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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-5, 18 octobre 2024, n° 18/03665

AIX-EN-PROVENCE

Ordonnance

Autre

CA Aix-en-Provence n° 18/03665

18 octobre 2024

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

[Adresse 2]

[Localité 1]

Chambre 1-5

N° RG 18/03665 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCBCX

Ordonnance n° 2024/MEE/156

SCI HAMEL

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée par Me Sébastien BLONDON, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Aly DIALLO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Appelante

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU GROUPE D'IMMEUBLES LE GARDANON

représenté et asisté par Me Christine MONCHAUZOU de la SCP TROEGELER - GOUGOT - BREDEAU- TROEGELER - MONCHAUZOU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Intimé

SAS NEXITY

assignée en IF le 15.04.2022 à personne habilitée à la requête de la SCI HAMEL

représentée et assistée par Me François ROSENFELD de la SCP CABINET ROSENFELD & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Ruth RIQUELME, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [W], [G] [C]

assigné en IF

représenté et assisté par Me Daniel PETIT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Parties Intervenantes

ORDONNANCE D'INCIDENT

Nous, Patricia HOARAU, magistrat de la mise en état de la Chambre 1-5 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, assistée de Priscilla BOSIO, greffier ;

Après débats à l'audience du 24 Septembre 2024, ayant indiqué à cette occasion aux parties que l'incident était mis en délibéré et que la décision serait rendue le 18 Octobre 2024, à cette date avons rendu l'ordonnance suivante :

EXPOSE DE L'INCIDENT

La SCI Hamel copropriétaire au sein de la copropriété dénommée [Adresse 3], sise à [Localité 1], a fait assigner, par exploit d'huissier du 2 septembre 2015, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 3], représenté par son syndic (ci-après le syndicat des copropriétaires) devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, aux fins d'annulation des assemblées générales des 19 juin 2014 et 28 avril 2015.

Par jugement du 23 janvier 2018, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a notamment :

- déclaré irrecevable comme tardive la demande d'annulation de l'assemblée générale du 19 juin 2014,

- déclaré irrecevable comme tardive la demande d'annulation de l'assemblée générale du 28 avril 2015,

- déclaré la SCI Hamel infondée en ses prétentions au titre des frais irrépétibles,

- condamné la SCI Hamel à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3 000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

- autorisé l'application de l'article 699 du code de procédure civile en faveur du conseil du syndicat des copropriétaires,

- débouté la SCI Hamel de sa dispense de participation aux frais de procédure en application article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Par deux déclarations du 24 février 2018 et 27 février 2018, la SCI Hamel a interjeté appel de ce jugement, en intimant le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic, la société Nexity Lamy.

Les deux instances ont été jointes par ordonnance du 13 mars 2018 sous le n° 18/03665.

Par exploit d'huissier du 15 avril 2022, la SCI Hamel a assigné en intervention forcée la société Nexity Lamy.

Statuant sur un incident de communication de pièces par le syndic, en rapport avec la validité du mandat du syndic et des assemblées générales, le conseiller de la mise en état a, par ordonnance du 10 octobre 2023, rejeté cette demande en condamnant la SCI Hamel aux dépens de l'incident.

Par soit-transmis adressé sur le RPVA, les parties ont été avisées que l'affaire a été fixée au fond à l'audience du 13 février 2024 avec une ordonnance de clôture annoncée pour le 30 janvier 2024.

Par soit-transmis du 25 janvier 2024, le greffe a sollicité la communication par RPVA de l'assignation en intervention forcée du 5 janvier 2024 concernant M. [C] en précisant « En effet, Me [Y] [I] souhaite se constituer pour cette partie et en l'absence de cette assignation, nous ne pouvons l'accepter ».

Les avocats associés Françoise Boulan - Romain Cherfils ' Pierre-Yves Imperatore et plus exactement Me Romain Cherfils, a adressé l'assignation du 5 janvier 2024, sous la constitution de Me Daniel Barrionuevo, en faisant savoir qu'il s'est dessaisi des intérêts de la SCI Hamel en qualité de postulant, en a informé son mandant, la juridiction, ses contradicteurs, mais que la SCI Hamel a refusé de le remplacer, le contraignant à continuer d'accomplir les actes de procédure.

A l'audience du 13 février 2024, l'affaire a été renvoyée à la mise en état et les parties informées que le dossier a été fixé en incident pour qu'il soit statué sur la nullité de l'intervention forcée de M. [C], évoquée lors du renvoi à la mise en état du dossier lors de l'audience du 13 février 2024.

Par conclusions d'incident déposées et notifiées par le RPVA le 23 juillet 2024, M. [W] [C] demande au conseiller de la mise en état de :

Vu l'article 117 du code de procédure civile,

Vu l'arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d'appel,

Vu les actes de la procédure,

Vu les pièces du dossier,

- juger que si sa mise en cause résulte de l'assignation du 5 janvier 2024, alors il convient d'en constater la nullité,

- juger, à défaut, que si sa mise en cause résulte de l'assignation du 29 janvier 2024, la cour n'a pas été régulièrement saisie,

En toute hypothèse,

- juger irrecevables les demandes de la SCI Hamel à son encontre, les rejeter comme telles,

- condamner la SCI Hamel à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure irrecevable, téméraire et abusive, outre celle de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SCI Hamel aux entiers dépens.

M. [W] [C] soutient :

- que l'assignation en intervention du 5 janvier 2024, est libellée comme suit : « La société civile immobilière HAMEL (') ayant pour avocats : Maître Daniel BARRIONUEVO, avocat postulant, inscrit au Barreau d'Aix-en-Provence ('), Maître Sébastien BLONDON, avocat plaidant au Barreau de PARIS (') »

- que l'assignation en intervention du 29 janvier 2024, est libellée comme suit : « La société civile immobilière HAMEL (') ayant pour avocats : Maître Romain CHERFILS, avocat postulant au Barreau d'Aix-en-Provence ('), Maître Sébastien BLONDON, avocat plaidant au Barreau de PARIS (') »

- qu'il a fait délivrer une sommation le 7 mars 2024 à l'avocat postulant de la SCI Hamel et celui-ci a répondu que l'assignation du 5 janvier 2024 n'a pas été émise ni enrôlée par ses soins et que l'assignation du 29 janvier 2024 semble avoir été adressée à la cour, directement par la SCI Hamel, par sa lettre du 31 janvier 2024,

- qu'il ne ressort pas de ces éléments que l'assignation du 29 janvier 2024 ait été enrôlée par l'avocat postulant de la SCI Hamel via le RPVA et il convient d'en tirer toutes les conséquences procédurales,

- que l'assignation du 5 janvier 2024 n'a pas pu saisir régulièrement la cour, puisque l'avocat mentionné comme postulant n'est pas constitué devant la cour, et est donc nulle en application de l'article 117 du code de procédure civile pour défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice,

- que l'action engagée contre lui en 2024 à la veille de la clôture, pour une procédure entreprise par la SCI Hamel en 2015 apparaît, sur le fond, dilatoire, irrecevable, totalement abusive et in fine malveillante, si bien qu'il est fondé à solliciter des dommages et intérêts.

Aucune autre partie, n'a conclu sur l'incident.

MOTIFS

Sur l'assignation en intervention forcée du 5 janvier 2024

Le code de procédure civile distingue les nullités pour vice de forme, qui pour prospérer nécessitent la preuve d'un grief, et les nullités de fond non soumises à la condition du grief.

L'article 117 du code de procédure liste les irrégularités de fond affectant la validité de l'acte, à savoir :

- la capacité d'ester en justice,

- le défaut de pouvoir d'une partie ou d'une personne figurant au procès comme représentant soit d'une personne morale, soit d'une personne atteinte d'une incapacité d'exercice,

- le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice.

En l'espèce, il ressort des pièces de la procédure que depuis le 6 avril 2023, Me Cherfils a informé la cour qu'il se dessaisissait des intérêts de la SCI Hamel, pour le compte de qui il intervenait comme postulant aux côtés de Me Sébastien Blondon.

Cependant et en application de l'article 419 du code de procédure civile, le représentant qui entend mettre fin à son mandat n'en est déchargé qu'après avoir informé de son intention son mandant, le juge et la partie adverse, et lorsque la représentation est obligatoire, l'avocat ne peut se décharger de son mandat de représentation que du jour où il est remplacé par un nouveau représentant constitué par la partie ou, à défaut, commis par le bâtonnier ou par le président de la chambre de discipline.

Il en ressort que jusqu'à ce qu'un autre avocat soit désigné en ses lieux et place, Me Cherfils est l'avocat constitué pour la SCI Hamel.

L'assignation du 5 janvier 2024 en intervention forcée, a été transmise sur le RPVA à la cour par Me Cherfils, le 25 janvier 2024.

La mention sur cette assignation, du nom d'un autre avocat postulant que Me Cherfils, dont la constitution n'a pas été régularisée aux lieu et place de Me Cherfils, constitue une irrégularité de fond sanctionnée par la nullité de l'assignation.

Il convient donc de déclarer nulle l'assignation en intervention forcée du 5 janvier 2024.

Sur l'assignation en intervention forcée du 29 janvier 2024

Aux termes de l'article 930-1 du code de procédure civile, « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique.

Lorsqu'un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe ou lui est adressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. En ce cas, la déclaration d'appel est remise ou adressée au greffe en autant d'exemplaires qu'il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l'un est immédiatement restitué.

Lorsque la déclaration d'appel est faite par voie postale, le greffe enregistre l'acte à la date figurant sur le cachet du bureau d'émission et adresse à l'appelant un récépissé par tout moyen.

Les avis, avertissements ou convocations sont remis aux avocats des parties par voie électronique, sauf impossibilité pour cause étrangère à l'expéditeur.

Un arrêté du garde des sceaux définit les modalités des échanges par voie électronique ».

En l'espèce l'assignation en intervention forcée délivrée le 29 janvier 2024 sous la postulation mentionnée de Me Cherfils, n'a pas été remise à la juridiction par voie électronique et n'aurait pu l'être que par Me Cherfils, avocat postulant constitué, toujours pas remplacé bien qu'ayant avisé son mandant de son dessaisissement.

Par courrier du 31 janvier 2024, le gérant de la SCI Hamel a fait parvenir ladite assignation à la cour, tandis que Me Cherfils conteste avoir établi cet acte de procédure, sur lequel son nom figure en tant que postulant.

Il en ressort que le fait de ne pas avoir pu transmettre l'assignation en intervention forcée par le RPVA résulte du fait de la partie elle-même, soit la SCI Hamel, qui bien qu'informée par son avocat postulant de son dessaisissement, n'a pas constitué un nouvel avocat pour l'accomplissement d'un acte de procédure qu'elle estimait utile.

L'assignation en intervention forcée du 29 janvier 2024 sera donc déclarée irrecevable.

Sur la demande de dommages et intérêts

Il est constant que l'exercice d'une action en justice constitue un droit, qui ne peut dégénérer en abus que s'il est démontré une volonté de nuire de la partie adverse ou sa mauvaise foi ou une erreur ou négligence blâmable équipollente au dol, ce qui suppose de rapporter la preuve de ce type de faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux, dans les conditions prévues par l'article 1240 du code civil.

En l'espèce, il n'est pas démontré que la SCI Hamel a abusé de son droit d'agir en justice contre une nouvelle partie, pour la mettre en cause dans une procédure en cours, dans une intention de nuire à M. [W] [C], ou la mauvaise foi ou une légèreté particulièrement blâmable.

M. [W] [C] sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution de l'incident, il convient de condamner la SCI Hamel aux dépens et aux frais irrépétibles qu'il est inéquitable de laisser à la charge de M. [W] [C].

PAR CES MOTIFS

Déclarons nulle l'assignation en intervention forcée de Monsieur [W] [C] formée par la SCI Hamel le 5 janvier 2024 ;

Déclarons irrecevable l'assignation en intervention forcée de Monsieur [W] [C] formée par la SCI Hamel le 29 janvier 2024 ;

Déboutons M. [W] [C] de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamnons la SCI Hamel aux dépens de l'incident ;

Condamnons la SCI Hamel à verser à M. [W] [C], la somme de 2 000 euros (deux mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Fait à Aix-en-Provence, le 18 Octobre 2024

Le greffier Le magistrat de la mise en état

Copie délivrée aux avocats des parties ce jour.

Le greffier