SARL [22], SCI [19] et [20], ainsi que des conventions réglementées conclues entre les sociétés et [E] [B] en sa qualité de dirigeante.
Elle expose que ces conventions auraient dû faire l'objet d'une approbation voire, d'une autorisation par l'assemblée générale annuelle des sociétés.
Les intimés soutiennent qu'elle ne s'est pas présentée à plusieurs assemblées d'associés et qu'elle a été destinataire annuellement des rapports de gestion et des liasses comptables des sociétés, ainsi que des autres documents et actes de cession auxquels elle pouvait accéder par un serveur dédié.
Ils soutiennent qu'il n'existe pas de convention réglementée entre la gérante et les sociétés. Ils ajoutent que les sociétés n'ont plus d'activité depuis 4 ans.
L'article L.223-19 du Code de commerce dispose que : « Le gérant ou, s'il en existe un, le commissaire aux comptes, présente à l'assemblée ou joint aux documents communiqués aux associés en cas de consultation écrite, un rapport sur les conventions intervenues directement ou par personnes interposées entre la société et l'un de ses gérants ou associés. L'assemblée statue sur ce rapport. Le gérant ou l'associé intéressé ne peut prendre part au vote et ses parts ne sont 12 pas prises en compte pour le calcul du quorum et de la majorité. Toutefois, s'il n'existe pas de commissaire aux comptes, les conventions conclues par un gérant non associé sont soumises à l'approbation préalable de l'assemblée. »
L'article L. 223-26 du Code de commerce prévoit que « Le rapport de gestion, l'inventaire et les comptes annuels établis par les gérants, sont soumis à l'approbation des associés réunis en assemblée, dans le délai de six mois à compter de la clôture de l'exercice sous réserve de prolongation de ce délai par décision de justice. Si l'assemblée des associés n'a pas été réunie dans ce délai, le ministère public ou toute personne intéressée peut saisir le président du tribunal compétent statuant en référé afin d'enjoindre, le cas échéant sous astreinte, aux gérants de convoquer cette assemblée ou de désigner un mandataire pour y procéder.
Les documents visés à l'alinéa précédent, le texte des résolutions proposées ainsi que le cas échéant, le rapport des commissaires aux comptes, les comptes consolidés et le rapport sur la gestion du groupe sont communiqués aux associés dans les conditions et délais déterminés par décret en Conseil d'Etat. Toute délibération, prise en violation des dispositions du présent alinéa et du décret pris pour son application, peut être annulée. »
Les intimés produisent les courriers recommandés adressés à [U] [Y] les 7 mars 2019 et 13 juin 2019 contenant convocation aux assemblées des trois sociétés avec communication des comptes annuels et du rapport spécial de la gérante.
Elle a reçu également le 22 mars 2023 une convocation aux assemblées des sociétés [22], [19] et [20] comportant les comptes annuels, les textes des résolutions et le rapport de gérance.
Le commissaire aux comptes n'a pas réalisé de rapport sur les conventions unissant la gérante à la société et [E] [B] soutient qu'il n'existe aucune convention de ce type.
Il convient en conséquence de juger que [U] [Y] a reçu les communications exigées par ces textes et la décision de rejet de sa demande de communication sera confirmée.
Sur la demande de dommages-intérêts de l'appelante
De même qu'en première instance, l'appelante présente une demande de réparation. Elle soutient qu'elle a enduré pendant 4 ans des pressions constantes aux fins d'approuver des actes de disposition importants sans pouvoir bénéficier des informations comptables nécessaires à la compréhension des enjeux et des conséquences, ce qui l'a plongée dans un état d'anxiété l'ayant conduite à consulter.
Les intimés soutiennent que c'est [U] [Y] qui retarde abusivement les opérations de partage depuis 5 ans. Ils rappellent son inertie et ses oppositions non justifiées aux actes de vente des actifs et de distribution de prix.
Ils indiquent qu'elle s'est opposée à la nomination de son frère comme mandataire successoral sans motif juridique et seulement afin de présenter des griefs personnels.
Ils soutiennent que [U] [Y] porte des accusations à leur encontre en ce qui concerne les événements antérieurs au décès de son père alors qu'elle n'a jamais contesté en justice la validité des actes accomplis à cette époque.
Ils indiquent qu'elle s'est elle-même mis à part de la famille et n'était notamment pas présente pendant la grave maladie de son père.
Le premier juge a rejeté cette demande au motif que [U] [Y] ne prouvait pas des préjudices subis mais seulement ressentis.
Toutefois, statuant dans le cadre de la procédure accélérée au fond, les pouvoirs du président sont limités aux mesures prévues par les textes cités dans l'article 1380 du code de procédure civile en matière de partage.
Le président ne détient pas dans le cadre de cette procédure spécifique le pouvoir de statuer sur une demande en réparation pour des motifs extérieurs à ceux de la procédure elle-même.
Or, en l'espèce, [U] [Y] dénonce le comportement de ses co-héritiers pendant toute la durée des opérations préalables au partage de la succession.
Il convient, en conséquence, de réformer la décision de première instance de ce chef et de déclarer irrecevable devant le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond la demande de dommages-intérêts de [U] [Y].
Sur la demande de dommages-intérêts des intimés
Les intimés demandent réparation du lourd préjudice en particulier moral par eux subis à raison de l'appel purement abusif et de l'acharnement de [U] [Y] à blesser et nuire.
La cour saisie d'un appel contre une décision du président statuant selon la procédure accélérée au fond ne dispose pas de plus de pouvoirs que ce dernier qui sont limités par l'article 1380 du code de procédure civile à certaines demandes.
Celle concernant les dommages et intérêts en raison de l'abus de procédure n'en fait pas partie.
Il convient en conséquence de déclarer d'office irrecevable la demande de ce chef.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
La décision de première instance n'est pas remise en cause sur le fond.
Il convient donc de confirmer la décision du premier juge concernant les dépens et les frais irrépétibles de procédure.
En ce qui concerne la procédure d'appel, [U] [Y] qui succombe devra supporter les entiers dépens.
Elle devra aussi verser aux intimés ensemble la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure qu'il est inéquitable de laisser à leur charge.
Sur l'amende civile
L' article 32-1 du code de procédure civile dispose que : « Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile et à indemniser son contradicteur ».
L'exercice d'une voie de recours constitue un droit pour tout justiciable à ce que sa cause soit entendue par un juge. Il ne dégénère en abus que s'il est mu par la seule volonté de nuire ou dans un but dilatoire.
[U] [Y], dans la continuité de son attitude depuis le décès de son père, s'est opposée à la désignation de son frère en qualité de mandataire successoral sans faire état de motifs précis et circonstanciés, faisant valoir uniquement des interrogations et soupçons non étayés.
Elle a formé appel de la décision de première instance sans apporter d'éléments supplémentaires pour fonder son opposition et sans solliciter l'arrêt de l'exécution provisoire.
Il ressort des circonstances de la cause décrites dans le corps de la présente décision que son opposition et son appel sont manifestement dilatoires.
Elle sera dès lors condamnée à régler une amende civile de 5000 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant après débats publics par mise à disposition au greffe, par défaut et en dernier ressort :
Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture du 3 juillet 2024 ;
Déclare irrecevables les conclusions sur le fond et les pièces communiquées par les parties postérieurement à la clôture du 3 juillet 2024 ;
Réforme la décision critiquée en ce qu'elle a rejeté la demande de dommages-intérêts de [U] [Y] ;
Statuant à nouveau de ce chef,
Déclare irrecevable la demande de dommages-intérêts présentée devant le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond ;
Confirme le jugement pour le surplus de ses chefs soumis à la cour ;
Y ajoutant,
Déclare irrecevable la demande de dommages et intérêts présentée devant la cour statuant en appel d'une procédure accélérée au fond ;
Condamne Madame [U] [Y] aux dépens d'appel ;
Condamne Madame [U] [Y] à verser à Madame [E] [B] veuve [Y] et Monsieur [G] [Y] ensemble la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure ;
Condamne Madame [U] [Y] à régler une amende civile de 5000 euros ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
La greffière La présidente