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Décisions

CA Rennes, 3e ch. com., 12 novembre 2024, n° 23/03039

RENNES

Arrêt

Autre

CA Rennes n° 23/03039

12 novembre 2024

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N°409

N° RG 23/03039 - N° Portalis DBVL-V-B7H-TZBX

(Réf 1ère instance : 2020F00376)

S.A.S. GEST'INNOV

S.E.L.A.S. ETUDE JP

C/

S.A.S. BAKER TILLY STREGO

S.A.S. GENERALI IARD SA

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me VERRANDO

Me LHERMITTE

Me CHAUDET

Copie certifiée conforme délivrée

le :

à : TC d RENNES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 12 NOVEMBRE 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Fabienne CLÉMENT, Présidente de chambre, Rapporteur

Assesseur : Madame Sophie RAMIN, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Frédérique HABARE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 17 Septembre 2024

ARRÊT :

Contradictoire prononcé publiquement le 12 Novembre 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

S.A.S. GEST'INNOV

immatriculée sous Ie n°818 092 363 au RCS de Paris, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Isabelle GALAND PADRAO substituant Me Yves Marie HERROU de la SELAS FIDAL, Plaidant, avocat au barreau d'ANGERS

INTERVENANT VOLONTAIRE :

S.E.L.A.S. ETUDE JP

prise en la personne de Me [Z] [T], es qualités de mandataire judiciaire de la société Gest'Innov selon jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 11 mars 2024

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Isabelle GALAND PADRAO substituant Me Yves Marie HERROU de la SELAS FIDAL, Plaidant, avocat au barreau d'ANGERS

Intervenant volontaire par conclusions en date du 03 juin 2024

INTIMÉES :

S.A.S. BAKER TILLY STREGO

société immatriculée sous le n°063.200.885 au RCS Angers, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Sandrine VIVIER substituant Me Jean-David CHAUDET de la SCP Jean-David CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Emmanuel RASKIN de la SELARL SOCIETE D ETUDES FISCALES ET JURIDIQUES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Représentée par Me Cédric BERTO de la SELAS ORATIO AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

GENERALI IARD SA

immatriculée sous Ie n°552.062.663 au RCS de Paris, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés és-qualités au siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Estelle FABART, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

FAITS

La société BAKER TILLY STREGO (BTS dite STREGO) est expert-comptable et commissaire aux comptes.

La société GEST'INNOV, partenaire de Microsoft est spécialisée dans les solutions informatiques de cet éditeur. Elle développe des solutions informatiques destinées à soutenir la transformation digitale des entreprises et des cabinets d'expertise comptable.

A compter de 2017 la société GEST'INNOV a recherché un cabinet d'expertise comptable capable de lui fournir des expertises métier pour son projet de développement d'une plate-forme du futur des cabinets d'expertise-comptable en partenariat avec Microsoft.

A cette époque la société BTS recherchait une solution informatique de gestion intégrée adaptée aux missions d'expertise comptable et à leurs évolutions.

La société GEST'INNOV et la société BTS ont été mises en relation par Microsoft afin de permettre à GEST'INNOV de faire une proposition commerciale à BTS

A l'issue de comités de pilotage les deux sociétés ont régularisé un contrat le 26 septembre 2018

Il s'agissait pour la société GEST'INNOV de livrer une nouvelle solution informatique désignée AKELEA adaptée à l'activité d'expertise comptable et destinée aux 1200 collaborateurs de BTS et à ses clients sur la base de la version Son de la plate-forme Business Central de Microsoft.

Le contrat prévoyait aussi les conditions d'utilisation et d'exploitation de la solution accordée à BTS pendant une durée initiale de 10 ans.

La société GEST'INNOV s'est également engagée à rétrocéder à BTS 50 % de la marge qu'elle réaliserait lors de la commercialisation de la solution.

Dans le cadre de ce projet, GEST'INNOV avait souscrit une assurance responsabilité professionnelle auprès de la compagnie GENERALI au titre des désordres pouvant résulter de son activité couvrant un total de préjudices de

1 500 000 euros.

Le développement de cette solution devait être réalisée en 3 lots :

- les deux premiers lots avaient pour objet de mettre en oeuvre un outil de production comptable de gestion des clients et de reporting ;

- le troisième lot (optionnel) portait sur l'intelligence artificielle et les datas.

Ces prestations devaient être réalisées par la société GEST'INNOV en plusieurs étapes :

- une période de développement jusqu'à la livraison d'une version bêta de chaque lot ;

- une période de test, de correction et d'amélioration de la version bêta de la solution pour chaque lot ;

- la livraison d'une version finale en septembre 2019.

En contrepartie de la livraison de cette version finale les parties ont convenu d'un prix forfaitaire de 782.800 euros HT. Le coût d'utilisation de cette solution a été fixé à la somme de 936.000 euros HT par an, soit 9.360.000 euros HT pour la durée contractuelle de 10 ans initialement prévue. La société BTS a versé à la société GEST'INNOV 80% du prix convenu soit la somme de 626.240 euros HT (751.477,20 euros TTC).

La société BTS affirme que d'avril à fin juillet 2019, la société GEST'INNOV n'a présenté en phase de tests (recette) que certaines fonctionnalités du lot 1 qui se sont révélées inexistantes, non conformes ou affectées de nombreuses anomalies ce qui a contraint BTS à soulever des réserves .

Elle ajoute que la solution n'a pas été livrée en septembre 2019.

Elle ajoute qu'elle a été informée à compter d'octobre 2019 de l'existence de limitations techniques et fonctionnelles de la version Son de Business Central qui rendaient plus complexe son système d'information :

- une limitation à 991 dossiers clients par tenants, alors que BTS traitait environ 25.000 dossiers clients ;

- une limitation à 80 Go d'espace de stockage par dossier, alors que le volume des fichiers par dossier pouvait largement excéder cette limite.

- une limitation à 900 utilisateurs interdisant le déploiement de la solution auprès de ses 1200 collaborateurs.

La société BTS a accordé à la société GEST'INNOV un délai supplémentaire afin qu'une solution conforme au contrat puisse être trouvée.

La société GEST'INNOV n' a pas la même analyse de l'évolution du projet. Elle indique que les anomalies dénoncées n'étaient pas bloquantes. Elle ajoute que la capacité de stockage et les limitations nécessitaient de revoir l'architecture de la solution avec Microsoft ce qu'a refusé la société STREGO.

Les relations entre les parties de sont tendues au début de l'année 2020 chaque partie s'estimant à l'origine de la fin des discussions pour parvenir à résoudre les difficultés.

Par lettre recommandée et par courriel du 10 avril 2020 la société BTS a mis en demeure la société GEST'INNOV de remédier à ses défaillances dans un délai de 30 jours à compter de sa notification.

Le 9 juillet 2020 la société GEST'INNOV répondu qu'elle avait satisfait à l'ensemble de ses obligations contractuelles et a sollicité le règlement du solde du prix fixé au contrat, soit 156.569 euros HT.

Le 10 septembre 2020 la société BTS a notifié à la société GEST'INNOV la résolution du contrat pour manquement grave à ses obligations et a contesté l'exigibilité de la somme réclamée.

Le 6 octobre 2020, la société GEST'INNOV a sollicité l'ouverture d'un sinistre . Par courriel du 8 octobre 2020, l'agent général a déclaré un sinistre au titre du contrat de Protection Juridique n° AP989813.

Le 10 novembre 2020 la société BTS a assigné, la société GEST'INNOV devant le tribunal de commerce de Rennes.

Elle sollicitait notamment :

- la résolution du contrat ;

- la restitution de 80% du prix de vente déjà versé en exécution du contrat de prestation de service soit 751 477,20 euros TTC augmentée des intérêts au taux légal ;

- le paiement de l'indemnité contractuelle prévue dans la clause pénale en cas de résiliation du contrat à hauteur de 150 000 euros ;

- le paiement des diverses pertes subies au titre des coûts, dépenses et investissements engagés à hauteur de 248 912 euros ;

- le paiement de diverses sommes afférentes aux gains manqués au titre de la mobilisation du personnel productif de BTS ainsi qu'au titre de l'utilisation de la solution à hauteur de 42 246 433 euros ;

- le paiement d'un préjudice moral à hauteur de 150 000 euros.

A la suite d'une deuxième déclaration de sinistre en date du 17 mai 2021 par laquelle la société GEST'INNOV a transmis à GENERALI l'assignation lui ayant été délivrée le 10 novembre 2020 , la compagnie d'assurance a ouvert un nouveau dossier sous la référence sinistre 37712329 en mai 2021 au titre d'un contrat de Responsabilité Civile Entreprise n° AP451775 dénommé Protection Entreprise & Dirigeant dont le dernier avenant est à effet du 5 novembre 2018.

Par courriel du 10 août 2021 la compagnie GENERALI a opposé un refus total de garantie

Le 4 novembre 2021 la société BTS a appelé en cause la société GENERALI.

Les instances ont été jointes par le tribunal.

Par jugement du 4 avril 2023 le tribunal de commerce de Rennes a :

- Prononcé la résolution du contrat de prestation de service du 26 septembre 2018 aux torts partagés des sociétés STREGO et GEST'INNOV,

- Condamné la société GEST'INNOV à restituer à la société STREGO, la somme de 751.477,20 euros TTC au titre des sommes versées en exécution du contrat de prestation ,

- Débouté la société STREGO de sa demande de condamner in solidum GENERALI IARD avec la société GEST'INNOV,

- Condamné la société STREGO à verser à la société GENERALI IARD la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et débouté la société GENERALI IARD du surplus de sa demande ,

- Débouté les sociétés STREGO et GEST'INNOV de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté les sociétés STREGO et GEST'INNOV du surplus de leurs demandes, fins et prétentions,

- Condamné à parts égales les sociétés STREGO et GEST'INNOV aux dépens de l'instance,

- Liquidé les frais de greffe à la somme de 94,34 euros tels que prévu aux articles 695 et 701 du code de procédure civile.

La société GEST'INNOV a fait appel du jugement le 26 mai 2023.

Par ordonnance du 21 novembre 2023, le premier président de la cour d'appel de Rennes a déclaré irrecevable la demande d'arrêt d'exécution provisoire formée par la société GEST'INNOV.

Par jugement du tribunal de commerce de Paris du 11 mars 2024, la société GEST'INNOV a été placée en procédure de sauvegarde judiciaire.

L'Etude JP prise en la personne de Me [Z] [M] est intervenue volontairement à la procédure.

La société BAKER TILLY STREGO a déclaré sa créance pour un montant de 14 264 912,97 euros.

Par ordonnance du 25 janvier 2024 le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Rennes a :

- Dit n'y avoir lieu à radiation de l'affaire du rôle de la cour ;

- Dit que les dépens de l'incident suivront le sort de ceux de l'arrêt rendu sur le fond ;

- Rejette les demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est en date du 12 septembre 2024.

Le 8 octobre 2024 la cour d'appel a transmis aux parties une note en délibéré.

La société GEST'INNOV bénéficie d'une procédure de sauvegarde.

I1 a été demandé à la société GEST'INNOV et à la société Etude JP, és qualités, de produire devant la cour, pour le 15 octobre 2024 au plus tard, copie du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde et de désignation du mandataire et copie des éventuelles décisions subséquentes.

Les parties ont été invitées, pour 1e 22 octobre 2024 au plus tard, à faire valoir

toutes observations sur la recevabilité des conclusions prises au seul nom de la

seule société Etude JP, es qualités, en ce qu'elles formulent des demandes de condamnation alors qu'il ne serait pas justifié que le mandataire judiciaire a reçu mandat pour agir à la place du débiteur en sauvegarde.

Vu les observations de la société GEST'INNOV en date du 14 et 22 octobre 2024.

Vu les observations de la société BAKER TILLY STREGO en date du 21 octobre 2024.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses écritures notifiées le 12 juillet 2024 l'Etude JP prise en la personne de Me [Z] [M] es qualité de mandataire judiciaire de la société GEST'INNOV demande à la cour au visa des articles 1112-1, 1210, 1211, 1212,1225, 1226, 1231, 1231-1, 1231-2, 1376 du code civil, 123-12, 134-5, 232-1, 442-1 du code de commerce, de :

- Recevoir la société GEST'INNOV en son appel, le dire bien fondé et y faisant droit,

- Décerner acte à la L'ETUDE JP prise en la personne de ME [Z] [M], de son intervention volontaire en reprise d'instance, comme mandataire à la procédure de sauvegarde de la société GEST'INNOV, désignée par jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 11 mars 2024 ;

- Lui donner acte de ce qu'en cette qualité, elle donne adjonction entière à l'appel inscrit et aux écritures prises au nom de la société GEST'INNOV, en adjuger l'entier bénéfice de la procédure de sauvegarde ;

- Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Rennes du 4 avril 2023 en toutes ces dispositions critiquées et particulièrement en ce qu'il a :

. Prononcé la résolution du contrat de prestation de service du 26 septembre 2018 aux torts partagés des sociétés STREGO et GEST'INNOV,

. Condamné la société GEST'INNOV à restituer à la société STREGO, la somme de 751.477,20 euros TTC au titre des sommes versées en exécution du contrat de prestation,

. Débouté la société GEST'INNOV de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

. Débouté la société GEST'INNOV du surplus de ses demandes, fins et prétentions,

. Condamné à parts égales les sociétés STREGO et GEST'INNOV aux dépens de l'instance,

. Liquidé les frais de greffe à la somme de 94,34 euros tels que prévu aux articles 695 et 701 du code de procédure civile.

Et statuant à nouveau :

A titre principal :

- Prononcer la résolution judiciaire du contrat de prestation de service du 26 septembre 2018 aux torts exclusif de STREGO ;

Et en conséquence :

- Condamner la société STREGO à verser à la société GEST'INNOV le solde non payé au titre du lot n°2, à savoir la somme de 156.569 euros HT soit 187.882,80 euros TTC ;

- Condamner la société STREGO à payer à la société GEST'INNOV la somme de 150.000 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article 9.3 du contrat de

prestation de service du 26 septembre 2018 ;

- Condamner la société STREGO à payer à la société GEST'INNOV les sommes suivantes :

- 114.000 euros HT au titre des gains manqués liés à la non-réalisation du lot 3 ;

- 3.270.312 euros HT au titre des gains manqués liés aux droits d'utilisation et d'exploitation de la solution ;

- 1.728.000 euros HT au titre des gains manqués liés au contrat de maintenance ;

- 9.611 euros HT au titre des coûts engagés pour le développement de la solution ;

- 24.350 euros HT au titre des frais liés à la gestion du litige avec STREGO.

- Condamner la société STREGO à payer à la société GEST'INNOV la somme de 50.000 euros au titre du préjudice moral subi par la société GEST'INNOV;

- Débouter la société STREGO de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

A titre subsidiaire si la cour confirmait la résolution du contrat de prestation de service aux torts partagés des sociétés STREGO et GEST'INNOV :

- Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Rennes du 4 avril 2023 en toutes ces dispositions sur les restitutions en constatant que :

. la quasi-totalité des prestations réalisées par GEST'INNOV au terme du contrat ont trouvé une utilité pour STREGO ;

. les prestations réalisées par GEST'INNOV ont été dûment effectuées et doivent à ce titre, être prise en compte dans la pondération des restitutions.

En statuant à nouveau :

- Prononcer des restitutions justes et conformes aux méthodes de calcul exposées, qui ne sauraient laisser à la charge de GEST'INNOV une quelconque restitution à opérer.

A titre infiniment subsidiaire,

- Déclarer irrecevable toute demande de condamnation pécuniaire à l'encontre de la société GEST'INNOV,

- Juger que les demandes de la société STREGO ne peuvent tendre qu'à l'inscription de la créance, éventuellement fixée par la cour, au passif de la procédure de sauvegarde.

En tout état de cause, et statuant à nouveau :

- Débouter la société STREGO de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- Condamner la société STREGO à verser à la société GEST'INNOV la somme de 100.000 euros au titre de la première instance, auquel il convient d'ajouter la somme de 20.000 euros au titre de l'appel, conformément à l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la société STREGO à verser à Maître [Z] [M], ès qualité de mandataire judiciaire de la société GEST'INNOV la somme de 5.000 euros au titre de l'appel, conformément à l'article 700 du code de procédure civile - Condamner la société STREGO aux entiers dépens sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile avec distraction au profit de l'avocat soussigné aux offres de droit.

Ces demandes ne sont présentées qu'au nom du mandataire, en présence de la société GEST'INNOV. Elles ne sont pas recevables alors qu'il n'est pas justifié que le mandataire judiciaire ait reçu mandat pour agir à la place du débiteur en sauvegarde.

Il convient donc de reprendre les écritures de la société GEST'INNOV notifiées le 20 février 2024 aux termes desquelles elle demande au visa des articles 1112-1, 1210, 1211, 1212,1225, 1226, 1231, 1231-1, 1231-2, 1376 du code civil, 123-12, 134-5, 232-1, 442-1 du code de commerce, de :

- Recevoir la société GEST'INNOV en son appel, le dire bien fondé et y faisant droit,

- Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Rennes du 4 avril 2023 en toutes ces dispositions critiquées et particulièrement en ce qu'il a :

. Prononcé la résolution du contrat de prestation de service du 26 septembre 2018 aux torts partagés des sociétés STREGO et GEST'INNOV,

Condamné la société GEST'INNOV à restituer à la société STREGO, la somme de 751.477,20 euros TTC au titre des sommes versées en exécution du contrat de prestation,

. Débouté la société GEST'INNOV de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

. Débouté la société GEST'INNOV du surplus de ses demandes, fins et prétentions,

. Condamné à parts égales les sociétés STREGO et GEST'INNOV aux dépens de l'instance,

. Liquidé les frais de greffe à la somme de 94,34 euros tels que prévu aux articles 695 et 701 du code de procédure civile.

Et statuant à nouveau :

A titre principal :

- Prononcer la résolution judiciaire du contrat de prestation de service du 26 septembre 2018 aux torts exclusif de STREGO ;

Et en conséquence :

- Condamner la société STREGO à verser à la société GEST'INNOV le solde non payé au titre du lot n°2, à savoir la somme de 156.569 euros HT soit 187.882,80 euros TTC ;

- Condamner la société STREGO à payer à la société GEST'INNOV la somme de 150.000 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article 9.3 du contrat de prestation de service du 26 septembre 2018 ;

- Condamner la société STREGO à payer à la société GEST'INNOV les sommes suivantes :

. 114.000 euros HT au titre des gains manqués liés à la non-réalisation du lot 3 ;

. 3.270.312 euros HT au titre des gains manqués liés aux droits d'utilisation et d'exploitation

de la solution ;

. 1.728.000 euros HT au titre des gains manqués liés au contrat de maintenance ;

. 9.611 euros HT au titre des coûts engagés pour le développement de la solution ;

. 24.350 euros HT au titre des frais liés à la gestion du litige avec STREGO.

- Condamner la société STREGO à payer à la société GEST'INNOV la somme de 50.000 euros au titre du préjudice moral subi par la société GEST'INNOV;

- Débouter la société STREGO de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

A titre subsidiaire si la cour confirmait la résolution du contrat de prestation de service aux torts partagés des sociétés STREGO et GEST'INNOV :

- Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Rennes du 4 avril 2023 en toutes ces dispositions sur les restitutions en constatant que :

- la quasi-totalité des prestations réalisées par GEST'INNOV au terme du contrat ont trouvé une utilité pour STREGO ;

- les prestations réalisées par GEST'INNOV ont été dument effectuées et doivent à ce titre, être prise en compte dans la pondération des restitutions.

En statuant à nouveau :

- Prononcer des restitutions justes et conformes aux méthodes de calcul exposées, qui ne sauraient laisser à la charge de GEST'INNOV une quelconque restitution à opérer.

En tout état de cause, et statuant à nouveau :

- Débouter la société STREGO de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- Condamner la société STREGO à verser à la société GEST'INNOV la somme de 100.000 euros au titre de la première instance, auquel il convient d'ajouter la somme de 20.000 euros au titre de l'appel, conformément à l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la société STREGO aux entiers dépens sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile avec distraction au profit de l'avocat soussigné aux offres de droi;

Dans ses écritures notifiées le 9 septembre 2024 la société BAKER TILLY STREGO demande à la cour au visa des articles 1103, 1170, 1190, 1191, 1217 et suivants, 1224 et suivants, 1231 et suivants, 1240 et suivants, 1352 et suivants du code civil, 369, 695, 696 et suivants, 700 et suivants, 910 du code de procédure civile L123-20 et L123-21 du code de commerce et 121-4 et 513-3 du plan comptable général L.112-2, L.113-1, L.124-1 et L.124-1-1, L.521-1 et suivants du code des assurances, de :

- Débouter les sociétés GEST'INNOV, GENERALI IARD et L'ETUDE JP, prise en la personne de Me [Z] [M], es qualités, de l'intégralité de leurs prétentions, moyens et conclusions ;

- Juger la société BAKER TILLY STREGO recevable en son appel incident et bien fondée en ses moyens et pretentions ;

- Confirmer le jugement entrepris du 4 avril 2023, en ce qu'il a:

. prononcé la résolution du contrat de prestation de service conclu le 26 septembre 2018 entre les sociétés BAKER TILLY STREGO et GEST'INNOV;

. condamné, par conséquent, la société GEST'INNOV à restituer à la société BAKER TILLY STREGO, la somme de 751.477,20 euros TTC au titre des sommes versées en exécution du contrat de prestation resolu ;

- Infirmer le jugement entrepris du 4 avril 2023, en ce qu'il a :

. prononcé la résolution dudit contrat aux torts partagés des sociétés BAKER TILLY STREGO et GEST'INNOV ;

. débouté la société BAKER TILLY STREGO de sa demande de condamnation in solidum de la societe GENERALI IARD avec la société GEST'INNOV ;

. condamné la société BAKER TILLY STREGO à verser à la société GENERALI IARD la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

. débouté la société BAKER TILLY STREGO de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

. débouté la société AKER TILLY STREGO du surplus de ses demandes,fins et prétentions ;

. condamné à parts égales les sociétés BAKER TILLY STREGO et GEST'INNOV aux dépens de l'instance .

Statuant à nouveau :

A titre principal :

- juger la résolution du contrat de prestation de service conclu le 26 septembre 2018, aux torts exclusifs de la société GEST'INNOV, du fait de la défaillance de cette dernière dans l'exécution de ses obligations contractuelles ;

En conséquence :

- FIXER la créance de la société BAKER TILLY STREGO à l'égard de la société GEST'lNNOV et au passif de cette dernière, à titre principal à la somme totale de, plus intérêts, frais et accessoires :

. 751.477,20 euros TTC au titre des sommes versées en exécution du contrat de prestation résolu, augmentée des intérêts afférents aux sommes versées en exécution du contrat de prestation resolu, au taux légal à compter de la date de chaque paiement réalisé par la société BAKER TILLYSTREGO jusqu'à la date du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société GEST'INNOV du 11 mars 2024 ;

. 150.000 euros au titre de l'indemnité prévue au contrat de prestation de service conclu le 26 septembre 2018 entre les parties ;

. 182.870 euros au titre des pertes subies par la société BAKERTILLY STREGO ;

. 12.846.433 euros au titre des gains manqués par la société BAKER TILLY STREGO (et de la perte de chance, le cas échéant);

. 150.000 euros au titre du préjudice moral subi par la société BAKER TILLY STREGO ;

. 12.029 euros au titre des couts engagés par la société BAKER TILLY STREGO dans le cadre de la gestion du litige opposant les parties (hors frais irrepétibles et dépens) ;

- Condamner la société GENERALI IARD à relever et garantir la société GEST'lNNOV de la créance ainsi fixée et, par voie de conséquence, à payer à la société BAKER TILLY STREGO son entier montant, en principal, plus intérêts frais et accessoires ;

A titre subsidiaire, sur ce dernier chef :

- Condamner la société GENERALI IARD à relever et garantir la société GEST'INNOV de la créance ainsi fixée à hauteur d'un million cinq cent mille euros (1 .500.000 euros) et, par voie de conséquence, à payer à la société BAKER TILLY STREGO ce montant, à titre principal avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et avec capitalisation sur les intérêts échus sur plus d'une année;

Dans tous les cas :

- Fixer la créance de la société BAKER TILLY STREGO à l'égard de la société GEST'lNNOV à la somme totale de 100.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d'appel ;

- Condamner la société GENERALI IARD à payer à la société BAKER TILLY STREGO la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d'appel ;

- Condamner l'Etude JP, prise en la personne de Me [Z] [M], à payer à la société BAKER TILLY STREGO la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d'appel.

Dans ses écritures notifiées le 11 septembre 2024 la société GENERALI IARD demande à la cour de :

A titre principal :

- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Rennes le 4 avril 2023 (RG n° 2020F00376) en ce qu'il a :

. Débouté la société STREGO de sa demande de condamner in solidum GENERALI IARD avec la société GEST'INNOV,

. Condamné la société STREGO à verser à la société GENERALI IARD la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Rejeter par conséquent l'intégralité des demandes formées à l'encontre de GENERALI IARD et LA METTRE HORS DE CAUSE.

A titre subsidiaire :

- Débouter la société BAKER TILLY STREGO de sa demande tendant à voir condamner in solidum GENERALI avec la société GEST'INNOV à lui payer le montant de toutes les condamnations, en principal, intérêts et accessoires, qui seront prononcées à l'encontre de la société GEST'INNOV ; - Rejeter toutes les demandes formées à l'encontre de GENERALI IARD excédant les limites de sa garantie (une franchise à hauteur de 4 000 € par sinistre et un plafond de garantie par sinistre à hauteur de 500 000 euros).

En tout état de cause :

- Débouter la société BAKER TILLY STREGO de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de GENERALI ;

- Condamner la société BAKER TILLY STREGO à verser à GENERALI IARD la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance d'appel.

Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.

DISCUSSION

La genèse du projet

Les relations entre les parties sont marquées par une phase précontractuelle conséquente au cours de laquelle est intervenue la société MICROSOFT en transmettant notamment à la société BTS un document d'accompagnement le 3 juillet 2018.

Ce document précise que la solution de gestion 'tout en un' repose sur le logiciel Microsoft Dynamics 365 Business Central autrement désignée BC Son.

Le projet WTA élaboré le 11 juillet 2019 indique notamment :

Les principaux enjeux du projet sont :

Les gains de productivité,

L'augmentation de la satisfaction des clients,

La simplification de son fonctionnement et de son système de management

La projection du métier de l'entreprise à l'horizon 2020-2030

Intégrer le métier de demain avec l'intelligence artificielle

Transformer le cabinet en entreprise

Le nouveau système d'information devra être capable de communiquer avec les applications

connexes, être structurant et évolutif et permettre un pilotage des activités plus efficace

Les objectifs de cette transformation sont d'avoir :

Un système d'information intégré et disponible en temps réel

Un outil spécialisé et orienté vers le métier de demain

Un outil communiquant standard et évolutif

Une gestion de la relation client améliorée

Concernant le calendrier il était prévu :

Suite à la réunion de lancement du 22/06/2018 la décision a été prise pour un démarrage de la phase 1 du lot 1 projet WTA en juillet 2018

les dates clés sont :

Démarrage du lot 1 en juillet 2018

Démarrage du lot 2 en septembre 2018

Démarrage du lot 3 en mars 2019

Libération de la version 1 de WTA en septembre 2019

Recette du lot 2

Recette du lot 3

Le projet prévoit la mise en place d'instances de pilotage selon une fréquence hebdomadaire ( comité de projet) mensuelle (comité de pilotage) et à minima une fois par an ou à la demande (comité stratégiques).

Au titre du plan de réalisation, le projet signale 4 étapes. La première, d'initialisation/cadrage devait mettre en place la logistique du projet et constituer les ateliers de cadrage destinés à :

- comprendre et s'approprier les travaux existants réalisés par STREGO au travers d'une série d'interview par domaine de métier ;

- en déduire la liste des processus métiers;

- dessiner une architecture applicative cible y compris les interfaces ;

- définir le phasage du projet et le périmêtre fonctionnelle de chaque phase

- valider la phasage.

Le contrat de prestations de services régularisé entre la société GEST'INNOV et la société STREGO le 29 septembre 2018 précise que le lot 1 renferme les outils de production interne à destination de l'utilisateur et de ses collaborateurs et le lot 2 des outils de gestion des clients et de reporting à destination des collaborateurs et des clients de l'utilisateur.

Il était donc convenu que jusqu'en juillet 2018 les parties devaient définir les besoins de la société STREGO et dessiner une architecte.

Comme l'indique le COPIL 1 du comité de projet qui s'est réuni le 27 juillet 2018 les travaux étaient divisés en ateliers s'agissant du lot 1 :

atelier 1 : définir les objectifs business

atelier 2 : comprendre les cibles utilisateurs personna 1

atelier 3 : comprendre les cibles utilisateurs personna 2

atelier 4 : déceler les scénarios utilisateurs scénario 1

atelier 5 : déceler les scénarios utilisateurs scénario 2

atelier 6 : déceler les scénarios utilisateurs scénario 3

atelier 7 : déceler les scénarios utilisateurs scénario 4

atelier 8 : déceler les scénarios utilisateurs scénario 5

atelier 9 : déceler les scénarios utilisateurs scénario 6

atelier 10: architecturer l'information (tri descendant)

atelier 11: architecturer l'information (tri montant )

Il s'agissait donc de définir un cahier des charges. La société GEST'INNOV ne peut donc soutenir que les besoins de la société STREGO n'ont pas été exprimés. Avant de démarrer le projet en juillet 2018, les partenaires ont travaillé sur le recueil des besoins de la société STREGO à partir de ses process.

A ce stade la société GEST'INNOV avait encore la possibilité de revoir le calendrier de démarrage du développement de la solution si elle s'estimait insuffisamment renseignée sur les attentes de la société STREGO. Aucune pièce ne vient démontrer qu'elle a émis des réserves sur la faisabilité du projet au regard des éléments recueillis auprès de sa cliente.

Le calendrier des travaux découpé en étapes et comités de pilotage établissent la technicité de le solution confirmée par le montant de son budget et le rôle des partenaires qui devaient agir en interdépendance pour respecter une mise en production à la date prévue en septembre 2019.

Le projet élaboré le 11 juillet 2019 à la suite de la définition des objectifs, précise bien dans une rubrique dite 'Matrice des responsabilités' la répartition des rôles et des tâches entre la société STREGO et la société GEST'INNOV.

Comme le fait remarquer l'appelante, cette chronologie et les documents contractuels confirment la nécessité d'une collaboration étroite entre tous les acteurs du projet et l'implication du client pour lequel le produit a été spécifiquement élaboré.

Toutefois en matière d'intégration de logiciels dans une architecture dématérialisée, considérée comme un produit complexe, le fournisseur a pour sa part l'obligation de s'assurer que la solution qu'il propose et livre réponde aux besoins de son client qu'il aura analysés.

La société GEST'INNOV s'est présentée à la société STREGO comme intégrateur MICROSOFT partenaire à forte valeur ajouté.

Son obligation de délivrance ne peut être considérée comme parfaitement et définitivement exécutée que si le produit a été installé, testé et mis en production, avec pour terme de ce processus une recette contradictoire attestant qu'il satisfait le client.

Les manquements

Le conseil de la société STREGO a mis en demeure la société GEST'INNOV par LR électronique du 10 avril 2020 :

...

Aux termes de ce contrat, votre société s'est ainsi engagée à développer cette solution sur une

durée de 16 mois (de juillet 2018 à octobre 2019) et à livrer à notre cliente la version n°1 finalisée de cette solution au mois de septembre 2019.

Or, il apparait qu'outre l'absence de correction des anomalies, y compris bloquantes, soulevées

par notre cliente, cette version n°1 finalisée n'a pas été livrée à l'échéance contractuellement

fixée, bien que notre cliente ait réglé entre vos mains l'intégralité du prix forfaitaire convenu pour son développement (soit la somme de 704 520 € TTC) et amplement mobilisé ses équipes sur ce projet.

Au mois d'octobre 2019 et dans le cadre d'une démarche purement amiable, notre cliente à toutefois accordé à votre société un délai supplémentaire de 2 à 3 mois pour remédier à cette défaillance.

Malgré ce nouveau délai et la réunion qui s'est tenue en févier dernier en présence des équipes de BAKERTILLY STREGO, de GEST'lNNOV et de MICROSOFT, aucune solution n'a, à ce jour, été livrée à notre cliente, dont les

accès à la plate-forme de recette de la solution ont d'ailleurs été désactivés depuis décembre 2019.

Ainsi, en dépit de ses démarches amiables, notre cliente n'a pu que constater l'absence totale de retour de vos équipes quant à la résolution de nos défaillances, outre l'annulation pure et simple à votre seule initiative de la réunion fixée qui avait été fixée au 2 mars 2020.

ll en ressort que vos manquements dans l'exécution des obligations qui vous incombent en vertu du contrat de prestation de service conçu avec notre cliente sont manifestement établis.

En conséquence et conformément aux stipulations de l'article 9.2 du contrat nous vous mettons formellement en demeure de remédier aux défaillances constatées, notre cliente entendant, en outre, être indemnisée au titre des préjudices qu'elle a subis.

A défaut d'exécution par votre société des termes de la présente mise en demeure dans un délai de 30 jours à compter de la notification ...le contrat de prestation de service qui vous lie sera unilatéralement résilié par notre cliente pour manquement grave de votre société à ses obligations sans préjudice la cas échéant de l'annulation dudit contrat pour dol de votre part.

Vous serez par ailleurs immédiatement redevable de l'indemnité fixée par l'article 9.3 dudit contrat envers notre cliente et tenu de la réparation de l'intégralité des préjudices engendrés par vos défaillances.

...

Le 10 septembre 2020 la société STREGO a résilié le contrat en sollicitant le versement de l'indemnité contractuelle d'un montant de 150 000 euros prévues à l'article 9.3 du contrat et refusant de régler le solde du prix des prestations d'un montant de 156 560 euros HT.

L'article 9.2 du contrat détermine les conditions de la résiliation du contrat par l'utilisateur avant son terme :

L'Utilisateur peut résilier la contrat dans les cas suivants :

- en cas de manquement grave du Fournisseur, après une mise en demeure adressée au Fournisseur par lettre recommandée avec avis de réception et restée sans effet dans un délai de 30jours;

- en cas d'expiration ou de résiliation du partenariat existant entre le Fournisseur et MICROSOFT

Par ailleurs, l'Utilisateur pourra résilier ou ne pas reconduire le Contrat de Maintenance, conformément aux stipulations de ce Contrat de Maintenance.

En cas d'échec du développement de la Solution, dont l'origine est imputable à une faute ou une inexécution des Prestations de Développement par le Fournisseur, le présent Contrat pourra être résilié unilatéralement par l'Utilisateur, après mise en demeure de s'exécuter et de remédier aux dysfonctionnements constatés adressée par lettre recommandée avec accusé de réception restée infructueuse dans un délai de trente (30) jours.

La société STREGO reproche à la société GEST'INNOV des manquements graves à trois niveaux.

1) La délivrance de la solution

La société STREGO affirme que la société GEST'INNOV a livré le lot 1 avec de nombreuses anomalies et n'a pas livré le lot 2. Elle rappelle ainsi que la solution n'a pas été livrée en septembre 2019 comme convenu.

. Le lot 1 :

La société STREGO verse des procès verbaux de recette établis entre le 10 avril 2019 et le 22 juillet 2019 qui montrent que de nombreux modules sont non fonctionnels, ne sont pas livrés ou comportent des anomalies (pièce 31 . 1, 31.2 et 54).

Certaines de ces anomalies sont mineures mais d'autres sont majeures voire bloquantes.

Les procès verbaux de recette qui visent ces anomalies comportent des commentaires de la société GEST'INNOV aux termes desquels des anomalies ont été corrigées. Mais les procès verbaux indiquent aussi que d'autres anomalies ne l'ont pas été.

Le projet du 11 juillet 2019 prévoit une procédure de recette.

3.13.3. Procédure de recette des phases de simulation :

La recette est assurée par STREGO.

GEST'INNOV assistera STREGO sur la mise en recette de l'application.

GEST'INNOV fournit une assistance à STREGO pendant toute la phase de recette.

Dans le document ci-joint sont fournis les descriptifs des simulations préconisées.

Lorsque les critères d'acceptation ne sont pas respectés sur un livrable, la liste des anomalies résiduelles est saisie, un délai de résolution des dites anomalies est négocié.

Les anomalies sont signalées par STREGO à GEST'INNOV:

Dans le cas de validation de livrables documentaires via l'annotation des modifications,

Dans le cas de livrables logiciels via une fiche anomalie.

Anomalie bloquante : Correspond au cas ou l'anomalie bloque le déroulement de la validation

ou recette (l'utilisation d'une ou plusieurs fonctions est bloquée sans possibilité de contournement) : une correction et une relivraison sont impératives avant de poursuivre la validation ou recette.

Anomalie majeure : Correspond au cas ou l'anomalie rend impossible l'utilisation d'une ou plusieurs fonctions. ll existe cependant une possibilité de contournement ou mode de fonctionnement dégradé. Néanmoins l'anomalie majeure ne bloque pas le déroulement de la validation ou recette dans leur ensemble.

Anomalie mineure : une anomalie est dite mineure dans les autres cas.

En cas d'anomalies mineures, et si le nombre de celles-ci reste limité, la validation ou recette d'un livrable peut être prononcée avec réserves (la liste des réserves correspondant à la liste des anomalies résiduelles).

A l'issue de chaque phase de recette, la recette correspondante est prononcée au travers de l'établissement d'un PV de recette rédigé par le Directeur de projet STREGO.

Ce PV de recette peut être :

Sans reserve en l'absence d'anomalies résiduelles,

Avec réserves matérialisant les anomalies résiduelles éventuelles.

Pendant toute la recette, GEST'INNOV s'engage en tout état de cause à fournir son diagnostic et remettre la solution en parfait état de marche, ou à fournir une solution de contournement provisoire (le cas échéant).

Durant la recette, les délais de prise en compte des anomalies sont les suivants:

Anomalie bloquante 3jours - prise en compte et livraison d'une solution de contournement ou d'une solution définitive si celle-ci peut étre réalisée,

Anomalie majeure 5 jours - prise en compte et fourniture d'une solution de contournement dans un délai de 2 jours et planification de la livraison de la solution définitive,

Anomalie mineure : 20 jours - prise en compte de l'anomalie dans le délai de 3 jours et planification de la livraison de la solution définitive.

L'installation de correctifs sera décidée conjointement par STREGO et GEST'INNOV de manière à ne pas perturber le déroulement des recettes.

La date butoir de fin de livraison des correctifs sera indiquée dans le planning.

La société GEST'INNOV devait donc procéder à la correction des anomalies dans des délais contraints. Elle ne démontre pas qu'elle l'a fait.

Pour s'en défendre elle indique que ces réserves pour leur majorité ne se réfèrent pas à un cahier des charges préexistant mais à des exigences de STREGO qui sont évolutives et impossibles à satisfaire pour certaines au regard la solution Dynamics 365 Business Central de MICROSOFT.

Les parties ont défini les besoins de la société STREGO avant la signature du contrat. La société GEST'INNOV n' a donc pu mettre en recette que des fonctionnalités convenues en partenariat.

Elle ne peut non plus opposer à la société STREGO une impossibilité de faire en raison du logiciel de base solution Sass Dynamics 365 Business Central de MICROSOFT. Comme collaborateur privilégié de MICROSOFT elle a validé ce choix.

La société GEST'INNOV affirme également que c'est la société STREGO qui a stoppé le processus de levée des réserves depuis juillet 2019 se limitant à gérer les contraintes techniques découvertes pendant l'été.

Les échanges entre les parties au sujet des contraintes liées solution Sass Dynamics 365 Business Central de MICROSOFT montrent que la société STREGO n'a été informée des contraintes du logiciel qu'en octobre 2019 et non à l'été 2019.

La société STREGO a en effet indiqué à la société MICROSOFT le 15 octobre 2019 :

Gest'innov annonce une limitation à 991 sociétés et 80 Go par instances. A priori cette information est de source Corp.

Dans le document ci-joint octobre 2019 page 10 l'on retrouve le sujet 80 Go mais le nombre de sociétés reste illimité.

...

J'ai du mal à comprendre ce désordre et surtout cette nouveauté si elle est confirmée change totalement l'architecture du projet WTA pour Strégo et la profession.

Au surplus la société GEST'INNOV ne démontre pas que la correction des anomalies était impossible en raison des contraintes liées au logiciel MICROSOFT puisque certaines ont été corrigées. Elle pouvait donc intervenir entre le mois de juillet 2019 et octobre 2019 avant que les relations entre les parties ne se détériorent.

La société GEST'INNOV rappelle que le 19 juillet 2019 la société STREGO lui a transmis un projet de contrat relatif aux conditions commerciales préférentielles. Selon elle cette transmission établit que les livraisons déjà effectuées satisfaisaient la société STREGO.

Cette analyse n'est pas exacte. A cette date la société STREGO pouvait encore espérer que les anomalies seraient corrigées et le lot 2 livré. Elle a donc pu engager des discussions sur les conditions de commercialisation de la solution dont elle attendait la livraison définitive pour le mois de septembre 2019.

Il est donc suffisamment établi que la société GEST'INNOV n'a pas livré le lot 1 exempt d'anomalies dans les délais convenus.

. Le lot 2

La société STREGO affirme que la société GEST'INNOV n'a pas livré le lot 2.

Le lot 2 comporte 3 options :

OPTION 1 DYNAMICS 365 BUSINESS CENTRAL

Déployer DYNAMICS 365 BUSINESS CENTRAL chez vos clients (disponible dès à présent) accessible prochainement via Accountant Hub

OPTION 2 2 CLIENTS AVEC LEUR SYSTEME DE GESTION INTERNE

Connecter les systèmes de vos clients avec le système STREGO

OPTION 3 PETITES ENTREPRISES

Doter vos clients d'un outil simple de récupération des données leur permettant d'avoir des éléments de gestion en temps réel dans un environnement MICROSOFT 365

La société GEST'INNOV fait valoir que la société STREGO a failli à son obligation de collaboration en omettant de lui transmettre la liste de clients et des paniers pour développer les option 1et 3. Elle ajoute qu'elle a déployé l'option 2 le 25 juin 2019.

Les pièces 14 16 et 20 de GEST'INNOV destinées à démontrer qu'elle a sollicité la société STREGO pour lui transmettre des éléments de nature à développer les options 1 et 3 sont trop peu précises pour affirmer que STREGO n'aurait pas satisfait à cette demande. Il s'agit de comptes rendus de comités de pilotage au cours desquels il était question de planifier les ateliers pour permettre de développer le lot 2.

La société GEST'INNOV affirme encore que le 11 février 2020 elle a relancé la société STREGO en ces termes :

..

De votre côté avec vous eu le temps d'identifier les clients tests ainsi que le nombre d'utilisateurs pour effectuer le premier run '

La société STREGO a répondu :

Avant de parler de run sur un produit et des flux non livrés il est prioritaire que les récentes contraintes d'architecture soient évaluées et levées.

Cet échange montre la société STREGO n'a été avisée de l'inadéquation du logiciel MICROSOFT retenu pour l'architecture de la solution, qu'à partir du mois d'octobre 2019. Il ne peut donc lui être reproché d'avoir cessé toute collaboration à partir de cette date alors qu'il était devenu nécessaire de trouver des solutions de contournement voire une autre architecture pour le développement de la solution.

La société GEST'INNOV signale encore qu'elle a livré la fonctionnalité liée à l'option 3.

Le procès verbal de recette du 3 juin 2019 indique que l'import FEC (fichier des écritures comptables) est fonctionnel.

La fonctionnalité de base FEC apparait au titre du lot 1 et non du lot 2. En tout état de cause le procès verbal de recette du 3 juin 2019 précise aussi que le module est fonctionnel mais fait l'objet de réserve. L'option 3 a été livrée mais ne convenait pas à la société STREGO.

Dans ces conditions la société GEST'INNOV échoue à démontrer qu'elle n'a pas livré le lot 2 dans sa totalité en raison de la défaillance de la société STREGO qui affirme au surplus avoir été exclue de l'accès à la plate-forme de recette.

2) La mise à disposition de la solution pendant la période de développement

La société STREGO rappelle que le 19 avril 20219 la société GEST'INNOV a fourni à ses collaborateurs les identifiants et mots de passe permettant les accès à la plate-forme de recettage et aux collaborateurs de tester les modules livrés.

La société STREGO indique que depuis le mois de décembre 2019 ces accès ont été bloqués comme le montrent deux constats d' huissiers des 13 et 18 mars 2020.

Le 27 décembre 2019 la société STREGO a signalé cette difficulté à la société GEST'INNOV.

La société GEST'INNOV explique que le blocage des accès fait suite à une mesure de sécurité nécessitant une remise à jour trimestrielle des mots de passe que la société STREGO ne lui a pas réclamé à cette époque. Elle ne démontre pas que cette mise à jour était déjà intervenue depuis le début des travaux de développement en juillet 2018 et/ou au moins depuis les premières livraison en avril 2019.

En tout état de cause comme fournisseur des modules à tester et administrateur des mots de passe il appartenait à la société GEST'INNOV de signaler à sa partenaire que les mots de passe devaient être actualisés avant la coupure. Les pièces 35 et 36 (stratégie d'expiration du mot de passe) communiquées ne constituent pas des avertissements et ne permettent pas de vérifier que la société GEST'INNOV a bien informé et relancé la société STREGO sur la nécessité de renouveler les mots de passe de ses collaborateurs.

Cette impossibilité d'accéder à la plate-forme a de fait, interdit à la société STREGO de s'associer au développement de la solution. Il ne peut donc lui être reproché d'avoir cessé toute collaboration.

3) Le devoir d'information et de conseil de la société GEST'INNOV

En sa qualité de professionnelle d'intégration de logiciels MICROSOFT, la société GEST'INNOV était tenue vis à vis de la société STREGO d'un devoir d'information et de conseil sur la capacité du logiciel Microsoft Dynamics 365 Business Central autrement désignée BC Son à supporter l'architecture de la solution.

L'appelante rappelle dans ses écritures que la société MICROSOFT a présenté à la société STREGO les fonctionnalités de la solution Microsoft Dynamics NAV 2017 ce que confirme la pièce 8 de STREGO (plaquette de présentation NAV 2017 transmise par MICROSOFT le 22 mai 2017).

Les échanges entre les parties à compter du 15 octobre 2019 montrent que cette version comportait des limitations. Les pièces au débat établissent en effet que la version 2017 était destinée aux start-up et TPE.

La société GEST'INNOV reconnait cette contrainte.

Elle affirme que STREGO a choisi ce logiciel et qu'en vertu de l'article 20 du contrat elle doit en assumer la responsabilité.

La société STREGO indique pourtant dans un mail du 29 octobre 2019 que la version Son a fait l'objet d'un choix par GEST'INNOV ce qui est cohérent compte tenu du partenariat GEST'INNOV/ MICROSOFT et des compétences techniques de GEST'INNOV.

L'article 20 du contrat du 26 septembre 2018 prévoit que l'utilisateur assume les responsabilités qui concernent notamment l'adéquation de la solution à ses besoins.

Cette disposition ne concerne pas le choix du logiciel servant de support à l'architecture de la solution, mais oblige l'utilisateur à être clair dans la définition de ses besoins et attentes.

En tout état de cause la choix de STREGO ne résulte que de la présentation qui lui a été faite de cette version Son. N'étant pas professionnelle de l'intégration de logiciels elle ne pouvait pas imposer ce choix qui n'appartenait qu'à ses prestataires spécialisés, ni s'apercevoir qu'un produit conseillé à la fois par MICROSOFT et GEST'INNOV n'était pas adapté.

Au moment du lancement des travaux, la version 2017 ne permettait pas de répondre aux besoins de la société GEST'INNOV.

La société STREGO reconnait les limitations qui remettent en cause toute l'architecture de la solution mais ajoute que MICROSOFT a annoncé la sortie de Microsoft Dynamics 365 Business Central dans sa version On premise, de plus grande capacité, uniquement le 3 octobre 2018 soit après la signature du contrat le 26 septembre 2018.

La société GEST'INNOV produit un échange avec la société MICROSOFT du 22 octobre 2019 pour démontrer que MICROSOFT elle même ne connaissait pas les contraintes de la version :

Suite à un mail de [B] [U] à [L] et moi, ce dernier revient vers nous sur la question de la limite du nombre de clients par tenant sur BC.

Après vérification directement auprès de [K] [E] (Principal Program Manager au sein du groupe produits Dynamics 365), voici sa réponse :

' On # Companies : Its unlimited (up to database limits)

' Database limit : terms dictate it cannot be more than 80GB, the technical limit is 150GB. If

you stay away from loading blobs (Pictures, files) 150GB of transactional data is quite big.

I would question the partner/customer whether we can split those companies up into multiple tenants - especially knowing you can now have multiple tenants per customer.

Par ailleurs, j'ai aussi vérifié sur le guide licensing Business Central (ci-attaché) que vous devez certainement connaître, le document indique bien que le nombre de société est illimité (page 10) sauf si j'interprète mal.

Le représentant de MICROSOFT en France à l'origine de ce mail ne précise pas s'il évoque la version 2017 ou la version On premise commercialisée le 3 octobre 2018. Il indique au surplus qu'il n'est pas certain de bien interpréter les documents.

La société GEST'INNOV ne verse pas la version 2017 du guide licensing Business Central.

La page 5 du guide de juillet 2018 en langue anglaise, précise Companies unlimited.

Cette information ne coincide pas avec les propos du représentant MICROSOFT dans son courriel du 22 octobre 2019 qui renvoie à la page 10 du guide. Elle contredit aussi l'existence de contraintes admises par tous les partenaires.

En tout état de cause il appartenait à la société GEST'INNOV de vérifier auprès de MICROSOFT que les capacités de la version proposée à la société STREGO permettaient de supporter le projet.

Elle s'est contentée de s'en remettre à un représentant MICROSOFT en France qui n'est même pas certain de sa compréhension des documents techniques.

En respectant cette obligation la société GEST'INNOV aurait pu déconseiller cette version à STREGO en attendant la commercialisation du nouveau logiciel en octobre 2018 pour débuter les travaux de développement.

La société GEST'INNOV fait également valoir que la société STREGO a cessé toute recherche de solution en se plaçant sur un terrain contentieux.

Il ressort effectivement des échanges entre les parties à partir du mois de février 2020 que la société STREGO n'a pas répondu à la proposition de MICROSOFT de participer à une réunion le 25 mars 2020. La société GEST'INNOV affirme que cette réunion était pourtant destinée à lui présenter un projet de contournement et une nouvelle architecture.

A cette date les délais de livraison de la solution étaient déjà dépassés depuis plusieurs mois.

La société STREGO a cependant attendu le 10 septembre 2020 pour prononcer la résiliation du contrat après une mise en demeure du 10 avril 2010.

Il ne peut lui être reproché d'avoir abandonné un projet qui présentait de nombreux dysfonctionnements alors qu'elle avait réglé 80 % de son budget sans obtenir de résultat prometteur.

Les manquements graves de la société GEST'INNOV sont donc établis.

La résolution prononcée le 10 septembre 2020 l'a été aux torts de la société GEST'INNOV.

Toutes ses demandes sont rejetées.

Le jugement est infirmé de ce chef.

La résolution ayant été prononcée aux torts de la société Gestinov, ses demandes de paiement de dommages-intérêts seront rejetées.

Les incidences de la résolution

1) La restitution de la somme de 751 477, 20 euros

La société STREGO sollicite la restitution de la somme de 751 477, 20 euros correspondant à 80 % du prix qu'elle a versé.

L'article 1229 du code civil précise :

La résolution met fin au contrat.

La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l'assignation en justice.

Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l'exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l'intégralité de ce qu'elles se sont procuré l'une à l'autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.

Contrairement aux affirmations de la société GEST'INNOV la restitution d'une prestation accomplie sur le fondement d'un contrat résolu doit inclure la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle cette prestation est assujettie.

La société GEST'INNOV considère que les travaux effectués durant l'étape de conception ont bénéficié à la société STREGO. Elle rappelle en effet que les lots 1 et 2 ont été livrés entre avril et juillet 2019. Elle ajoute que les prestations correspondant à la phase de développement ont été également utiles à la société STREGO et que leur suite a été mise en échec du fait de la société STREGO qui a fait 'capoter' le projet. Elle affirme donc qu'aucune restitution n'est due.

Les lots 1 et 2 ont été livrés partiellement et/oui présentant des anomalies non corrigées. La société GEST'INNOV ne verse aucun document technique permettant de confirmer que les modules livrés sans anomalie apportent un gain dans la gestion de la société STREGO. Elle ne détaille pas l'utilité de ses travaux pour STREGO.

S'agissant de la phase de développement en l'état des travaux à la fin de l'année 2019 l'architecture proposée n'était pas adaptée pour permettre aux nombreux collaborateurs et clients de la société STREGO de l'utiliser.

En outre comme le rappelle la société STREGO une nouvelle architecture aurait encore nécessité des travaux de conception et de tests mobilisant à nouveau les collaborateurs de STREGO pour réaliser ces tests et la recette.

A défaut de rapporter l'utilité des travaux réalisés par la société GEST'INNOV pour sa cliente il convient donc de la condamner à restituer à la société STREGO la somme de 751 477, 20 euros.

En conséquence il convient de fixer la créance de la société BAKER TILLY STREGO au passif de la société GEST'INNOV à la somme de 751.477,20 euros TTC au titre des sommes versées en exécution du contrat de prestation résolu, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de chaque paiement réalisé par la société BAKER TILLYSTREGO jusqu'à la date du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société GEST'INNOV du 11 mars 2024.

2) L'indemnité contractuelle

Au visa de l'article 9.3 du contrat 26 septembre 2018 la société STREGO sollicite la somme de 150 000 euros.

L'article 9.3 lndemnité contractuelle en cas de défaillance de l'une des Parties précise :

En cas de résiliation du présent Contrat, la Partie contre laquelle une faute grave peut être prouvée dans le cadre de ses obligations devra payer à l'autre partie une indemnité contractuelle de CENT CINQUANTE MILLE €uros (150 000 €uros), sans préjudice du droit de l'autre Partie de demander réparation de tout préjudice qu'elle pourrait subir.

Cette somme a été déterminée d'un commun accord entre les Parties compte tenu de l'importance stratégique que revêt le Contrat pour chacune d'elle.

L'article 9.3 prévoit une indemnité en cas de faute grave, alors que la résolution est prévue en cas de manquement grave. Ces deux notions ne sont pas identiques. La faute pour être grave doit être grossière, traduire une mauvaise foi ou impéritie ou une incurie. En l'espèce, la société GEST'INNOV n'est pas parvenue à mettre le produit au point mais il n'est pas justifié qu'elle est fait preuve de légèreté dans ses efforts pour y parvenir. Elle a manqué gravement à ses obligations contractuelles en étant incapable d'atteindre les objectifs fixés, mais aucune faute grave n'est caractérisée à son encontre. Il n'y a donc pas lieu à indemnisation telle que prévue à l'article 9.3 de la convention.

Il convient donc de rejeter la demande de la société STREGO tendant à la condamnation de la société GEST'INNOV à la somme de 150 000 euros

Le jugement est confirmé de ce chef.

Les pertes subies dans le cadre du projet WTA

Pour justifier ses demandes la société STREGO verse une attestation de son commissaire aux comptes du 28 octobre 2020 :

En notre qualité de Commissaire aux comptes de la société STREGO et en réponse à votre demande, nous avons procédé à la vérification des informations figurant dans le document joint à la présente attestation et établi dans le cadre du litige avec la société GEST'INNOV sur le projet WTA.

Les informations, jointes à la demande, ont été détaillées dans différentes annexes :

- Volume et coût de revient des heures consacrées au projet: 1 714 heures et des prestations valorisées à hauteur de 231 269 euros.

- Coût de facturation des heures consacrées au projet par le personnel productif et perte de marge induite : 937 heures pour un coût de facturation de 144 408 euros et une perte de marge de 69 894 euros.

- Volume et coût de facturation des heures de tenue de journaux pour l'exercice 2018/2019 :

166 938 heures pour un coût de facturation de 11 376 619 euros.

Ces informations ont été établies et arrêtées au 30 septembre 2020, sous la responsabilité du Président de la société STREGO.

II nous appartient de nous prononcer sur la cohérence de ces informations avec les données de la gestion interne ainsi qu'avec la comptabilité.

ll ne nous appartient pas, en revanche, de remettre en cause les hypothèses retenues par la direction.

Notre intervention, qui ne constitue ni un audit ni un examen limité, a été effectuée selon les normes d'exercice professionnel applicables en France.

Nos travaux ont consisté à valider l'ensemble des données des différentes annexes, en s'assurant que :

- Le volume d'heures correspond aux temps saisis par chaque intervenant, dans le cadre du projet WTA et suivant la procédure de suivi des temps mise en place au sein du groupe BAKER TILLY STREGO ;

- La valorisation de ces heures est fonction du coût social de chaque intervenant du projet WTA ;

- La prise en compte de la facturation des prestations de la société BPS et des cabinets d'avocats ORATIO AVOCATS et KBRC est justifiée et réelle ;

- Le taux de chargement environnemental est en rapport avec les informations comptables et financiéres du groupe BAKER TILLY STREGO ;

Le calcul de la perte sur marge est cohérent vis-a-vis des données visant Messieurs [S] et [V] ;

- Les heures de tenue des journaux de l'exercice 2018/2019, ainsi que leur valorisation sont en accord avec les états de la gestion interne.

Sur la base de nos travaux, nous n'avons pas d'observation à formuler sur la cohérence des informations figurant dans le document joint avec les données de la gestion interne, ainsi qu'avec la comptabilité.

Cette attestation n'a de valeur probatoire que si elle s'accompagne des pièces et données comptables notamment sur lesquelles le commissaire aux comptes a réalisé son contrôle de cohérence. Il précise lui même qu'il ne peut examiner les hypothèses retenues par la direction.

1) Les coûts et dépenses engagés en phase de conception

. La société STREGO sollicite la somme de 62 123 euros à parfaire, selon justificatifs versés aux débats au titre du coût de mobilisation de ses équipes en phase de conception de la solution sur la base du nombre d'heures passées par chacun des intervenants et du coût complet de revient de ces heures (coût salarial augmenté d'un taux de chargement environnemental de 30% du salaire chargé).

En pièce 37 elle communique un tableau qui reprend par salarié le nombre d'heures passés sur le projet et le coût de revient complet ainsi que le coût des heures de tenue de journaux pour l'exercice 2018/2019. Elle y adjoint ses pièces 37-1 à 37-7.

La société STREGO n'établit pas que les salariés figurant au tableau pièce 37 ont bien participé au projet.

En tout état de cause elle ne verse pas de documents permettant de vérifier le nombre d'heures de chaque salarié sur le projet et aucune méthode de calcul n'est versée au débat pour justifier ce montant.

Les fiches en pièces 37-1 à 37-7 qui concernent les salariés du tableau pièce 37 sont biffées sur leur grande majorité de sorte que leur lecture ne permet pas de les analyser et de les confronter à l'attestation du commissaire aux comptes. Leur lien avec les coûts de mobilisation n'est donc pas établi.

Par ailleurs la société STREGO n'explique pas son choix de retenir un taux de chargement environnemental de 30% du salaire chargé sauf à affirmer qu'il serait raisonnable.

A défaut pour la société STREGO de justifier de cette demande, elle est rejetée.

Le jugement est confirmé de ce chef.

. La société STREGO sollicite la somme de 6500 euros HT en remboursement des honoraires versés à son conseil dans le cadre de la négociation du contrat.

Elle verse une facture du cabinet ORATIO du 30 septembre 2018 d'un montant de 6 500 euros HT (pièce 66).

Ainsi que le fait remarquer le tribunal, ces honoraires restent dus quelque soit l'issue des négociations, les parties à ce stade de la relation d'affaire n'étant jamais assurées de sa réussite.

La demande de la société STREGO est donc rejetée.

Le jugement est confirmé de ce chef.

2) Les coûts et dépenses engagés en phase de développement

La société GEST'INNOV sollicite la somme de 114 247 euros à parfaite selon justificatifs au débat au titre du temps passé par ses salariés au développement de la solution sur la base du nombre d'heures passées par chacun desdits intervenants et du coût complet de revient de ces heures (coût salarial augmente d'un taux de chargement environnemental de 30% du salaire chargé).

En pièce 37 elle communique un tableau qui reprend par salarié le nombre d'heures passés sur le projet et le coût de revient complet ainsi que le coût des heures de tenue de journaux pour l'exercice 2018/2019. Elle y adjoint ses pièces 37-1 à 37-7.

La société STREGO n'établit pas que les salariés figurant au tableau pièce 37 ont bien participé au projet.

En tout état de cause elle ne verse pas de documents permettant de vérifier le nombre d'heures de chaque salarié sur le projet et aucune méthode de calcul n'est versée au débat pour justifier ce montant.

Les fiches en pièces 37-1 à 37-7 qui concernent les salariés du tableau pièce 37 sont biffées sur leur grande majorité de sorte que leur lecture ne permet pas de les analyser et de les confronter à l'attestation du commissaire aux comptes. Leur lien avec les coûts de mobilisation n'est donc pas établi.

La société STREGO n'explique pas son choix de retenir un taux de chargement environnemental de 30% du salaire chargé sauf à affirmer qu'il serait raisonnable.

A défaut pour la société STREGO de justifier de cette demande, elle est rejetée.

Le jugement est confirmé de ce chef.

3) Le gain manqué au titre de la mobilisation du personnel productif

La société STREGO sollicite une indemnisation au titre de la perte de marge (coût de facturation - coût de revient) sur le temps passé par ses collaborateurs sur le projet WTA au préjudice de son activité facturable valorisée sur la base du nombre d'heures passées par chacun de ces collaborateurs et du coût de facturation duquel est déduit le coût de revient de ces heures à un montant estimé de 69.894 euros HT, à parfaire, selon justificatifs verses aux débats.

La société GEST'INNOV rappelle à juste titre le gain manqué dont se prévaut la société STREGO n'a pas de caractère certain. Il s'agit d'une perte de chance d'obtenir une marge sur la facturation des actes de la société STREGO. Elle ne démontre pas en quoi la mobilisation de son personnel sur le projet WTA a entrainé une diminution de son activité facturable, qui est par principe soumise à un aléa lié au contexte économique.

La société STREGO ne précise pas dans quelle proportion les salariés concernés participaient aux actes facturés.

Les pièces 37-8 et 37-9 communiquées par la société STREGO à ce titre sont trop peu précises pour établir cette perte de chance.

A défaut de produire des données sur lesquelles elle se fonde l'évaluation effectuée par la société STREGO n'est donc pas justifiée.

Elle est rejetée.

Le jugement est confirmé de ce chef.

4) Le gain manqué au titre de l'utilisation de la solution

. Les économies non réalisées au titre de la migration de la solution GEGID vers la solution AKELEA.

La société STREGO fait valoir que la solution devait remplacer dès le mois d'octobre 2021, la solution de gestion CEGID qu'elle utilisait ce qui lui permettait de réaliser des économies eu égard au coût des licences utilisateurs CEGID et au coût des licences utilisateurs négocié avec GEST'INNOV.

Elle évalue le gain manqué au titre des économies prévues sur une durée minimale de 5 ans à la somme de 1.008.000 euros HT en fonction du nombre d'utilisateurs (74-53) x 12 x 800 x 5ans.

Pour justifier le délai de 5 ans la société STREGO explique qu'elle correspond au temps perdu du fait des défaillances de GEST'INNOV et à la durée totale nécessaire pour développer un nouveau projet équivalent au projet WTA.

Ce délai est arbitraire et ne repose sur aucune estimation sérieuse et comparative. Le projet initial a débuté en mars 2018 (premiers COPILS) et devait s'achever en septembre 2019. Il devait donc être mené sur 18 mois. Dans ces conditions la société STREGO ne justifie pas qu'un projet similaire devrait être projeté sur 5 ans.

Par ailleurs la société STREGO ne démontre pas que toutes les fonctionnalités du logiciel CEGID devaient être supprimées au profit de la solution élaborée par la société GEST'INNOV.

L'évaluation effectuée par la société STREGO n'est donc pas justifiée.

Elle est rejetée.

Le jugement est confirmé de ce chef.

. Les économies non réalisées au titre de la suppression du logiciel RCA dont les fonctionnalités devaient être intégrées dans WTA.

La société STREGO fait valoir que l'échec du projet WTA l'a privée de la réalisation d'une économie correspondant au coût d'utilisation et de maintenance du logiciel RCA, soit 6.532 euros HT par mois et donc 78.384 euros HT par an.

Elle évalue la somme qu'elle réclame à hauteur de 391.920 euros HT sur la base de factures RCA et sur la durée de 5 ans (78.384 x 5).

Pour confirmer que la module RCA devait être remplacé par WTA la société STREGO renvoie au compte rendu d'atelier métier du 26 octobre 2018 qui précise notamment :

Fonctionnalités supplémentaires identifiés :

Business central doit pouvoir comporter les fonctionnalités suivantes :

Possibilité de retrouver dans WTA l'ensemble des fonctionnalités comprises dans les modules RCA.

Attention pour STREGO seuls les modules : Prévision flash- Evaluation flash-Bilan imagé-avec de l'analyse Sectorielle-IF doivent être repris. Pour le projet WTA arbitrage pour savoir si on reprend l'ensemble des modules proposés par RCA (tenir compte également des MEG).

Ce compte rendu démontre qu'il n'était pas certain que les fonctionnalités RCA soient reprises.

Il ajoute que certaines seulement de ces fonctionnalités devaient figurer dans le WTA.

Dans ces conditions à défaut pour la société STREGO de démontrer lesquelles de ces fonctions devaient finalement être reprises dans WTA, sa demande n'est pas suffisamment justifiée.

Elle repose sur un délai d'économies non réalisées de 5 ans qui n'est pas non plus justifié.

La demande de la société STREGO est rejetée.

Le jugement est confirmé de ce chef.

5) Le gain manqué de productivité au titre de l'utilisation de la solution

La société STREGO fait valoir que la solution avait vocation à accroître la productivité de ses collaborateurs dans l'exercice de leurs missions d'expertise comptable.

Elle estime, sur la base des données chiffrées de gestion interne et du volume d'heures facturables passées par ses collaborateurs sur les missions de retenue des journaux du 1er septembre 2018 au 31 aout 2019 valorisées à 11.376.619 euros HT, pouvoir réaliser avec la solution un gain de productivité (rentabilité) annuel de l'ordre de 20%, soit un gain annuel de 2.275.323 euros HT a minima sur ces missions sur 5 ans.

La société STREGO qui procède par estimation ne verse aucune pièce comptable de nature à justifier cette demande. Les pièces 37-10 37-11 et 37-12 ne permettent pas de correler cette demande à des données précises de gestion interne.

Elle reposes sur un délai de 5 ans qui n'est pas non plus justifié.

La demande de la société STREGO est rejetée.

Le jugement est confirmé de ce chef.

Le préjudice moral

La société STREGO sollicite la somme de 150 000 euros au titre de son préjudice moral en faisant valoir que l'échec d'un projet informatique a anéanti les espoirs de ses collaborateurs qui se sont investis et a destabilisé ses équipes et son management d'entreprise.

La société STREGO ne verse aucune pièce de nature à démontrer la destabilisation de ses équipes.

Cette demande n'est pas justifiée.

Elle est rejetée.

Les coûts de la gestion du litige

Les pièces versées par la société STREGO pour justifier sa demande relative à la gestion du litige sont inexploitables ( 37 à 37-7).

En outre la pièce 65 (factures de la société BPS Advisor) sont de montants supérieurs à la somme sollicitée par la société STREGO à ce titre. M [X] n'apparait dans aucune de ces factures qui sont pour partie biffées. Il est donc impossible de vérifier sa participation auprès de la société STREGO.

En tout état de cause ces dépenses ne résultent que de son choix de faire appel à des conseils extérieurs à son cabinet d'avocat et à des huissiers de justice pour réaliser des constats. Elle doit en assumer la charge.

Sa de

mande est rejetée.

Le jugement est confirmé de ce chef.

L'appel en garantie de la société GENERALI IARD

1) La protection juridique

La société STREGO considère que l'ouverture par GENERALI d'un dossier PROTECTION JURIDIQUE au bénéfice de la société GEST'INNOV confirme qu'elle entendait la garantir au titre de la garantie RESPONSABILITE CIVILE.

Les dispositions générales du contrat PROTECTION JURIDIQUE prévoient:

Article 1 Objet du contrat

Au titre du présent contrat, nous prenons en charge votre Protection Juridique de la manière suivante :

1.1 Nous répondons à vos demandes d'informations en vue de prévenir la réalisation d'un sinistre et nous vous fournissons à ce titre, nos conseils par téléphone et nos services comme il est indiqué à l'article 2 'Nos prestations'.

1.2 En cas de sinistre garanti, nous intervenons en application des dispositions contractuelles ci-après exposées :

- pour votre défense juridique si vous faites l'objet d'une réclamation amiable ou d'une action judiciaire,

- pour votre recours juridique, c'est-à-dire l'exercice au plan amiable ou judiciaire, de votre propre réclamation si vous êtes victime d'une atteinte à vos intérêts ou d'un préjudice (corporel,matériel ou financier) susceptible de donner lieu à indemnisation de la part d'un tiers.

Les conditions particulières du contrat précisent :

Le contrat Protection Juridique ne s'applique pas aux litiges dirigés contre l'assuré en raison de dommages mettant en jeu sa Responsabilité Civile lorsqu'elle est garantie par un contrat d'assurance ou lorsqu'elle aurait dû l'être en exécution d'une obligation légale d'assurance. L'assuré a déclaré être titulaire d'un contrat d'assurance le garantissant pour son activité professionnelle garantie.

Dans ces conditions l'ouverture d'un dossier au titre de la protection juridique à la demande de la société GEST'INNOV le 8 octobre 2020 n'induit pas la garantie automatique de la société GENERALI.

La société GEST'INNOV a sollicité la mise oeuvre de la garantie RC en déclarant un sinistre le 17 mai 2021 à la suite de son assignation devant le tribunal de commerce. Cette demande exclut la mise en oeuvre du contrat protection juridique.

Conformément à l'articulation entre les deux contrats, l'agent GENERALI a donc indiqué à son collègue du département RC le 17 mai 2021 l'ouverture d'un sinistre RC :

Notre assuré GEST INNOV a été assigné en novembre 2020 par son client STREGO.

Par le biais de son contrat PJ EQUITE GENERALI AP989813, il a donc procédé à l'ouverture d'un sinistre Protection juridique pour la prise en charge de ses honoraires. Generali n' a pas été assigné.

Aux vues des conclusions jointes, sous réserves de responsabilités et de garanties, nous avons procédé ce jour à l'ouverture d'un sinistre RC sous la référence 37712329, et vous demandons de reprendre la gestion de ce dossier.

Les plaidoiries sont fixées pour octobre 2021.

Il est bien indiqué que le département RC reprend le dossier et que la garantie n'intervient que sous réserve des responsabilités, ce qui signifie à ce stade de la procédure, qu'elle n'est pas acquise.

La société STREGO ne peut tirer aucune incidence de l'ouverture des deux sinistres succesivement quant à la mise en oeuvre de la garantie RC laquelle ne dépend que des sinistres assurés et des exclusions figurant au contrat.

2) La garantie responsabilité civile

Dans un courriel du 10 aout 2021 l'agent GENERALI a informé le dirigeant de la société GEST'INNOV du refus de garantie :

...

Au vu de ces éléments et après étude du contrat AP451775 dont est titulaire GEST'lNNOV auprès de notre compagnie, il apparait que les garanties ne peuvent vous être acquises.

En effet, au titre des dispositions générales GA3F24E PED RC il est précisé :

Page 8 : exclusions spécifiques à la RC après/ou professionnelle/N°16, est exclu : 'Tout préjudice

afférent à la conclusion, la reconduction, la modification, la résiliation, l'annulation, la rupture des contrats que l'assuré a passé avec des tiers'.

L'ensemble des demandes concernant la résolution du contrat et la restitution des sommes versées est exclu au titre de l'exclusion sus visée.

Page 9 : exclusions spécifiques à la RC après et/ou professionnelle / N° 4 sont exclus :'Les réclamations résultant de la non-obtention des résultats auxquels l'assuré s'est engagé dans le cadre de ses prestations, propositions, prestations et conseils.'

Les demandes indemnitaires pour manque à gagner sont exclues au titre de l'exclusion N°4.GENERALI ne peut donc intervenir.

Nous restons a votre disposition pour tout complément d'information.

La société STREGO estime que les conditions générales du contrat RC ne lui sont pas opposables et qu'en tout état de cause les clauses d'exclusion de garantie ne sont pas applicables.

. L'opposabilité du contrat

Les conditions particulières du contrat responsabilité civile à effet du 5 novembre 2018 précisent :

Le contrat se compose des présentes Dispositions Particulières et des documents référencés ci-dessous, dont l'assuré reconnait avoir reçu un exemplaire :

- Dispositions Générales N° GA3F24E DISPOSITIONS GENERALES RC

Les présentes dispositions particulières constituent un tout indissociable de 6 pages.

De convention expresse, le fait pour l'assuré de se prévaloir de l'une quelconque des stipulations du présent contrat, notamment en effectuant des déclarations relatives au risque assuré, en déclarant un sinistre ou en fournissant à une autre personne les références du contrat pour justifier d'une garantie d'assurance, vaut acceptation irrévocable de l'ensemble du contrat, lequel constitue un tout indivisible.

Vous reconnaissez voir reçu au titre de projet de contrat, ce jour et préalablement à sa signature, les présentes Dispositions Particulières ainsi que l'ensemble des documents composant le contrat et mentionnés ci-dessus.

DUREE DU CONTRAT.

Le contrat est conclu pour une durée d'un an avec tacite reconduction. ll peut être résilié chaque année moyennant un préavis de deux mois avant le 1er février, date anniversaire du contrat.

Les pages du document sont toutes signées par le souscripteur. La signature correspond à celle de M .Berthier, dirigeant de la société GEST' INNOV qui figure au contrat régularisé avec la société STREGO le 26 septembre 2018.

Les conditions générales du contrat 'responsabilité civile entreprise' qui prévoient les conditions d'exclusion de la garantie ne sont pas signées mais le dirigeant de la société GEST'INNOV a reconnu qu'il en avait reçu un exemplaire en signant les conditions particulières.

La société GENERALI démontre ainsi qu'elle a informé son assurée des causes d'exclusion de garantie prévues au contrat responsabilité civile.

Le contrat dans sa globalité, conditions générales et particulières est donc opposable à la société STREGO dans le cadre de son action directe à l'encontre de la société GENERALI.

. L'exclusion de garantie

Les conditions générales du contrat précisent :

Chapitre 1 - Objet du contrat

Le présent contrat a pour objet de garantir l'Assuré contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant lui incomber en raison des dommages corporels* , matériels* et immatériels* causés aux tiers, imputables à l'activité ou aux activités déclarées dans la limite des montants garantis figurant aux Dispositions Particulières, et sous réserve des exclusions énumérées au chapitre 3.

La compagnie GENERALI a opposé à la société GEST'INNOV une exclusion de garantie figurant à l'article 16 des conditions générales chapitre 3 :

Ce qui exclu : tout préjudice afférent à la conclusion, la reconduction, la modification, la résolution, la résiliation l'annulation la rupture de contrats que l'Assuré* a passé avec les tiers*.

La société STREGO affirme que l'application de cette clause qui n'est pas limitative, prive l'obligation essentielle de l'assureur de toute substance.

La clause litigieuse ne vide pas la police d'assurance de sa substance. En effet la société GEST'INNOV reste garantie au titre des dommages résultant de sa faute inexcusable en sa qualité d'employeur, accident du travail, maladies professionnelles, dommages causés aux biens confiés ou prêtés, atteintes accidentelles à l'environnement sur site non soumis à autorisation ou enregistrement, responsabilité civile après livraison et/ou professionnel, frais de dépose et repose engagés par l'assuré, frais de retrait y compris dépenses de restauration de l'image de marque atteinte logique et frais de prévention.

La société STREGO fait encore valoir que ses demandes en restitution du prix et versement de l'indemnité contractuelle ne sont pas afférentes à la conclusion, la reconduction, la modification, la résolution, la résiliation, l'annulation, la rupture des contrats passés par GEST'INNOV mais résultent d'un défaut d'exécution du contrat par GEST'INNOV lui occasionnant un préjudice indemnisable.

L'analyse de la société STREGO n'est pas exacte.

La créance de restitution du prix qu'elle a versé à la société GEST'INNOV ainsi que celle relative à l'indemnité contractuelle de 150 000 euros sont la conséquence directe de la résiliation du contrat liant la société GEST'INNOV à la société STREGO. Les conséquences de cette résiliation font l'objet d'une exclusion de garantie.

Affirmer le contraire reviendrait à contraindre l'assureur à restituer le prix versé par la société STREGO alors que cette restitution qui fait suite à la résiliation du contrat ne constitue pas un préjudice indemnisable.

La société STREGO ajoute que le refus de GEST'INNOV de lui restituer le prix auquel elle a été condamnée constitue une faute engageant sa responsabilite extra contractuelle dans l'exercice de son activité et lui cause un dommage dont le montant est égal au prix non restitué également indemnisable.

La faute de la société GEST'INNOV n'est pas établie.

L'ouverture d'une procédure de sauvegarde judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Paris du 11 mars 2024, démontre que la société GEST'INNOV présente des difficultés qu'elle n'était pas en mesure de surmonter.

Dans son ordonnance du 25 janvier 2024 le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Rennes rappelle :

S'agissant des créances clients il ne peut être raisonnablement soutenu que celles puissent être immédiatement mobilisées.

Il en résulte que la société GEST'INNOV malgré l'amélioration de sa situation en 2023 n'est pas en capacité d'exécuter le jugement déféré.

La société STREGO n'établit pas que la société GEST'INNOV aurait retrouvé meilleure fortune.

Dans ces conditions la clause d'exclusion de garantie figurant aux conditions générales de contrat article 16 du chapitre 3 trouve bien à s'appliquer. Elle est opposable à la société STREGO et la société GENERALI IARD est bien fondée à lui opposer une absence de garantie sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres conditions d'exclusion de garantie figurant au contrat souscrit par la société GEST'INNOV.

3) Le devoir d'information et de conseil de la société GENERALI

La société STREGO soutient que la société GENERALI engage sa responsabilité civile délictuelle pour avoir manqué à son obligation d'information et de conseil à l'égard de son assuré et lui avoir fait souscrire une garantie inadaptée à ses besoins et au projet WTA ; que ces manquements lui causent un préjudice.

La garantie souscrite par GEST' INNOV ne vide pas le contrat de sa substance puisque toute l'activité professionnelle de la société GEST'INNOV ne fait pas l'objet d'exclusions .

Ainsi que la remise des conditions particulières applicables à compter du 5 novembre 2018, l'établit, le dirigeant de la société GEST'INNOV a reçu toute les informations relatives aux conditions d'application du contrat RC, aux exclusions et plafonds des garanties.

Le tableau figurant aux conditions particulières du contrat montre que ces plafonds de garantie sont loin d'être négligeables y compris pour une société de numérique. La société STREGO ne peut sur ce point évaluer l'inadéquation du montant des garanties à la mesure de ses propres demandes indemnitaires qui ont toutes été rejetées à l'exclusion du versement de l'indemnité contractuelle de 150 000 euros.

Par ailleurs il n'est pas démontré que la société GENERALI IARD a été informée par son assurée des enjeux financiers afférents au contrat souscrit par la société GEST'INNOV avec la société STREGO. Par suite il peut lui être reproché de n'avoir pas alerté la société GEST'INNOV sur l'inadéquation supposée des garanties souscrites et/ou conseillé d'étendre ces garanties.

La société GENERALI IARD démontre donc qu'elle a respecté son obligation d'information et de conseil vis à vis de son assurée. Aucun manquement de ce chef ne saurait lui être reproché.

En tout état de cause, l'obligation de restituer les sommes perçues dans le cadre de la résolution du contrat ne constitue pas un dommage causé à autrui et n'aurait pas été couverte par une garantie responsabilité civile plus étendue.

Les demandes de la société STREGO à l'encontre de la société GENERALI IARD sont rejetées.

Le jugement est confirmé de ce chef.

Les demandes annexes

Il n'est pas inéquitables de rejeter les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société GEST'INNOV est condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour

Déclare irrecevables les écritures notifiées le 12 juillet 2024 par la société JP prise en la personne de Me [Z] [M] es qualité de mandataire judiciaire de la société GEST'INNOV,

Infirme le jugement en ce qu'il a :

- Prononcé la résolution du contrat de prestation de service du 26 septembre 2018 aux torts partagés des sociétés STREGO et GEST'INNOV ;

- Condamné la société GEST'INNOV à restituer à la société STREGO, la somme de 751.477,20 euros TTC au titre des sommes versées en exécution du contrat de prestation ;

- Condamné à parts égales les sociétés STREGO et GEST'INNOV aux dépens de l'instance.

Confirme le jugement pour le surplus.

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- Dit que la résolution prononcée le 10 septembre 2020 l'a été aux torts de la société GEST'INNOV ;

- Fixe la créance de la société BAKER TILLY STREGO au passif de la société GEST'INNOV à la somme de 751.477,20 euros TTC au titre des sommes versées en exécution du contrat de prestation résolu, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de chaque paiement réalisé par la société BAKER TILLYSTREGO jusqu'à la date du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société GEST'INNOV du 11 mars 2024 ;

- Rejette les autres demandes des parties ;

- Condamne la société GEST'INNOV aux dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier, Le Président,