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Décisions

Cass. 2e civ., 3 octobre 2024, n° 22-15.448

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme. MARTINEL

Aix-en-Provence, du 18 janvier 2022

18 janvier 2022

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 janvier 2022), un tribunal judiciaire a rejeté, par un jugement, la demande, formée par M. [F] et la société Aigle marin, de nullité de la vente d'un immeuble, situé dans la commune de [Localité 8] (06), consentie par la société Villacota 4 à la société BS Invest Côte d'Azur.

2. M. [F] et la société Aigle marin ont été condamnés in solidum à payer à la société BS Invest Côte d'Azur diverses indemnités, outre des sommes en application de l'article 700 du code de procédure civile, à M. [N], notaire, et à Mme [R], représentante de la société Villacota 4.

3. M. [F] et la société Aigle marin ont relevé appel de cette décision le 23 juillet 2020.

4. Par ordonnance du 30 juin 2021, un conseiller de la mise en état a notamment prononcé la nullité de la déclaration d'appel de la société Aigle marin.

Recevabilité du pourvoi examinée d'office

5. Après avis donné aux parties conformément à l'article 16 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 609 du même code.

6. Le pourvoi en cassation n'est recevable que si le demandeur a intérêt à agir.

7. M. [F] s'est pourvu en cassation contre une décision qui a ordonné la réouverture des débats afin de recueillir les observations des parties sur la nullité de sa déclaration d'appel.

8. L'arrêt n'est attaqué qu'en ce qu'il a prononcé la nullité de la déclaration d'appel de la société Aigle marin.

9. En conséquence, le pourvoi n'est pas recevable en ce qu'il est formé par M. [F].

Examen des moyens
Sur le premier moyen en tant qu'il est soulevé par la société Aigle marin

10. La société Aigle marin fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a prononcé la nullité de la déclaration d'appel de la société Aigle marin, alors :

« 1°/ que la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief ; que l'acte de saisine de la juridiction, même entaché d'un vice de procédure, interrompt les délais de prescription comme de forclusion ; que, dès lors, le vice de forme entachant la déclaration d'appel peut être régularisée jusqu'à ce que le juge statue ; qu'en énonçant au cas d'espèce que le vice tenant à la mention d'une adresse erronée du siège social de la société Aigle marin dans la déclaration d'appel ne pouvait être régularisée après l'expiration du délai d'appel, les juges du fond ont violé les articles 2241 du code civil et 115 du code de procédure civile ;

2°/ que la nullité de la déclaration d'appel est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief ; que l'acte de saisine de la juridiction, même entaché d'un vice de procédure, interrompt les délais de prescription comme de forclusion ; que, dès lors, le vice de forme entachant la déclaration d'appel peut être régularisé jusqu'à ce que le juge statue ; que par conséquent, c'est au jour où le juge statue, qu'il doit apprécier l'existence d'un grief ; qu'en retenant que l'existence, au jour de la déclaration d'appel, d'un grief causé par la mention dans cet acte d'une adresse erronée du siège social de la société Aigle marin suffisait à justifier la nullité de la déclaration, sans rechercher si le grief subsistait au jour où ils statuaient, les juges du fond ont violé les articles 2241 du code civil et 115 du code de procédure civile ;

3°/ que la nullité entachant la déclaration d'appel est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief ; que dès lors, la date à laquelle le juge doit se placer pour apprécier l'existence d'un grief est nécessairement postérieure au jour de la déclaration d'appel ; qu'en retenant que l'existence, au jour de la déclaration d'appel, d'un grief causé par la mention dans cet acte d'une adresse erronée du siège social de la société Aigle marin suffisait à justifier la nullité de la déclaration d'appel (arrêt, p. 6, dernier §, et p. 7, §2), les juges du fond ont violé les articles 54, 57 et 901 du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, et les articles 114, 115 du même code. »

Réponse de la Cour Recevabilité du moyen

11. La société BS Invest Côte d'Azur et Mme [R] contestent la recevabilité du moyen. Elles soutiennent que le moyen, pris en ses trois branches, est nouveau et mélangé de fait et, partant, irrecevable.

12. Toutefois, le moyen est de pur droit dès lors qu'il ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond.

13. Il est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles 2241, alinéa 2, et 115 du code de procédure civile :

14. Il résulte du premier de ces textes que l'acte de saisine de la juridiction, même entaché d'un vice de procédure, interrompt les délais de prescription comme de forclusion.

15. Aux termes du second, la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief.

16. Il résulte de ces textes que la déclaration d'appel entachée d'un vice de forme, dont la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver l'existence d'un grief, interrompt le délai d'appel, de sorte que sa régularisation reste possible en dépit de l'expiration du délai d'appel.

17. Pour prononcer la nullité de la déclaration d'appel de la société Aigle marin, l'arrêt retient que la preuve est rapportée du grief causé, à cette date, par la mention dans cet acte d'une adresse erronée du siège social de la société et que la régularisation intervenue par des conclusions d'incident ne peut être prise en compte, étant postérieure à l'expiration du délai d'appel.

18. En statuant ainsi, alors que demeurait possible la régularisation de la déclaration d'appel qui, même entachée d'un vice de procédure, avait interrompu le délai d'appel, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi en tant qu'il est formé par M. [F] ;

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix- en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix- en-Provence autrement composée ;

Condamne la société BS Invest Côte d'Azur et M. [N], la société Office notarial [Adresse 7], anciennement dénommée SCP Pierre Mouzon - Jean-Paul Ricard - [T] [N] et Martine Godefroy-Jacquot, Mme [R] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par la société BS Invest Côte d'Azur et M. [N], la société Office notarial [Adresse 7], anciennement dénommée SCP Pierre Mouzon - Jean-Paul Ricard - [T] [N] et Martine Godefroy-Jacquot, et Mme [R] et les condamne in solidum à verser à M. [F] et la société Aigle marin la somme de 4 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par le président en l'audience publique du trois octobre deux mille vingt-quatre et signé par Mme Thomas, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.