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Décisions

Cass. com., 20 novembre 2024, n° 23-17.842

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigneau

Rapporteur :

Mme Brahic-Lambrey

Avocat général :

Mme Guinamant

Avocats :

SCP Françoise Fabiani - François Pinatel, SCP Le Griel

Lyon, du 27 avr. 2023

27 avril 2023

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 27 avril 2023), les 30 mars et 2 octobre 2015, la société par actions simplifiée Med Clean France, ayant pour dirigeante la société de droit suisse Med Clean, elle-même dirigée par M. [U], a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires, M. [B], ultérieurement remplacé par la société [O], étant désigné liquidateur.

2. Saisi par le liquidateur, le tribunal de commerce a prononcé une mesure de faillite personnelle à l'égard de M. [U] et l'a condamné pour insuffisance d'actif.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. M. [U] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer une partie de l'insuffisance d'actif de la société Med Clean France et de prononcer une mesure de faillite personnelle à son encontre, alors :

« 1°/ que, dans le dispositif de ses conclusions d'appel, la Selarl [O] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Med Clean France se contentait, après avoir demandé que la cour d'appel statue au fond en cas d'annulation du jugement déféré, de demander que soient confirmés les chefs de dispositif dudit jugement ; que la cour d'appel n'était donc saisie d'aucune demande en cas d'annulation du jugement ; qu'en prononçant la nullité du jugement tout en condamnant M. [U] à supporter une partie de l'insuffisance d'actif et en prononçant à son encontre une mesure de faillite personnelle, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la Selarl [O] ;

2°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que dans le dispositif de ses conclusions d'appel, la Selarl [O] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Med Clean France se contentait, après avoir demandé que la cour d'appel statue au fond en cas d'annulation du jugement déféré, de demander que soient confirmés les chefs de dispositif dudit jugement ; que la cour d'appel n'était donc saisie d'aucune demande en cas d'annulation du jugement ; qu'en prononçant la nullité du jugement tout en condamnant M. [U] à supporter une partie de l'insuffisance d'actif et en prononçant à son encontre une mesure de faillite personnelle, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°/ que la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions d'appel ; que dans son dispositif, le liquidateur judiciaire se contentait de demander la confirmation de chefs du dispositif du jugement déféré ; qu'en prononçant la nullité du jugement déféré sans en déduire que toutes les demandes de confirmation de ses chefs de dispositif étaient devenues sans objet, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile ;

4°/ qu'en condamnant M. [R] [U] à supporter une partie de l'insuffisance d'actif et en prononçant une mesure de faillite personnelle à son encontre, après avoir prononcé la nullité du jugement qui lui était déféré, et quand le liquidateur judiciaire de la société Med Clean France se contentait de demander que soient confirmés les chefs de dispositif du jugement, la cour d'appel a commis un excès de pouvoir. »

Réponse de la Cour

5. En application de l'article 562 du code de procédure civile, lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement pour un motif autre que l'irrégularité de l'acte introductif d'instance, l'effet dévolutif opère pour le tout.

6. Les conclusions du liquidateur, qui, dans leur dispositif, demandaient la confirmation du jugement en ce qu'il avait condamné M. [U] à supporter l'insuffisance d'actif de la société Med Clean France et prononcé à son encontre une interdiction de gérer d'une durée de quinze années, avaient valablement saisi la cour d'appel lui permettant, après avoir annulé le jugement, de statuer sur la responsabilité de ce dernier pour insuffisance d'actif et sur le prononcé d'une mesure d'interdiction de gérer.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

8. M. [U] fait le même grief à l'arrêt alors « que les statuts d'une société par actions simplifiée peuvent prévoir que la société personne morale qui la dirige sera représentée par un représentant permanent ; que, dans ce cas, seul le représentant permanent est dirigeant de droit au sens de l'article L. 651-2 du code de commerce ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée dans les conclusions d'appel de M. [U], si la société Med Clean France, société par actions simplifiée, avait stipulé dans ses statuts que sa présidente, la société de droit suisse Med Clean SA, avait désigné un représentant permanent en la personne de M. [J] et que, dès lors, M. [U], simple dirigeant de la société Med Clean SA sans en être le représentant permanent au sein de la société Med Clean France, ne pouvait être qualifié de dirigeant de droit de cette dernière et voir sa responsabilité pour insuffisance d'actif engagée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 123-9, L. 227-5, L. 227-7, L. 651-1 et L. 651-2 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 651-1 et L. 651-2 du code de commerce :

9. Il résulte de l'article L. 651-1 du code de commerce que la responsabilité pour insuffisance d'actif, encourue sur le fondement de l'article L. 651-2 du même code, est applicable aux personnes physiques représentants permanents des dirigeants personnes morales.

10. Lorsqu'une société par actions simplifiée est dirigée par une personne morale qui a désigné un représentant permanent conformément aux statuts de cette société, la personne physique dirigeant cette personne morale ne peut voir sa responsabilité pour insuffisance d'actif engagée si elle n'a pas également la qualité de représentant permanent.

11. Pour condamner M. [U] à supporter une partie de l'insuffisance d'actif, l'arrêt relève que les dispositions de l'article L. 225-20 du code de commerce ne peuvent s'appliquer à la société Med Clean France qui est une société par actions simplifiée pour ne s'appliquer qu'aux sociétés anonymes et qu'en application de l'article L. 227-7 du même code, M. [U], dirigeant de la société Med Clean, dirigeante de la société Med Clean France, ne peut qu'avoir également la qualité de dirigeant de droit de cette dernière.

12. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui incombait, si la société Med Clean France avait stipulé dans ses statuts que sa présidente, la société Med Clean, avait désigné un représentant permanent en la personne de M. [J], la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquence de la cassation

13. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt ayant condamné M. [U], en sa qualité de dirigeant, à supporter l'insuffisance d'actif de la société Med Clean France, entraîne la cassation du chef du dispositif, ayant prononcé à son encontre, en cette même qualité, une mesure de faillite personnelle, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 avril 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble.