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Décisions

CA Riom, ch. com., 6 novembre 2024, n° 23/00896

RIOM

Arrêt

Autre

CA Riom n° 23/00896

6 novembre 2024

COUR D'APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°

DU : 06 Novembre 2024

N° RG 23/00896 - N° Portalis DBVU-V-B7H-GAJU

ACB

Arrêt rendu le six Novembre deux mille vingt quatre

Sur APPEL d'une décision rendue le 24 avril 2023 par le Tribunal judiciaire de CLERMONT-FERRAND (RG n° 22/01619 ch1 cab2)

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre

Mme Sophie NOIR, Conseiller

Madame Anne Céline BERGER, Conseiller

En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

SA immatriculée au RCS de Paris sous le n° 542 097 902

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentants : Me Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

(postulant) et Me Philippe METAIS et Elodie VALETTE du PARTNERSHIPS BRYAN CAVE LEIGHTON PAISNER (France) LLP, avocat au barreau de PARIS (plaidants)

APPELANTE

ET :

M. [K] [T] [F]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Christine ROUSSEL-SIMONIN de la SELARL DIAJURIS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Mme [E] [I]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Christine ROUSSEL-SIMONIN de la SELARL DIAJURIS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMÉS

DÉBATS :

Après avoir entendu en application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, à l'audience publique du 19 Septembre 2024, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame BERGER, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET :

Prononcé publiquement le 06 Novembre 2024 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige :

Le 30 septembre 2008, M. [K] [T] [F] et Mme [E] [I] ont souscrit un crédit Helvet Immo auprès de la société BNP Paribas Personal Finance, libellé en francs suisses (217 297,82 unités) et remboursable en euros (132 973 unités) sur une durée de 25 ans, avec un taux de change révisable d'un euro pour un franc suisse et soixante-et-un centimes. Le prêt stipulait au bénéfice des emprunteurs la faculté d'opter, tous les cinq ans (lors de la révision du taux), pour une monnaie de compte en euro (taux fixe ou révisable).

M. [F] et Mme [I], estimant avoir conclu un contrat abusivement déséquilibré en raison du risque de change, ont fait assigner la société BNP Paribas Personal Finance devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand par exploit d'huissier signifié le 15 décembre 2020.

Par jugement contradictoire du 24 avril 2023, le tribunal a :

- annulé les clauses « Description de votre crédit '', « Financement de votre crédit '', « Ouverture d'un compte interne en euros et d'un compte interne en francs suisses pour gérer votre crédit ''' « Opération de change '', et «Remboursement de votre crédit '' figurant au contrat de prêt conclu 30 septembre 2008 entre M. [F] et Mme [I], d'une part, et la société BNP Paribas Personal Finance, d'autre part ;

- condamné la société BNP Paribas Personal Finance à restituer à M. [F] et Mme [I] la totalité des sommes payées, et spécialement les intérêts, les primes d'assurance et les frais d'amortissement et de change ;

- condamné la société BNP Paribas Personal Finance à établir un décompte précis des sommes payées par M.[F] et Mme [I] et à le communiquer à ces derniers dans un délai de 30 jours suivant la signification du jugement ;

- dit que, passé ce délai, la société BNP Paribas Personal Finance sera redevable d'une astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- condamné M. [F] et Mme [I] à restituer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme prêtée soit 132 973 euros ;

- ordonné la compensation entre ces deux dettes ;

- annulé l''inscription d'hypothèque accessoire au prêt du 30 septembre 2008 ;

- condamné la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens ;

- condamné la société BNP Paribas Personal Finance à verser à M.[F] et Mme [I] ensemble la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a principalement jugé que les clauses litigieuses ne forment pas un ensemble clair et compréhensible ; que M. [F] et Mme [I] supportent un risque financier illimité, reflétant la parité des monnaies de compte et de paiement sans que leur cocontractante ne soit pareillement exposée ; que la faculté d'opter pour un prêt en euros ou un remboursement anticipé ne saurait compenser cet inconvénient majeur ; que la clause implicite d'indexation crée donc un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et présente un caractère abusif et doit être réputée non écrite ; qu'il convient de replacer les emprunteurs dans la situation qui aurait été la leur si les clauses n'avaient jamais existé ; que la société BNP Paribas Personal Finance est ainsi condamnée à restituer aux emprunteurs la totalité des sommes payées et M. [F] et Mme [I] à lui restituer la somme de 132'973 unités qui leur a été remise par la banque.

Par déclaration du 07 juin 2023, la société BNP Paribas Personal Finance a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 7 décembre 2023, la présidente de la troisième chambre civile et commerciale a rejeté la demande de radiation formée par M. [F] et Mme [I], celle-ci étant devenue sans objet.

Par conclusions déposées et notifiées le 11 juillet 2024, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour, au visa de l'article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, des articles L. 120-1, L. 132-1 et suivants du code de la consommation, du principe de la réparation intégrale du préjudice, des articles 1116, 1304 ancien et 2224 du code civil et des articles 31, 122, 699 et 700 du code de procédure civile, de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand le 24 avril 2023 en ce qu'il l'a condamnée au paiement de la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

- infirmer le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Paris le 11 mai 2023 en ce qu'il a l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- lui donner acte de ce qu'elle renonce à contester la demande d'annulation du contrat de prêt Helvet immo ;

- ordonner l'annulation du contrat de prêt de M. [F] et Mme [I] ;

- en conséquence, juger que les parties sont remises dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant de contracter, comme si le contrat de prêt n'avait jamais existé ;

- ordonner la restitution par M. [F] et Mme [I] de la contrevaleur en euros du capital libéré en francs suisses par application du taux de change initial, soit la somme de 132.973,00 euros ;

- juger qu'elle restituera l'ensemble des sommes qu'elle a perçues de M. [F] et Mme [I], en ce compris les intérêts, le capital et l'effet de la variation du taux de change ;

- ordonner la compensation entre les restitutions réciproques à opérer ;

- statuant de nouveau :

- sur la demande subsidiaire de nullité du contrat de prêt formée par M. [F] et Mme [I] sur le fondement du dol :

- à titre principal, juger que la demande de nullité du contrat de prêt pour dol est irrecevable ;

- à titre subsidiaire, débouter M. [F] et Mme [I] de leur demande de nullité du contrat de prêt pour dol ;

- à titre infiniment subsidiaire, si la cour décidait d'ordonner la nullité du contrat de prêt pour dol, d'ordonner le versement des restitutions réciproques entre les parties ;

- sur la demande infiniment subsidiaire de dommages et intérêts sur le fondement d'un prétendu manquement de sa part à son obligation d'information :

- à titre principal, juger que cette demande est irrecevable ;

- à titre subsidiaire, débouter M. [F] et Mme [I] de leur demande de dommages et intérêts ;

- à titre infiniment subsidiaire, si la cour jugeait qu'elle a manqué à son obligation d'information, débouter M. [F] et Mme [I] de leur demande de condamnation au paiement de dommages et intérêts formée à son encontre ;

- en tout état de cause :

- débouter M. [F] et Mme [I] de l'intégralité de leurs demandes ;

- lui donner acte de ce qu'elle renonce à toute demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [F] et Mme [I] aux entiers dépens.

Par conclusions déposées et notifiées le 20 septembre 2023, M. [F] et Mme [I] demandent à la cour, au visa des articles 1116 et 1147 du code civil dans sa version applicable au 30 septembre 2008 et de l'article L 212-1 du code de la consommation, de :

- à titre principal, déclarer non écrite car abusive, la clause de conversion contenue dans le prêt Helvet Immo souscrit par eux le 30 septembre 2008 ;

- à titre subsidiaire, prononcer la nullité du contrat de prêt ;

- en tout état de cause condamner la société BNP Paribas Personal Finance à la restitution de la totalité des sommes payées par eux dans l'intervalle, jusqu'à ce jour, spécialement les intérêts, primes d'assurance, amortissement et frais de change ;

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance à produire un nouvel échéancier en euros, avec indication de la somme restant due en capital à la date de la décision à intervenir avec intérêt au taux légal applicable au jour de l'assignation, sous astreinte de 50 euros par jour de retard une fois passé le délai de 30 jours à compter de la signification ;

- constater la nullité subséquente de l'inscription d'hypothèque accessoire au contrat de prêt en date du 30 septembre 2008 ;

- à titre infiniment subsidiaire, condamner la société BNP Paribas Personal Finance, à les indemniser de leur préjudice correspondant à la différence entre les sommes versées et restant à verser avec les sommes mentionnées dans le tableau d'amortissement prévisionnel du prêt litigieux ;

- en tout état de cause condamner la société BNP Paribas Personal Finance , au paiement de la somme de 10.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 septembre 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience le 19 septembre 2024.

MOTIFS :

Sur la demande d'annulation du contrat de prêt formée par M. [F] et Mme [I]':

L'article 4 du code de procédure civile dispose que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

En l'espèce, M. [F] et Mme [I] sollicitent dans le dispositif de leurs conclusions du 20 septembre 2023 de voir :

- à titre principal, déclarer non écrite car abusive, la clause de conversion contenue dans le prêt Helvet Immo souscrit par eux le 30 septembre 2008 ;

- à titre subsidiaire, prononcer la nullité du contrat de prêt.

Néanmoins, ce dispositif doit s'interpréter à la lumière des moyens qu'ils développent dans leurs conclusions. A cet égard, ils exposent dans leurs conclusions d'intimés que le tribunal devra déclarer non écrite la clause contenue dans le contrat Helvet Immo créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations respectifs des parties (page 9) puis ils en concluent que ces clauses abusives étant réputées non écrites et le contrat de prêt ne pouvant pas subsister sans elles, il y a lieu de prononcer l'annulation rétroactive du contrat de prêt litigieux (page 11).

Force est de constater que les intimés sollicitent bien l'annulation du contrat de prêt à laquelle la société BNP Paribas Personal Finance, aux termes de ses dernières conclusions du 11 juillet 2024, acquiesce.

Il convient donc, sans avoir à examiner les demandes de M. [F] et de Mme [I] tendant à voir déclarer non écrite la clause de conversion de l'acte de prêt ainsi qu'à voir prononcer la nullité du contrat de prêt, de constater cette renonciation de la société BNP Paribas Personal Finance.

Sur les conséquences de l'annulation du contrat de prêt :

S'agissant des conséquences de l'annulation du contrat de prêt, M. [F] et Mme [I] soutiennent que :

- la remise des parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient à la date de conclusion du prêt implique la restitution par la banque de la totalité des sommes qu'ils ont payées;

- il ne peut être prononcé de condamnation à leur encontre à restituer le capital effectivement débloqué par la banque lors de la signature du prêt (soit 132'973 euros) dans la mesure où la déchéance du terme du prêt n'a pas été prononcée par la banque ;

- la BNP devra leur fournir un nouvel échéancier avec indication de la somme restant due en capital à la date de la décision à intervenir, le taux d'intérêt légal applicable au jour de l'assignation se substituera au taux conventionnel et sans la majoration prévue à l'article L.313-3 du code monétaire et financier.

En réponse, la banque soutient que :

- lorsqu'un contrat de prêt est annulé, les emprunteurs sont tenus de restituer à la banque le capital prêté, tandis que la banque doit restituer toutes les sommes prélevées en exécution du contrat de prêt ; ce faisant les parties sont remises dans l'état dans lequel elles se trouvaient si le prêt n'avait pas existé ;

- l'annulation du prêt efface tout éventuel préjudice financier qui a été subi par l'emprunteur en raison de l'exécution du prêt ;

- M. [F] et Mme [I] auront à restituer le seul capital à l'exclusion de tout intérêt et frais perçus par la banque soit conformément à l'offre de prêt la somme de 132'973 euros correspondant à la contre-valeur en euros du montant effectivement décaissé (hors frais de change et autres frais) ;

- elle restituera les mensualités versées par les emprunteurs (incluant le capital, les intérêts et les frais de change) en exécution du prêt soit la somme de 131'147,56 euros arrêtée au 10 juin 2024';

- la cour ordonnera la compensation des sommes correspondant aux restitutions à opérer par la banque et par les emprunteurs.

Sur ce,

L'annulation d'un contrat entraîne la remise des parties dans l'état où elles se trouvaient avant la conclusion de ce contrat, qui n'est censé n'avoir jamais existé. Dans le cas d'un contrat de prêt, l'annulation emporte l'obligation pour chaque partie, prêteur et emprunteur, de restituer l'ensemble des sommes payées à l'autre en exécution du contrat. M. [F] et Mme [I] ne sont donc pas fondés à arguer de l'absence du prononcé de la déchéance du terme pour s'opposer à la restitution du capital débloqué par la banque lors de la signature du prêt.

En l'espèce, il est constant que, lors du déblocage du prêt, la société BNP Paribas Personal Finance a payé à M. [F] et Mme [I] la somme de 132 973 euros correspondant à la contre valeur en euros du montant qu'elle a décaissé. Ceux-ci sont donc condamnés à lui restituer cette somme.

De son côté, la société BNP Paribas Personal Finance sera condamnée à restituer à M. [F] et Mme [I] la totalité des sommes payées et spécialement les intérêts, les primes d'assurance et les frais d'amortissement et de change. La banque indique dans ses écritures que les emprunteurs ont payé la somme de 131 147,56 arrêtée au 10 juin 2024 au titre du capital, des intérêts et des frais de change, sans cependant en justifier par aucune pièce. En outre, le dispositif des conclusions de la société BNP Paribas Personal Finance indique seulement qu'elle sera tenue de restituer l'ensemble des sommes perçues de M. [F] et Mme [I] en ce compris les intérêts, le capital et l'effet de variation du taux de change sans mentionner aucune somme.

Dès lors, en l'absence d'éléments produits à hauteur de cour permettant de chiffrer les sommes versées par M. [F] et Mme [I], l'appelante sera condamnée, comme déjà ordonné par les premiers juges, à établir un décompte des sommes payées par les emprunteurs et à leur communiquer sous astreinte.

La compensation entre les dettes réciproques est ordonnée.

Enfin, le contrat étant anéanti, l'annulation du contrat d'hypothèque accessoire au prêt du 30 septembre 2008 sera confirmée.

Le jugement déféré sera donc intégralement confirmé.

Sur la demande subsidiaire de nullité du contrat de prêt pour dol :

Compte tenu de l'annulation du contrat de prêt à titre principal sur le fondement des clauses abusives, la demande subsidiaire de nullité du contrat de prêt pour dol est désormais sans objet.

Sur la demande en dommages-intérêts au titre du manquement à l'obligation d'information de la banque :

Au soutien de leurs demandes au titre du manquement à l'obligation d'information, les intimés font valoir que :

- il doit être tiré toutes les conséquences du jugement rendu par le tribunal correctionnel de Paris le 26 février 2020 ;

- il est manifeste que l'information donnée par la banque était insuffisante puisqu'elle n'exposait pas de manière transparente le fonctionnement concret du mécanisme de conversion de la devise étrangère ;

- ils n'ont pu évaluer les conséquences économiques et les risques qui en découlaient pour eux ce qui implique la réparation du préjudice dont ils ont souffert ;

- en l'espèce, ils ont vu leur prêt s'allonger de 5 ans et en septembre 2022 il restait à rembourser un capital de 143'553,17 euros alors même qu'ils ont emprunté une somme inférieure de 132'973 euros qu'ils remboursent depuis 2008 ;

- ils sollicitent donc la condamnation de la banque à les indemniser de leur préjudice correspondant à la différence entre les sommes versées et restant à verser avec les sommes mentionnées dans le tableau d'amortissement prévisionnel du prêt litigieux.

En réponse, la société BNP Paribas Personal Finance soutient que :

- dès lors qu'elle renonce à contester l'annulation du prêt sur le fondement des clauses abusives, les emprunteurs sont privés d'intérêt à agir en ce qui concerne leur demande fondée sur un prétendu manquement de la banque à son obligation d'information ;

- en présence d'un contrat anéanti rétroactivement, celui qui entend obtenir une condamnation à des dommages-intérêts ne peut invoquer les manquements contractuels pour engager la responsabilité de son contractant conformément à l'article 1178 du Code civil ;

- leur demande fondée sur un manquement de la banque à son obligation d'information est irrecevable pour cause de défaut d'intérêt à agir et de prescription ;

- en tout état de cause, seule la perte de chance de ne pas contracter pourrait être indemnisée et en l'espèce la preuve du préjudice invoqué au titre de la perte de chance n'est pas rapportée puisqu'il n'est pas démontré que les emprunteurs auraient bénéficié de conditions plus favorables en souscrivant un autre type de prêt.

Sur ce,

Lorsqu'un contrat est anéanti rétroactivement, il ne peut être invoqué des manquements contractuels pour engager la responsabilité de son contractant ( Cass. Civ.3ème 18 mai 2011 n° 10-11.721).

Néanmoins, en application de l'article 1178 dernier alinéa du code civil indépendamment de l'annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité extracontractuelle.

En l'espèce, M. [F] et Mme [I] invoquent un défaut d'information de la banque en visant les dispositions de l'article 1147 ancien du code civil relatif à une inexécution contractuelle.

Cependant, compte tenu de l'anéantissement du contrat, les intimés ne peuvent invoquer un manquement contractuel pour engager la responsabilité de la banque et ils seront déboutés de leur demande de versement de la différence entre les sommes versées et restant à verser avec les sommes mentionnées dans le tableau d'amortissement prévisionnel du prêt litigieux, demande au demeurant non chiffrée.

Enfin, si M. [F] et Mme [I] indiquent dans la partie discussion de leurs conclusions, qu'ils sollicitent à titre subsidiaire l'indemnisation de leur préjudice à hauteur de 130 000 euros au titre de la perte de chance de ne pas contracter, la cour constate que cette demande n'est pas reprise dans le dispositif de leurs conclusions de sorte qu'elle n'en est pas saisie. En effet, selon l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La société BNP Paribas Personal Finance, qui succombe pour l'essentiel, sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel.

La société BNP Paribas personal Finance demande, dans son dispositif, à la cour d'infirmer le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Paris le 11 mai 2023 (RG 13/06722) en ce qu'il l'a débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Néanmoins, la cour ne peut statuer sur cette demande, n'étant pas saisie d'un appel de cette décision.

Enfin, la société BNP Paribas Personal Finance sera condamnée à payer à M. [F] et Mme [I] la somme de 3 000 euros au titre de leurs frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant :

Constate que la société BNP Paribas Personal Finance acquiesce à la demande de M. [K] [T] [F] et Mme [E] [I] d'annulation du contrat de prêt conclu le 30 septembre 2008 fondée sur la stipulation de clauses abusives ;

Prononce l'annulation du contrat de prêt conclu le 30 septembre 2008 entre la société BNP Paribas Personal Finance et M. [K] [T] [F] et Mme [E] [I] ;

Dit que la demande subsidiaire de nullité du contrat de prêt pour dol est sans objet ;

Déboute M. [K] [T] [F] et Mme [E] [I] de leur demande d'indemnisation pour manquement de la banque à son obligation d'information ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [K] [T] [F] et Mme [E] [I] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens d'appel.

Le greffier, La présidente,