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Décisions

Cass. com., 8 novembre 2023, n° 22-13.149

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Pharmabest (SAS)

Défendeur :

Teroma (SAS), Plein Sud (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigneau

Rapporteur :

Mme Ducloz

Avocat :

SCP L. Poulet-Odent

Aix-en-Provence, du 1er décembre 2021

1 décembre 2021

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société Pharmabest du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Teroma.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 1er décembre 2021), le capital de la société Pharmabest, laquelle a pour objet la fourniture de prestations de services destinées aux officines de pharmacie, était détenu par une trentaine d'actionnaires, majoritairement des sociétés holding exploitant des officines de pharmacie adhérentes au réseau Pharmabest, dont la société Plein Sud.

3. Par une ordonnance du 8 novembre 2018, le président d'un tribunal de commerce, statuant en la forme des référés, a désigné, sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil, un expert avec pour mission de déterminer la valeur des titres Pharmabest détenus par la société Plein Sud.

4. Le 16 juillet 2020, la société Plein Sud a assigné, en référé, la société Pharmabest afin qu'il lui soit enjoint de communiquer, sous astreinte, certaines pièces à l'expert, dont le détail du chiffre d'affaires, au 31 décembre 2019, des entités du groupement de pharmaciens Pharmabest.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La société Pharmabest fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance de référé rendue le 17 septembre 2020 par le président du tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il l'a condamnée à communiquer à l'expert, sous astreinte, le détail du chiffre d'affaires des entités du groupement de pharmaciens Pharmabest au 31 décembre 2019, alors « que les parties étant tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction, sauf à ce que toutes conséquences soient tirées de leur abstention ou de leur refus, le juge peut, si une partie détient un élément de preuve, lui enjoindre, sur la requête d'une autre partie, de le produire, au besoin à peine d'astreinte ; que, cependant, nul ne peut donner ni produire ce qu'il n'a pas ; qu'il s'ensuit que la partie qui requiert du juge qu'il enjoigne à une autre de produire un document doit établir, outre son existence, à tout le moins sa vraisemblance, sa possession par cette autre partie ; que le juge, quant à lui, ne peut accéder à cette requête, a fortiori sous astreinte, sans avoir vérifié que cette double preuve était apportée ; qu'en l'espèce, la société Plein Sud a demandé à la cour d'enjoindre à la société Pharmabest, sous astreinte, de communiquer le détail du chiffre d'affaires des entités du groupement de pharmacien Pharmabest au 31 décembre 2019, dont la société Pharmabest, cependant, protestait qu'elle ne le possédait pas ; que, pour confirmer l'ordonnance qui avait fait droit à la requête de la société Plein Sud, la cour s'est bornée à considérer que la société Pharmabest "ne justifiait pas de ce que la communication de pièces serait illégitime en ce que le secret des affaires serait en cause" ; qu'en se déterminant ainsi, sans avoir vérifié que la société Plein Sud établissait l'existence ou la vraisemblance du document réclamé ainsi que sa détention par la société Pharmabest, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 10 [du code civil] et 11 du code de procédure civile, ensemble de l'article 1843-4 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 10, 11 et 145 du code de procédure civile :

6. Il résulte de la combinaison de ces textes qu'il ne peut être enjoint à une partie, sur requête ou en référé, de produire un élément de preuve qu'elle ne détient pas.

7. Pour enjoindre à la société Pharmabest de communiquer, sous astreinte, le détail du chiffre d'affaires, au 31 décembre 2019, des entités du groupement de pharmaciens Pharmabest, l'arrêt retient que cette société ne justifie pas de ce que la communication de cette pièce serait illégitime en ce que le secret des affaires serait en cause.

8. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui appartenait dès lors que la société Pharmabest faisait valoir que la pièce en litige n'existait pas et qu'en tout état de cause, elle ne la détenait pas, si la société Plein Sud, à qui la preuve en incombait en l'état de cette contestation, établissait que l'existence de cette pièce était, sinon établie, du moins vraisemblable et, le cas échéant, qu'elle était détenue ou pouvait être détenue par la société Pharmabest, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant l'ordonnance attaquée, il enjoint à la société Pharmabest de communiquer à M. [C] [Z] le détail du chiffre d'affaires des entités du groupement de pharmaciens Pharmabest au 31 décembre 2019 dans les quinze jours suivant la notification de l'ordonnance et, à défaut de ce faire dans ce délai, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard dans le délai d'un mois, l'arrêt rendu le 1er décembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société Plein Sud aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Plein Sud à payer à la société Pharmabest la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille vingt-trois.