CJUE, 4e ch., 7 novembre 2024, n° C-588/22 P
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Ryanair DA
Défendeur :
Commission européenne, République de Finlande
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
M. Lycourgos
Juges :
M. S. Rodin (rapporteur), Mme O. Spineanu-Matei,
Avocat général :
M. Szpunar
Avocats :
Me V. Blanc, Me F.-C. Laprévote, Me E. Vahida, Me D. Pérez de Lamo, Me S. Rating
1 Par son pourvoi, Ryanair DAC demande l'annulation de l'arrêt du Tribunal de l'Union européenne du 22 juin 2022, Ryanair/Commission (Finnair II ; Covid-19) (T 657/20, ci-après l'« arrêt attaqué », EU:T:2022:390), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision C(2020) 3970 final de la Commission, du 9 juin 2020, relative à l'aide d'État SA.57410 (2020/N) – Finlande – COVID-19 : Recapitalisation de Finnair (JO 2020, C 310, p. 6, ci-après la « décision litigieuse »).
Les antécédents du litige et la décision litigieuse
2 Les antécédents du litige, tels qu'ils ressortent de l'arrêt attaqué, peuvent être résumés comme suit.
3 Le 3 juin 2020, la République de Finlande a notifié à la Commission européenne, conformément à l'article 108, paragraphe 3, TFUE, un projet de mesure d'aide sous la forme d'une recapitalisation (émission de droits) d'un montant qui, en fonction des conditions définitives de la délivrance des droits, pouvait aller de 499 à 512 millions d'euros (ci-après la « mesure en cause »). Les nouvelles actions étaient offertes à tous les actionnaires de la bénéficiaire, Finnair plc, au prorata de leurs parts existantes dans son capital.
4 La mesure en cause est fondée sur l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE. Elle fait suite à l'octroi d'une garantie de l'État en faveur de Finnair que la Commission a déclarée, dans sa décision C(2020) 3387 final, du 18 mai 2020, relative à l'aide d'État SA.56809 (2020/N) – Finlande COVID 19 : Garantie de l'État accordée à Finnair (JO 2020, C 269, p. 2), compatible avec le marché intérieur, au regard des points 3.2 et 3.4 de la communication de la Commission du 19 mars 2020, intitulée « Encadrement temporaire des mesures d'aide d'État visant à soutenir l'économie dans le contexte actuel de la flambée de COVID-19 » (JO 2020, C 91 I, p. 1), telle que modifiée les 3 avril (JO 2020, C 112 I, p. 1) et 8 mai 2020 (JO 2020, C 164, p. 3) (ci-après l'« encadrement temporaire »). Cette garantie de l'État couvrait 90 % d'un prêt de 600 millions d'euros obtenu par Finnair auprès d'un fonds de pension.
5 Le 9 juin 2020, la Commission a adopté la décision litigieuse, par laquelle elle a déclaré la mesure en cause compatible avec le marché intérieur au titre de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE. À cet égard, la Commission a apprécié la compatibilité de chaque mesure faisant partie de l'opération globale, à savoir la garantie de l'État et la recapitalisation. En particulier, elle a examiné s'il existait des effets découlant du cumul des deux mesures et a vérifié si les éventuels effets cumulatifs étaient compatibles avec le marché intérieur.
Le recours devant le Tribunal et l'arrêt attaqué
6 Par une requête déposée au greffe du Tribunal le 30 octobre 2020, Ryanair a introduit un recours tendant à l'annulation de la décision litigieuse.
7 À l'appui de ce recours, Ryanair a soulevé quatre moyens, tirés, le premier, d'une violation de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, le deuxième, d'une violation des principes de non-discrimination en raison de la nationalité, de la libre prestation des services et de la liberté d'établissement, le troisième, d'une violation de ses droits procéduraux au motif que la Commission avait refusé d'ouvrir la procédure formelle d'examen en dépit de l'existence de doutes sérieux quant à la compatibilité de la mesure en cause avec le marché intérieur et, le quatrième, d'une violation de l'article 296, deuxième alinéa, TFUE.
8 Par l'arrêt attaqué, à titre liminaire, le Tribunal a jugé que le recours était recevable, dès lors que Ryanair était une partie intéressée ayant un intérêt à assurer la sauvegarde des droits procéduraux qu'elle tirait de l'article 108, paragraphe 2, TFUE et qu'elle faisait valoir, par le troisième moyen de ce recours, une violation de ses droits procéduraux.
9 S'agissant de ce troisième moyen, le Tribunal a considéré qu'il était habilité à examiner les arguments de fond présentés par la requérante dans le cadre des premier et deuxième moyens de son recours, auxquels celle-ci renvoyait dans ledit troisième moyen, afin de vérifier s'ils étaient de nature à conforter ce dernier, ayant trait à l'existence de doutes justifiant l'ouverture de la procédure formelle d'examen visée à l'article 108, paragraphe 2, TFUE.
10 S'agissant du quatrième moyen de ce recours, tiré du défaut de motivation dont la décision litigieuse aurait été entachée, le Tribunal a noté qu'un tel défaut relevait de la violation des formes substantielles et constituait un moyen d'ordre public qui devait être soulevé d'office par le juge de l'Union et ne se rapportait pas à la légalité au fond de cette décision.
11 Après avoir examiné et écarté, en premier lieu, le troisième moyen de Ryanair, en prenant en considération ses premier et deuxième moyens, ainsi que, en second lieu, son quatrième moyen, le Tribunal a rejeté ledit recours dans son intégralité.
Les conclusions des parties au pourvoi
12 Par son pourvoi, Ryanair demande à la Cour :
– d'annuler l'arrêt attaqué ;
– d'annuler la décision litigieuse ;
– de condamner, d'une part, la Commission à supporter ses propres dépens et ceux exposés par la requérante ainsi que, d'autre part, les parties intervenantes en première instance à supporter leurs propres dépens, ou, à titre subsidiaire,
– d'annuler l'arrêt attaqué, et
– de renvoyer l'affaire devant le Tribunal et de réserver les dépens.
13 La Commission demande à la Cour :
– de rejeter le pourvoi et
– de condamner la requérante aux dépens.
14 La République de Finlande demande à la Cour de rejeter le pourvoi.
Sur le pourvoi
15 À l'appui de son pourvoi, Ryanair soulève quatre moyens. Le premier moyen est tiré d'une erreur de droit et d'une dénaturation des faits que le Tribunal aurait commises en ne reconnaissant pas l'existence de « doutes sérieux » quant à l'application erronée de l'encadrement temporaire et de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE. Le deuxième moyen est tiré d'une erreur de droit et d'une dénaturation des faits que le Tribunal aurait commises en ne reconnaissant pas l'existence de « doutes sérieux » quant à la violation des principes de non-discrimination et de proportionnalité. Le troisième moyen est tiré d'une erreur de droit et d'une dénaturation des faits que le Tribunal aurait commises en ne reconnaissant pas l'existence de « doutes sérieux » quant à la violation des libertés fondamentales d'établissement et de prestation des services. Le quatrième moyen est tiré d'une erreur de droit que le Tribunal aurait commise en jugeant que la Commission n'avait pas violé l'obligation de motivation qui lui incombe en vertu de l'article 296, deuxième alinéa, TFUE et en ayant omis de motiver l'arrêt attaqué.
Sur le premier moyen
Argumentation des parties
16 Par son premier moyen, qui comprend quatre branches, Ryanair reproche au Tribunal d'avoir, aux points 25 à 131 de l'arrêt attaqué, commis des erreurs de droit et dénaturé les faits en rejetant les quatre premières branches du troisième moyen de son recours en première instance, tirées de ce que la Commission aurait dû éprouver des doutes sérieux quant à la violation, par la mesure en cause, de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE et de l'encadrement temporaire.
17 Par la première branche du premier moyen, Ryanair fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit et entaché l'arrêt attaqué d'une dénaturation des faits en concluant, au point 57 de l'arrêt attaqué, que la mesure en cause était nécessaire pour atteindre l'un des buts prévus à l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, à savoir remédier à une perturbation grave de l'économie finlandaise.
18 À cet égard, premièrement, le Tribunal aurait considéré à tort, aux points 29 à 31 de l'arrêt attaqué, que la mesure en cause pouvait être considérée comme étant compatible avec le marché intérieur en vertu de cette disposition, même si cette mesure n'était pas susceptible de remédier, à elle seule, à la perturbation grave de l'économie finlandaise occasionnée par la pandémie de COVID-19. En outre, contrairement à ce qui est, en substance, affirmé aux points 43 et 44 de l'arrêt attaqué, Ryanair n'aurait pas soutenu que le seul fait que Finnair ne soit ni une banque ni un gestionnaire de réseau de chemins de fer signifiait qu'elle n'était pas importante pour l'économie finlandaise.
19 Deuxièmement, le Tribunal aurait commis une erreur de droit et dénaturé les faits en ce que, aux points 39 à 41 de l'arrêt attaqué, il n'aurait pas dûment exercé son contrôle et aurait accepté telles quelles les constatations de la Commission sur l'importance de Finnair pour l'économie finlandaise. Selon Ryanair, le Tribunal a, notamment, ignoré le fait que la décision litigieuse comportait des informations qui auraient laissé penser que la contribution de Finnair à cette économie et à la connectivité de la Finlande n'était pas systémique, mais pouvait être remplacée partiellement ou intégralement, en particulier à court terme, ce qui ressortirait de certains éléments de fait avancés par Ryanair. En outre, le raisonnement du Tribunal serait entaché d'une erreur de droit en ce qu'il ferait peser systématiquement la charge de la preuve sur la requérante, alors que, selon les principes régissant la répartition de cette charge, la preuve de la compatibilité d'une aide avec le marché intérieur doit être apportée par la Commission et par l'État membre ayant notifié cette aide.
20 Troisièmement, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en considérant, aux points 49 à 53 de l'arrêt attaqué, que la Commission n'était pas tenue, aux fins de l'appréciation de la compatibilité de la mesure en cause avec le marché intérieur, de démontrer que, en l'absence d'une aide, Finnair aurait nécessairement cessé l'ensemble de ses activités. Le critère énoncé par le Tribunal, selon lequel il suffisait de constater que cette mesure était nécessaire au vu des graves difficultés que Finnair éprouvait pour maintenir ses activités du fait des risques qui pesaient sur sa solvabilité, constituerait un « affaiblissement critique » des conditions d'application de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE. Par ailleurs, l'affirmation du Tribunal, au point 53 de l'arrêt attaqué, selon laquelle Finnair avait cherché d'autres solutions de financement, semblables à celle que la requérante mentionnait dans ses écritures, avant d'adresser à la République de Finlande une demande écrite de recapitalisation, mais n'avait pas réussi à obtenir un financement, ne figurait pas dans la décision litigieuse.
21 Par la deuxième branche de son premier moyen, Ryanair reproche au Tribunal, en substance, d'avoir commis une erreur de droit et une dénaturation manifeste des éléments de preuve en considérant, aux points 59 à 103 de l'arrêt attaqué, que les caractéristiques de la mesure en cause étaient particulières et permettaient à la Commission de conclure à la compatibilité de cette mesure avec le marché intérieur, bien qu'elle ne remplît pas certaines exigences prévues au point 3.11 de l'encadrement temporaire.
22 Premièrement, contrairement à ce que le Tribunal a affirmé, les caractéristiques de la mesure en cause ne seraient pas « exceptionnelles » ou constitutives de « circonstances exceptionnelles » au sens de la jurisprudence rappelée au point 62 de l'arrêt attaqué. Si de simples circonstances « particulières » étaient de nature à justifier le non-respect, par la Commission, des règles énoncées par elle-même dans ses communications, elle serait à même d'ignorer régulièrement les exigences de l'encadrement temporaire. En outre, il ne pourrait pas résulter du fait que la Commission a modifié l'encadrement temporaire après l'adoption de la décision litigieuse qu'elle se soit, dans l'intervalle, conformée aux principes de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et d'égalité de traitement.
23 Deuxièmement, le Tribunal aurait, à tort, considéré, aux points 72 à 100 de l'arrêt attaqué, que les caractéristiques particulières de la mesure en cause justifiaient une dérogation à plusieurs exigences prévues par l'encadrement temporaire. En particulier, en rejetant l'argumentation de Ryanair tirée de ce que la Commission a violé l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE et l'encadrement temporaire en ce qu'elle a considéré qu'il pouvait être dérogé au mécanisme de hausse de la rémunération, à l'interdiction d'acquisition et à l'interdiction de versement de dividendes, prévus aux paragraphes 61, 74 et 77 de l'encadrement temporaire, le Tribunal aurait commis une erreur de droit et dénaturé les faits.
24 En premier lieu, aux points 72 à 82 de l'arrêt attaqué, le Tribunal aurait interprété de manière incorrecte l'encadrement temporaire et commis une erreur de droit en reprenant à son compte la conclusion de la Commission selon laquelle le mécanisme de hausse de la rémunération n'était pas nécessaire, et était même inadapté, dans la mesure où, après la recapitalisation, la part de la République de Finlande dans le capital de Finnair n'avait pas augmenté. Or, il ressortirait du paragraphe 56 de l'encadrement temporaire que l'objectif de ce mécanisme serait, en soi, non pas de réduire la part de l'État, mais de veiller à ce que les fonds ayant servi à la recapitalisation, et à l'aide que celle-ci comporte, soient, en fin de compte, remboursés, et à ce que les distorsions du marché engendrées par cette aide soient éliminées ou atténuées. Dans ce contexte, le Tribunal aurait, en outre, omis de prendre en compte certains faits. Ainsi, au point 74 de l'arrêt attaqué, le Tribunal aurait, sans que cela ressorte des paragraphes 61 et 62 de l'encadrement temporaire, affirmé à tort, en substance, que l'objectif dudit mécanisme est de rétablir le statu quo ante.
25 En deuxième lieu, aux points 85, 86, 89 et 90 de l'arrêt attaqué, le Tribunal aurait de manière erronée, et, en particulier, contrairement aux paragraphes 44 et 54 de l'encadrement temporaire, considéré que l'interdiction d'acquisition d'une participation visée à ces paragraphes jusqu'à ce que le bénéficiaire d'une mesure de recapitalisation réalisée dans le contexte de la pandémie de COVID 19 ait remboursé au moins 75 % des fonds correspondant à cette mesure n'était pas nécessaire pour inciter la République de Finlande à sortir du capital de Finnair, au motif qu'un tel remboursement conduirait cet État membre à réduire sa part dans le capital de cette société à un niveau inférieur à celui de la part qu'il détenait avant la pandémie de COVID 19. Par ailleurs, la requérante affirme que l'interdiction de procéder à des acquisitions durant une période de trois ans prévue par la mesure en cause ne suffit pas à remédier à l'erreur de la Commission.
26 En troisième lieu, le Tribunal aurait, aux points 93 à 95 et 99 de l'arrêt attaqué, considéré à tort que l'interdiction de verser des dividendes tant que les fonds ayant servi à la mesure de recapitalisation n'ont pas été remboursés intégralement n'était pas nécessaire pour inciter la République de Finlande à sortir du capital de Finnair « compte tenu des caractéristiques particulières de la mesure en cause ». De surcroît, le Tribunal aurait estimé, aux points 96 à 98 de l'arrêt attaqué, qu'« il était important dans le cas d'espèce de permettre le versement de dividendes dès lors que cela constituait une incitation pour les actionnaires privés et les investisseurs privés à souscrire de nouvelles actions », en particulier dans « un climat d'investissement morose », sans expliquer une telle justification de cette dérogation.
27 Par la troisième branche de son premier moyen, Ryanair reproche au Tribunal d'avoir commis des erreurs de droit, aux points 114 à 131 de l'arrêt attaqué, en écartant son argumentation quant au défaut d'appréciation, par la Commission, du caractère significatif du pouvoir de marché de Finnair, au sens du paragraphe 72 de l'encadrement temporaire.
28 Premièrement, le Tribunal aurait, sans procéder réellement à un contrôle juridictionnel effectif, largement repris l'argumentation de la Commission en affirmant, au point 117 de l'arrêt attaqué, que, « dès lors que la mesure [en cause] visait à maintenir dans la mesure du possible l'ensemble des activités de Finnair et qu'elle ne ciblait pas des liaisons particulières, il y [avait] lieu de constater qu'elle était susceptible de produire les mêmes effets sur toutes les combinaisons de liaisons que Finnair pouvait effectuer grâce aux créneaux horaires et aux autres actifs qu'elle parvenait à conserver ». Ce raisonnement ne correspondrait ni au libellé du paragraphe 72 de l'encadrement temporaire ni à la pratique de la Commission ou à la jurisprudence de la Cour et, en outre, comporterait une faille logique, dès lors que la décision litigieuse ne ferait mention d'aucun engagement de Finnair de maintenir toutes ses routes.
29 Deuxièmement, le Tribunal a, selon Ryanair, commis une erreur de droit et interprété de manière erronée l'encadrement temporaire en validant, aux points 120 à 124 de l'arrêt attaqué, sans appréciation ni explication adéquate, la conclusion de la Commission selon laquelle Finnair ne détenait pas un pouvoir de marché significatif à l'aéroport d'Helsinki (Finlande). Ce serait, notamment, à tort que le Tribunal a estimé, au point 124 de l'arrêt attaqué, que la requérante ne présentait aucun élément concret de nature à établir l'absence d'une contrainte concurrentielle exercée sur les différentes liaisons desservies par Finnair. En tout état de cause, Ryanair soutient avoir produit une série d'indices à cet effet.
30 Par la quatrième branche de son premier moyen, Ryanair reproche au Tribunal d'avoir commis une erreur de droit en écartant, aux points 104 à 111 de l'arrêt attaqué, son argumentation tirée d'une violation, par la Commission, de l'obligation de mise en balance des effets bénéfiques de la mesure en cause avec ses effets négatifs sur les conditions des échanges et sur le maintien d'une concurrence non faussée.
31 Plus particulièrement, l'appréciation du Tribunal, notamment au point 110 de l'arrêt attaqué, selon laquelle cette obligation ne s'appliquait pas s'agissant d'une aide octroyée au titre de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE reposerait sur une interprétation erronée, d'une part, de cette disposition, lue en combinaison avec l'article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, et, d'autre part, des points 20 et 39 de l'arrêt du 22 septembre 2020, Autriche/Commission (C 594/18 P, EU:C:2020:742), à laquelle le Tribunal aurait procédé aux points 106 et 107 de l'arrêt attaqué.
32 La Commission et la République de Finlande soutiennent que le premier moyen doit être rejeté comme étant dénué de fondement. La Commission estime, en outre, que ce moyen est en partie irrecevable.
Appréciation de la Cour
33 Il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que, par la décision litigieuse, la mesure en cause a été déclarée compatible avec le marché intérieur au titre de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, qui prévoit que peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur les aides « destinées [...] à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un État membre ».
34 Par le premier grief de la première branche de son premier moyen, Ryanair soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant, aux points 29 à 31 de l'arrêt attaqué, que cette disposition n'exigeait pas que la mesure en cause soit susceptible, à elle seule, de remédier à la perturbation grave de l'économie finlandaise.
35 À cet égard, si la dérogation au principe d'incompatibilité avec le marché intérieur des aides d'État prévue à l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE doit faire l'objet d'une interprétation stricte, les termes utilisés pour définir cette dérogation ne doivent cependant pas être interprétés d'une manière qui restreindrait indûment sa portée ou qui la priverait de ses effets. Une dérogation doit, en effet, être interprétée de manière conforme aux objectifs qu'elle poursuit (arrêt du 23 novembre 2023, Ryanair/Commission , C 209/21 P, EU:C:2023:905, point 88 et jurisprudence citée).
36 Or, il ne ressort nullement des termes de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, lus à la lumière de l'objectif de cette disposition, qui est de permettre aux États membres de remédier à une perturbation grave de leur économie, que pourraient uniquement être déclarées compatibles avec le marché intérieur, sur le fondement de ladite disposition, les aides qui garantissent à elles seules qu'il soit remédié à la perturbation grave de l'économie d'un État membre. En effet, une aide peut, le cas échéant, être destinée à remédier à une telle perturbation grave de l'économie et contribuer à remplir l'objectif expressément visé à ladite disposition sans pour autant suffire à elle seule à atteindre cet objectif (arrêt du 30 mai 2024, Ryanair/Commission , C 353/21 P, EU:C:2024:437, point 28).
37 À cet égard, la Cour a déjà jugé que, pour pouvoir être déclarée compatible avec le marché intérieur en vertu d'une dérogation au titre de l'article 107, paragraphes 2 et 3, TFUE, une mesure d'aide ne doit, notamment, que contribuer à la réalisation d'un objectif qui y figure (arrêt du 30 mai 2024, Ryanair/Commission , C 353/21 P, EU:C:2024:437, point 29 et jurisprudence citée).
38 En outre, l'interprétation de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE suggérée par Ryanair priverait cette disposition d'une grande partie de son effet utile. Si, pour pouvoir revendiquer l'application de ladite disposition, les États membres étaient tenus d'accorder des aides à l'ensemble des entreprises revêtant une importance particulière pour leur économie, de manière à ce que ces aides garantissent à elles seules qu'il soit remédié à la perturbation grave de l'économie concernée, sans pouvoir réserver lesdites aides à un nombre limité de ces entreprises, voire à une seule, ces États membres seraient souvent dissuadés d'octroyer des aides au titre de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, en raison des coûts qu'elles représenteraient (arrêt du 30 mai 2024, Ryanair/Commission , C 353/21 P, EU:C:2024:437, point 30 et jurisprudence citée).
39 Il s'ensuit que l'objectif poursuivi par l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE n'exclut pas qu'un État membre puisse, sans que cela soit dicté par une volonté de favoriser une entreprise par rapport à ses concurrents, choisir, pour des raisons objectives, de ne faire bénéficier qu'une seule entreprise d'une mesure adoptée au titre de cette disposition (arrêt du 30 mai 2024, Ryanair/Commission , C 353/21 P, EU:C:2024:437, point 31 et jurisprudence citée).
40 Il découle de ce qui précède que le Tribunal n'a commis aucune erreur de droit en considérant, aux points 30 et 31 de l'arrêt attaqué, que l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE n'exige pas que l'aide en cause soit susceptible, à elle seule, de remédier à la perturbation grave de l'économie de l'État membre concerné et que des aides d'État peuvent être autorisées au titre de cette disposition, sous forme de régimes d'aides ou d'aides individuelles, pourvu que toutes les conditions d'application de celle-ci soient réunies, si elles contribuent à remédier à cette perturbation grave de l'économie.
41 Il convient, dès lors, d'écarter le premier argument du premier grief de la première branche du premier moyen comme étant non fondé.
42 Dans la mesure où Ryanair conteste, en outre, par ce premier grief, l'énonciation figurant à la deuxième phrase du point 44 de l'arrêt attaqué, dont il ressortirait qu'elle a affirmé, en rapport avec des décisions antérieures de la Commission, que le seul fait que Finnair ne soit ni une banque ni un gestionnaire de réseau de chemins de fer signifie qu'elle n'était pas importante pour l'économie finlandaise, il suffit de constater que cette énonciation présente un caractère surabondant, puisqu'elle intervient après que, à la première phrase de ce point 44, le Tribunal a rejeté l'argumentation de la requérante relative à la pertinence de ces décisions, au motif que la légalité de la décision litigieuse devait être appréciée dans le seul cadre de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, et non à l'aune d'une prétendue pratique décisionnelle antérieure de la Commission.
43 Dès lors, il convient de rejeter le premier grief de la première branche du premier moyen comme étant en partie non fondé et en partie inopérant.
44 Dans la mesure où, par le deuxième grief de la première branche du premier moyen, Ryanair reproche au Tribunal d'avoir, aux points 39 à 41 de l'arrêt attaqué, commis une erreur de droit et de s'être livré à une dénaturation des éléments de fait qui lui étaient soumis lorsqu'il a examiné l'appréciation, dont procède la décision litigieuse, selon laquelle, compte tenu de l'importance de Finnair pour l'économie finlandaise, la mesure en cause était appropriée pour remédier à la perturbation grave de cette économie, il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, il résulte de l'article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE et de l'article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l'Union européenne que le Tribunal est seul compétent, d'une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l'inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d'autre part, pour apprécier ces faits (arrêt du 25 juin 2020, CSUE/KF , C 14/19 P, EU:C:2020:492, point 103 et jurisprudence citée).
45 Il s'ensuit que l'appréciation des faits ne constitue pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant le Tribunal, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (arrêt du 25 juin 2020, CSUE/KF , C 14/19 P, EU:C:2020:492, point 104 et jurisprudence citée).
46 Lorsqu'il allègue une dénaturation d'éléments de preuve par le Tribunal, un requérant doit, en application de l'article 256 TFUE, de l'article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l'Union européenne et de l'article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour, indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par celui-ci et démontrer les erreurs d'analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation. Par ailleurs, il est de jurisprudence constante qu'une dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu'il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêt du 25 juin 2020, CSUE/KF , C 14/19 P, EU:C:2020:492, point 105 et jurisprudence citée).
47 En l'espèce, Ryanair reproche, en substance, au Tribunal d'avoir fait sienne l'analyse de la Commission et de ne pas avoir vérifié si les preuves dont celle-ci disposait étayaient la conclusion à laquelle elle est parvenue. Or, force est de constater, d'une part, que, aux points 39 à 41 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a exercé son contrôle en examinant les preuves apportées par la Commission. D'autre part, dans le cadre de son allégation relative à une dénaturation des éléments de fait, Ryanair se limite à formuler de simples affirmations, sans démontrer une quelconque dénaturation que le Tribunal aurait commise dans son appréciation pour parvenir, sur le fondement d'un examen détaillé de la décision litigieuse à cet égard, figurant aux points 37 à 56 de cet arrêt, à la considération, figurant aux points 41 et 57 dudit arrêt, selon laquelle, du fait, notamment, de l'importance de Finnair pour l'économie finlandaise, la mesure en cause était appropriée pour remédier à la perturbation grave de cette économie occasionnée par la pandémie de COVID-19, conformément à l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE.
48 Pour autant que Ryanair soutient, en outre, que le Tribunal a, ce faisant, renversé la charge de la preuve, qui, selon elle, aurait dû peser sur la Commission, il convient de rappeler qu'il incombe en principe à la personne qui allègue des faits au soutien d'une demande ou d'un argument d'apporter la preuve de leur réalité (arrêt du 30 mai 2024, Ryanair/Commission , C 353/21 P, EU:C:2024:437, point 37 et jurisprudence citée).
49 Il s'ensuit que le deuxième grief de la première branche du premier moyen n'est pas fondé.
50 Le troisième grief de la première branche du premier moyen est tiré de ce que le Tribunal a, à tort, jugé, au point 49 de l'arrêt attaqué, que la Commission n'était pas tenue, aux fins d'apprécier la compatibilité de la mesure en cause avec le marché intérieur, de s'assurer que, en l'absence de cette mesure, Finnair aurait nécessairement cessé l'ensemble de ses activités.
51 Ainsi qu'il ressort de la jurisprudence citée au point 36 du présent arrêt, lorsque la Commission examine une mesure d'aide au regard de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, elle doit vérifier que cette mesure est nécessaire afin de contribuer à remédier à une perturbation grave de l'économie de l'État membre ayant adopté ladite mesure. Ainsi, en l'espèce, il revenait à la Commission, sous le contrôle du Tribunal, de déterminer si Finnair jouait un rôle important pour l'économie finlandaise et si la mesure en cause aurait contribué à remédier à la perturbation grave de cette économie causée par la pandémie de COVID-19. À cet égard, ainsi que le Tribunal l'a relevé, en substance, au point 49 de l'arrêt attaqué, et contrairement à ce que la requérante allègue, la cessation des activités de Finnair en l'absence d'intervention de la République de Finlande n'était pas la seule hypothèse permettant à la Commission de constater que la mesure en cause aurait contribué à remédier à une telle perturbation de ladite économie, dès lors que cet objectif peut aussi être atteint, notamment, lorsqu'il est démontré que l'entreprise concernée éprouve de graves difficultés pour maintenir ses activités du fait des risques qui pèsent sur sa solvabilité. Or, ainsi que le Tribunal l'a relevé aux points 50 et 51 de l'arrêt attaqué, la Commission a fait état de manière circonstanciée de ces difficultés et de ces risques dans la décision litigieuse.
52 C'est donc sans commettre d'erreur de droit que le Tribunal a pu considérer, au point 49 de l'arrêt attaqué, que la Commission n'était pas tenue de démontrer spécifiquement que, en l'absence de la mesure en cause, Finnair aurait nécessairement cessé l'ensemble de ses activités.
53 En ce que Ryanair fait, en outre, valoir que la circonstance évoquée par le Tribunal au point 53 de l'arrêt attaqué, concernant la recherche par Finnair d'autres solutions de financement, ne figure pas dans la décision litigieuse, il ressort, certes, de la jurisprudence de la Cour que, dans le cadre du contrôle de légalité visé à l'article 263 TFUE, la Cour et le Tribunal ne peuvent, en toute hypothèse, substituer leur propre motivation à celle de l'auteur de l'acte attaqué (arrêt du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 117 et jurisprudence citée).
54 Toutefois, il y a lieu de constater que, au considérant 87 de la décision litigieuse, la Commission a énoncé, en substance, que Finnair ne disposait d'aucun autre plan de recapitalisation potentiel susceptible de remplacer l'émission de droits. Ainsi, au point 53 de l'arrêt attaqué, le Tribunal s'est borné, dans sa réponse à l'argumentation de la requérante tirée de l'existence d'autres solutions de financement sur le marché et dans le cadre de son appréciation souveraine des faits et des éléments de preuve, à apporter certaines précisions à cet aspect déjà abordé dans la décision litigieuse, sans substituer sa propre motivation à celle de cette décision.
55 Il s'ensuit que le troisième grief de la première branche du premier moyen doit être écarté comme étant non fondé et que, par conséquent, la première branche du premier moyen doit être écartée dans son ensemble.
56 Par la deuxième branche du premier moyen, Ryanair reproche au Tribunal, en substance, d'avoir commis une erreur de droit et une dénaturation des éléments de preuve en considérant, aux points 59 à 103 de l'arrêt attaqué, que les caractéristiques de la mesure en cause étaient particulières et permettaient à la Commission de conclure à la compatibilité de cette mesure avec le marché intérieur, bien qu'elle ne remplît pas certaines exigences prévues au point 3.11 de l'encadrement temporaire, à savoir celles relatives, premièrement, à un mécanisme de hausse de la rémunération de l'État dans le but d'inciter le bénéficiaire d'une mesure de recapitalisation à racheter la participation souscrite par l'État, deuxièmement, à une interdiction d'acquisition de participation dans certaines entreprises et, troisièmement, à une interdiction de versement de dividendes.
57 À cet égard, il convient de rappeler, d'emblée, qu'il ressort d'une jurisprudence constante, visée par le Tribunal aux points 61 et 62 de l'arrêt attaqué, que, aux fins de l'appréciation de la compatibilité de mesures d'aide avec le marché intérieur, au titre de l'article 107, paragraphe 3, TFUE, la Commission bénéficie d'un large pouvoir d'appréciation dont l'exercice implique des évaluations complexes d'ordre économique et social (voir, en ce sens, arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a. , C 526/14, EU:C:2016:570, point 38 et jurisprudence citée).
58 Toutefois, en adoptant des règles de conduite, telles que celles instaurées par l'encadrement temporaire, afin d'établir les critères sur la base desquels elle entend évaluer la compatibilité avec le marché intérieur des aides envisagées par les États membres et en annonçant par leur publication qu'elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, cette institution s'autolimite dans l'exercice du pouvoir d'appréciation que, notamment, l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE lui confère à cet égard, et ne saurait, en principe, se départir de ces règles, sous peine de se voir sanctionner, le cas échéant, au titre d'une violation de principes généraux du droit, tels que l'égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime (voir, en ce sens, arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C526/14 , EU:C:2016:570 , points 39 et 40 ; voir également, par analogie, arrêt du 31 janvier 2023, Commission/Braesch e.a. , C 284/21 P, EU:C:2023:58, point 90).
59 Si, dans le domaine des aides d'État, la Commission est ainsi, en principe, tenue par les règles de conduite qu'elle adopte, telles que l'encadrement temporaire, toujours est-il que l'adoption de telles règles n'affranchit pas la Commission de son obligation d'examiner les circonstances spécifiques exceptionnelles qu'un État membre invoque, dans un cas particulier, afin de solliciter l'application directe de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE (voir, en ce sens, arrêts du 8 mars 2016, Grèce/Commission , C 431/14 P, EU:C:2016:145, point 72, ainsi que du 31 janvier 2023, Commission/Braesch e.a. , C 284/21 P, EU:C:2023:58, point 93).
60 Partant, les États membres conservent la faculté de notifier à la Commission des projets d'aides qui ne satisfont pas aux exigences fixées dans de telles règles de conduite et la Commission peut autoriser de tels projets dans des circonstances exceptionnelles (voir, en ce sens, arrêts du 19 juillet 2016, Kotnik e.a. , C 526/14, EU:C:2016:570, point 43, ainsi que du 31 janvier 2023, Commission/Braesch e.a. , C 284/21 P, EU:C:2023:58, point 92).
61 Il est d'ailleurs énoncé au point 16 de l'encadrement temporaire que « la notification de solutions [autres que celles envisagées par cet encadrement] – tant des régimes d'aides que des mesures individuelles – reste possible ».
62 En l'espèce, ainsi que le Tribunal l'a relevé au point 63 de l'arrêt attaqué, la République de Finlande avait notifié la mesure en cause à la Commission au titre de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE. Celle-ci a procédé à l'examen de cette mesure à la lumière du point 3.11 de l'encadrement temporaire, tout en considérant que certaines exigences qui y sont prévues, à savoir celles mentionnées au point 56 du présent arrêt, ne devaient pas être appliquées compte tenu des spécificités de la mesure en cause.
63 À cet égard, il convient de noter, à titre liminaire, que, dans le cadre de la deuxième branche de son premier moyen, Ryanair ne conteste pas que, dans des circonstances exceptionnelles au sens de la jurisprudence rappelée aux points 59 et 60 du présent arrêt, la Commission peut se départir de règles de conduite telles que l'encadrement temporaire lorsqu'elle apprécie la compatibilité d'une mesure d'aide avec le marché intérieur au titre de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE. Elle se borne à soutenir, en substance, que le Tribunal a commis une erreur de droit et dénaturé des faits en considérant, aux points 65 à 103 de l'arrêt attaqué, que, selon les appréciations effectuées à cet égard dans la décision litigieuse, les conditions d'une telle dérogation étaient remplies en l'espèce en ce qui concerne les exigences de l'encadrement temporaire mentionnées au point 56 du présent arrêt et que, par conséquent, il ne découlait pas du fait que celles-ci n'étaient pas respectées que la Commission aurait dû éprouver des doutes quant à la compatibilité de la mesure en cause avec le marché intérieur susceptibles de donner lieu à l'adoption d'une décision d'ouverture de la procédure formelle d'examen.
64 En ce que, par cette deuxième branche, la requérante critique l'appréciation du Tribunal selon laquelle les spécificités de la mesure en cause pouvaient constituer des circonstances exceptionnelles au sens de la jurisprudence rappelée aux points 59 et 60 du présent arrêt, il y a lieu de relever que cette appréciation n'est entachée d'aucune erreur de droit. En effet, le Tribunal a correctement appliqué cette jurisprudence en examinant si la Commission avait pu à bon droit constater qu'il existait en l'espèce des circonstances spécifiques exceptionnelles qui, dans un cas particulier, lui permettent d'autoriser une mesure d'aide au titre de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE alors qu'elle ne satisfait pas à toutes les exigences découlant de l'encadrement temporaire.
65 À cet égard, aux points 65 à 100 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a, à juste titre, examiné l'existence de telles circonstances au regard de tous les éléments pertinents de l'espèce, à savoir eu égard, d'une part, au contexte réglementaire plus général dans lequel s'inscrivait la mesure en cause et, d'autre part et plus particulièrement, aux spécificités propres à cette mesure.
66 Ainsi, au point 67 de l'arrêt attaqué, c'est de manière pertinente que le Tribunal a fait état, en ce qui concerne ce contexte, de celui de la pandémie de COVID-19, dans le cadre duquel l'encadrement temporaire ainsi que les mesures envisagées par les États membres ont été adoptés. Ledit contexte se caractérisait, ainsi que le Tribunal l'a relevé à ce point de l'arrêt attaqué, par des circonstances d'une particulière urgence et une évolution de la situation nécessitant une action immédiate tant au niveau des États membres qu'au niveau de l'Union européenne ainsi qu'une modification de cet encadrement à plusieurs reprises et à de courts intervalles, si bien que, dans ledit encadrement, la Commission n'envisageait pas toutes les mesures que les États membres étaient susceptibles d'adopter en faveur d'opérateurs économiques touchés par la crise concernée.
67 S'agissant des appréciations contenues aux points 72 à 100 de l'arrêt attaqué, Ryanair soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit et dénaturé des faits en jugeant que les caractéristiques de la mesure en cause permettaient à la Commission de se départir des exigences de l'encadrement temporaire mentionnées au point 56 du présent arrêt.
68 À cet égard, il convient de constater que, au point 68 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a identifié d'emblée l'existence de caractéristiques très particulières de la mesure en cause et a, à juste titre, annoncé, au point 69 de cet arrêt, l'examen des éléments que la requérante avait avancés devant lui, aux fins de vérifier si ces éléments étaient de nature à susciter des doutes quant à la compatibilité de cette mesure avec le marché intérieur. Le Tribunal s'est ensuite livré à une appréciation circonstanciée de la décision litigieuse en ce qui concerne les spécificités de ladite mesure.
69 Ainsi, en premier lieu, aux points 72 à 82 de l'arrêt attaqué, concernant l'exigence relative au mécanisme de hausse de la rémunération de l'État prévue par l'encadrement temporaire, le Tribunal a confirmé à bon droit l'appréciation de la Commission figurant dans la décision litigieuse selon laquelle ce mécanisme, eu égard à son objectif, consistant à inciter le bénéficiaire à racheter la participation souscrite par l'État, était inadapté aux recapitalisations telles que celle concernée en l'espèce, relatives à des entreprises déjà détenues en partie par l'État et dans lesquelles ce dernier et les investisseurs privés souscrivaient à l'augmentation de capital au prorata de leur participation antérieure, dès lors que son application obligerait la République de Finlande à réduire sa part dans le capital de Finnair à un niveau inférieur à celui existant avant la mise en œuvre de la mesure en cause.
70 Il importe, à cet égard, de relever que, ainsi que cela ressort du point 71 de l'arrêt attaqué, qui n'a pas été contesté par la requérante dans le cadre du présent pourvoi, cet examen du Tribunal fait suite à l'affirmation, non entachée d'erreur de droit, selon laquelle ni le libellé du paragraphe 61 de l'encadrement temporaire ni le contenu du point 3.11.7 de cet encadrement n'affranchissaient la Commission de son obligation de vérifier si le mécanisme de hausse de la rémunération était adapté au cas d'espèce, compte tenu des caractéristiques de la mesure en cause, et, si tel n'était pas le cas, d'appliquer directement l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE.
71 Or, dans le cadre d'une telle vérification, le Tribunal a conclu, au point 76 de l'arrêt attaqué, que, compte tenu des caractéristiques très particulières de la mesure en cause, la Commission a estimé à juste titre que l'exigence d'un mécanisme de hausse de la rémunération prévue aux paragraphes 61 et 62 de l'encadrement temporaire, qui incite le bénéficiaire de la mesure de recapitalisation à racheter la part de capital acquise par l'État, était inappropriée.
72 Cette conclusion n'est entachée d'aucune erreur de droit. En effet, ainsi que le Tribunal l'a affirmé au point 74 de l'arrêt attaqué, et contrairement à ce que la requérante soutient, l'objectif de ce mécanisme est le rétablissement du statu quo ante. Cela est, notamment, confirmé par le paragraphe 44 de l'encadrement temporaire, selon lequel les mesures de recapitalisation devraient se limiter « à rétablir la structure de capital qui était celle du bénéficiaire avant la flambée de COVID-19 », et, en tout état de cause, ne doivent pas dépasser le minimum nécessaire pour assurer la viabilité du bénéficiaire. Or, ainsi que le Tribunal l'a indiqué au point 75 de l'arrêt attaqué, le fait d'appliquer les paragraphes 61 et 62 de cet encadrement dans un contexte où l'État acquiert de nouvelles actions au prorata de sa participation antérieure, aurait pour conséquence de réduire sa participation au capital de l'entreprise bénéficiaire à un niveau inférieur à celui existant avant la mise en œuvre de la mesure en cause, ce qui entraînerait une modification de la structure du capital de cette entreprise.
73 Par ailleurs, s'agissant de l'examen par le Tribunal des autres arguments de la requérante relatifs à cette question, aux points 78 à 82 de l'arrêt attaqué, il suffit de constater que, ainsi qu'il ressort de ce point 82, le Tribunal a, en substance, effectué une appréciation des faits et des éléments de preuve lui ayant permis de conclure que, dans le cas particulier de Finnair, dans lequel la mesure d'aide est neutre pour la structure du capital de celle-ci, la participation concomitante du secteur privé est importante, la rémunération de l'État est suffisante et, partant, le risque de distorsion de concurrence est moindre, la Commission avait établi à suffisance de droit, dans la décision litigieuse, conformément à la jurisprudence citée au point 59 du présent arrêt, que le cas d'espèce se distinguait des situations visées par l'encadrement temporaire. Or, la requérante tente de remettre en cause cette appréciation, sans pour autant avancer une argumentation susceptible de démontrer une dénaturation de ces faits et de ces éléments de preuve que le Tribunal aurait commise, en conformité avec la jurisprudence rappelée au point 46 du présent arrêt.
74 En deuxième lieu, aux points 83 à 90 de l'arrêt attaqué, concernant l'exigence de l'encadrement temporaire relative à l'interdiction d'acquisition, par le bénéficiaire de l'aide, d'une participation supérieure à 10 % dans des entreprises concurrentes ou de la même ligne d'activité, tant qu'au moins 75 % des fonds ayant servi à des mesures de recapitalisation dans le contexte de la pandémie de COVID-19 n'ont pas été remboursés, le Tribunal a examiné de manière détaillée les appréciations de la Commission figurant dans la décision litigieuse et a considéré que l'application de cette exigence à la mesure en cause, par laquelle l'État n'augmentait pas sa part dans le capital de l'entreprise concernée, n'était pas appropriée, dès lors que ladite exigence aurait également pour conséquence d'obliger la République de Finlande à réduire sa part dans le capital de Finnair à un niveau inférieur à celui existant avant la pandémie de COVID-19.
75 À cet égard, d'une part, la requérante conteste cette considération du Tribunal en renvoyant aux arguments qu'elle a invoqués afin de contester les points 72 à 82 de l'arrêt attaqué. En particulier, elle soutient que le Tribunal a mal interprété les paragraphes 44 et 54 de l'encadrement temporaire ainsi que les objectifs généraux de celui-ci. Or, il suffit de relever que ces arguments ont été écartés dans le cadre de l'examen effectué ci-dessus de la critique de l'appréciation figurant à ces points 72 à 82 et que, en tout état de cause, dans le cadre de l'analyse figurant aux points 83 à 90 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a examiné la portée du paragraphe 74 de cet encadrement, et non de ces paragraphes 44 et 54.
76 D'autre part, s'agissant de l'argument de la requérante selon lequel l'interdiction de procéder à des acquisitions durant une période de trois ans, prévue par la mesure en cause, ne suffit pas à remédier à l'erreur que la Commission aurait commise en ne veillant pas au respect de l'exigence concernée, il y a lieu de constater que le Tribunal a, au point 88 de l'arrêt attaqué, affirmé que la requérante ne contestait pas, en tant que telle, la durée de cette interdiction, proposée par la République de Finlande et acceptée par la Commission. Or, dès lors que, dans le cadre du pourvoi, la requérante n'a pas contesté cette affirmation du Tribunal, elle ne saurait invoquer un tel argument qui n'a pas été soulevé en première instance.
77 En troisième lieu, aux points 91 à 99 de l'arrêt attaqué, concernant l'exigence relative à l'interdiction de verser des dividendes tant que les fonds correspondant à la mesure de recapitalisation n'ont pas été remboursés, le Tribunal a, notamment, fait état d'une caractéristique spécifique de la mesure en cause mentionnée dans la décision litigieuse, à savoir que cette mesure reposait sur une participation significative du secteur privé, de manière à ce que la part de l'État dans le capital de Finnair demeurât inchangée, et a considéré qu'il était important dans le cas d'espèce de permettre le versement de dividendes, dès lors que cela constituait une incitation pour les actionnaires privés et les investisseurs privés à souscrire de nouvelles actions et à fournir ainsi à Finnair de nouveaux capitaux privés, d'autant plus eu égard à la détérioration du climat des investissements dans le secteur aérien occasionnée par la pandémie de COVID-19.
78 En outre, au point 99 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a relevé en substance que, au demeurant, la requérante n'avait apporté aucun élément de nature à établir que la situation dans laquelle un État entre dans le capital d'une entreprise privée au moyen d'une mesure d'aide, augmentant ainsi nécessairement la part de cet État dans le capital de celle-ci, serait comparable à la situation en cause, caractérisée par un apport de capitaux tant publics que privés, dans les mêmes conditions et au prorata de la participation antérieure dans le capital de cette entreprise. Or, force est de constater que la requérante ne conteste pas de manière circonstanciée cette appréciation, mais se limite, à nouveau, à renvoyer aux arguments visant à contester les points 72 à 82 de l'arrêt attaqué, qui ont été écartés dans le cadre de l'examen de la critique de l'appréciation du Tribunal figurant à ces points, alors que l'appréciation figurant à ce point 99 suffit pour justifier la conclusion figurant au point 100 de l'arrêt attaqué, selon laquelle la décision litigieuse a établi à suffisance de droit, conformément à la jurisprudence citée au point 59 du présent arrêt, que le cas d'espèce se distinguait des situations visées par l'encadrement temporaire et que, par conséquent, le fait que la Commission a levé l'interdiction de verser des dividendes ne constituait pas un indice de l'existence de doutes quant à la compatibilité de la mesure en cause avec le marché intérieur.
79 Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur de droit que le Tribunal a pu considérer, au point 101 de l'arrêt attaqué, que le seul fait que la Commission a dérogé à l'application de certaines exigences de l'encadrement temporaire pour tenir compte des circonstances spécifiques exceptionnelles, au sens de la jurisprudence rappelée au point 59 du présent arrêt, de la mesure en cause ne saurait suffire à démontrer qu'elle aurait dû éprouver des doutes quant à la compatibilité de cette mesure avec le marché intérieur, qui auraient dû entraîner l'adoption d'une décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen.
80 Eu égard à ce qui précède, il convient d'écarter la deuxième branche du premier moyen comme étant non fondée.
81 S'agissant du premier grief de la troisième branche du premier moyen, premièrement, Ryanair reproche au Tribunal, en substance, d'avoir, au point 117 de l'arrêt attaqué, fait sienne une appréciation de la Commission et, ainsi, de ne pas avoir exercé un contrôle juridictionnel effectif. À cet égard, il convient de constater que le seul fait que le Tribunal a, dans le cadre de sa propre appréciation souveraine des faits, entériné une appréciation de la Commission pour parvenir à la conclusion que, dans la décision litigieuse, la Commission avait considéré à bon droit qu'elle pouvait déterminer le pouvoir de marché de Finnair en examinant la contrainte concurrentielle exercée sur cette compagnie aérienne dans les aéroports où elle détenait des créneaux horaires n'établit pas que le Tribunal n'a pas dûment exercé son contrôle juridictionnel à cet égard ou qu'il aurait, en particulier, méconnu les principes régissant la répartition de la charge de la preuve, tels que rappelés au point 48 du présent arrêt. En l'occurrence, il ressort des points 115 à 130 de l'arrêt attaqué que le Tribunal a effectué un examen suffisant de l'appréciation de la Commission figurant dans la décision litigieuse.
82 Deuxièmement, Ryanair n'a pas démontré en quoi l'appréciation figurant au point 117 de l'arrêt attaqué comporterait une erreur de droit, une telle erreur ne pouvant, notamment, pas ressortir d'une prétendue pratique décisionnelle antérieure de la Commission (voir, en ce sens, arrêt du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 33 et jurisprudence citée).
83 Enfin, troisièmement, s'agissant de l'argument selon lequel l'appréciation du Tribunal se serait écartée du libellé du paragraphe 72 de l'encadrement temporaire, il suffit de relever que, ainsi que l'a indiqué le Tribunal au point 114 de l'arrêt attaqué, qui n'a pas été contesté par la requérante dans le cadre du pourvoi, la notion de « pouvoir de marché significatif » figurant à ce paragraphe n'est pas définie par l'encadrement temporaire et celui-ci ne donne pas non plus d'indication quant à l'approche à suivre pour définir les marchés concernés. Par ailleurs, il y a lieu de constater que le constat figurant au point 116 de l'arrêt attaqué, selon lequel la mesure en cause permet à Finnair de conserver des créneaux horaires et des actifs qui peuvent être utilisés sur toutes ses routes, ne contient aucune faille logique, mais découle du constat selon lequel cette mesure vise au maintien de la viabilité de cette compagnie aérienne.
84 Il s'ensuit que le premier grief de la troisième branche du premier moyen doit être écarté comme étant non fondé.
85 Par le second grief de cette troisième branche, il est reproché au Tribunal, en substance, d'avoir, aux points 120 à 124 de l'arrêt attaqué, confirmé la conclusion de la Commission selon laquelle Finnair ne détenait pas un pouvoir de marché significatif à l'aéroport d'Helsinki, alors que la requérante aurait fourni des éléments de preuve allant dans le sens contraire. À cet égard, il suffit de constater que cette dernière vise ainsi, en réalité, à remettre en cause l'appréciation souveraine des faits et des éléments de preuve que le Tribunal a effectuée concernant cette conclusion, sans même invoquer une dénaturation, au sens de la jurisprudence rappelée au point 46 du présent arrêt, que le Tribunal aurait commise. Par conséquent, ce second grief doit être écarté comme étant irrecevable.
86 Il ressort de ce qui précède que la troisième branche du premier moyen doit être écartée comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondée.
87 Par la quatrième branche du premier moyen, Ryanair soutient, en substance, que le Tribunal a, notamment aux points 106 et 107 de l'arrêt attaqué, commis une erreur de droit en considérant que la Commission n'était pas contrainte, en vertu de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, de procéder à une mise en balance des effets bénéfiques de la mesure en cause avec ses effets négatifs sur les conditions des échanges et sur le maintien d'une concurrence non faussée.
88 À cet égard, il convient de relever que, au point 20 de l'arrêt du 22 septembre 2020, Autriche/Commission (C 594/18 P, EU:C:2020:742), la Cour a mis en exergue les différences entre les libellés de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE et de l'article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, et a relevé, en particulier, que seule la première de ces dispositions énonçait la condition selon laquelle l'aide en cause devait poursuivre un objectif d'intérêt commun. La Cour en a déduit que l'article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE ne subordonnait pas la compatibilité d'une aide à cette condition.
89 Pour un motif similaire, également fondé sur la comparaison de ces libellés, ainsi que le Tribunal l'a, en substance, jugé au point 106 de l'arrêt attaqué, en l'absence de référence, à l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, à la démonstration d'une absence d'altération des conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun et, donc, à la nécessité d'effectuer une mise en balance des effets bénéfiques et des effets négatifs de l'aide concernée, cette disposition ne saurait être interprétée, à la différence de l'article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, comme requérant que la Commission procède à une telle mise en balance aux fins d'apprécier la compatibilité de la mesure en cause avec le marché intérieur (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2023, Ryanair/Commission , C 209/21 P, EU:C:2023:905, point 85).
90 Cette différence d'appréciation de la compatibilité avec le marché intérieur des aides visées à l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE et de celles visées à l'article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE s'explique par la nature particulière des aides visées à l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, qui poursuivent des objectifs de caractère exceptionnel et d'un poids particulier consistant soit à promouvoir la réalisation d'un projet important d'intérêt européen commun, soit à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un État membre. Les mesures d'aide qui concourent à l'un de ces objectifs, sous réserve qu'elles soient nécessaires et proportionnées, peuvent donc être considérées comme assurant un juste équilibre entre leurs effets bénéfiques et leurs effets négatifs sur le marché intérieur et comme répondant, par conséquent, à l'intérêt commun de l'Union (arrêt du 23 novembre 2023, Ryanair/Commission , C 209/21 P, EU:C:2023:905, point 86).
91 Dès lors, puisque l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE reflète la mise en balance des effets des aides d'État visées à cette disposition à laquelle les auteurs du traité TFUE ont procédé, la Commission n'est pas tenue d'opérer une nouvelle mise en balance de ces effets lorsqu'elle examine la compatibilité d'une aide dont l'octroi est envisagé sur le fondement de ladite disposition (arrêt du 23 novembre 2023, Ryanair/Commission , C 209/21 P, EU:C:2023:905, point 87).
92 Eu égard à ce qui précède, le Tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en considérant, aux points 106 à 110 de l'arrêt attaqué, que la Commission n'était pas contrainte, en vertu de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, de procéder à une mise en balance des effets bénéfiques de la mesure en cause avec ses effets négatifs sur les conditions des échanges et sur le maintien d'une concurrence non faussée.
93 Il ressort de ce qui précède qu'il convient d'écarter la quatrième branche du premier moyen comme étant non fondée et que, par voie de conséquence, ce moyen doit être écarté dans son intégralité.
Sur le deuxième moyen
Argumentation des parties
94 Par son deuxième moyen, qui comporte trois branches et vise les points 132 à 149 de l'arrêt attaqué, Ryanair reproche au Tribunal d'avoir commis des erreurs de droit et une dénaturation des faits dans le cadre de l'examen du troisième moyen de son recours en première instance en tant que celui-ci portait sur une violation des principes de non-discrimination et de proportionnalité.
95 Par la première branche de ce moyen, Ryanair soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant, au point 138 de l'arrêt attaqué, qu'une aide individuelle instaure une différence de traitement, voire une discrimination, qui est inhérente à son caractère individuel. En jugeant qu'une aide individuelle ne saurait jamais revêtir un caractère discriminatoire, le Tribunal aurait écarté d'emblée toute analyse fondée sur la comparabilité afin d'apprécier l'existence d'une telle discrimination.
96 Par la deuxième branche de ce moyen, Ryanair fait valoir que le Tribunal n'a pas dûment appliqué le principe d'interdiction de toute discrimination fondée sur la nationalité, qui serait un principe essentiel de l'ordre juridique de l'Union. Bien que le Tribunal ait reconnu, au point 139 de l'arrêt attaqué, que la différence de traitement instituée par la mesure en cause, en ce qu'elle ne bénéficiait qu'à Finnair, pouvait être assimilée à une discrimination, il aurait considéré à tort qu'une telle discrimination ne devait être appréciée qu'au regard de de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, au motif que cette disposition constituait une disposition particulière prévue par les traités, au sens de l'article 18 TFUE.
97 Par la troisième branche dudit moyen, Ryanair soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit et une dénaturation des faits lorsqu'il a appliqué le principe de proportionnalité.
98 À cet égard, le Tribunal aurait considéré à tort, au point 146 de l'arrêt attaqué, que la Commission n'avait pas l'obligation d'examiner si la République de Finlande aurait dû élargir le cercle des bénéficiaires de la mesure en cause dès lors que la décision C(2020) 3387 final ainsi que la décision litigieuse établissaient à suffisance de droit la nécessité de préserver la contribution de Finnair à l'économie finlandaise. Le raisonnement du Tribunal figurant aux points 141 à 143 de l'arrêt attaqué consisterait, en substance, à affirmer qu'une société qui répond le mieux à l'objectif visé par une aide est en droit d'obtenir la totalité de cette aide au titre de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, sans tenir compte du fait que d'autres sociétés contribuent également de manière importante à cet objectif, ce qui irait à l'encontre du principe de proportionnalité.
99 La Commission et la République de Finlande soutiennent que le deuxième moyen doit être rejeté comme étant dénué de fondement.
Appréciation de la Cour
100 Il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que, selon une jurisprudence constante, la qualification d'une mesure nationale d'« aide d'État », au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE, requiert que toutes les conditions suivantes soient remplies. Premièrement, il doit s'agir d'une intervention de l'État ou au moyen de ressources d'État. Deuxièmement, cette intervention doit être susceptible d'affecter les échanges entre les États membres. Troisièmement, elle doit accorder un avantage sélectif à son bénéficiaire. Quatrièmement, elle doit fausser ou menacer de fausser la concurrence (arrêt du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 101 et jurisprudence citée).
101 C'est donc à l'égard de mesures présentant de telles caractéristiques et déployant de tels effets, en ce qu'elles sont susceptibles de fausser le jeu de la concurrence et de porter atteinte aux échanges entre les États membres, que l'article 107, paragraphe 1, TFUE énonce le principe d'incompatibilité des aides d'État avec le marché intérieur (arrêt du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 102).
102 En particulier, l'exigence de sélectivité découlant de l'article 107, paragraphe 1, TFUE suppose que la Commission établisse que l'avantage économique, pris au sens large, découlant directement ou indirectement d'une mesure donnée profite spécifiquement à une ou à plusieurs entreprises. Il lui incombe, pour ce faire, de démontrer, en particulier, que la mesure concernée introduit des différenciations entre les entreprises se trouvant, au regard de l'objectif poursuivi, dans une situation comparable. Il faut donc que l'avantage soit octroyé de façon sélective et qu'il soit susceptible de placer certaines entreprises dans une situation plus favorable que d'autres (arrêt du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 103 et jurisprudence citée).
103 Lorsque, comme en l'espèce, la mesure concernée est envisagée comme une aide individuelle, l'identification de l'avantage économique permet, en principe, de présumer de sa sélectivité (arrêt du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 104 et jurisprudence citée).
104 Il s'ensuit que, s'agissant de la première branche du deuxième moyen, par laquelle Ryanair conteste le point 138 de l'arrêt attaqué, le Tribunal n'a commis aucune erreur de droit en affirmant, en substance, à ce point, que, par sa nature, une aide individuelle instaure une différence de traitement, voire une discrimination, entre l'entreprise bénéficiaire de cette aide et toutes les autres entreprises se trouvant, au regard de l'objectif poursuivi par ladite aide, dans une situation comparable. En outre, contrairement à ce que Ryanair fait valoir, cette affirmation ne saurait être comprise en ce sens que le Tribunal a considéré qu'une aide individuelle, qui serait, selon lui, contraire au principe de non-discrimination, est néanmoins compatible avec le marché intérieur, dès lors qu'il a expressément précisé, à la fin dudit point, que le droit de l'Union permet aux États membres d'octroyer de telles aides, « pourvu que toutes les conditions prévues à l'article 107 TFUE soient remplies » (voir, en ce sens, arrêts du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 105, et du 30 mai 2024, Ryanair/Commission , C 353/21 P, EU:C:2024:437, point 61).
105 Il y a lieu, dès lors, d'écarter la première branche du deuxième moyen comme étant non fondée.
106 S'agissant de la deuxième branche du deuxième moyen, il importe de relever que l'article 107 TFUE établit, à ses paragraphes 2 et 3, certaines dérogations au principe d'incompatibilité des aides d'État avec le marché intérieur, évoqué au point 101 du présent arrêt, telles que celle énoncée à l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE concernant les aides destinées « à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un État membre ». Sont, ainsi, compatibles ou susceptibles d'être déclarées compatibles avec le marché intérieur des aides d'État octroyées dans les conditions prévues à ces dispositions dérogatoires, nonobstant le fait qu'elles présentent les caractéristiques visées au point 100 du présent arrêt et déploient les effets visés à ce même point .
107 Il s'ensuit que, sauf à priver lesdites dispositions dérogatoires de tout effet utile, des aides d'État qui sont octroyées en conformité avec ces conditions, c'est-à-dire aux fins d'un objectif qui y est reconnu et dans les limites de ce qui est nécessaire et proportionné à la réalisation de cet objectif, ne sauraient être jugées incompatibles avec le marché intérieur au regard des seules caractéristiques ou des seuls effets, visés au point 100 du présent arrêt, qui sont inhérents à toute aide d'État, à savoir, notamment, pour des raisons liées à ce que l'aide est sélective ou à ce qu'elle fausserait la concurrence (arrêts du 22 mars 1977, Iannelli & Volpi , 74/76, EU:C:1977:51, points 14 et 15 , ainsi que du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 107).
108 Par la deuxième branche de son deuxième moyen, Ryanair invoque une erreur de droit tirée de ce que le Tribunal n'a pas appliqué, au point 139 de l'arrêt attaqué, le principe de non-discrimination en raison de la nationalité consacré à l'article 18 TFUE, mais a examiné la mesure en cause au regard de l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE.
109 À cet égard, il convient de rappeler qu'il ressort de la jurisprudence de la Cour que la procédure prévue à l'article 108 TFUE ne doit jamais aboutir à un résultat qui serait contraire aux dispositions spécifiques du traité FUE. Ainsi, une aide qui, en tant que telle ou par certaines de ses modalités, viole des dispositions ou des principes généraux du droit de l'Union ne peut être déclarée compatible avec le marché intérieur (arrêts du 31 janvier 2023, Commission/Braesch e.a. , C 284/21 P, EU:C:2023:58, point 96, ainsi que du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 109).
110 Toutefois, en ce qui concerne spécifiquement l'article 18 TFUE, il est de jurisprudence constante que cet article n'a vocation à s'appliquer de manière autonome que dans des situations régies par le droit de l'Union pour lesquelles le traité FUE ne prévoit pas de règles spécifiques de non-discrimination (arrêts du 18 juillet 2017, Erzberger , C 566/15, EU:C:2017:562, point 25, et du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 110).
111 Dès lors que, ainsi qu'il a été rappelé au point 106 du présent arrêt, l'article 107, paragraphes 2 et 3, TFUE prévoit des dérogations au principe d'incompatibilité des aides d'État avec le marché intérieur, énoncé au paragraphe 1 de cet article, et admet ainsi, en particulier, des différences de traitement entre les entreprises, sous réserve de remplir les exigences prévues par ces dérogations, ces dernières doivent être considérées comme étant des « dispositions particulières » prévues par les traités, au sens de l'article 18, premier alinéa, TFUE (arrêts du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 111, et du 30 mai 2024, Ryanair/Commission , C 353/21 P, EU:C:2024:437, point 67).
112 Il s'ensuit que le Tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en considérant, au point 139 de l'arrêt attaqué, que l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE constituait une telle disposition particulière et qu'il convenait seulement d'examiner si la différence de traitement induite par la mesure en cause était permise au titre de cette disposition.
113 Eu égard à ce qui précède, il y a lieu d'écarter la deuxième branche du deuxième moyen comme étant non fondée.
114 Pour autant que, par la troisième branche de ce moyen, Ryanair fait grief au Tribunal d'avoir, au point 146 de l'arrêt attaqué, considéré à tort que la Commission n'avait pas l'obligation d'examiner si la République de Finlande aurait dû élargir le cercle des bénéficiaires de la mesure en cause au-delà de Finnair, il résulte de l'examen de la première branche du premier moyen du pourvoi, notamment du point 38 du présent arrêt, que, quand bien même l'octroi de cette mesure à d'autres entreprises aurait pu contribuer à la réalisation de l'objectif prévu à l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, cet État membre était en droit de limiter le bénéfice de ladite mesure à une seule entreprise.
115 Plus particulièrement, il découle de la jurisprudence de la Cour qu'une aide accordée au titre d'une des dérogations prévues à l'article 107, paragraphes 2 et 3, TFUE ne saurait être jugée disproportionnée, et, ainsi, incompatible avec le marché intérieur, du seul fait qu'elle ne bénéficie qu'à une seule entreprise (arrêt du 30 mai 2024, Ryanair/Commission , C 353/21 P, EU:C:2024:437, point 77 et jurisprudence citée).
116 Il s'ensuit que, en jugeant, au point 146 de l'arrêt attaqué, que la Commission n'était pas tenue d'examiner, pour apprécier la proportionnalité de la mesure en cause, si le cercle des bénéficiaires de celle-ci aurait dû être élargi, le Tribunal n'a commis aucune erreur de droit. En outre, aux points 140 à 145 de l'arrêt attaqué, le Tribunal, renvoyant, de plus, aux considérations détaillées qu'il a exposées aux points 37 à 41 de cet arrêt, a appliqué correctement le test de proportionnalité en ce qu'il a examiné si l'octroi de la mesure en cause uniquement à Finnair ne dépassait pas les limites de ce qui était approprié et nécessaire à la réalisation de l'objectif légitime poursuivi par la République de Finlande.
117 S'agissant, enfin, du grief tiré d'une dénaturation des faits que le Tribunal aurait commise, il y a lieu de constater que Ryanair n'avance aucun argument susceptible de démontrer que le Tribunal a dénaturé des faits, au sens de la jurisprudence rappelée au point 46 du présent arrêt, dans le cadre de son examen de la proportionnalité de la mesure en cause.
118 Eu égard à ce qui précède, la troisième branche du deuxième moyen et, par voie de conséquence, ce moyen dans son intégralité doivent être écartés.
Sur le troisième moyen
Argumentation des parties
119 Par son troisième moyen, Ryanair reproche au Tribunal d'avoir commis une erreur de droit et d'avoir dénaturé des faits en jugeant, au point 155 de l'arrêt attaqué, que la requérante n'avait pas établi que la mesure en cause constituait une entrave à la liberté d'établissement ou à la libre prestation des services et que cette entrave était injustifiée.
120 Par la première branche de ce moyen, Ryanair soutient que l'appréciation du Tribunal figurant à ce point 155, selon laquelle elle n'avait pas établi en quoi le caractère exclusif de la mesure en cause était de nature à dissuader des transporteurs aériens de s'établir en Finlande ou d'effectuer des prestations de services depuis ce pays et à destination de celui-ci, est contradictoire et erronée. Le fait que des compagnies aériennes soient exclues d'un avantage réservé à Finnair suffirait en effet à démontrer que la libre prestation des services et la liberté d'établissement sont découragées, sans qu'aucune autre démonstration soit requise.
121 Ryanair fait valoir qu'elle a démontré à suffisance de droit que la mesure en cause désavantageait, en pratique, les seuls transporteurs aériens ayant leur siège social dans un État membre autre que la Finlande. En effet, elle aurait fourni des éléments de preuve relatifs à l'effet restrictif de cette mesure sur la libre prestation des services.
122 Par la seconde branche de son troisième moyen, Ryanair soutient qu'elle a démontré que la restriction à la libre prestation des services et à la liberté d'établissement résultant de ladite mesure n'était pas justifiée. Le Tribunal aurait dû examiner si cette restriction était justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général, non discriminatoire et proportionnée par rapport à l'objectif d'intérêt général poursuivi.
123 La Commission et la République de Finlande soutiennent que le troisième moyen doit être rejeté comme étant dénué de fondement.
Appréciation de la Cour
124 Par les première et seconde branches du troisième moyen, qu'il convient d'examiner ensemble, Ryanair fait grief au Tribunal, en substance, d'avoir commis des erreurs de droit au point 155 de l'arrêt attaqué, en ce qu'il a examiné le fait que la mesure en cause ne profitait qu'à Finnair seulement au regard des critères de l'article 107 TFUE, au lieu de vérifier si cette mesure était justifiée au regard des motifs visés aux dispositions de ce traité relatives à la libre prestation des services ou à la liberté d'établissement.
125 À cet égard, ainsi qu'il a été rappelé au point 109 du présent arrêt, la procédure prévue à l'article 108 TFUE ne doit jamais aboutir à un résultat qui serait contraire aux dispositions spécifiques du traité FUE. Ainsi, une aide qui, en tant que telle ou par certaines de ses modalités, viole des dispositions ou des principes généraux du droit de l'Union ne peut être déclarée compatible avec le marché intérieur.
126 Toutefois, d'une part, les effets restrictifs qu'une mesure d'aide déploierait sur la libre prestation des services ou sur la liberté d'établissement ne constituent pas pour autant une restriction interdite par le traité FUE, dans la mesure où il peut s'agir d'un effet inhérent à la nature même d'une aide d'État, tel que son caractère sélectif (arrêt du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 132).
127 D'autre part, il ressort de la jurisprudence de la Cour que, lorsque les modalités d'une aide sont à ce point indissolublement liées à l'objet de l'aide qu'il ne serait pas possible de les apprécier isolément, leur effet sur la compatibilité ou l'incompatibilité de l'aide dans son ensemble avec le marché intérieur doit nécessairement être apprécié au moyen de la procédure prévue à l'article 108 TFUE (voir, en ce sens, arrêts du 22 mars 1977, Iannelli & Volpi , 74/76, EU:C:1977:51, point 14, ainsi que du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 133).
128 Or, en l'occurrence, le choix de Finnair en tant que bénéficiaire de la mesure en cause fait partie de l'objet de celle-ci et, en tout état de cause, quand bien même ce choix devrait être considéré comme constituant une modalité de cette mesure, Ryanair ne conteste pas qu'une telle modalité est indissolublement liée à cet objet, qui consistait à remédier à la perturbation grave de l'économie finlandaise occasionnée par la pandémie de COVID-19, en garantissant à Finnair suffisamment de liquidités pour maintenir sa viabilité et en évitant que son éventuelle faillite aggrave cette perturbation, compte tenu de l'importance de cette compagnie pour l'économie finlandaise. Il s'ensuit que l'effet sur le marché intérieur dudit choix ne peut pas faire l'objet d'un examen séparé de celui de la compatibilité de ladite mesure, dans son ensemble, avec le marché intérieur au moyen de la procédure prévue à l'article 108 TFUE (voir, par analogie, arrêt du 30 mai 2024, Ryanair/Commission , C 353/21 P, EU:C:2024:437, point 92).
129 Il résulte des motifs qui précèdent et de la jurisprudence rappelée au point 107 du présent arrêt que c'est sans commettre d'erreur de droit que le Tribunal a jugé, au point 155 de l'arrêt attaqué, en substance, que, pour établir que la mesure en cause constituait, en raison du fait qu'elle ne bénéficiait qu'à Finnair, une entrave à la libre prestation des services et à la liberté d'établissement, la requérante aurait dû démontrer, en l'espèce, que cette mesure produisait des effets restrictifs qui allaient au-delà de ceux qui sont inhérents à une aide d'État octroyée conformément aux exigences prévues à l'article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE (voir, par analogie, arrêts du 28 septembre 2023, Ryanair/Commission , C 320/21 P, EU:C:2023:712, point 135, et du 30 mai 2024, Ryanair/Commission , C 353/21 P, EU:C:2024:437, point 93).
130 Or, l'argumentation avancée par Ryanair à l'appui des première et seconde branches du troisième moyen vise, dans son ensemble, à critiquer le choix de Finnair en tant qu'unique bénéficiaire de la mesure en cause et les conséquences de ce choix, alors même que ce dernier est inhérent au caractère sélectif de cette mesure.
131 Pour le surplus, s'agissant de la dénaturation de certains faits invoquée par la requérante, il y a lieu de constater que celle-ci s'est limitée à formuler ce grief sans avancer aucun élément à l'appui de celui-ci.
132 Il résulte de ce qui précède que le troisième moyen doit être écarté.
Sur le quatrième moyen
Argumentation des parties
133 Par son quatrième moyen, Ryanair reproche au Tribunal d'avoir commis une erreur de droit en ce qu'il a jugé, aux points 160 à 168 de l'arrêt attaqué, que la Commission n'avait pas violé l'obligation de motivation qui lui incombe en vertu de l'article 296, deuxième alinéa, TFUE, et en ce qu'il a lui-même omis de motiver à suffisance de droit l'arrêt attaqué.
134 À cet égard, la requérante fait état de certains éléments que la Commission aurait omis d'expliquer ou qu'elle n'aurait pas appréciés dans la décision litigieuse, en violation de cette obligation. Par ailleurs, elle soutient que l'arrêt attaqué ne permettrait pas de « dissiper les doutes » qu'elle éprouve quant à ces éléments.
135 La Commission et la République de Finlande soutiennent que le quatrième moyen doit être rejeté comme étant dénué de fondement.
Appréciation de la Cour
136 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l'article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être adaptée à la nature de l'acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l'institution auteur de l'acte de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d'exercer son contrôle. L'exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l'espèce, notamment du contenu de l'acte, de la nature des motifs invoqués et de l'intérêt que les destinataires de l'acte ou d'autres personnes concernées directement et individuellement par celui-ci peuvent avoir à recevoir des explications. Il n'est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d'un acte satisfait aux exigences de l'article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l'ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêt du 2 septembre 2021, Commission/Tempus Energy et Tempus Energy Technology , C 57/19 P, EU:C:2021:663, point 198 ainsi que jurisprudence citée).
137 Lorsqu'il s'agit, plus particulièrement, comme en l'espèce, d'une décision, prise en application de l'article 108, paragraphe 3, TFUE, de ne pas soulever d'objections à l'égard d'une mesure d'aide, la Cour a déjà eu l'occasion de préciser qu'une telle décision, qui est prise dans des délais brefs, doit uniquement contenir les raisons pour lesquelles la Commission estime ne pas être en présence de difficultés sérieuses d'appréciation de la compatibilité de l'aide concernée avec le marché intérieur et que même une motivation succincte de cette décision doit être considérée comme étant suffisante au regard de l'exigence de motivation que prévoit l'article 296, deuxième alinéa, TFUE, pour autant qu'elle fasse apparaître de façon claire et non équivoque les raisons pour lesquelles la Commission a estimé ne pas être en présence de telles difficultés, la question du bien-fondé de cette motivation étant étrangère à cette exigence (voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2021, Commission/Tempus Energy et Tempus Energy Technology , C 57/19 P, EU:C:2021:663, point 199 ainsi que jurisprudence citée).
138 C'est au regard de ces exigences qu'il convient d'examiner si le Tribunal a commis une erreur de droit en estimant que la décision litigieuse était motivée à suffisance de droit.
139 Ryanair fait état d'éléments spécifiques sur lesquels la Commission, en méconnaissance de l'obligation de motivation lui incombant, ne se serait pas prononcée ou qu'elle n'aurait pas appréciés dans la décision litigieuse, à savoir l'importance systémique de Finnair dans la perspective de la remédiation à la perturbation grave de l'économie finlandaise occasionnée par la pandémie de COVID-19, la possibilité de remplacer Finnair par d'autres compagnies aériennes, le besoin de fonds propres pour pallier un problème de liquidité à court terme, la possibilité de recourir à d'autres options de financement sur le marché, les raisons pour lesquelles certaines caractéristiques de la mesure en cause constituaient des circonstances exceptionnelles, les raisons pour lesquelles le pouvoir de marché de Finnair n'avait pas été apprécié conformément à une pratique décisionnelle antérieure, la mise en balance des effets bénéfiques et négatifs de la mesure en cause ainsi que le respect, par cette mesure, des principes de non-discrimination, de liberté d'établissement et de libre prestation des services.
140 À cet égard, il ressort des points 160 à 166 de l'arrêt attaqué que, après avoir rappelé les critères à la lumière desquels la motivation de la décision litigieuse devait être appréciée, le Tribunal a énuméré une série d'éléments et exposé les raisons pour lesquelles ceux-ci soit n'étaient pas pertinents aux fins de cette décision, soit avaient été examinés dans ladite décision de telle manière que le raisonnement de la Commission fût compris.
141 Or, il n'apparaît pas que, par ces considérations, le Tribunal aurait méconnu les exigences de motivation relatives à une décision de la Commission, prise en application de l'article 108, paragraphe 3, TFUE, de ne pas soulever d'objections, telles qu'elles découlent de la jurisprudence rappelée aux points 136 et 137 du présent arrêt.
142 Il convient de relever, par ailleurs, que, dans son pourvoi, la requérante n'allègue pas qu'elle aurait expressément mis en cause devant le Tribunal l'insuffisance de la motivation des éléments de la décision litigieuse autres que ceux examinés aux points 161 à 166 de l'arrêt attaqué.
143 En outre, dans la mesure où l'argumentation avancée dans le cadre du quatrième moyen vise en réalité à démontrer que la décision litigieuse a été adoptée sur le fondement d'une appréciation insuffisante ou juridiquement erronée de la Commission, cette argumentation a trait au bien-fondé de cette décision plutôt qu'à l'exigence de motivation en tant que formalité substantielle, de telle sorte qu'elle doit être écartée au regard de la jurisprudence rappelée au point 137 du présent arrêt.
144 Il ressort de ce qui précède que le Tribunal n'a commis aucune erreur de droit en jugeant, aux points 160 à 167 de l'arrêt attaqué, que la décision litigieuse était motivée à suffisance de droit.
145 Enfin, il y a lieu de constater que Ryanair n'a avancé aucun argument susceptible de démontrer que le Tribunal aurait lui-même manqué à l'obligation de motivation lui incombant en examinant, à ces points de l'arrêt attaqué, le quatrième moyen du recours en première instance, l'affirmation de cette société selon laquelle l'arrêt attaqué ne lui aurait pas permis de « dissiper les doutes » qu'elle éprouve, à cet égard, quant à la décision litigieuse étant sans pertinence.
146 Il ressort de ce qui précède que le quatrième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
147 Aucun des moyens soulevés par la requérante n'ayant été accueilli, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son intégralité.
Sur les dépens
148 Aux termes de l'article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n'est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.
149 L'article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 184, paragraphe 1, de celui-ci, prévoit que toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en ses moyens et la Commission ayant conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission.
150 Conformément à l'article 184, paragraphe 4, dudit règlement, lorsqu'elle n'a pas, elle-même, formé le pourvoi, une partie intervenante en première instance ne peut être condamnée aux dépens dans la procédure de pourvoi que si elle a participé à la phase écrite ou orale de la procédure devant la Cour. Lorsqu'une telle partie participe à la procédure, la Cour peut décider qu'elle supporte ses propres dépens. La République de Finlande, partie intervenante en première instance, ayant participé à la procédure devant la Cour, il y a lieu de décider qu'elle supportera ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Ryanair DAC supporte, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.
3) La République de Finlande supporte ses propres dépens.