Décisions
CA Riom, 1re ch., 12 novembre 2024, n° 24/00046
RIOM
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE RIOM
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 12 novembre 2024
N° RG 24/00046 - N° Portalis DBVU-V-B7I-GDPQ
- PV- Arrêt n° 464
[Y] [C] / [R] [T], [J] [T], S.C.I. LA LIBERATION 55
Ordonnance Référé, origine Président du TJ de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 28 Novembre 2023, enregistrée sous le n° 23/00718
Arrêt rendu le MARDI DOUZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
Mme Clémence CIROTTE, Conseiller
En présence de :
Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé
ENTRE :
M. [Y] [C]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représenté par Me Lionel DUVAL, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
Timbre fiscal acquitté
APPELANT
ET :
M. [R] [T]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C63113-2024-001123 du 08/02/2024 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CLERMONT-F)
[Adresse 7]
[Localité 3]
et
M. [J] [T]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C63113-2024-000564 du 23/01/2024 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CLERMONT-FD)
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentés par Me Virginie DESSERT de la SCP VILLATTE-DESSERT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
S.C.I. LA LIBERATION 55
[Adresse 1]
[Localité 6]
non représentée
INTIMES
DÉBATS :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 septembre 2024, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. VALLEIX, rapporteur.
ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 12 novembre 2024 après prorogé du délibéré initialement prévu le 05 novembre 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [Z] [K] [D] est décédée le 15 mars 2023 à [Localité 9] (Puy-de-Dôme), laissant pour lui succéder ses trois enfants : M. [R] [T] et M. [J] [T], issus d'une première union avec M. [P] [T] avec lequel elle avait divorcé, ainsi que M. [Y] [C], issu d'une seconde union avec avec M. [B] [C] avec lequel elle avait également divorcé.
Elle a laissé les dispositions testamentaires suivantes : un testament olographe daté du 1er novembre 1993, instituant MM. [R] et [J] [T] comme légataires à titre universel pour ¿ de tous ses biens et un testament olographe daté du 26 avril 2021, instituant M. [Y] [C] comme légataire universel pour ¿ de tous ses biens de la quotité disponible de sa succession.
Par acte authentique établi le 18 septembre 1993 auprès de Me [L] [I], notaire à [Localité 8] (Puy-de-Dôme), Mme [D] et ses trois enfants MM. [R] et [J] [T] ainsi que M. [B] [C] avaient constitué une société civile immobilière dénommée LIBÉRATION 55 dont le siège social est situé au lieudit [Adresse 10] à [Localité 6] (Puy-de-Dôme). La SCI LIBERATION 55 est propriétaire d'un immeuble de 11 appartements dont 10 mis en location, situé [Adresse 4] à [Localité 9] (Puy-de-Dôme). Selon l'article 7 des statuts de cette SCI, Mme [D] détenait 897 parts sur les 900 parts constituant le capital social. Ses trois enfants détenaient de leur côté une part sociale chacun dans cette SCI.
Arguant d'une situation de mésentente entre les associés de la SCI LIBÉRATION 55 et sollicitant en conséquence la nomination d'un administrateur provisoire pour celle-ci, M. [Y] [C] a, par acte d'huissier de justice du 30 août 2023 suivant autorisation du 29 août 2023 d'assigner à date rapprochée, assigné en référé MM. [R] et [J] [T] devant le Président du tribunal de Clermont-Ferrand. Par acte d'huissier de justice du 29 septembre 2023, M. [Y] [C] a également assigné la SCI LIBÉRATION 55 afin de lui faire déclarer la décision à intervenir commune et opposable. La jonction de ces deux procédures a été ordonnée le 24 octobre 2023.
C'est dans ces conditions que le Président du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand a, suivant une ordonnance de référé n° RG-23/00718 rendue le 28 novembre 2023 :
au principal, renvoyé les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront ;
au provisoire ;
rejeté toutes fins de non-recevoir ;
rejeté la demande de désignation d'un administrateur provisoire de la SCI LIBERATION 55, formée par M. [Y] [C] ;
dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
laissé les dépens à la charge de M. [Y] [C].
Par déclaration formalisée par le RPVA le 8 janvier 2024, le conseil de M. [Y] [C] a interjeté appel de l'ordonnance susmentionnée. L'effet dévolutif de cet appel y est ainsi libellé :
« Objet/Portée de l'appel : Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués et ce que : la demande de désignation d'un administrateur provisoire de la SCI LIBERATION 55 formulée par Monsieur [C] a été rejetée. En ce que la demande au titre de l'article 700 du CPC de Monsieur [C] a été rejetée. En ce que les dépens ont été mis à la charge de Monsieur [Y] [C]. »
' Par dernières conclusions d'appelant notifiées par le RPVA le 9 février 2024, M. [Y] [C] a demandé de :
au visa des dispositions des articles 834, 835 alinéa 1er du code de procédure civile et de l'article 1846 [du Code civil] ;
déclarer recevable l'appel interjeté par M. [Y] [C] à l'encontre de l'ordonnance de référé du 28 novembre 2023 ;
réformer cette ordonnance de référé et désigner tel administrateur provisoire qu'il plaira à la juridiction de faire choix afin de gérer et d'administrer la SCI LIBERATION 55 dont le siège social est situé au lieudit [Adresse 10] à [Localité 6] (Puy-de-Dôme) ;
y ajouter une indemnité de 2.000,00 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, tant pour la procédure de première instance que pour la procédure d'appel ;
condamner MM. [R] et [J] [T] in solidum aux entiers dépens de l'instance.
' Par dernières conclusions d'intimé et d'appel incident notifiées par le RPVA le 13 février 2024, M. [J] [T] et M. [R] [T] ont demandé de :
au visa des articles 1846 et 1373 du Code civil;
confirmer l'ordonnance de référé rendue le 28 novembre 2023 par le Président du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand en ce qu'elle a :
rejeté la demande de désignation d'un administrateur provisoire de la SCI LIBERATION 55 formée par M. [Y] [C];
laissé les dépens à la charge de M. [Y] [C];
infirmer l'ordonnance de référé rendue par le Président du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand le 28 novembre 2023 en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;
statuant à nouveau ;
rejeter l'intégralité des demandes de M. [Y] [C];
condamner M. [Y] [C] à payer à M. [R] [T] et M. [J] [T] une indemnité de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de l'instance.
' La SCI LIBÉRATION 55 n'a pas constitué avocat et était donc non-comparante. En application des dispositions de l'article 474 alinéa 1er, la présente décision comportant une pluralité de défendeurs sera rendue de manière réputée contradictoire à l'égard de l'ensemble des parties, la signification de la déclaration d'appel et des conclusions d'appelant et ont été effectuée le 17 janvier 2024 à la personne de la SCI LIBÉRATION 55.
Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, les moyens développés par les parties à l'appui de leurs prétentions sont directement énoncés dans la partie MOTIFS DE LA DÉCISION.
Après évocation de cette affaire et clôture des débats lors de l'audience civile en conseiller-rapporteur du 19 septembre 2024 à 14h00, au cours de laquelle chacun des conseils des parties a réitéré et développé ses moyens et prétentions précédemment énoncés, la décision suivante a été mise en délibéré au 5 novembre 2024, prorogée au 12 novembre 2024, par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il convient préalablement de constater qu'aucun appel incident n'a été formé par MM. [R] et [J] [T] sur le rejet de leur fin de non-recevoir en première instance.
En matière de société civile, l'article 1846 alinéa 5 du Code civil, visé par M. [Y] [C], dispose que « Si, pour quelque cause que ce soit, la société se trouve dépourvue de gérant, tout associé peut réunir les associés ou, à défaut, demander au président du tribunal [judiciaire] statuant sur requête la désignation d'un mandataire chargé de le faire, à seule fin de nommer un ou plusieurs gérants. ».
Dans le corps de ses conclusions d'appelant, M. [Y] [C] base également sa demande de nomination d'un administrateur provisoire sur l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile qui dispose que « Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. ». En revanche, dans le corps de ces mêmes conclusions, il ne présente aucun développement au visa de l'article 834 du code de procédure civile qui sera dès lors écarté.
En l'occurrence, s'il est exact que la SCI LIBÉRATION 55 n'a plus de gérant depuis le décès le 15 mars 2023 de Mme [Z] [K] [D], force est de constater que M. [Y] [C] ne rapporte pas davantage en cause d'appel qu'en première instance la preuve d'une mésentente entre associés qui soit à un point tel qu'elle puisse constituer des circonstances exceptionnelles rendant impossible le fonctionnement de cette société civile, en termes par ailleurs de dommage imminent à prévenir ou de trouble manifestement illicite à faire cesser. En effet, les divergences de lecture des dispositions testamentaires laissées par la personne défunte, occasionnent certes des mésententes entre les associés au regard notamment de l'exacte étendue de leurs droits respectifs dans la société civile. Pour autant, l'absence actuelle de gérant de cette société civile ne peut suffire à objectiver en l'état actuel de la procédure ce type de situation exceptionnelle qui nécessiterait des mesures urgentes susceptibles de porter atteinte à la souveraineté des associés et au fonctionnement normal du pacte sociétaire. Il n'est en effet pas factuellement contesté que la SCI LIBÉRATION 55 n'est pas pour autant entravée dans son fonctionnement normal, et donc dans sa pérennité, dès lors qu'elle continue de percevoir l'ensemble des loyers de ses locataires conformément à son objet social et de procéder au règlement de ses divers créanciers.
En tout état de cause, M. [Y] [C] ne produit aucun document de nature gestionnaire ou comptable à l'appui de ses allégations de circonstances exceptionnelles qui rendraient selon lui nécessaire la désignation d'un administrateur provisoire du fait d'une compromission de l'équilibre économique de cette société civile immobilière. Il demeure d'ailleurs lui-même sur le mode conjectural et non sur le mode actuel lorsqu'il affirme dans ses écritures que « La mésentente des associés va entraîner un dysfonctionnement grave de l'organe de fonctionnement de la société. » et ajoute sans aucune offre de preuve que la vacance et le non-renouvellement de deux logements locatifs seraient la conséquence de cette situation de défiance et de mésentente entre les trois associés.
Il importe dès lors de se référer aux dispositions précitées de l'article 1846 alinéa 5 du Code civil qui prévoient précisément que tout associé peut prendre à tout moment l'initiative de provoquer la réunion des autres associés en vue de la désignation d'un gérant dans le cas de figure où celle-ci se trouve dépourvue de gérant et que ce n'est que dans l'échec d'une telle initiative qu'il peut être demandé au Président du tribunal judiciaire, dès lors par défaut, la nomination d'un mandataire chargé de faire procéder à la nomination d'un gérant. Or, cette initiative a précisément été prise par M. [J] [T] en adressant à M. [Y] [C] le 20 décembre 2023 une lettre recommandée avec demande d'avis de réception en vue de la convocation d'une assemblée générale extraordinaire devant se tenir le 5 janvier [2024, et non 2025 comme manifestement libellé par erreur] à 18h00 au siège de la SCI LIBÉRATION 55 afin notamment de procéder à la nomination d'un nouveau gérant. Cette assemblée générale n'ayant pu en réalité se tenir, il appartient en conséquence à l'associé le plus diligent de renouveler une telle initiative spécifiquement offerte par la loi avant de recourir le cas échéant à la voie judiciaire.
Dans ces conditions, la décision de première instance sera confirmée en son rejet de demande de désignation d'un administrateur provisoire.
Cette ordonnance de référé sera confirmée en ses décisions de rejet général d'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'imputation des dépens de première instance.
Il serait effectivement inéquitable, au sens des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de laisser à la charge de MM. [R] et [J] [T] les frais irrépétibles qu'ils ont été contraints d'engager à l'occasion de cette procédure d'appel et qu'il convient d'arbitrer à la somme de 2.000,00 €.
Enfin, succombant à l'instance, M. [Y] [C] sera purement et simplement débouté de sa demande de défraiement formée au visa de l'article 700 du code procédure civile et en supportera les entiers dépens.
LA COUR,
STATUANT PUBLIQUEMENT
ET DE MANIÈRE RÉPUTÉE CONTRADICTOIRE.
CONFIRME en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé n° RG-23/00718 rendue le 28 novembre 2023 par le Président du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand.
Y ajoutant.
CONDAMNE M. [Y] [C] à payer au profit de M. [R] [T] et M. [J] [T] une indemnité de 2.000,00 €, en dédommagement de leurs frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile.
REJETTE le surplus des demandes des parties.
CONDAMNE M. [Y] [C] aux entiers dépens de l'instance.
Le greffier Le président
DE RIOM
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 12 novembre 2024
N° RG 24/00046 - N° Portalis DBVU-V-B7I-GDPQ
- PV- Arrêt n° 464
[Y] [C] / [R] [T], [J] [T], S.C.I. LA LIBERATION 55
Ordonnance Référé, origine Président du TJ de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 28 Novembre 2023, enregistrée sous le n° 23/00718
Arrêt rendu le MARDI DOUZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
Mme Clémence CIROTTE, Conseiller
En présence de :
Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé
ENTRE :
M. [Y] [C]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représenté par Me Lionel DUVAL, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
Timbre fiscal acquitté
APPELANT
ET :
M. [R] [T]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C63113-2024-001123 du 08/02/2024 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CLERMONT-F)
[Adresse 7]
[Localité 3]
et
M. [J] [T]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C63113-2024-000564 du 23/01/2024 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CLERMONT-FD)
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentés par Me Virginie DESSERT de la SCP VILLATTE-DESSERT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
S.C.I. LA LIBERATION 55
[Adresse 1]
[Localité 6]
non représentée
INTIMES
DÉBATS :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 septembre 2024, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. VALLEIX, rapporteur.
ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 12 novembre 2024 après prorogé du délibéré initialement prévu le 05 novembre 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [Z] [K] [D] est décédée le 15 mars 2023 à [Localité 9] (Puy-de-Dôme), laissant pour lui succéder ses trois enfants : M. [R] [T] et M. [J] [T], issus d'une première union avec M. [P] [T] avec lequel elle avait divorcé, ainsi que M. [Y] [C], issu d'une seconde union avec avec M. [B] [C] avec lequel elle avait également divorcé.
Elle a laissé les dispositions testamentaires suivantes : un testament olographe daté du 1er novembre 1993, instituant MM. [R] et [J] [T] comme légataires à titre universel pour ¿ de tous ses biens et un testament olographe daté du 26 avril 2021, instituant M. [Y] [C] comme légataire universel pour ¿ de tous ses biens de la quotité disponible de sa succession.
Par acte authentique établi le 18 septembre 1993 auprès de Me [L] [I], notaire à [Localité 8] (Puy-de-Dôme), Mme [D] et ses trois enfants MM. [R] et [J] [T] ainsi que M. [B] [C] avaient constitué une société civile immobilière dénommée LIBÉRATION 55 dont le siège social est situé au lieudit [Adresse 10] à [Localité 6] (Puy-de-Dôme). La SCI LIBERATION 55 est propriétaire d'un immeuble de 11 appartements dont 10 mis en location, situé [Adresse 4] à [Localité 9] (Puy-de-Dôme). Selon l'article 7 des statuts de cette SCI, Mme [D] détenait 897 parts sur les 900 parts constituant le capital social. Ses trois enfants détenaient de leur côté une part sociale chacun dans cette SCI.
Arguant d'une situation de mésentente entre les associés de la SCI LIBÉRATION 55 et sollicitant en conséquence la nomination d'un administrateur provisoire pour celle-ci, M. [Y] [C] a, par acte d'huissier de justice du 30 août 2023 suivant autorisation du 29 août 2023 d'assigner à date rapprochée, assigné en référé MM. [R] et [J] [T] devant le Président du tribunal de Clermont-Ferrand. Par acte d'huissier de justice du 29 septembre 2023, M. [Y] [C] a également assigné la SCI LIBÉRATION 55 afin de lui faire déclarer la décision à intervenir commune et opposable. La jonction de ces deux procédures a été ordonnée le 24 octobre 2023.
C'est dans ces conditions que le Président du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand a, suivant une ordonnance de référé n° RG-23/00718 rendue le 28 novembre 2023 :
au principal, renvoyé les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront ;
au provisoire ;
rejeté toutes fins de non-recevoir ;
rejeté la demande de désignation d'un administrateur provisoire de la SCI LIBERATION 55, formée par M. [Y] [C] ;
dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
laissé les dépens à la charge de M. [Y] [C].
Par déclaration formalisée par le RPVA le 8 janvier 2024, le conseil de M. [Y] [C] a interjeté appel de l'ordonnance susmentionnée. L'effet dévolutif de cet appel y est ainsi libellé :
« Objet/Portée de l'appel : Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués et ce que : la demande de désignation d'un administrateur provisoire de la SCI LIBERATION 55 formulée par Monsieur [C] a été rejetée. En ce que la demande au titre de l'article 700 du CPC de Monsieur [C] a été rejetée. En ce que les dépens ont été mis à la charge de Monsieur [Y] [C]. »
' Par dernières conclusions d'appelant notifiées par le RPVA le 9 février 2024, M. [Y] [C] a demandé de :
au visa des dispositions des articles 834, 835 alinéa 1er du code de procédure civile et de l'article 1846 [du Code civil] ;
déclarer recevable l'appel interjeté par M. [Y] [C] à l'encontre de l'ordonnance de référé du 28 novembre 2023 ;
réformer cette ordonnance de référé et désigner tel administrateur provisoire qu'il plaira à la juridiction de faire choix afin de gérer et d'administrer la SCI LIBERATION 55 dont le siège social est situé au lieudit [Adresse 10] à [Localité 6] (Puy-de-Dôme) ;
y ajouter une indemnité de 2.000,00 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, tant pour la procédure de première instance que pour la procédure d'appel ;
condamner MM. [R] et [J] [T] in solidum aux entiers dépens de l'instance.
' Par dernières conclusions d'intimé et d'appel incident notifiées par le RPVA le 13 février 2024, M. [J] [T] et M. [R] [T] ont demandé de :
au visa des articles 1846 et 1373 du Code civil;
confirmer l'ordonnance de référé rendue le 28 novembre 2023 par le Président du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand en ce qu'elle a :
rejeté la demande de désignation d'un administrateur provisoire de la SCI LIBERATION 55 formée par M. [Y] [C];
laissé les dépens à la charge de M. [Y] [C];
infirmer l'ordonnance de référé rendue par le Président du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand le 28 novembre 2023 en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;
statuant à nouveau ;
rejeter l'intégralité des demandes de M. [Y] [C];
condamner M. [Y] [C] à payer à M. [R] [T] et M. [J] [T] une indemnité de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de l'instance.
' La SCI LIBÉRATION 55 n'a pas constitué avocat et était donc non-comparante. En application des dispositions de l'article 474 alinéa 1er, la présente décision comportant une pluralité de défendeurs sera rendue de manière réputée contradictoire à l'égard de l'ensemble des parties, la signification de la déclaration d'appel et des conclusions d'appelant et ont été effectuée le 17 janvier 2024 à la personne de la SCI LIBÉRATION 55.
Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, les moyens développés par les parties à l'appui de leurs prétentions sont directement énoncés dans la partie MOTIFS DE LA DÉCISION.
Après évocation de cette affaire et clôture des débats lors de l'audience civile en conseiller-rapporteur du 19 septembre 2024 à 14h00, au cours de laquelle chacun des conseils des parties a réitéré et développé ses moyens et prétentions précédemment énoncés, la décision suivante a été mise en délibéré au 5 novembre 2024, prorogée au 12 novembre 2024, par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il convient préalablement de constater qu'aucun appel incident n'a été formé par MM. [R] et [J] [T] sur le rejet de leur fin de non-recevoir en première instance.
En matière de société civile, l'article 1846 alinéa 5 du Code civil, visé par M. [Y] [C], dispose que « Si, pour quelque cause que ce soit, la société se trouve dépourvue de gérant, tout associé peut réunir les associés ou, à défaut, demander au président du tribunal [judiciaire] statuant sur requête la désignation d'un mandataire chargé de le faire, à seule fin de nommer un ou plusieurs gérants. ».
Dans le corps de ses conclusions d'appelant, M. [Y] [C] base également sa demande de nomination d'un administrateur provisoire sur l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile qui dispose que « Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. ». En revanche, dans le corps de ces mêmes conclusions, il ne présente aucun développement au visa de l'article 834 du code de procédure civile qui sera dès lors écarté.
En l'occurrence, s'il est exact que la SCI LIBÉRATION 55 n'a plus de gérant depuis le décès le 15 mars 2023 de Mme [Z] [K] [D], force est de constater que M. [Y] [C] ne rapporte pas davantage en cause d'appel qu'en première instance la preuve d'une mésentente entre associés qui soit à un point tel qu'elle puisse constituer des circonstances exceptionnelles rendant impossible le fonctionnement de cette société civile, en termes par ailleurs de dommage imminent à prévenir ou de trouble manifestement illicite à faire cesser. En effet, les divergences de lecture des dispositions testamentaires laissées par la personne défunte, occasionnent certes des mésententes entre les associés au regard notamment de l'exacte étendue de leurs droits respectifs dans la société civile. Pour autant, l'absence actuelle de gérant de cette société civile ne peut suffire à objectiver en l'état actuel de la procédure ce type de situation exceptionnelle qui nécessiterait des mesures urgentes susceptibles de porter atteinte à la souveraineté des associés et au fonctionnement normal du pacte sociétaire. Il n'est en effet pas factuellement contesté que la SCI LIBÉRATION 55 n'est pas pour autant entravée dans son fonctionnement normal, et donc dans sa pérennité, dès lors qu'elle continue de percevoir l'ensemble des loyers de ses locataires conformément à son objet social et de procéder au règlement de ses divers créanciers.
En tout état de cause, M. [Y] [C] ne produit aucun document de nature gestionnaire ou comptable à l'appui de ses allégations de circonstances exceptionnelles qui rendraient selon lui nécessaire la désignation d'un administrateur provisoire du fait d'une compromission de l'équilibre économique de cette société civile immobilière. Il demeure d'ailleurs lui-même sur le mode conjectural et non sur le mode actuel lorsqu'il affirme dans ses écritures que « La mésentente des associés va entraîner un dysfonctionnement grave de l'organe de fonctionnement de la société. » et ajoute sans aucune offre de preuve que la vacance et le non-renouvellement de deux logements locatifs seraient la conséquence de cette situation de défiance et de mésentente entre les trois associés.
Il importe dès lors de se référer aux dispositions précitées de l'article 1846 alinéa 5 du Code civil qui prévoient précisément que tout associé peut prendre à tout moment l'initiative de provoquer la réunion des autres associés en vue de la désignation d'un gérant dans le cas de figure où celle-ci se trouve dépourvue de gérant et que ce n'est que dans l'échec d'une telle initiative qu'il peut être demandé au Président du tribunal judiciaire, dès lors par défaut, la nomination d'un mandataire chargé de faire procéder à la nomination d'un gérant. Or, cette initiative a précisément été prise par M. [J] [T] en adressant à M. [Y] [C] le 20 décembre 2023 une lettre recommandée avec demande d'avis de réception en vue de la convocation d'une assemblée générale extraordinaire devant se tenir le 5 janvier [2024, et non 2025 comme manifestement libellé par erreur] à 18h00 au siège de la SCI LIBÉRATION 55 afin notamment de procéder à la nomination d'un nouveau gérant. Cette assemblée générale n'ayant pu en réalité se tenir, il appartient en conséquence à l'associé le plus diligent de renouveler une telle initiative spécifiquement offerte par la loi avant de recourir le cas échéant à la voie judiciaire.
Dans ces conditions, la décision de première instance sera confirmée en son rejet de demande de désignation d'un administrateur provisoire.
Cette ordonnance de référé sera confirmée en ses décisions de rejet général d'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'imputation des dépens de première instance.
Il serait effectivement inéquitable, au sens des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de laisser à la charge de MM. [R] et [J] [T] les frais irrépétibles qu'ils ont été contraints d'engager à l'occasion de cette procédure d'appel et qu'il convient d'arbitrer à la somme de 2.000,00 €.
Enfin, succombant à l'instance, M. [Y] [C] sera purement et simplement débouté de sa demande de défraiement formée au visa de l'article 700 du code procédure civile et en supportera les entiers dépens.
LA COUR,
STATUANT PUBLIQUEMENT
ET DE MANIÈRE RÉPUTÉE CONTRADICTOIRE.
CONFIRME en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé n° RG-23/00718 rendue le 28 novembre 2023 par le Président du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand.
Y ajoutant.
CONDAMNE M. [Y] [C] à payer au profit de M. [R] [T] et M. [J] [T] une indemnité de 2.000,00 €, en dédommagement de leurs frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile.
REJETTE le surplus des demandes des parties.
CONDAMNE M. [Y] [C] aux entiers dépens de l'instance.
Le greffier Le président