Décisions
CA Paris, Pôle 3 - ch. 1, 6 novembre 2024, n° 23/16163
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRET DU 06 NOVEMBRE 2024
(n° 2024/ , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/16163 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIKKR
Décisions déférées à la Cour :
Arrêt du 23 Mars 2022 - Cour de cassation - Arrêt n°267 F-B
Arrêt du 12 Juin 2019 - Cour d'appel de PARIS - Pôle 3-1 - RG n° 18/07430
Jugement du 23 Février 2018 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/18351
DEMANDEUR
Madame [Z] [R]
née le [Date naissance 8] 1960 à [Localité 17] (PORTUGAL)
[Adresse 7]
représentée par Me Johanna BISOR BENICHOU de la SELARL LACROIX AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0504
DEFENDEURS
Madame [D] [N] épouse [P]
née le [Date naissance 6] 1960 à [Localité 13] (92)
[Adresse 2]
Madame [I] [N] épouse [E]
née le [Date naissance 5] 1962 à [Localité 13] (92)
[Adresse 16]
Monsieur [S] [N]
né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 13] (92)
[Adresse 11](SUISSE)
représentés par Me Françoise HERMET LARTIGUE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0716
Monsieur [K] [A], auquel la déclaration de saisine, l'avis de fixation et les conclusions de l'appelant ont été signifiés par acte d'huissier du 30/11/2023 selon procès-verbal de recherches infructueuses
né le [Date naissance 3] 1951 à [Localité 15]
[Adresse 9]
défaillant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Septembre 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller faisant fonction de Président, chargée du rapport, et M. Bertrand GELOT, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller faisant fonction de Président
Monsieur Bertrand GELOT, Conseiller
Mme Patricia GRASSO, Magistrat honoraire
Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON
ARRÊT :
- rendu par défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller faisant fonction de Président, et par Mme Emilie POMPON, Greffier, présentes lors de la mise à disposition.
***
EXPOSE DU LITIGE :
[H] [A], dont le dernier domicile était situé à [Localité 14], est décédé le [Date décès 4] 2016 sans descendance.
[H] [A] a exprimé ses dernières volontés :
dans un testament authentique reçu le 17 décembre 2013 par Me [U] [J], notaire à [Localité 12] (Yvelines), par lequel le défunt a institué légataires universels [D] [N], [I] [N] et [S] [N] à charge pour eux de délivrer divers legs particuliers au profit notamment de Mme [Z] [R] et de M. [K] [A], ce testament révoquant toutes dispositions antérieures ;
dans un testament olographe daté du 1er avril 2014 qui institue son neveu M. [K] [A] et Mme [Z] [R] comme légataires universels à charge pour eux de délivrer divers legs particuliers, notamment aux consorts [N], et qui révoque toutes dispositions antérieures.
Puis après avoir confirmé la validité de son testament authentique dans un codicille du 11 octobre 2014, puis celle de son testament olographe dans des écrits du 21 octobre et 9 décembre 2014, tous révoquant successivement toutes dispositions ultérieures, [H] [A] a rédigé le 13 décembre 2014 le dernier codicille suivant :
« Je soussigné [H] [A] né le 9/11/1926 à [Localité 10] (92) confirme le testament authentique reçu par Me [J] le 17 décembre 2013 et je révoque toutes dispositions que j'aurais pu faire ultérieurement - Fait à [Localité 14] le 13 décembre 2014. Signé : [H][A] »
Un désaccord oppose depuis les légataires successivement désignés quant à la validité des dernières volontés de [H] [A].
Par jugement contradictoire du 23 février 2018, le Tribunal de grande instance de Paris a :
débouté M. [K] [A] et Mme [Z] [R] de leur demande de nullité des testaments olographes des 11 octobre et 13 décembre 2014 ;
dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
rejeté toute autre demande ;
condamné M. [K] [A] et Mme [Z] [R] aux entiers dépens.
Par déclaration en date du 9 avril 2018, M. [K] [A] et Mme [Z] [R] ont interjeté appel de ce jugement.
Par arrêt du 12 juin 2019, la Cour d'appel de Paris, a :
confirmé le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le legs à Mme [Z] [R],
Y ajoutant,
dit que le legs particulier au profit de Mme [Z] [R] aux termes du testament du 17 décembre 2023 se heurte à l'interdiction résultant des dispositions des articles L.116-4 du code de l'action sociale et des familles ;
dit que Mme [D] [N] épouse [P], Mme [I] [N] épouse [E] et M. [S] [N] sont déchargés de toute obligation de délivrance du legs au profit de Mme [Z] [R] ;
débouté M. [K] [A] et Mme [Z] [R] de leur demande au titre des pénalités et majorations au profit de l'administration fiscale ;
vu l'article 700 du code de procédure civile, rejeté les demandes formées par M. [K] [A] et Mme [Z] [R], ainsi que par Mme [D] [N] épouse [P], Mme [I] [N] épouse [E] et M. [S] [N] ;
rejeté toute autre demande ;
condamné M. [K] [A] et Mme [Z] [R] aux entiers dépens.
Mme [Z] [R] a formé pourvoi en cassation contre cet arrêt.
Par arrêt du 23 mars 2022, la Cour de cassation a :
cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il dit que le legs à titre particulier au profit de Mme [R] aux termes du testament du 17 décembre 2013 se heurte à l'interdiction résultant des dispositions de l'article L. 116-4 du code de l'action sociale et des familles et que Mmes [D] et [I] [N], ainsi que M. [S] [N] sont déchargés de toute obligation de délivrance du legs au profit de Mme [R] et rejette la demande de Mme [R] au titre des pénalités et majorations au profit de l'administration fiscale, l'arrêt rendu le 12 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remis, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyés devant la Cour d'appel de Paris autrement composée ;
condamné Mmes [D] et [I] [N], ainsi que M. [S] [N] aux dépens ;
rejeté la demande formée par Mmes [D] et [I] [N] et M. [S] [N] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les a condamnés à payer à la SARL Delvolvé et Trichet la somme de 3.000 € en application de cet article ;
dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé.
Par déclaration de saisine du 28 septembre 2023, Mme [Z] [R] a saisi la Cour d'appel de Paris en tant que cour de renvoi.
Mme [Z] [R] a remis ses premières conclusions d'appelante le 18 octobre 2023.
Les Consorts [N] ont remis leurs premières conclusions d'intimés le 25 mars 2024.
Saisi le 25 mars 2024 par les consorts [N] d'un incident l'irrecevabilité des demandes de l'appelant sur le fondement de l'article 542 du code de procédure civile, le magistrat chargé de la mise en état, par ordonnance du 15 mai 2024 a :
débouté Mmes [D] et [I] [N] ainsi que M. [S] [N] de leur demande d'irrecevabilité ;
dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
réservé les dépens de l'incident.
Aux termes de ses dernières conclusions remises et notifiées le 10 juin 2024, Mme [Z] [R] demande à la Cour de :
l'accueillir en ses présentes conclusions, l'y déclarer recevable et bien fondée ;
Et y faisant droit,
confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu la validité du testament du 13 décembre 2014, et partant celui du 17 décembre 2013 et en ce qu'il a rejeté la demande des consorts [N] de voir déclarer nul le legs particulier qui lui a été consenti par [H] [A] au visa de l'article L.116-4 du code de l'action sociale et des familles ;
infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de la prise en charge des éventuelles pénalités de retard ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
débouter les Consorts [N] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions;
lui donner acte de ce qu'elle se désiste de son action relative à la délivrance du legs;
condamner in solidum Mme [D] [N] épouse [P], Mme [I] [N] épouse [E], et M. [S] [N] à lui payer les pénalités et majorations fiscales qui pourraient être mises à sa charge par l'administration fiscale du fait du paiement tardif des droits de succession afférents à son legs ;
condamner en conséquence Mme [D] [N] épouse [P], Mme [I] [N] épouse [E], et M. [S] [N] à lui régler la somme de 40.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi du fait du retard de délivrance du legs ;
condamner in solidum Mme [D] [N] épouse [P], Mme [I] [N] épouse [E] et M. [S] [N] à lui payer la somme de 6.720 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamner les intimés aux entiers dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions d'intimés remises et notifiées le 21 juin 2024, les Consorts [N] demandent à la Cour de :
déclarer irrecevables au visa de l'article 542 du code de procédure civile les demandes de l'appelante aux fins de confirmation ;
déclarer également irrecevables les demandes d'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [R] de sa demande au titre de la prise en charge d'éventuelles pénalités de retard, cette demande n'ayant jamais été formulée en première instance, Mme [R] faisant valoir à l'époque qu'elle était légataire universelle et que les consorts [N], pour se prévaloir eux-mêmes de la même qualité, auraient été responsables d'une éventuelle pénalité de retard dans l'acquittement des droits successoraux ;
déclarer en conséquence irrecevable Mme [R] dans ses demandes nouvelles en cause d'appel, en outre sans objet, Mme [R] en l'état de l'arrêt rendu par la Cour de Cassation et au vu du jugement dont appel étant bénéficiaire d'un legs particulier net de tous droits successoraux ;
déclarer irrecevable Mme [R] en l'intégralité de ses demandes additionnelles en délivrance de legs et en condamnation sous astreinte, ainsi qu'au titre de l'article 700, en l'absence de demande de délivrance au notaire chargé de la succession ;
En tout état de cause,
déclarer Mme [R] mal fondée en l'intégralité de ses demandes, les consorts [N] ne s'étant jamais opposés à la délivrance du legs sollicité par Mme [R],
condamner Mme [R] à leur payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, lesquels pourront être recouvrés par Me Hermet Lartigue, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 juin 2024.
L'affaire a été appelée à l'audience du 11 septembre 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Il résulte de ces différentes décisions de justice que la succession de [H] [A] est gouvernée par les dispositions testamentaires du codicille du 13 décembre 2014 qui a confirmé le testament reçu le 17 décembre 2013 par acte authentique, lequel a institué Mme [D] [N], Mme [I] [N] et M. [S] [N] légataires universels et gratifié Mme [Z] [R] et M. [K] [A] d'un legs particulier chacun.
Mme [R] indique qu'en cours de procédure, soit le 27 mai 2024, les consorts [N] ont procédé au règlement de la somme de 60 159,06 € au titre du legs particulier dont elle a été gratifiée à hauteur de son montant nominal s'élevant à la somme de 60 000 €. Du fait de ce règlement, Mme [R] déclare se désister de sa demande en délivrance du legs particulier qui lui a été consenti par le testament au 17 décembre 2013 confirmé par le codicille du 13 décembre 2014.
Sur la recevabilité de la demande de Mme [R] de confirmation de certains chefs du jugement
Se fondant sur l'article 542 du code civil, les consorts [N] soulèvent l'irrecevabilité de la demande de Mme [R] de confirmation du jugement au motif qu'elle ne tend pas à la réformation ou à l'annulation du jugement ; ils précisent que ce faisant Mme [R] acquiesce au jugement et à l'arrêt de la cour d'appel en ses chefs non cassés portant sur la validité du testament du 13 décembre 2014 et 17 décembre 2013.
L'appel tendant à la réformation ou l'annulation du jugement, en l'absence de demande de réformation ou d'annulation d'un chef du jugement, l'appel est sans d'objet relativement à ce chef. De surcroît, Mme [Z] [R] est dépourvue d'intérêt à agir à demander la confirmation d'un chef de jugement dont la réformation ou l'annulation n'est pas demandée.
Il ne sera pas statué sur une demande qui n'a pas d'objet.
Sur les demandes de Mme [R] au titre des pénalités et majorations fiscales et de la réparation du préjudice subi
Mme [R] qui expose avoir sollicité devant la cour d'appel que soient mises à la charge des consorts [N] les éventuelles pénalités et majorations qui pourraient lui être réclamées par l'administration fiscale en raison du retard du paiement des droits de succession, estime que ces derniers ont commis une faute en s'opposant à la délivrance de son legs sur le fondement d'une loi entrée en vigueur postérieurement aux dispositions testamentaires l'instaurant légataire à titre particulier et demande sur le fondement de l'article 1240 du code civil réparation de ce préjudice par leur condamnation in solidum à lui payer les pénalités et majorations fiscales qui pourraient être mises à sa charge par l'administration fiscale.
Elle prétend également avoir subi un préjudice résultant du retard dans l'exécution de son legs imputable aux consorts [N] et demande à ce titre des dommages-intérêts d'un montant de 40 000 €.
Les consorts [N] exposent que dans l'instance devant la cour d'appel ayant abouti à l'arrêt partiellement cassé du 12 juin 2019, Mme [Z] [R] se prévalait exclusivement de sa qualité de légataire universel, n'ayant présenté aucune demande en sa qualité de légataire particulier ; ils soulèvent sur le fondement de l'article 910-4 du code de procédure civile l'irrecevabilité de sa demande présentée devant la cour de renvoi au titre des majorations et pénalités qui pourraient lui être appliquées en sa qualité de légataire particulier, ajoutant de surcroît que le legs qui lui a été consenti est net de tous droits.
L'article 910-4 du code de procédure civile dispose qu' « à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès leurs premières conclusions mentionnées aux articles 905-2, 908 et 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
Le principe de concentration des prétentions qui découle de l'article 910-4 du code de procédure civile s'applique devant la cour d'appel de renvoi.
Certes, il est de règle qu'une demande faite sous une autre qualité que celle sous laquelle elle avait été initialement formulée équivaut à une nouvelle prétention. Cependant, devant le tribunal, les consorts [N] demandaient à titre reconventionnel la nullité du legs particulier consenti à Mme [Z] [R]. Le jugement n'ayant pas fait droit à la leur demande à ce titre, ils ont formé appel incident de ce chef du jugement. Il résulte du dispositif des conclusions de Mme [Z] [R] du 7 novembre 2018, qui sont reprises dans l'arrêt du 11 juin 2019, que cette dernière demandait de voir débouter les consorts [N] de leur appel incident portant sur les chefs du jugement ayant déclaré non applicables au legs particulier consenti à Mme [Z] [R], les dispositions de l'article L.116-4 du code de l'action sociale et des familles frappant d'une incapacité de recevoir les employés de maison. Elle demandait donc de « confirmer le jugement en ce qu'il a estimé que Mme [Z] [R] avait la capacité de recevoir et que partant le testament qui avait institué à son profit une libéralité ne pouvait être frappé de nullité ».
Ainsi, il est inexact de soutenir que Mme [Z] [R] qui demandait à voir reconnaître sa capacité à recevoir, ne s'est pas prévalue aussi de sa qualité de légataire particulier.
Par ailleurs, ces demandes constituaient une réplique à l'appel incident présenté par les consorts [N].
L'irrecevabilité soulevée par les consorts [N] sur le fondement de l'article 910-4 sera, en conséquence, rejetée.
Ces derniers s'opposent à la demande de dommages-intérêts, faisant valoir que le préjudice dont se prévaut Mme [R] est lié à l'action en contestation du testament du 13 décembre 2014 et du testament du 17 décembre 2013 qu'elle a initiée devant le tribunal de grande instance et qu'elle a poursuivie devant la cour d'appel en formant appel du jugement, que ces procédures ont paralysé la succession de [H] [A] jusqu'en 2019, ajoutant que n'étant pas héritiers en ligne directe, la vente des actifs pour permettre la délivrance des legs au bénéfice des différents légataires s'avérait particulièrement urgente et qu'en sus de son legs net de tout droit, Mme [R] a bénéficié de rappels de salaires et d'indemnités de licenciement sur la base d'un salaire mensuel de plus de 5 000 € par mois.
Les développements sur le montant du salaire de Mme [Z] [R], les rappels de salaires et indemnités de licenciement qui lui ont été versés sont sans lien avec la responsabilité que recherche cette dernière dans le cadre de la délivrance de son legs.
Le retard dans la délivrance du legs particulier trouve son origine dans la durée des procédures, étant rappelé que c'est Mme [Z] [R] qui a fait appel principal du jugement et qu'après la l'arrêt de la Cour de cassation du 23 mars 2022, elle n'a saisi la cour de renvoi que le 28 septembre 2023.
Dans ces circonstances, la délivrance dans le courant du mois de mai 2024 par les consorts [N] du legs particulier dont Mme [Z] [R] a été gratifiée, soit avant même l'issue du litige dont était alors saisie la cour n'est pas constitutif d'une faute de leur part.
Mme [Z] [R] se verra, en conséquence, déboutée de ses deux demandes de dommages-intérêts.
Sur les demandes accessoires
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie.
Au vu de la solution apportée au litige résultant du désistement partiel qui a succédé à la délivrance du legs particulier, il n'y a pas réellement de partie perdante ou gagnante.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée ; il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à condamnation.
Partant, chaque partie supportera les dépens qu'elle a engagés en première instance et en appel, y compris ceux devant la présente cour statuant sur renvoi de cassation.
Au vu de cette répartition des dépens, il n'y a pas lieu de faire application au profit de l'une ou l'autre des parties des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement par arrêt rendu par défaut et dans les limites de l'appel,
Rejette l'irrecevabilité soulevée par Mmes [D] et [I] [N], ainsi que M. [S] [N] sur le fondement de l'article 910-4 du code de procédure civile ;
Déboute Mme [Z] [R] de sa demande de dommages-intérêts ;
Dit que chaque partie conservera la charge des dépens qu'elle a engagés ;
Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Le Greffier, Le Président,
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRET DU 06 NOVEMBRE 2024
(n° 2024/ , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/16163 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIKKR
Décisions déférées à la Cour :
Arrêt du 23 Mars 2022 - Cour de cassation - Arrêt n°267 F-B
Arrêt du 12 Juin 2019 - Cour d'appel de PARIS - Pôle 3-1 - RG n° 18/07430
Jugement du 23 Février 2018 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/18351
DEMANDEUR
Madame [Z] [R]
née le [Date naissance 8] 1960 à [Localité 17] (PORTUGAL)
[Adresse 7]
représentée par Me Johanna BISOR BENICHOU de la SELARL LACROIX AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0504
DEFENDEURS
Madame [D] [N] épouse [P]
née le [Date naissance 6] 1960 à [Localité 13] (92)
[Adresse 2]
Madame [I] [N] épouse [E]
née le [Date naissance 5] 1962 à [Localité 13] (92)
[Adresse 16]
Monsieur [S] [N]
né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 13] (92)
[Adresse 11](SUISSE)
représentés par Me Françoise HERMET LARTIGUE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0716
Monsieur [K] [A], auquel la déclaration de saisine, l'avis de fixation et les conclusions de l'appelant ont été signifiés par acte d'huissier du 30/11/2023 selon procès-verbal de recherches infructueuses
né le [Date naissance 3] 1951 à [Localité 15]
[Adresse 9]
défaillant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Septembre 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller faisant fonction de Président, chargée du rapport, et M. Bertrand GELOT, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller faisant fonction de Président
Monsieur Bertrand GELOT, Conseiller
Mme Patricia GRASSO, Magistrat honoraire
Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON
ARRÊT :
- rendu par défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller faisant fonction de Président, et par Mme Emilie POMPON, Greffier, présentes lors de la mise à disposition.
***
EXPOSE DU LITIGE :
[H] [A], dont le dernier domicile était situé à [Localité 14], est décédé le [Date décès 4] 2016 sans descendance.
[H] [A] a exprimé ses dernières volontés :
dans un testament authentique reçu le 17 décembre 2013 par Me [U] [J], notaire à [Localité 12] (Yvelines), par lequel le défunt a institué légataires universels [D] [N], [I] [N] et [S] [N] à charge pour eux de délivrer divers legs particuliers au profit notamment de Mme [Z] [R] et de M. [K] [A], ce testament révoquant toutes dispositions antérieures ;
dans un testament olographe daté du 1er avril 2014 qui institue son neveu M. [K] [A] et Mme [Z] [R] comme légataires universels à charge pour eux de délivrer divers legs particuliers, notamment aux consorts [N], et qui révoque toutes dispositions antérieures.
Puis après avoir confirmé la validité de son testament authentique dans un codicille du 11 octobre 2014, puis celle de son testament olographe dans des écrits du 21 octobre et 9 décembre 2014, tous révoquant successivement toutes dispositions ultérieures, [H] [A] a rédigé le 13 décembre 2014 le dernier codicille suivant :
« Je soussigné [H] [A] né le 9/11/1926 à [Localité 10] (92) confirme le testament authentique reçu par Me [J] le 17 décembre 2013 et je révoque toutes dispositions que j'aurais pu faire ultérieurement - Fait à [Localité 14] le 13 décembre 2014. Signé : [H][A] »
Un désaccord oppose depuis les légataires successivement désignés quant à la validité des dernières volontés de [H] [A].
Par jugement contradictoire du 23 février 2018, le Tribunal de grande instance de Paris a :
débouté M. [K] [A] et Mme [Z] [R] de leur demande de nullité des testaments olographes des 11 octobre et 13 décembre 2014 ;
dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
rejeté toute autre demande ;
condamné M. [K] [A] et Mme [Z] [R] aux entiers dépens.
Par déclaration en date du 9 avril 2018, M. [K] [A] et Mme [Z] [R] ont interjeté appel de ce jugement.
Par arrêt du 12 juin 2019, la Cour d'appel de Paris, a :
confirmé le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le legs à Mme [Z] [R],
Y ajoutant,
dit que le legs particulier au profit de Mme [Z] [R] aux termes du testament du 17 décembre 2023 se heurte à l'interdiction résultant des dispositions des articles L.116-4 du code de l'action sociale et des familles ;
dit que Mme [D] [N] épouse [P], Mme [I] [N] épouse [E] et M. [S] [N] sont déchargés de toute obligation de délivrance du legs au profit de Mme [Z] [R] ;
débouté M. [K] [A] et Mme [Z] [R] de leur demande au titre des pénalités et majorations au profit de l'administration fiscale ;
vu l'article 700 du code de procédure civile, rejeté les demandes formées par M. [K] [A] et Mme [Z] [R], ainsi que par Mme [D] [N] épouse [P], Mme [I] [N] épouse [E] et M. [S] [N] ;
rejeté toute autre demande ;
condamné M. [K] [A] et Mme [Z] [R] aux entiers dépens.
Mme [Z] [R] a formé pourvoi en cassation contre cet arrêt.
Par arrêt du 23 mars 2022, la Cour de cassation a :
cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il dit que le legs à titre particulier au profit de Mme [R] aux termes du testament du 17 décembre 2013 se heurte à l'interdiction résultant des dispositions de l'article L. 116-4 du code de l'action sociale et des familles et que Mmes [D] et [I] [N], ainsi que M. [S] [N] sont déchargés de toute obligation de délivrance du legs au profit de Mme [R] et rejette la demande de Mme [R] au titre des pénalités et majorations au profit de l'administration fiscale, l'arrêt rendu le 12 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remis, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyés devant la Cour d'appel de Paris autrement composée ;
condamné Mmes [D] et [I] [N], ainsi que M. [S] [N] aux dépens ;
rejeté la demande formée par Mmes [D] et [I] [N] et M. [S] [N] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les a condamnés à payer à la SARL Delvolvé et Trichet la somme de 3.000 € en application de cet article ;
dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé.
Par déclaration de saisine du 28 septembre 2023, Mme [Z] [R] a saisi la Cour d'appel de Paris en tant que cour de renvoi.
Mme [Z] [R] a remis ses premières conclusions d'appelante le 18 octobre 2023.
Les Consorts [N] ont remis leurs premières conclusions d'intimés le 25 mars 2024.
Saisi le 25 mars 2024 par les consorts [N] d'un incident l'irrecevabilité des demandes de l'appelant sur le fondement de l'article 542 du code de procédure civile, le magistrat chargé de la mise en état, par ordonnance du 15 mai 2024 a :
débouté Mmes [D] et [I] [N] ainsi que M. [S] [N] de leur demande d'irrecevabilité ;
dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
réservé les dépens de l'incident.
Aux termes de ses dernières conclusions remises et notifiées le 10 juin 2024, Mme [Z] [R] demande à la Cour de :
l'accueillir en ses présentes conclusions, l'y déclarer recevable et bien fondée ;
Et y faisant droit,
confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu la validité du testament du 13 décembre 2014, et partant celui du 17 décembre 2013 et en ce qu'il a rejeté la demande des consorts [N] de voir déclarer nul le legs particulier qui lui a été consenti par [H] [A] au visa de l'article L.116-4 du code de l'action sociale et des familles ;
infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de la prise en charge des éventuelles pénalités de retard ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
débouter les Consorts [N] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions;
lui donner acte de ce qu'elle se désiste de son action relative à la délivrance du legs;
condamner in solidum Mme [D] [N] épouse [P], Mme [I] [N] épouse [E], et M. [S] [N] à lui payer les pénalités et majorations fiscales qui pourraient être mises à sa charge par l'administration fiscale du fait du paiement tardif des droits de succession afférents à son legs ;
condamner en conséquence Mme [D] [N] épouse [P], Mme [I] [N] épouse [E], et M. [S] [N] à lui régler la somme de 40.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi du fait du retard de délivrance du legs ;
condamner in solidum Mme [D] [N] épouse [P], Mme [I] [N] épouse [E] et M. [S] [N] à lui payer la somme de 6.720 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamner les intimés aux entiers dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions d'intimés remises et notifiées le 21 juin 2024, les Consorts [N] demandent à la Cour de :
déclarer irrecevables au visa de l'article 542 du code de procédure civile les demandes de l'appelante aux fins de confirmation ;
déclarer également irrecevables les demandes d'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [R] de sa demande au titre de la prise en charge d'éventuelles pénalités de retard, cette demande n'ayant jamais été formulée en première instance, Mme [R] faisant valoir à l'époque qu'elle était légataire universelle et que les consorts [N], pour se prévaloir eux-mêmes de la même qualité, auraient été responsables d'une éventuelle pénalité de retard dans l'acquittement des droits successoraux ;
déclarer en conséquence irrecevable Mme [R] dans ses demandes nouvelles en cause d'appel, en outre sans objet, Mme [R] en l'état de l'arrêt rendu par la Cour de Cassation et au vu du jugement dont appel étant bénéficiaire d'un legs particulier net de tous droits successoraux ;
déclarer irrecevable Mme [R] en l'intégralité de ses demandes additionnelles en délivrance de legs et en condamnation sous astreinte, ainsi qu'au titre de l'article 700, en l'absence de demande de délivrance au notaire chargé de la succession ;
En tout état de cause,
déclarer Mme [R] mal fondée en l'intégralité de ses demandes, les consorts [N] ne s'étant jamais opposés à la délivrance du legs sollicité par Mme [R],
condamner Mme [R] à leur payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, lesquels pourront être recouvrés par Me Hermet Lartigue, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 juin 2024.
L'affaire a été appelée à l'audience du 11 septembre 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Il résulte de ces différentes décisions de justice que la succession de [H] [A] est gouvernée par les dispositions testamentaires du codicille du 13 décembre 2014 qui a confirmé le testament reçu le 17 décembre 2013 par acte authentique, lequel a institué Mme [D] [N], Mme [I] [N] et M. [S] [N] légataires universels et gratifié Mme [Z] [R] et M. [K] [A] d'un legs particulier chacun.
Mme [R] indique qu'en cours de procédure, soit le 27 mai 2024, les consorts [N] ont procédé au règlement de la somme de 60 159,06 € au titre du legs particulier dont elle a été gratifiée à hauteur de son montant nominal s'élevant à la somme de 60 000 €. Du fait de ce règlement, Mme [R] déclare se désister de sa demande en délivrance du legs particulier qui lui a été consenti par le testament au 17 décembre 2013 confirmé par le codicille du 13 décembre 2014.
Sur la recevabilité de la demande de Mme [R] de confirmation de certains chefs du jugement
Se fondant sur l'article 542 du code civil, les consorts [N] soulèvent l'irrecevabilité de la demande de Mme [R] de confirmation du jugement au motif qu'elle ne tend pas à la réformation ou à l'annulation du jugement ; ils précisent que ce faisant Mme [R] acquiesce au jugement et à l'arrêt de la cour d'appel en ses chefs non cassés portant sur la validité du testament du 13 décembre 2014 et 17 décembre 2013.
L'appel tendant à la réformation ou l'annulation du jugement, en l'absence de demande de réformation ou d'annulation d'un chef du jugement, l'appel est sans d'objet relativement à ce chef. De surcroît, Mme [Z] [R] est dépourvue d'intérêt à agir à demander la confirmation d'un chef de jugement dont la réformation ou l'annulation n'est pas demandée.
Il ne sera pas statué sur une demande qui n'a pas d'objet.
Sur les demandes de Mme [R] au titre des pénalités et majorations fiscales et de la réparation du préjudice subi
Mme [R] qui expose avoir sollicité devant la cour d'appel que soient mises à la charge des consorts [N] les éventuelles pénalités et majorations qui pourraient lui être réclamées par l'administration fiscale en raison du retard du paiement des droits de succession, estime que ces derniers ont commis une faute en s'opposant à la délivrance de son legs sur le fondement d'une loi entrée en vigueur postérieurement aux dispositions testamentaires l'instaurant légataire à titre particulier et demande sur le fondement de l'article 1240 du code civil réparation de ce préjudice par leur condamnation in solidum à lui payer les pénalités et majorations fiscales qui pourraient être mises à sa charge par l'administration fiscale.
Elle prétend également avoir subi un préjudice résultant du retard dans l'exécution de son legs imputable aux consorts [N] et demande à ce titre des dommages-intérêts d'un montant de 40 000 €.
Les consorts [N] exposent que dans l'instance devant la cour d'appel ayant abouti à l'arrêt partiellement cassé du 12 juin 2019, Mme [Z] [R] se prévalait exclusivement de sa qualité de légataire universel, n'ayant présenté aucune demande en sa qualité de légataire particulier ; ils soulèvent sur le fondement de l'article 910-4 du code de procédure civile l'irrecevabilité de sa demande présentée devant la cour de renvoi au titre des majorations et pénalités qui pourraient lui être appliquées en sa qualité de légataire particulier, ajoutant de surcroît que le legs qui lui a été consenti est net de tous droits.
L'article 910-4 du code de procédure civile dispose qu' « à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès leurs premières conclusions mentionnées aux articles 905-2, 908 et 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
Le principe de concentration des prétentions qui découle de l'article 910-4 du code de procédure civile s'applique devant la cour d'appel de renvoi.
Certes, il est de règle qu'une demande faite sous une autre qualité que celle sous laquelle elle avait été initialement formulée équivaut à une nouvelle prétention. Cependant, devant le tribunal, les consorts [N] demandaient à titre reconventionnel la nullité du legs particulier consenti à Mme [Z] [R]. Le jugement n'ayant pas fait droit à la leur demande à ce titre, ils ont formé appel incident de ce chef du jugement. Il résulte du dispositif des conclusions de Mme [Z] [R] du 7 novembre 2018, qui sont reprises dans l'arrêt du 11 juin 2019, que cette dernière demandait de voir débouter les consorts [N] de leur appel incident portant sur les chefs du jugement ayant déclaré non applicables au legs particulier consenti à Mme [Z] [R], les dispositions de l'article L.116-4 du code de l'action sociale et des familles frappant d'une incapacité de recevoir les employés de maison. Elle demandait donc de « confirmer le jugement en ce qu'il a estimé que Mme [Z] [R] avait la capacité de recevoir et que partant le testament qui avait institué à son profit une libéralité ne pouvait être frappé de nullité ».
Ainsi, il est inexact de soutenir que Mme [Z] [R] qui demandait à voir reconnaître sa capacité à recevoir, ne s'est pas prévalue aussi de sa qualité de légataire particulier.
Par ailleurs, ces demandes constituaient une réplique à l'appel incident présenté par les consorts [N].
L'irrecevabilité soulevée par les consorts [N] sur le fondement de l'article 910-4 sera, en conséquence, rejetée.
Ces derniers s'opposent à la demande de dommages-intérêts, faisant valoir que le préjudice dont se prévaut Mme [R] est lié à l'action en contestation du testament du 13 décembre 2014 et du testament du 17 décembre 2013 qu'elle a initiée devant le tribunal de grande instance et qu'elle a poursuivie devant la cour d'appel en formant appel du jugement, que ces procédures ont paralysé la succession de [H] [A] jusqu'en 2019, ajoutant que n'étant pas héritiers en ligne directe, la vente des actifs pour permettre la délivrance des legs au bénéfice des différents légataires s'avérait particulièrement urgente et qu'en sus de son legs net de tout droit, Mme [R] a bénéficié de rappels de salaires et d'indemnités de licenciement sur la base d'un salaire mensuel de plus de 5 000 € par mois.
Les développements sur le montant du salaire de Mme [Z] [R], les rappels de salaires et indemnités de licenciement qui lui ont été versés sont sans lien avec la responsabilité que recherche cette dernière dans le cadre de la délivrance de son legs.
Le retard dans la délivrance du legs particulier trouve son origine dans la durée des procédures, étant rappelé que c'est Mme [Z] [R] qui a fait appel principal du jugement et qu'après la l'arrêt de la Cour de cassation du 23 mars 2022, elle n'a saisi la cour de renvoi que le 28 septembre 2023.
Dans ces circonstances, la délivrance dans le courant du mois de mai 2024 par les consorts [N] du legs particulier dont Mme [Z] [R] a été gratifiée, soit avant même l'issue du litige dont était alors saisie la cour n'est pas constitutif d'une faute de leur part.
Mme [Z] [R] se verra, en conséquence, déboutée de ses deux demandes de dommages-intérêts.
Sur les demandes accessoires
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie.
Au vu de la solution apportée au litige résultant du désistement partiel qui a succédé à la délivrance du legs particulier, il n'y a pas réellement de partie perdante ou gagnante.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée ; il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à condamnation.
Partant, chaque partie supportera les dépens qu'elle a engagés en première instance et en appel, y compris ceux devant la présente cour statuant sur renvoi de cassation.
Au vu de cette répartition des dépens, il n'y a pas lieu de faire application au profit de l'une ou l'autre des parties des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement par arrêt rendu par défaut et dans les limites de l'appel,
Rejette l'irrecevabilité soulevée par Mmes [D] et [I] [N], ainsi que M. [S] [N] sur le fondement de l'article 910-4 du code de procédure civile ;
Déboute Mme [Z] [R] de sa demande de dommages-intérêts ;
Dit que chaque partie conservera la charge des dépens qu'elle a engagés ;
Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Le Greffier, Le Président,