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Décisions

Cass. 2e civ., 23 mai 2024, n° 22-15.264

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Martinel

Rapporteur :

Mme Bonnet

Avocat général :

Mme Bonnet

Avocat :

SCP Zribi et Texier

Aix-en-Provence, ch. 2-4, du 8 septembre…

8 septembre 2021

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 septembre 2021), Mme [P] a, le 27 novembre 2017, assigné le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille aux fins de se voir reconnaître la nationalité française.

2. Le tribunal a débouté Mme [P] de ses demandes et constaté son extranéité, par jugement du 20 décembre 2018, dont elle a relevé appel.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Mme [P] fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, de constater son extranéité et d'ordonner la mention du présent arrêt prévue par l'article 28 du code civil en marge de l'état civil de l'intéressée, alors « que la procédure sans audience prévue par l'article 6 de l'ordonnance du 18 novembre 2020 ne peut être appliquée à un litige dans lequel le ministère public, dispensé d'avocat, est partie principale ; que tel est le cas en matière de nationalité ; que dès lors, en appliquant cette procédure sans audience à un litige relatif au droit de la nationalité dans lequel le parquet était partie principale, la cour d'appel a violé les articles 6 de l'ordonnance n° 2020-1400 du 18 novembre 2020 et 431 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. L'article 1er de l'ordonnance n° 2020-1400 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux copropriétés prévoit que les dispositions du titre 1er de l'ordonnance sont applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale, sans faire exception pour les litiges de nature civile dans lesquels le ministère public est partie principale.

5. Dès lors, le grief qui soutient que l'article 6 de cette ordonnance n'est pas applicable, manque en droit.

Mais sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

6. Mme [P] fait le même grief à l'arrêt, alors « que pour statuer sans audience, l'arrêt relève qu'en application de l'article 6 de l'ordonnance du 18 novembre 2020, les parties ont été régulièrement avisées de la mise en oeuvre de la procédure sans audience et qu'elles ne s'y sont pas opposées ; qu'en statuant ainsi, sans qu'il ne résulte de la décision ou des pièces de la procédure que les parties auraient disposé d'un délai de quinze jours pour s'opposer, le cas échéant, à cette procédure sans audience, la cour d'appel a violé l'article 6 de l'ordonnance n° 2020-1400 du 18 novembre 2020. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 6 de l'ordonnance n° 2020-1400 du 18 novembre 2020 :

7. Il résulte de ce texte que lorsque la représentation est obligatoire ou que les parties sont assistées ou représentées par un avocat, le juge ou le président de la formation de jugement peut, à tout moment de la procédure, décider qu'elle se déroule selon la procédure sans audience. Les parties sont informées de cette décision par tout moyen. Elles peuvent s'y opposer dans un délai de quinze jours.

8. L'information par tout moyen de ce que le juge envisage de statuer sans audience peut être communiquée aux avocats des parties, notamment par messages via le Réseau privé virtuel des avocats (RPVA) conformément à l'article 748-1 du code de procédure civile ou, à défaut, par courriels à leur adresse professionnelle, ou, à défaut encore, par tout autre mode assurant l'effectivité de cette transmission.

9. Pour statuer sans audience, l'arrêt relève qu'en application de l'article 6 de l'ordonnance n° 2020-1400 du 18 novembre 2020, les parties ont été avisées de ce que l'affaire serait jugée selon la procédure sans audience prévue par l'article 6 de l'ordonnance précitée et ne s'y sont pas opposées.

10. En se déterminant ainsi, sans rechercher si l'information définie au paragraphe 8 avait été portée à la connaissance des parties dans des conditions leur permettant de s'opposer à la procédure sans audience dans un délai de quinze jours, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille vingt-quatre.