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Cass. crim., 14 novembre 2024, n° 23-85.703

COUR DE CASSATION

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Cassation

Cass. crim. n° 23-85.703

14 novembre 2024

N° F 23-85.703 F-B

N° 01365

LR
14 NOVEMBRE 2024

CASSATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 14 NOVEMBRE 2024

M. [L] [H] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Metz, chambre correctionnelle, en date du 15 septembre 2023, qui a prononcé sur une requête en confusion de peines.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Guerrini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [L] [H], et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 9 octobre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Guerrini, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Le Roch, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Le 15 avril 2021, M. [L] [H] a formé une requête en confusion des peines suivantes :

- 1) huit ans d'emprisonnement pour des faits de vol avec arme commis les 16 septembre et 26 décembre 1997, prononcée par la cour d'assises de la Dordogne le 7 février 2001 ;

- 2) quatre mois d'emprisonnement pour des faits de recel commis le 23 juin 2013, prononcée par le tribunal correctionnel de Mont-de-Marsan par jugement du 21 novembre 2013 ;

- 3) quatorze ans de réclusion criminelle pour des faits de vol avec arme, d'arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire, participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime, et détention sans autorisation d'arme ou munition, commis en 2009 et 2010, prononcée par la cour d'assises des Hautes-Pyrénées, le 16 avril 2015 ;

- 4) vingt-deux ans de réclusion criminelle pour des faits de meurtre commis pour assurer l'impunité d'un vol, d'importation, détention et port d'armes prohibés, commis le 24 juin 1997, prononcée par la chambre criminelle du tribunal du Luxembourg, le 29 janvier 2019. Cette peine a fait l'objet d'une décision de reconnaissance et d'exécution en France par décision du 13 mars 2020.

3. Les peines n° 2, 3 et 4 ont fait l'objet d'une réduction au maximum légal le 7 avril 2021.

4. Par jugement du 4 avril 2022, le tribunal correctionnel a déclaré la requête irrecevable s'agissant de la peine n° 2, et l'a rejetée pour le surplus.

5. M. [H] a relevé appel de cette décision, le ministère public a formé appel incident.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la confusion de la peine n° 1 de huit ans d'emprisonnement prononcée le 7 février 2001 par la cour d'assises de la Dordogne et de la peine n° 4 de vingt-deux ans de réclusion criminelle prononcée le 29 janvier 2019 par la chambre criminelle du Luxembourg, alors :

« 1°/ que si une même condamnation ne peut être incluse dans plusieurs opérations de réduction au maximum légal encouru, elle peut en revanche être incluse dans plusieurs opérations de confusion facultative ; elle peut également être incluse à la fois dans une confusion facultative et dans une réduction au maximum légal ; en l'espèce, les peines nos 2, 3 et 4 sont en concours réel dès lors que les faits qu'elles répriment, commis entre 1997 et le 23 juin 2013, sont antérieurs aux condamnations prononcées respectivement les 21 novembre 2013, 16 avril 2015 et 29 janvier 2019 ; leur cumul a donc été réduit au maximum légal de 30 ans par décision du 22 mars 2021 du procureur de la République près le tribunal judiciaire de Metz ; mais la peine n°4 est également en concours réel avec la peine n°1 dès lors que les faits que ces deux peines répriment, commis en 1997, sont antérieurs aux condamnations prononcées les 7 février 2001 et 29 janvier 2019 ; par application de la règle sus-énoncée, la circonstance que la peine n°4 soit incluse dans l'opération de réduction au maximum légal qui la lie aux peines nos 2 et 3, ne fait pas obstacle à ce qu'elle se confonde facultativement avec la peine n°1 ; en refusant néanmoins par principe toute confusion entre ces peines nos1 et 4, au motif erroné que cela « entraînerait une confusion de fait entre les peines n°1 et 2, [et] entre les peines 1 et 3 » (p. 4, al. 6), la cour d'appel a méconnu la portée de la règle susvisée, et a violé l'article 132-4 du code pénal ;

2°/ que le fait qu'une peine ait été exécutée ne fait pas davantage obstacle à sa confusion ; en énonçant, pour écarter la confusion des peines nos 1 et 4, que « la peine [n°1] de 8 ans d'emprisonnement prononcée par la Cour d'assises de la Dordogne a été exécutée le 13 août [2003] et que dès lors, la confusion de cette peine avec l'une quelconque des autres peines serait privée d'effet » (arrêt, p. 4, al. 6), la cour d'appel a méconnu la règle sus-énoncée, a ajouté à la loi et a violé derechef le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 132-4 et 132-5 du code pénal, et 728-56 du code de procédure pénale :

7. Selon le dernier de ces textes, lorsqu'une condamnation prononcée à l'étranger est devenue exécutoire en France par une décision devenue définitive, l'exécution de la peine est régie par les dispositions du code de procédure pénale. Il en résulte qu'une condamnation à une peine privative de liberté prononcée par un Etat membre de l'Union européenne, ayant fait l'objet d'une décision définitive de reconnaissance comme exécutoire en France, peut être incluse dans une opération de réduction au maximum légal ou de confusion facultative de peines.

8. Selon les deux premiers, la réduction au maximum légal appliquée, de droit, sur instructions du procureur de la République, à une personne ayant fait l'objet de plusieurs condamnations à des peines de même nature et non définitives dans leurs rapports entre elles, ne fait pas obstacle à une éventuelle confusion facultative dont il revient au juge d'apprécier l'opportunité.

9. Pour rejeter la requête en confusion de peines présentée par M. [H], l'arrêt attaqué énonce que si la confusion paraît possible entre la peine n° 4 et les peines n° 1 à 3, une telle confusion entraînerait une confusion de fait entre les peines n° 1 et 2 et entre les peines n° 1 et 3.

10. En se déterminant ainsi, par des motifs qui reviennent à prohiber toute confusion facultative de peines après une réduction au maximum légal, notamment à l'égard d'une peine prononcée au Luxembourg qui avait fait l'objet d'une décision définitive de reconnaissance et d'exécution en France, et qui pouvait donc être incluse dans une telle opération, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.

11. La cassation est par conséquent encourue.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Metz, en date du 15 septembre 2023, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Metz et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille vingt-quatre.