CA Lyon, 1re ch. civ. B, 29 octobre 2024, n° 22/04540
LYON
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Sci les Quatre Saisons (SCI)
Défendeur :
Sci Les Quatre Saisons (SCI)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Gonzalez
Conseillers :
Mme Lemoine, Mme Lecharny
Avocats :
Me Laffly, Me Chapy, Me Sourbe, Me Herlemont
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous-seing privé du 26 décembre 2004, [V] [F], détenteur de 10'000 parts de la SCI des quatre saisons (la SCI), en a vendu 1 999 à M. [N] [T], son associé, gérant de la SCI et détenteur d'une part sociale, moyennant le versement d'un prix de 8 624 euros.
L'acte de cession, rédigé en néerlandais et traduit par un expert près la cour d'appel de Lyon le 18 août 2013, prévoit, en son article 3, la condition suivante :
« Comme condition résolutoire lors de cette convention il est convenu que la créance du vendeur à la société, créée dans le cadre du financement du prix de vente d'une parcelle limitrophe, pour laquelle le vendeur a mis à la disposition de la société comme emprunt la somme de 304'900 €, est tenue, de manière égale, à être remboursée sur une période de 12 ans. Les conditions concernant cet amortissement seront fixées dans une convention d'emprunt séparément, laquelle fera partie de cette convention d'achat/vente.
Lorsque la société ne remplirait pas les obligations de remboursement sans raisons fondées, ou lorsque l'emprunt ne serait pas remboursé entièrement au 31 décembre 2016, l'acheteur sera obligé de proposer au vendeur toutes les actions contre le prix, comme mentionné à l'article 2 [8 624 euros]. L'acheteur ne pourra pas aliéner ces actions dans la société sans autorisation du vendeur ».
[V] [F] est décédé le [Date décès 3] 2012, laissant pour lui succéder son épouse, Mme [X] [F]-[B], et ses trois enfants, Mmes [R], [D] et [S] [F].
Faisant valoir que la condition résolutoire était remplie dans la mesure où la somme de 304'900 euros n'avait pas été remboursée dans les conditions convenues, Maître Chapy, avocat, indiquant intervenir comme mandataire de « l'indivision [F] » a, par lettre recommandée du 16 janvier 2017, adressé à M. [T] un acte de cession de 1 999 parts sociales qu'il l'a invité à lui retourner signé avant le 31 janvier 2017.
M. [T] n'ayant pas donné suite à ce courrier, « l'indivision [F] représentée par Mme [X] [F] » l'a assigné devant le tribunal de grande instance d'Annecy aux fins de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire.
Parallèlement, M. [T] a assigné les héritiers d'[V] [F] devant le tribunal de Nord Hollande aux fins de voir juger qu'il n'aurait pas à transférer ses parts dans le capital de la SCI. Par jugement du 14 mars 2018, ce tribunal a sursis à statuer jusqu'à communication de l'état d'avancement de la procédure devant le tribunal de grande instance d'Annecy.
Par jugement réputé contradictoire du 17 novembre 2017, ce tribunal a constaté l'acquisition de la clause résolutoire mais, sur appel de M. [T], le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Chambéry a dit que le tribunal de grande instance de Lyon est compétent pour connaître du litige et le dossier lui a été transmis.
En cours de procédure, M. [T] a appelé en la cause la SCI en paiement de la somme de 16'948 euros au titre du remboursement du solde de son compte courant d'associé.
Par jugement du 1er juin 2022, le tribunal judiciaire de Lyon a :
- débouté Mme [F]-[B], représentant l'indivision [F] (ci-après, l'indivision), et la SCI de la demande tendant à voir déclarer acquise la clause résolutoire et des demandes qui en découlent,
- débouté M. [T] de sa demande de dommages-intérêts,
- condamné la SCI à payer à M. [T] une somme de 16'948 euros en remboursement de son compte courant d'associé, outre intérêts au taux légal à compter du jugement,
- débouté Mme [F]-[B], représentant l'indivision, et la SCI de la demande de dommages-intérêts pour procédure dilatoire,
- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires,
- condamné sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile Mme [F]-[B], représentant l'indivision, d'une part, à verser à M. [T] une somme de 2 000 euros, et la SCI, d'autre part, à lui verser une somme de 1 000 euros,
- condamné Mme [F]-[B], représentant l'indivision, et la SCI aux dépens.
Par déclaration du 20 juin 2022, Mme [F]-[B] et la SCI ont relevé appel du jugement.
Par conclusions notifiées le 3 juillet 2023, elles demandent à la cour de :
A titre principal
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il les déboute de leurs demandes tendant à voir caractériser une condition résolutoire,
et statuant à nouveau,
- juger que l'article 3 de l'acte litigieux du 26 décembre 2004 constitue une condition résolutoire,
- juger que la condition résolutoire est accomplie,
- condamner M. [T] à restituer, par le biais d'un acte de cession, les 1 999 parts sociales de la SCI à l'indivision, moyennant le prix d'origine préalablement fixé dans l'acte de cession du 26 décembre 2004,
En conséquence,
- juger que la répartition du capital de la SCI est celle d'origine :
l'indivision : 9 999 parts sociales,
M. [T] : 1 part sociale,
- juger que l'article 7 des statuts de la SCI est modifié en conséquence,
- donner tous pouvoirs à Résolvance avocats, agissant par le ministère de Maître Bertrand Chapy, avocat, pour effectuer toutes les formalités juridiques en découlant auprès du tribunal de commerce de Lyon auprès duquel la SCI est immatriculée,
- débouter M. [T] de toutes ses autres demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire
- juger que M. [T] est en situation de manquement contractuel à l'égard de Mme [F]-[B] représentant l'indivision,
- juger que Mme [F]-[B] est en droit de réclamer l'exécution forcée de l'obligation contractuelle de M. [T] à son égard,
- condamner M. [T] à restituer, par le biais d'un acte de cession, les 1 999 parts sociales de la SCI à l'indivision, moyennant le prix d'origine préalablement fixé dans l'acte de cession du 26 décembre 2004,
en conséquence,
- juger que la répartition du capital de la SCI est celle d'origine :
l'indivision : 9 999 parts sociales,
M. [T] : 1 part sociale,
- juger que l'article 7 des statuts de la SCI est modifié en conséquence,
- donner tous pouvoirs à Résolvance avocats, agissant par le ministère de Maître Bertrand Chapy, avocat, pour effectuer toutes les formalités juridiques en découlant auprès du tribunal de commerce de Lyon auprès duquel la SCI est immatriculée,
A titre infiniment subsidiaire
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il les déboute de leur demande tendant à voir déclarer acquise la clause résolutoire et des demandes qui en découlent,
- juger que M. [T] n'apporte aucune preuve du soi-disant abandon de compte courant d'associé par [V] [F],
et statuant à nouveau,
- juger que la lettre recommandée du 16 janvier 2007 constitue une mise en demeure, mais aussi l'ensemble des actes de procédure,
- juger que la clause résolutoire de l'acte de cession de parts sociales est acquise,
- juger que la cession de parts de la SCI en date du 26 décembre 2004 entre [V] [F] et M. [T] est résolue,
en conséquence,
- juger que la répartition du capital de la SCI est celle d'origine :
l'indivision : 9 999 parts sociales,
M. [T] : 1 part sociale,
- juger que l'article 7 des statuts de la SCI est modifié en conséquence,
- donner tous pouvoirs à Résolvance avocats, agissant par le ministère de Maître Bertrand Chapy, avocat, pour effectuer toutes les formalités juridiques en découlant auprès du tribunal de commerce de Lyon auprès duquel la SCI est immatriculée,
Sur les demandes reconventionnelles
- juger que la SCI a parfaitement respecté les règles de convocation à l'assemblée générale du 8 janvier 2017 à laquelle il était loisible pour M. [T] de participer,
- juger que la révocation de M. [T] n'avait aucun caractère vexatoire, et en conséquence, débouter M. [T] de toutes ses demandes sur ce point,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la demande de dommages-intérêts de M. [T] pour un montant de 100'000 euros,
En tout état de cause
- condamner M. [T] au paiement de la somme de 15'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à Mme [F]-[B] représentant l'indivision et à la SCI, chacune,
- condamner M. [T] aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction à la selarl Lexavoué Lyon.
Par conclusions notifiées le 15 avril 2024, M. [T] demande à la cour de :
A titre principal
- confirmer le jugement déféré en ses dispositions ayant :
débouté Mme [F]-[B], représentant l'indivision, et la SCI de la demande tendant à voir déclarer acquise la clause résolutoire et des demandes qui en découlent,
condamné la SCI à lui payer une somme de 16'948 euros en remboursement de son compte courant d'associé, outre intérêts au taux légal à compter du jugement,
débouté Mme [F]-[B], représentant l'indivision, et la SCI de la demande de dommages-intérêts pour procédure dilatoire,
condamné sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile Mme [F]-[B], représentant l'indivision, d'une part, à lui verser à une somme de 2 000 euros, et la SCI, d'autre part, à lui verser une somme de 1 000 euros,
condamné Mme [F]-[B], représentant l'indivision, et la SCI aux dépens,
- infirmer le jugement s'agissant de sa disposition l'ayant débouté de sa demande de dommages-intérêts pour révocation vexatoire et abusive de son mandat social,
et statuant à nouveau,
Sur l'irrecevabilité et/ou le mal fondé des demandes adverses visant à voir caractériser une condition résolutoire et/ou visant à l'exécution forcée du contrat au visa de l'article 1217 du code civil
- déclarer l'indivision et la SCI irrecevables en leurs demandes tendant à voir :
infirmer le jugement déféré en ce qu'il les déboute de leurs demandes tendant à voir caractériser une condition résolutoire,
juger que l'article 3 de l'acte litigieux du 26 décembre 2004 constitue une condition résolutoire,
juger que la condition résolutoire est accomplie,
condamner M. [T] à restituer, par le biais d'un acte de cession, les 1 999 parts sociales de la SCI à l'indivision, moyennant le prix d'origine préalablement fixé dans l'acte de cession du 26 décembre 2004,
juger que M. [T] est en situation de manquement contractuel à l'égard de Mme [F]-[B] représentant l'indivision,
juger que Mme [F]-[B] est en droit de réclamer l'exécution forcée l'obligation contractuelle de M. [T] à son égard,
condamner M. [T] à restituer, par le biais d'un acte de cession, les 1 999 parts sociales de la SCI à l'indivision, moyennant le prix d'origine préalablement fixé dans l'acte de cession du 26 décembre 2004,
donner tous pouvoirs à Résolvance avocats, agissant par le ministère de Maître Bertrand Chapy, avocat, pour effectuer toutes les formalités juridiques en découlant auprès du tribunal de commerce de Lyon auprès duquel la SCI est immatriculée,
- déclarer l'indivision et la SCI mal fondées en l'ensemble de leurs demandes,
en conséquence,
- rejeter purement et simplement, sans examen au fond, l'ensemble des demandes formulées par l'indivision et la SCI tendant à voir :
infirmer le jugement déféré en ce qu'il les déboute de leurs demandes tendant à voir caractériser une condition résolutoire,
juger que l'article 3 de l'acte litigieux du 26 décembre 2004 constitue une condition résolutoire,
juger que la condition résolutoire est accomplie,
condamner M. [T] à restituer, par le biais d'un acte de cession, les 1 999 parts sociales de la SCI à l'indivision, moyennant le prix d'origine préalablement fixé dans l'acte de cession du 26 décembre 2004,
juger que M. [T] est en situation de manquement contractuel à l'égard de Mme [F]-[B] représentant l'indivision,
juger que Mme [F]-[B] est en droit de réclamer l'exécution forcée l'obligation contractuelle de M. [T] à son égard,
condamner M. [T] à restituer, par le biais d'un acte de cession, les 1 999 parts sociales de la SCI à l'indivision, moyennant le prix d'origine préalablement fixé dans l'acte de cession du 26 décembre 2004,
donner tous pouvoirs à Résolvance avocats, agissant par le ministère de Maître Bertrand Chapy, avocat, pour effectuer toutes les formalités juridiques en découlant auprès du tribunal de commerce de Lyon auprès duquel la SCI est immatriculée,
- débouter l'indivision et la SCI de leur demande tendant à voir juger que l'article 3 de l'acte litigieux du 26 décembre 2004 constitue une condition résolutoire et l'ensemble des demandes qui en découlent,
- débouter l'indivision et la SCI de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions à ce titre,
Sur le débouté des demandes adverses tendant à voir déclarer acquise la clause résolutoire
- juger que l'indivision et la SCI sont mal fondées en l'ensemble de leurs demandes,
- juger que la clause résolutoire stipulée à l'acte de cession de titres de la SCI ne peut être acquise à l'indivision compte tenu que M. [T] et/ou la SCI n'ont pas été mis en demeure de rembourser le solde de l'emprunt dans un certain délai et qu'il ne leur a pas été rappelé qu'en cas d'inexécution, la convention sera résiliée de plein droit,
en conséquence,
- débouter Mme [B]-[F], représentant l'indivision, et la SCI de leur demande tendant à voir déclarer acquise la clause résolutoire et des demandes qui en découlent,
- débouter l'indivision et la SCI de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions à ce titre,
Sur le rejet/débouté des demandes adverses aux fins d'exécution forcée en nature de la convention de cession du 26 décembre 2004
- déclarer l'indivision mal fondée en l'ensemble de ses demandes aux fins d'exécution forcée en nature de la convention de cession du 26 décembre 2004 et formulées au visa des dispositions des articles 1217 et suivants du code civil, en conséquence,
- débouter l'indivision et la SCI de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions à ce titre, en particulier celles tendant à voir :
juger que M. [T] est en situation de manquement contractuel à l'égard de Mme [F]-[B] représentant l'indivision,
juger que Mme [F]-[B] est en droit de réclamer l'exécution forcée l'obligation contractuelle de M. [T] à son égard,
condamner M. [T] à restituer, par le biais d'un acte de cession, les 1 999 parts sociales de la SCI à l'indivision, moyennant le prix d'origine préalablement fixé dans l'acte de cession du 26 décembre 2004,
donner tous pouvoirs à Résolvance avocats, agissant par le ministère de Maître Bertrand Chapy, avocat, pour effectuer toutes les formalités juridiques en découlant auprès du tribunal de commerce de Lyon auprès duquel la SCI est immatriculée,
Sur ses demandes reconventionnelles et en tout état de cause
- juger que la révocation de son mandat de gérant est intervenue dans des circonstances vexatoires et abusives, dénotant un manque de loyauté et de considération à son égard, malgré l'investissement sans faille et les importants sacrifices concédés par lui pendant de très nombreuses années, pour assurer la « survie » de la SCI,
- juger que Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, et la SCI ont agi de manière particulièrement vexatoire et abusive à son égard,
- juger qu'il a subi un préjudice moral, lequel est évalué forfaitairement à la somme de 100 000 euros,
- le déclarer recevable et bien fondé en l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,
en conséquence,
- condamner in solidum la SCI et Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, à lui payer la somme de 100'000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral et financier, outre intérêt légal à compter de la décision à intervenir,
- condamner la SCI à lui payer la somme de 16'948 euros au titre du remboursement du solde de son compte courant d'associé et intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,
- débouter l'indivision et la SCI de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire
Sur le débouté des prétentions de l'indivision et de la SCI
- juger qu'[V] [F], ès qualités d'associé majoritaire, avait expressément et partiellement abandonné le solde de son compte-courant d'associé au profit de la SCI, vu les difficultés financières rencontrées par cette dernière,
- juger que subséquemment à l'abandon partiel de son compte courant d'associé, [V] [F] a renoncé à se prévaloir de la clause résolutoire stipulée à l'acte de cession des titres de la SCI de 2004,
- juger que cet abandon partiel de compte courant emporte, de facto, renonciation d'[V] [F] à se prévaloir de l'application de la clause résolutoire stipulée à l'acte de cession des titres de la SCI de 2004,
- juger que Mme [F]-[B], es qualités de représentante de l'indivision, sollicite l'acquisition de la clause résolutoire en parfaite mauvaise foi,
- juger que l'indivision et la SCI sont mal fondées en l'ensemble de leurs demandes,
En conséquence,
- débouter purement et simplement Mme [F]-[B] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,
Sur ses demandes reconventionnelles et en tout état de cause
- juger que la révocation de son mandat de gérant est intervenue dans des circonstances vexatoires et abusives, dénotant un manque de loyauté et de considération à son égard, malgré l'investissement sans faille et les importants sacrifices concédés par lui pendant de très nombreuses années, pour assurer la « survie » de la SCI,
- juger que Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, et la SCI ont agi de manière particulièrement vexatoire et abusive à son égard,
- juger qu'il a subi un préjudice moral, lequel est évalué forfaitairement à la somme de 100 000 euros,
- juger qu'il est recevable et bien fondé en l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,
en conséquence,
- condamner in solidum la SCI et Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, à lui payer la somme de 100'000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral et financier, outre intérêt légal à compter de la décision à intervenir,
- condamner la SCI à lui payer la somme de 16'948 euros au titre du remboursement du solde de son compte courant d'associé et intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,
A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour devait faire droit à la demande adverse au titre de la résiliation/résolution de la cession
- condamner Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, à lui payer la somme de 8 624 euros au titre du remboursement du prix de cession des titres de la SCI, outre intérêt légal à compter de la décision à intervenir,
- débouter Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, et la SCI du surplus de leurs demandes, fins et conclusions
- juger que la révocation de son mandat de gérant est intervenue dans des circonstances vexatoires et abusives, dénotant un manque de loyauté et de considération à son égard, malgré l'investissement sans faille et les importants sacrifices concédés par lui pendant de très nombreuses années, pour assurer la « survie » de la SCI,
- juger que Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, et la SCI ont agi de manière particulièrement vexatoire et abusive à son égard,
- juger qu'il a subi un préjudice moral, lequel est évalué forfaitairement à la somme de 100'000 euros,
- le déclarer recevable et bien fondé en l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,
en conséquence,
- débouter Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, et la SCI du surplus de leurs demandes, fins et conclusions,
- condamner in solidum la SCI et Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, à lui payer la somme de 100'000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral et financier, outre intérêt légal à compter de la décision à intervenir,
- condamner la SCI à lui payer la somme de 16'948 euros au titre du remboursement du solde de son compte courant d'associé et intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,
En toute hypothèse
- débouter Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, et la SCI du surplus de leurs demandes, fins et conclusions,
- condamner in solidum Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, et la SCI à lui payer la somme de 15'000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum Mme [F]-[B], ès qualités de représentante de l'indivision, et la SCI aux entiers dépens d'instance avec distractions au profit de la SCP Baufumé Sourbé, selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 avril 2024.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes tendant à voir « juger » lorsque celles-ci développent en réalité des moyens.
Par ailleurs, aucune partie ne sollicitant l'infirmation du chef de dispositif ayant débouté Mme [F]-[B] et la SCI de la demande de dommages-intérêts pour procédure dilatoire, celui-ci est définitif.
1. Sur les fins de non-recevoir
M. [T] soulève l'irrecevabilité des demandes des appelantes visant à voir juger que l'article 3 de l'acte du 26 décembre 2004 constitue une condition résolutoire et que celle-ci est accomplie, ou visant à l'exécution forcée du contrat, ainsi que des demandes qui en découlent. Il fait valoir essentiellement que :
- la demande adverse tendant à voir juger que l'article 3 de l'acte de cession caractérise une condition résolutoire accomplie est irrecevable du fait de l'effet dévolutif de l'appel, puisque, d'une part, les premiers juges n'ont jamais été amenés à examiner et statuer sur ces demandes, l'indivision s'étant jusqu'alors toujours bornée à demander aux juridictions saisies de voir déclarer acquise la clause résolutoire stipulée à l'article 3 de l'acte, et, d'autre part, ces nouvelles demandes ne figurent pas dans la déclaration d'appel rédigée par les appelants ;
- en application de l'article 564 du code de procédure civile, ces demandes sont irrecevables car nouvelles en appel ; la demande de voir qualifier l'article 3 de condition résolutoire modifie l'objet du litige et les prétentions initiales, et rompt le principe d'unité du litige ; la demande aux fins d'exécution forcée de la convention ne tend absolument pas à la même fin que la demande initiale de résolution de la convention de cession, dès lors qu'on ne saurait soutenir à la fois la résolution d'une convention et son exécution forcée ;
- ces demandes se heurtent au principe d'estoppel et de loyauté procédurale.
Mme [F]-[B] et la SCI répliquent essentiellement que :
- sur l'effet dévolutif de l'appel : elles ont relevé appel de l'ensemble des chefs de jugement qu'elles critiquent, de sorte qu'il ne saurait être soutenu l'irrecevabilité au regard de l'effet dévolutif de l'appel ;
- sur le caractère nouveau en appel des demandes : elles sont recevables à inverser en appel un principal et un subsidiaire ; la demande de voir qualifier la clause de condition résolutoire ne constitue pas une prétention nouvelle conduisant à modifier l'objet initial du litige puisqu'elle trouve son origine dans le même fait originaire, à savoir l'acte de cession du 26 et décembre 2004, et tend aux mêmes fins que la demande consistant à constater l'acquisition de la clause résolutoire, à savoir la résolution du contrat ; il en est de même de la demande tendant à solliciter l'exécution forcée de l'article 3 du contrat, puisque cet article prévoit contractuellement la résolution du contrat ; le principe d'unité du litige n'a pas vocation à s'appliquer pour se prévaloir d'une prétention nouvelle en cause d'appel ;
- sur l'estoppel : il n'y a pas de contradiction entre leurs diverses prétentions et M. [T] ne démontre pas l'existence d'une quelconque déloyauté.
Réponse de la cour
L'appel interjeté par Mme [F]-[B] et la SCI a effectivement déféré à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément dans la déclaration d'appel du 20 juin 2022 et de ceux qui en dépendent, conformément à l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2023-1391 du 29 décembre 2023, applicable à l'espèce. Par hypothèse, la demande des appelantes tendant à voir juger que l'article 3 de l'acte de cession caractérise une condition résolutoire accomplie ne pouvait être évoquée dans l'acte d'appel puisqu'ainsi que l'énonce M. [T] lui-même, ce chef de demande n'avait pas été soumis aux premiers juges, de sorte qu'il n'a pas donné lieu à un chef de jugement.
Le débat relatif à la recevabilité des demandes des appelantes est donc sans lien avec la question de l'effet dévolutif de l'appel mais doit conduire la cour à s'interroger sur le caractère nouveau ou non de ces demandes.
Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Et selon l'article 565 du même code, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
En l'espèce, la demande tendant à voir qualifier l'article litigieux de condition résolutoire et la demande aux fins d'exécution forcée de ce même article tendent à la même fin que la demande initiale de résolution de la convention de cession, à savoir la restitution des parts sociales de la SCI, dès lors que les appelantes soutiennent qu'en l'absence de remboursement de l'emprunt par la SCI, cet article prévoit contractuellement la résolution du contrat de cession ou fait obligation au cessionnaire de restituer les parts sociales au cédant.
Enfin, la fin de non-recevoir tirée du principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui sanctionne l'attitude procédurale consistant pour une partie, au cours d'une même instance, à adopter des positions contraires ou incompatibles entre elles dans des conditions qui induisent en erreur son adversaire sur ses intentions.
En l'espèce, le fait pour les appelantes de solliciter, à titre principal, qu'il soit jugé que l'article 3 de l'acte litigieux constitue une condition résolutoire accomplie, à titre subsidiaire, que Mme [F]-[B] est en droit de réclamer l'exécution forcée du contrat prévoyant la restitution des parts sociales, et à titre infiniment subsidiaire, que la clause résolutoire de l'acte de cession de parts sociales est acquise, ne s'analyse pas en l'adoption de positions contraires ou incompatibles entre elles de nature à induire en erreur son adversaire sur ses intentions, puisqu'ainsi qu'il a été relevé juste avant, ces demandes tendent toutes à la même fin, à savoir la restitution des parts sociales.
Au vu de ce qui précède, la cour rejette les fins de non-recevoir soulevées par M. [T].
2. Sur la demande principale tendant à voir juger que l'article 3 de l'acte de cession constitue une condition résolutoire accomplie
Mme [F]-[B] et la SCI font valoir en substance que :
- l'esprit de l'accord est clair et les premiers juges n'auraient pas dû s'arrêter au choix des mots retenus par des non juristes, au demeurant traduits du néerlandais au français, pour remettre en cause cet accord ;
- la clause litigieuse constitue une condition résolutoire qui, en l'absence de remboursement de la somme de 304'900 euros à l'échéance prévue, est acquise, de telle sorte que l'obligation doit faire l'objet d'une révocation automatique sans qu'il soit nécessaire de mettre en demeure le cocontractant ;
- la cession organisant les restitutions n'est pas une nouvelle cession en tant que telle mais une modalité pratique de la révocation de la cession initiale, puisque le transfert de propriété ne peut s'opérer en dehors d'une autre cession de parts sociales en retour ; la stipulation contractuelle organise expressément l'anéantissement rétroactif de la convention en plaçant les parties en l'état antérieur à la réalisation de l'acte de cession litigieux, conformément à l'article 1183 du code civil ;
- [V] [F] n'a jamais abandonné son compte courant d'associé ; l'indivision applique de bonne foi les règles contractuelles de la cession de parts sociales et son action, engagée par une mise en demeure de janvier 2017, est sans lien avec la révision du plan local d'urbanisme (PLU) en 2019.
M. [T] réplique essentiellement que :
- l'analyse attentive des termes de la clause litigieuse démontre qu'elle constitue une clause résolutoire et non une condition résolutoire, et qu'ainsi, le contrat de cession était ferme et définitif ; cette stipulation vise à sanctionner M. [T] dans le cas où la société qu'il représentait alors en sa qualité de dirigeant ne satisferait pas à ses obligations au titre du remboursement de l'emprunt ;
- la mise en 'uvre de cette clause n'a pas pour effet d'entraîner l'anéantissement rétroactif de la cession litigieuse, mais uniquement de l'obliger à proposer une nouvelle cession des titres initialement cédés ; la mise en 'uvre de cette clause suppose donc la réalisation d'une nouvelle cession de titres, de telle sorte qu'elle ne peut être assimilée et/ou qualifiée de condition résolutoire ;
- contrairement à ce que soutiennent les appelantes, la résolution rétroactive d'une cession sous condition résolutoire peut se formaliser par la régularisation d'un simple protocole entre les parties, d'un procès-verbal d'assemblée générale des associés et d'une modification des statuts de la société, sans qu'il soit nécessaire de procéder à un nouveau transfert de titres ;
- en tout état de cause, Mme [F]-[B] doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes, dès lors qu'[V] [F] avait consenti à la SCI un abandon de son compte-courant d'associé à hauteur du solde de l'emprunt et, de ce fait, renoncé à se prévaloir de la clause résolutoire stipulée dans l'acte de cession des parts sociales ; l'indivision ne peut faire fi de cet accord et revenir sur cet accord consenti au profit d'un ami et associé de longue date, sauf à faire preuve d'une mauvaise foi et d'une déloyauté patente;
- l'indivision n'est pas fondée à se prévaloir de l'acquisition de ladite clause résolutoire en raison de sa mauvaise foi, la mise en 'uvre de la clause résolutoire intervenant dans le but de l'évincer de ses droits sociaux et de son droit à prendre part à la répartition du prix de cession, dans le cas d'une éventuelle vente des actifs immobiliers de la SCI, l'un des terrains étant devenu constructible avec le nouveau PLU de 2019.
À titre infiniment subsidiaire et s'il était fait droit aux demandes des appelantes, M. [T] sollicite le remboursement de la somme de 8 624 euros, compte tenu de l'anéantissement rétroactif de la cession des parts sociales.
Réponse de la cour
Aux termes de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable à l'espèce, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Et il résulte de l'article 1183 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance précitée, que la condition résolutoire entraîne l'anéantissement rétroactif du contrat ainsi que des restitutions réciproques qui en constituent des conséquences légales.
En l'espèce, c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu que la clause de l'acte de cession qui stipule que « Lorsque la société ne remplirait pas les obligations de remboursement sans raisons fondées, ou lorsque l'emprunt ne serait pas remboursé entièrement au 31 décembre 2016, l'acheteur sera obligé de proposer au vendeur toutes les actions contre le prix, comme mentionné à l'article 2 » n'opère pas de façon automatique une révocation de la cession avec remise en l'état antérieur mais suppose au contraire une nouvelle cession avec l'obligation pour l'acheteur de « proposer au vendeur toutes les actions contre le prix », étant observé que la clause ne fait pas expressément obligation au vendeur d'accepter la proposition d'achat, de sorte qu'elle ne prévoit pas l'anéantissement rétroactif du contrat ainsi que des restitutions réciproques.
Aussi convient-il de rejeter la demande principale des appelants tendant à voir juger que l'article 3 de l'acte de cession constitue une condition résolutoire accomplie.
3. Sur la demande subsidiaire d'exécution forcée de l'obligation contractuelle
A titre subsidiaire, Mme [F]-[B] et la SCI font valoir essentiellement que :
- si la cour considère que la stipulation contractuelle prévue à l'article 3 de l'acte de cession n'est pas une condition résolutoire, elle constitue néanmoins un engagement contractuel de M. [T] envers [V] [F] ; ainsi, dès lors que l'emprunt n'était pas remboursé au 31 décembre 2016, M. [T] était obligé de proposer à ce dernier toutes les actions objet de la cession contre le prix initial de celles-ci ;
- à défaut d'exécution volontaire par M. [T], malgré deux mises en demeure, elles sont fondées à solliciter en justice l'exécution forcée de l'obligation contractuelle ;
- [V] [F] n'a jamais abandonné son compte courant d'associé ; l'indivision applique de bonne foi les règles contractuelles de la cession de parts sociales et son action, engagée par une mise en demeure de janvier 2017, est sans lien avec la révision du plan local d'urbanisme (PLU) en 2019.
M. [T] réplique que :
- l'exécution forcée en nature d'une convention est subordonnée à une mise en demeure préalable ; or, en l'espèce, ni lui-même, en sa qualité de cessionnaire des titres sociaux, ni la SCI, en sa qualité de débitrice de l'obligation de remboursement des sommes, n'ont été mis en demeure, préalablement à l'introduction de l'instance, d'avoir à procéder au règlement du solde de l'emprunt dans un certain délai et il ne leur a jamais été rappelé non plus qu'en cas d'inexécution, l'article 3 trouverait à s'appliquer ; le courrier du 16 janvier 2017 n'est pas un courrier de mise en demeure mais un courrier constatant la résolution du contrat ;
- en tout état de cause, Mme [F]-[B] doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes, dès lors qu'[V] [F] avait consenti à la SCI un abandon de son compte-courant d'associé à hauteur du solde de l'emprunt et, de ce fait, renoncé à se prévaloir de la clause résolutoire stipulée dans l'acte de cession des parts sociales ; l'indivision ne peut faire fi de cet accord et revenir sur cet accord consenti au profit d'un ami et associé de longue date, sauf à faire preuve d'une mauvaise foi et d'une déloyauté patente;
- l'indivision n'est pas fondée à se prévaloir de l'acquisition de ladite clause résolutoire en raison de sa mauvaise foi, la mise en 'uvre de la clause résolutoire intervenant dans le but de l'évincer de ses droits sociaux et de son droit à prendre part à la répartition du prix de cession, dans le cas d'une éventuelle vente des actifs immobiliers de la SCI, l'un des terrains étant devenu constructible avec le nouveau PLU de 2019.
À titre infiniment subsidiaire et s'il était fait droit aux demandes des appelantes, M. [T] sollicite le remboursement de la somme de 8 624 euros, compte tenu de l'anéantissement rétroactif de la cession des parts sociales.
Réponse de la cour
Ainsi qu'il a été rappelé juste avant, aux termes de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Et il résulte de l'article 1184 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance précitée, que, lorsqu'une des deux parties ne satisfait pas à son engagement, le contrat n'est pas résolu de plein droit, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté ayant le choix de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.
En l'espèce, la clause litigieuse fait obligation à M. [T], en l'absence de remboursement de l'emprunt par la SCI au plus tard le 31 décembre 2016, d'avoir à « proposer au vendeur toutes les actions contre le prix, comme mentionné à l'article 2 ».
Or, force est de relever, d'une part, qu'il n'est pas contesté que l'emprunt consenti par [V] [F] n'a pas été remboursé en totalité à la date du 31 décembre 2016, d'autre part, que M. [T] n'a pas proposé aux ayants droit d'[V] [F] les actions qu'il avait acquises contre le prix initialement payé.
Contrairement à ce qu'il soutient, M. [T] a bien été mis en demeure d'exécuter l'obligation mise à sa charge par la clause puisqu'il a été destinataire, le 12 janvier 2017, d'un courrier recommandé du 16 janvier 2017 de Maître Chapy, avocat se déclarant « mandaté par l'indivision [F] », l'invitant à lui retourner « une cession [des] parts sociales [...] revêtue de [ses] initiales sur chacune des pages, et de [sa] signature sur la dernière page précédée de la mention « Bon pour cession de 1 999 parts » avant le 31 janvier 2017 », à défaut de quoi il précisait être « mandaté pour saisir les tribunaux compétents afin d'obtenir l'exécution forcée de [ses] obligations ».
Par ailleurs, M. [T] ne rapporte pas la preuve qu'[V] [F] avait consenti à la SCI un abandon de son compte-courant d'associé à hauteur du solde de l'emprunt et, de ce fait, renoncé à se prévaloir de la clause litigieuse. En effet, ainsi que l'a justement retenu le tribunal, il ressort de l'examen des comptes annuels de la SCI pour les années 2016 et 2017 que figurait toujours au passif une somme de 176'500 euros au titre du « compte courant [F] emprunt ». En outre, s'il résulte des échanges de mails que l'intimé verse aux débats (ses pièces n° 30 et suivantes) la preuve que des discussions ont été engagées entre M. [T] et les ayants droit d'[V] [F] en vue de la signature d'un avenant au contrat de cession annulant la clause visée à l'article 3, force est de constater, d'une part, que ces échanges n'établissent pas, en revanche, qu'[V] [F] avait lui-même renoncé à se prévaloir de ladite clause, d'autre part, que ces discussions n'ont pas abouti à la signature de l'avenant, faute d'accord entre les parties.
Enfin, M. [T] est mal fondé à arguer de la mauvaise foi des ayants droit d'[V] [F] dans la mise en oeuvre de la clause litigieuse, alors que la mise en demeure d'exécuter le contrat est antérieure de deux années à la révision du PLU.
Au vu de ce qui précède, la cour fait droit à la demande d'exécution forcée de Mme [F]-[B] et de la SCI, et condamne M. [T] à restituer, par le biais d'un acte de cession, les 1 999 parts sociales de la SCI à Mme [F]-[B].
En contrepartie, Mme [F]-[B] est condamnée à payer à M. [T] la somme de 8 624 euros correspondant au prix d'origine fixé dans l'acte de cession du 26 décembre 2004.
Il n'y a pas lieu, en revanche, de faire droit aux demandes annexes relatives à la répartition du capital de la SCI et à la modification des statuts de la SCI, ces conséquences découlant nécessairement de la condamnation prononcée.
La cour ayant fait droit à la demande subsidiaire des appelantes tendant à l'exécution forcée de la convention, leur demande présentée à titre infiniment subsidiaire, tendant à voir juger que la clause résolutoire est acquise, est devenue sans objet. Le jugement est donc infirmé en ce qu'il a débouté Mme [F]-[B] et la SCI de leur demande tendant à voir déclarer acquise la clause résolutoire et des demandes qui en découlent.
4. Sur les demandes reconventionnelles
4.1. Sur le remboursement du compte-courant d'associé
Mme [F]-[B] et la SCI ne s'opposant pas à cette demande, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SCI à payer à M. [T] la somme de 16'948 euros en remboursement de son compte courant d'associé, outre intérêts au taux légal à compter du jugement.
4.2. Sur l'indemnisation du préjudice moral et financier
M. [T] fait valoir essentiellement que :
- l'attitude de Mme [F]-[B] et de la SCI a été particulièrement vexatoire et abusive puisqu'il s'est vu évincer de la gestion de la SCI et privé des fruits de son travail par les héritiers de son ancien associé et ami, en dépit d'un investissement sans faille pendant 14 ans et de sacrifices consentis qui avaient justifié la cession à son profit des titres en 2004 à un prix de convenance ;
- il n'a pas été invité à participer à la réunion des organes statuant sur sa révocation et n'a pas pu présenter ses observations en défense, les courriers recommandés de convocation des 6 juillet et 20 décembre 2016 ayant été remis, non à lui-même mais à un mandataire qui a signé les accusés de réception ; le motif de sa révocation est mensonger puisqu'il n'a jamais abandonné la gestion de la SCI.
Mme [F]-[B] et la SCI répliquent que :
- par deux courriers de 2016, l'indivision a porté à la connaissance de M. [T] sa volonté que soit mise en place une assemblée générale extraordinaire dont l'ordre du jour serait la démission de la gérance et la désignation d'un nouveau gérant ; M. [T] a été convoqué à l'assemblée générale extraordinaire du 8 janvier 2017 mais ne s'y est pas présenté ;
- M. [T] n'apporte aucun élément tangible permettant de matérialiser en quoi sa révocation aurait été vexatoire et de justifier le montant des dommages-intérêts réclamés.
Réponse de la cour
C'est par des motifs pertinents, justement déduits des faits de la cause et des pièces produites, que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu, après avoir rappelé les dispositions de l'article 1851 du code civil, d'une part que M. [T] a bien été convoqué à l'assemblée générale extraordinaire lors de laquelle la révocation de sa gérance a été décidée et a donc bien été en mesure de s'expliquer, d'autre part, qu'il ne justifie pas du caractère vexatoire et injustifié de cette révocation.
Pour confirmer le jugement déféré, la cour ajoute, en premier lieu, que M. [T] ne saurait valablement tirer argument de ce qu'il n'a pas personnellement accusé réception des courriers de convocation des 6 juillet et 20 décembre 2016, alors que ces deux courriers ont été signés par un tiers se déclarant comme son mandataire.
En deuxième lieu, force est de constater qu'alors que M. [T] persiste à contester en appel les motifs de sa révocation, à savoir l'absence de tenue de l'assemblée d'approbation des comptes 2015, l'opacité de sa gestion et l'abandon de la gestion de la société durant plusieurs mois, et à soutenir qu'il a continué d'accomplir pleinement sa mission de gérant malgré son éloignement géographique et la prise d'un autre emploi, il ne s'explique toujours pas à hauteur d'appel sur les motifs de sa révocation et ne justifie pas plus qu'en première instance de l'accomplissement effectif de sa mission.
En conséquence, la cour ne peut que confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts.
5. Sur les frais irrépétibles et les dépens
Compte tenu de la solution donnée au litige en appel, il convient d'infirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance.
M. [T], partie perdante au principal, est condamné aux dépens de première instance et d'appel et à payer à Mme [F]-[B], d'une part, à la SCI, d'autre part, la somme de 2 500 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [X] [F]-[B], représentant l'indivision [F], et la SCI des quatre saisons de la demande tendant à voir déclarer acquise la clause résolutoire et des demandes qui en découlent, et en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance,
Le confirme pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Condamne M. [N] [T] à restituer, par le biais d'un acte de cession, 1 999 parts sociales de la SCI des quatre saisons à Mme [X] [F]-[B],
Condamne, en contrepartie, Mme [X] [F]-[B] à payer à M. [N] [T] la somme de 8 624 euros correspondant au prix d'origine fixé dans l'acte de cession du 26 décembre 2004,
Condamne M. [N] [T] à payer à Mme [X] [F]-[B] et à la SCI des quatre saisons la somme de 2 500 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [N] [T] aux dépens de première instance et d'appel.