CA Orléans, ch. civ., 12 novembre 2024, n° 22/01129
ORLÉANS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
HB 41 (SASU)
Défendeur :
TIERCELIN BRUNET DUVIVIER (SELARL), MAM SATEMA (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme COLLOMP
Conseiller :
Mme CHOUVIN-GALLIARD
FAITS ET PROCEDURE :
En 1991, la société Les plastiques industriels de [Localité 12] (PIV) a acquis la propriété de la totalité d'un ensemble immobilier sis [Adresse 1] et [Adresse 6] à [Localité 15], cadastré ZW [Cadastre 2], sur lequel sont édifiés des bâtiments à usage industriel.
Selon acte reçu par Me [Z] le 17 décembre 1991, et après division de la parcelle ZW [Cadastre 2] en deux lots :
- la société PIV a vendu le lot n°1 (consistant en le sol de la parcelle ZW [Cadastre 2]) à la société Calpont,
- la société PIV a conservé la propriété du lot n° 2 (correspondant au bâtiment édifié sur cette même parcelle).
Dans le même acte, un droit de circulation et de passage sur le lot n°1 est prévu au profit du lot n°2.
Le lot n°1, constitué par le sol de la parcelle ZW113, a été divisé en trois lots par acte reçu par Me [Z] le 4 avril 2003, la parcelle ZW [Cadastre 2] étant divisée en trois parcelles (ZW [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5]), le lot n°2 se trouvant désormais sur le lot n°3 (parcelle ZW145).
Selon bail commercial des 15 et 23 février 2005 reçu par Me [F], notaire salarié au sein de la société [Z] et Tiercelin, la société PIV a loué à la société Mam Satema le lot n°2 de la parcelle [Cadastre 3].
Ce bail commercial prévoyait qu'était consenti au locataire 'un droit de circulation, stationnement et stockage sur le lot n°3, appartenant à la société Calpont SA, consistant en le sol de la ladite parcelle ZW [Cadastre 3], d'une surface de 20 751 mètres carrés'.
Selon acte reçu par Me [T] le 28 décembre 2007, la société Calpont a cédé ses actifs à la société Grepa, laquelle est devenue propriétaire des lots n°3,4 et 5.
Selon acte reçu par Me [Z] le 11 mars 2014, le lot n°3 a été divisé en deux lots (6 et 7). La société Grepa a vendu :
- le lot n°7 à la commune de [Localité 15] au terme du même acte ;
- le lot n°6, sur lequel se trouvent les bâtiments constituant le lot n°2, à la société HB41 par acte du 30 juillet 2019, reçu par Me [T], notaire à [Localité 13] (28).
Par actes d'huissier en date des 26 et 30 décembre 2019 et 10 janvier 2020, la société HB 41 a assigné devant le tribunal de grande instance de Blois la société PIV, la société Mam Satemaet la société Tiercelin et Brunet, en leur qualité de notaire rédacteurde l'acte aux fins de les voir condamner à indemniser les préjudices résultant de l'utilisation par la société Mam Satema de leur terrain.
Par jugement en date du 7 avril 2022, le tribunal judiciaire de Blois a :
- rejeté l'ensemble des demandes formées par la société HB 41 à l'encontre de la société PIV;
- rejeté l'ensemble des demandes formées par la société HB 41 à l'encontre de la société Mam Satema ;
- rejeté l'ensemble des demandes formées par la société HB 41 à l'encontre de la société Tiercelin et Brunet ;
- condamné la société HB 41 à verser à la somme de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à la société PIV ;
- condamné la société HB 41 à verser la somme de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à la Tiercelin et Brunet ;
- rejeté les autres demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la société HB 41 aux dépens ;
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration en date du 10 mai 2022, la société Hb 41 a relevé appel de l'intégralité des chefs de ce jugement.
Les parties ont constitué avocat et ont conclu à l'exception de la société Mam Satema.
La déclaration d'appel a été signifiée par remise en étude à la société Mam Satema par acte d'huissier en date du 8 juillet 2022.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 24 juillet 2024, la société HB 41 demande à la cour de :
- dire la société HB 41 recevable et bien fondée en son appel et en ses demandes.
- infirmer le jugement entrepris du tribunal judiciaire de Blois du 7 avril 2022 en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau,
- ordonner à la société PIV et à la société Mam Satema de remettre en état le lot 6 de la parcelle ZW [Cadastre 3], commune de [Localité 15], en procédant notamment aux opérations de dépollution destinées à supprimer les non conformités décrites par le rapport du SIAEP le 13 septembre 2017 et en libérant ensuite le lot de toute occupation allant au-delà du droit de circulation prévu dans l'acte du 17 décembre 1991, sous astreinte de 300 euros par jours de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir.
- condamner, in solidum, la société PIV, à la société Mam Satema et la société Tiercelin-Duvivier-Brunet à prendre en charge le coût de la remise en état par une entreprise tierce pour le cas où les intimés ne procéderaient pas à la remise en état du site.
- condamner, in solidum, la société PIV, à la société Mam Satema et la société Tiercelin-Duvivier-Brunet à payer à la société HB 41, la somme de 160.000,00 euros au titre des indemnités d'occupation échues entre le 1er janvier 2015 et le 31 décembre 2022, avec intérêt au taux légal à compter du 10 janvier 2020 date de délivrance de l'assignation devant le tribunal judiciaire de Blois.
- condamner, in solidum, la société PIV, à la société Mam Satema et la société Tiercelin-Duvivier-Brunet à payer à la société HB 41, la somme de 20.000 euros par an au titre de cette même indemnité d'occupation jusqu'à libération effective des lieux.
A titre infiniment subsidiaire,
- condamner, in solidum, la société PIV,et la société Tiercelin-Duvivier-Brunet à payer à la société HB 41, la somme de 160.000,00 euros en raison d'un enrichissement injustifié sur la période comprise entre le 1er janvier 2015 et le 31 décembre 2022, avec intérêt au taux légal à compter du 10 janvier 2020 date de délivrance de l'assignation devant le tribunal judiciaire de Blois.
- condamner, in solidum, la société PIV et la société Tiercelin-Duvivier-Brunet à payer à la société HB 41, la somme de 20.000 euros par an au titre de cet enrichissement jusqu'à libération effective des lieux.
En tout état de cause,
- condamner, in solidum, la société PIV, à la société Mam Satema et la société Tiercelin-Duvivier-Brunet à payer à la société HB 41, la somme de 6.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamner, in solidum, la société PIV, à la société Mam Satema et la société Tiercelin-Duvivier-Brunet à payer à la société HB 41 aux entiers dépens de première instance et d'appel.
- débouter la société PIV, à la société Mam Satema et la société Tiercelin-Duvivier-Brunet de toutes leurs demandes, fins et conclusions.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 24 octobre 2022, la société Tiercelin et Brunet demande à la cour de :
- recevoir la société Tiercelin-Duvivier-Brunet en ses conclusions, la déclarer bien fondée,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 07 avril 2022
En conséquence,
- débouter la société HB 41 de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- constater que les conditions impératives de l'article 1240 du code civil ne sont pas réunies,
- dire que la responsabilité de la société Tiercelin-Duvivier-Brunet n'est pas engagée,
Subsidiairement,
- débouter la société PIV de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société HB 41 à verser à la société Tiercelin-Duvivier-Brunet la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'instance.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 19 août 2022, la société PIV demande à la cour de :
- confirmer le jugement du 7 avril 2022 du tribunal judiciaire de Blois en ce qu'il a rejeté les demandes de la société HB41 dirigées à l'encontre de la société PIV ; condamné la société HB41 à payer à la société PIV une indemnité de 750 euros à la société PIV au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; condamné la société HB41 aux dépens.
Et y ajoutant :
- condamner la société HB41 à payer à la société PIV une indemnité de
3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamner la société HB41 aux dépens d'appel lesquels seront recouvrés par la société Referens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Et en cas de condamnation de la société PIV :
- condamner la société Tiercelin-Duvivier-Brunet à garantir la société PIV de toutes condamnations en principal, intérêts et accessoires prononcées à son encontre.
- condamner la société Tiercelin-Duvivier-Brunet à payer la somme de
3 000,00 euros à la société PIV au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamner la société Tiercelin-Duvivier-Brunet aux dépens de première instance et d'appel lesquels seront recouvrés par la société Referens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 2 septembre 2024.
MOTIFS
I - Sur la responsabilité de la société PIV
1 - Sur le principe de la responsabilité
Moyens des parties
La société HB41 reproche à la société PIV d'avoir commis une faute en ce que le bail consenti, les 15 et 23 février 2005, à la société MAM SATEMA, sur les bâtiments dont elle était propriétaire, constituant le lot n°2, accordait au locataire non seulement un droit de circulation et de passage vers la voie publique, mais également un droit de stockage et de stationnement sur le terrain. Or la société PIV n'était pas titulaire d'un tel droit sur ce terrain, puisque l'acte du 17 décembre 1991 ne lui accorde qu'un droit de circulation et de passage.
La société PIV répond que le bail a été rédigé par un notaire, et confirme que les bâtiments ont été donnés à bail avec un droit de circulation, de stationnement et de stockage sur le sol, tandis qu'elle n'avait qu'un droit de circulation et de passage conformément à l'acte du 17 décembre 1991. Elle souligne que les anciens propriétaires, à savoir les sociétés Calpont et Grepa ne se sont jamais plaintes d'une telle occupation, et que la société HB41 n'est devenue propriétaire du lot 6 que le 30 juillet 2019.
Réponse de la cour
Il résulte des pièces produites que par acte du 17 décembre 1991, la société PIV, qui était propriétaire de l'ensemble de la parcelle ZW113 et des bâtiments édifiés sur celle-ci, a divisé son lot en 2 lots :
- 1 lot constitué du sol, qu'elle a vendu à la société Calpont (lot n°1) ;
- 1 lot constitué des bâtiments (lot n°2), qu'elle a consevé.
Il était précisé, en page 2 de cet acte, que 'tout ayant cause du lot n°2 disposera d'un droit de circulation et de passage, non limité dans le temps, sur le lot n°1, pour accéder à la voie publique, ledit droit pouvant être exercé à toute heure, à pied et avec voitures, animaux et tous engins, à charge de supporter la totalité des frais d'entretien et de réfection de l'emprise de la servitude'.
C'est donc un droit de circulation et de passage pour accéder à la voie publique qui a été accordé au lot n°2 par cet acte.
Le lot n°1 a été divisé, selon état descriptif de division du 4 avril 2003, en trois parcelles ZW [Cadastre 3] à [Cadastre 5], portant les numéros de lots 3, 4 et 5. Le lot n°3, sur lequel étaient implantés les bâtiments objets du lot n°2, est resté la propriété de la société Calpont SA.
Par acte notarié du 15 et 23 février 2005, reçu par la SCP [Z] - TIERCELIN, notaire, la société PIV a consenti à la société MAM SATEMA un bail commercial sur ce lot, le contrat précisant qu'était consenti au locataire 'un droit de circulation, stationnement et stockage sur le lot n°3, appartenant à la société Calpont SA, consistant en le sol de la ladite parcelle ZW [Cadastre 3], d'une surface de 20 751 mètres carrés'.
Or la société PIV ne disposait d'aucun droit de stockage et de stationnement sur la parcelle ZW [Cadastre 3], mais seulement d'un droit de circulation et de passage jusqu'à la voie publique.
Il en résulte qu'elle a donné à bail des droits dont elle ne disposait pas sur la parcelle ZW145, qui appartenait à la société Calpont SA, ce qu'elle n'ignorait pas, quand bien même le bail a été rédigé par un notaire, puisqu'elle a signé le bail contenant ladite clause.
Elle a ce faisant commis une faute de nature délictuelle à l'égard du propriétaire de la parcelle ZW145, dont elle doit répondre pour les préjudices en résultant.
2 - Sur la demande de remise en état et de libération des lieux
Moyens des parties
La société HB41 sollicite :
- la remise en état du site, faisant valoir que la parcelle ZW [Cadastre 3] est occupée illégalement par la société MAM SATEMA qui a pollué les lieux au travers de la présence de nombreux déchets et a entreposé beaucoup de matériel agricole, ainsi qu'il résulte du bilan de visite du SIAEP du 13 septembre 2017, que les photographies prises en 2022 montrent que la situation n'a pas évolué depuis, qu'elle verse aux débats des éléments émanant du Préfet du Loir et Cher en 2024, qui démontrent l'ampleur de la pollution et la responsable de la société MAM SATEMA ; qu'il convient de mettre un terme à cette violation inadmissible de son droit de propriété et de condamner la société PIV à remettre en état le lot n°6, en libérant le sol de toute occupation, et en effectuant les opérations de dépollution destinées à supprimer les non-conformités décrites dans le rapport du SIAEP du 13 septembre 2017, sous astreinte.
- la condamnation de la société PIV, de la société MAM SATEMA et de la société Tiercelin-Brunet-Duvivier à prendre en charge le coût de la remise en état s'ils n'y procèdent pas eux-mêmes.
La société PIV répond qu'au regard du droit de l'environnement, il appartient à l'exploitant de répondre de sa pollution, et qu'en l'espèce, cette pollution résulte de l'occupation de la société MAM SATEMA et n'est donc pas le fait de la société PIV. Elle n'est pas non plus le propriétaire du terrain pollué. Elle n'est donc ni le pollueur, ni le propriétaire du terrain pollué et n'a donc pas à répondre des faits de pollution.
Elle ajoute que surtout, la pollution n'est pas démontrée par la société HB41.
Réponse de la cour
La société PIV a autorisé son locataire à jouir du terrain situé autour des bâtiments dont elle était propriétaire en y stockant du matériel, alors qu'elle ne disposait pas de ce droit.
Elle a ce faisant commis une faute à l'égard du propriétaire du terrain et doit répondre du préjudice en résultant, consistant dans l'occupation illicite de son terrain, indépendamment même de tout fait de pollution.
Or il est établi par les pièces produites, et notamment par le rapport du service intercommunal d'alimentation en eau potable de la vigne aux champs (ci-après SIAEP) du 13 septembre 2017, par les photographies du site versées aux débats ainsi que par les documents établis courant 2024 par les services de la préfecture dont il résulte que la société MAM SATEMA n'a pas libéré le terrain (pièce 25-3 de la société HB41), que le locataire stockait sur le terrain des engins agricoles, tracteurs, carcasses de voitures, et divers fûts et bidons et contenants de tous genres.
S'il résulte de la pièce n°25-3 que l'administration a procédé au 'nettoyage de l'établissement', et notamment évacué 95% des fûts du site en juillet 2023, il n'est pas démontré que le terrain est désormais libre de toute occupation.
Si la société PIV ne peut être condamnée à procéder elle-même à l'enlèvement des matériaux demeurant sur le terrain, qui ne lui appartiennent pas, enlèvement qui incombe au premier chef à la société MAM SATEMA, il lui appartiendra en revanche, dès lors qu'elle est responsable du préjudice en résultant pour la société HB41, de supporter le coût de cet enlèvement dans l'hypothèse où la société MAM SATEMA n'y procéderait pas elle-même, in solidum avec celle-ci.
3 - Sur la demande en paiement d'une indemnité d'occupation
Moyens des parties
La société HB41 sollicite le paiement d'une somme de 160 000 euros au titre des indemnités d'occupation échues entre le 1er janvier 2015 et le 31 décembre 2022, outre 20 000 euros par an à compter de cette date.
La société PIV fait valoir que la société HB41 ne peut demander une indemnité d'occupation pour la période antérieure au 30 juillet 2019, date à laquelle elle est devenue propriétaire de sorte qu'elle n'a personnellement
subi aucune occupation illicite et polluante avant cette date, et que ses auteurs ne se sont jamais plaints d'une telle occupation.
Réponse de la cour
La société HB41 voit son terrain occupé par le locataire de la société PIV, de sorte qu'elle n'est pas elle-même en mesure de jouir de son propre terrain.
La société PIV , responsable de l'occupation par son locataire du terrain de la société HB41, doit donc répondre du préjudice qui en résulte pour cette société.
En revanche, la société HB41 sollicite une indemnité d'occupation à compter du 1er janvier 2015.
Toutefois, la société HB41 a fait l'acquisition du terrain par acte notarié du 30 juillet 2019.
En vertu du principe de la réparation intégrale du préjudice, les dommages et intérêts dus au créancier sont de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé sans qu'il en résulte pour lui ni perte ni profit.
La clause de subrogation dans les droits du vendeur figurant dans l'acte d'acquisition du 30 juillet 2019 ne confère pas à l'acquéreur le droit d'obtenir l'indemnisation d'un préjudice, antérieur à l'acquisition du bien, qu'il n'a donc pas personnellement subi puisqu'il a été subi par une autre personne morale.
En conséquence, sa demande en paiement d'une indemnité d'occupation sera rejetée pour la période antérieure au 30 juillet 2019.
Elle sollicite à ce titre une indemnité annuelle de 20 000 euros, au motif que le contrat de bail prévoit un loyer annuel d'un montant de 60 000 euros pour la location de 4 bâtiments d'une surface de 1066 mètres carrés, ainsi que pour l'occupation du terrain.
Le terrain de la société HB41, irrégulièrement occupé par la société MAM SATEMA, a une surface de plus 28 751 mètres carrés.
La société HB41 sollicite une indemnité d'occupation d'un montant de
20 000 euros par an.
Aucune pièce n'est produite permettant de déterminer la valeur locative respective des bâtiments et du terrain. Aucun élément ne justifie notamment de considérer que l'occupation de la parcelle justifierait l'octroi d'une indemnité d'occupation équivalente à un tiers du loyer, proportion élevée en considération de la surface relativement conséquente des bâtiments, dont la valeur locative est significativement supérieure à celle d'un terrain, fût-il grand.
Il convient d'allouer à la société HB41 une indemnité d'occupation d'un montant de 15 000 euros par an, soit pour la période du 1er août 2019 au 31 décembre 2022 une somme de 51 250 euros, outre une somme de 15 000 euros par an jusqu'à libération des lieux.
II - Sur la responsabilité du notaire, la SELARL Tiercelin et Brunet
1 - Sur le principe de la responsabilité
Moyens des parties
La société HB41 soutient que le notaire, qui a reçu le contrat de bail commercial consenti par la société PIV à la société MAM SATEMA, a commis une faute puisqu'alors qu'il connaissait parfaitement la clause contenue dans l'acte de 1991, le bail qu'il a rédigé comporte une clause accordant au locataire un droit de stockage et de stationnement dont ne disposait pas le bailleur, la société PIV. Elle ajoute que le notaire l'a fait en toute connaissance de cause puisqu'il a envoyé un courrier le 3 février 2005 à la société Calpont, alors propriétaire du terrain, qui ne laisse planer aucun doute sur la connaissance qu'il avait de la consistance réelle de la servitude, de sorte que c'est intentionnellement qu'il en a modifié la substance dans le bail commercial.
La société Tiercelin-Brunet soutient que si une erreur rédactionnelle peut effectivement être relevée dans le contrat de bail, cela ne permet pas de réunir les trois conditions prévues par l'article 1240 du code civil pour engager sa responsabilité, à défaut de préjudice subi par la société HB41.
Réponse de la cour
En application de l'article 1240 du code civil :
'Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'.
Il est constant que le notaire est tenu de s'assurer de la vadité et de l'efficacité des actes qu'il instrumente. Il est responsable même envers les tiers de toute faute préjudiciable commise par lui dans l'exercice de ses fonctions. Il doit, notamment, vérifier la situation juridique de l'immeuble objet de la convention qu'il instrumente, notamment au regard de l'existence de servitudes.
Or en l'espèce, le bail reçu les 15 et 23 février 2005 par la SCP [Z] - TIERCELIN, notaire, portait sur les bâtiments constituant le lot n°2. Le contrat stipule qu'était consenti au locataire 'un droit de circulation, stationnement et stockage sur le lot n°3, appartenant à la société Calpont SA, consistant en le sol de la ladite parcelle ZW [Cadastre 3], d'une surface de 20 751 mètres carrés'.
Or la société PIV, bailleur, ne disposait d'aucun droit de stockage sur la parcelle ZW [Cadastre 3], mais seulement d'un droit de circulation et de passage jusqu'à la voie publique, ce que le notaire n'ignorait pas puisqu'il résulte d'un courrier du 3 février 2005 adressé à la société Calpont, propriétaire du terrain, qu'elle avait une parfaite connaissance du fait que les droits de la société PIV sur le terrain entourant les bâtiment étaient seulement des droits de passage et de circulation, et en aucun cas un droit de stockage.
Le notaire a donc manqué à son obligation d'assurer l'efficacité des actes qu'il instrumente puisque le bail commercial octroyait au preneur davantage de droits que n'en avait le bailleur. La connaissance éventuelle qu'avait la société PIV de cette irrégularité n'exonère pas le notaire de la responsabilité qui est la sienne dès lors qu'il avait une parfaite connaissance de la situation juridique de ce bien.
Il a donc commis une faute dans l'exercice de sa mission dont il est responsable à l'égard de la société HB41.
2 - Sur la demande en remise en état
Moyens des parties
La société HB41 sollicite la condamnation de la SELARL Tiercelin-Brunet-Duvivier, in solidum avec la psociété PIV et la société MAM SATEMA, à prendre en charge le coût de la remise en état par une entreprise tierce pour le cas où les sociétés PIV et MAM SATEMA n'y procéderaient pas elles-mêmes.
La société Tiercelin-Brunet fait valoir que la parcelle a été exploitée depuis 2005 par la société MAM SATEMA en toute connaissance de cause des différents propriétaires des lots, que la société HB41 avait pleinement connaissance de la présence de la société MAM SATEMA lors de l'acquisition du lot, qu'elle ne peut de toutes façons solliciter une indemnité d'occupation que depuis qu'elle est propriétaire du lot. Elle ajoute qu'il n'y a pas de lien de causalité, le notaire ne pouvant être tenu pour responsable de la pollution du lot, qui n'est ni directement, ni indirectement de son fait.
Réponse de la cour
La société Tiercelin-Brunet a commis une faute en recevant un contrat de bail commercial octroyant au locataire un droit, en l'espèce un droit de stockage sur le terrain appartenant à un tiers, dont ne disposait pas le bailleur.
Elle doit donc indemniser ce tiers du préjudice que lui cause cette faute, préjudice constitué par l'occupation qui en est faite par le locataire et qui prive le propriétaire de la possibilité de jouir de son terrain, indépendamment même de tout fait de pollution.
Or il est établi par les pièces produites, et notamment par le rapport du SIAEP de 2017, par les photographies du site versées aux débats ainsi que par les documents établis courant 2024 par les services de la préfecture dont il résulte que la société MAM SATEMA n'a pas libéré le terrain (pièce 25-3 de la société HB41), que le locataire stockait sur le terrain des engins agricoles, tracteurs, carcasses de voitures, et divers fûts et bidons et contenants de tous genres.
S'il résulte de la pièce n°25-3 que l'administration a évacué 95% des fûts du site en juillet 2023, il n'est pas démontré que le terrain, sur lequel étaient
également entreposés divers véhicules, carcasses et autres engins agricoles, est désormais libre de toute occupation, outre qu'il reste des contenants puisque seuls 95% de ceux-ci ont été enlévés.
Si la société Tiercelin et Brunet ne peut être condamnée à procéder elle-même à l'enlèvement des matériaux restant sur le terrain, qui ne lui appartiennent pas, enlèvement qui incombe au premier chef à la société MAM SATEMA, il lui appartiendra en revanche de supporter le coût de cet enlèvement par une entreprise tierce à l'initiative de la société HB41 dans l'hypothèse où la société MAM SATEMA n'y procéderait pas elle-même, in solidum avec celle-ci et avec la société PIV puisque chacun des responsables d'un même dommage est tenu d'en réparer la totalité.
3 - Sur la demande en paiement d'indemnités d'occupation
Moyens des parties
La société HB41 estime que le notaire doit l'indemniser pour le préjudice de jouissance qu'elle subit, par subrogation dans les droits de son auteur depuis 2005, et elle-même depuis le 30 juillet 2019.
La société Tiercelin et Brunet répond que la société HB41 ne peut solliciter d'indemnité d'occupation que depuis qu'elle est propriétaire du lot, à partir du 30 juillet 2019, qu'elle chiffre de manière arbitraire son préjudice, et qu'il n'y a aucun lien de causalité avec le préjudice de la société HB41, le notaire ne pouvant être tenu pour responsable de la pollution du site.
Réponse de la cour
La société HB41 voit son terrain occupé par le locataire de la société PIV, de sorte qu'elle n'est pas elle-même en mesure de jouir de son propre terrain.
Le notaire, dont la faute a contribué à l'occupation par son locataire du terrain de la société HB41, doit donc répondre du préjudice qui en résulte pour cette société.
En revanche, la société HB41 sollicite une indemnité d'occupation à compter du 1er janvier 2015, alors qu'elle n'a acquis son terrain que le 30 juillet 2019.
En vertu du principe de la réparation intégrale du préjudice, les dommages et intérêts dus au créancier sont de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé sans qu'il en résulte pour lui ni perte ni profit.
La clause de subrogation dans les droits du vendeur figurant dans l'acte d'acquisition du 30 juillet 2019 ne confère pas à l'acquéreur le droit d'obtenir l'indemnisation d'un préjudice, antérieur à l'acquisition du bien, qu'il n'a donc pas personnellement subi puisqu'il a été subi par une autre personne morale.
En conséquence, sa demande en paiement d'une indemnité d'occupation sera rejetée pour la période antérieure au 30 juillet 2019.
Elle sollicite à ce titre une indemnité annuelle de 20 000 euros, au motif que le contrat de bail prévoit un loyer annuel d'un montant de 60 000 euros pour la location de 4 bâtiments d'une surface de 1066 mètres carrés, ainsi que pour l'occupation du terrain.
Le terrain de la société HB41, irrégulièrement occupé par la société MAM SATEMA, a une surface de plus 28 751 mètres carrés.
La société HB41 sollicite une indemnité d'occupation d'un montant de 20.000 euros par an.
Aucune pièce n'est produite permettant de déterminer la valeur locative respective des bâtiments et du terrain. Aucun élément ne justifie notamment de considérer que l'occupation de la parcelle justifierait l'octroi d'une indemnité d'occupation équivalente à un tiers du loyer, proportion élevée en considération de la surface relativement conséquente des bâtiments, dont la valeur locative est significativement supérieure à celle d'un terrain, fût-il grand.
Il convient de condamner la société Tiercelin et Brunet, in solidum avec la société PIV, à verser à la société HB41 une indemnité d'occupation d'un montant de 15 000 euros par an, soit pour la période du 1er août 2019 au 31 décembre 2022 une somme de 51 250 euros, outre une somme de 15 000 euros par an jusqu'à libération des lieux.
Sur la responsabilité de la société MAM SATEMA
Moyens des parties
La société HB41 soutient que la responsabilité de la soicété MAM SATEMA est engagée en ce qu'elle a pollué le site de façon très importante, ainsi qu'il résulte du rapport du SIAEP du 13 septembre 2017, qui fait état d'un risque majeur de pollution compte tenu de la présence de bidons éventrés, de traces d'hydrocarbures sur le sol, de carcasses de véhicules et de tas de pneus. Elle précise qu'une mises en demeure a été envoyé à la GREPA en novembre 2017, en vain puisque la pollution résultait de l'occupation par la société SATEMA. Elle a fait constater en 2019 que la parcelle restait occupée dans les mêmes conditions, et elle souligne qu'elle produit de nouveaux éléments récents démontrant l'importance de la pollution et la responsabilité de la société MAM SATEMA dans celle-ci.
Réponse de la cour
Il résulte d'un rapport du SIAEP , établi le 13 septembre 2017, que :
- à l'intérieur des bâtiments ont été constatés : la présence de 4 cuves fuel et plastifiant, vides ou quasi et situées dans des fosses bétonnées ; la présence de plusieurs fûts, divers contenants, huile moteur, bidons de diluant, lubrifiant... sans bas de rétention ;
- à l'extérieur des bâtiments : une dizaine de tracteurs et des engins agricoles sont garés ; des stockages présentant un risque majeur de pollution, bidons éventrés, traces d'hydrocarbures sur le sol, carcasses de véhicules, tas de pneus.
Ce rapport, qui mettait en évidence un risque majeur de pollution, invitait la société locataire à mettre tout en oeuvre pour stocker réglementairement les produits et supprimer l'ensemble des stockages à l'extérieur des bâtiments.
Le propriétaire du terrain, la société GREPA, a été mise en demeure d'engager des travaux de conformité dans un délai d'un mois sur le fondement des articles L1324-1 et L1324-3 du code de la santé publique.
Le Préfet de Loir-et-cher a :
- le 11 juin 2018, dressé un procès-verbal à la société MAM SATEMA pour non respect de l'arrêté de DUP ;
- par arrêté du 9 mars 2021, il l'a mise en demeurure de procéder sous trois mois à l'évacuation des déchets présents sur le site et à l'identification des sources de pollution des eaux.
Le 13 juin 2023, une visite a eu lieu sur le site par l'administration, qui a constaté la présence d'un lac d'hydrocarbures en sous-sol du bâtiment avec infiltration dans le sol en cours, et diverses sources de pollution réparties sur le site (fûts et bidons d'huile et d'hydrocarbures, engins agricoles, cuves de stockage).
Des prélèvements du fluide identifié dans le sous-sol du site confirment qu'il s'agit principalement d'huile de vidange usagée, et qu'elles contiennent des hydrocarbures non volatils et des métaux, aluminium, antimoine et une concentration importante en zinc.
Les mises en demeure adressées à la société MAM SATEMA sont restées sans effet et au vu de l'urgence, de l'atteinte à la salubrité publique et du risque d'aggravation de la pollution, le préfet a donc fait procéder lui-même aux travaux de nettoyage : pompage de la nappe et évacuation de 95% des fûts du site. Les travaux onté té réceptionnés le 13 juillet 2023.
Le document intitulé 'secteur d'information sur les sols MAM SATEMA à [Localité 15]', établi le 7 février 2024, conclut 'en ce qui concerne les sols de l'établissement MAM SATEMA, la présence d'hydrocarbures et de HAP dans les sols rend nécessaire la mise en place d'un secteur d'information sur les sols afin :
- d'assurer la conservation de la mémoire de cette pollution ;
- de protéger les intervenants en cas de travaux réalisés sur ce site ;
- d'imposer que les demandes d'autorisation à construire attentent de la prise en compte d'une étude de sols définissant les modalités de gestion de la pollution afin de garantir la compatibilité entre l'usage futur et l'état des sols'.
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Il ne peut être reproché à la société MAM SATEMA d'avoir utilisé le terrain de la société HB41 à des fins de stockage, puisque le bail lui en donnait l'autorisation.
En revanche, il est établi qu'elle a, dans le cadre de ses activités, commis des actes de pollution affectant le terrain de la société HB41.
Le SIAEP a recensé les sources de pollution suivantes :
- à l'intérieur des bâtiments : la présence de 4 cuves fuel et plastifiant, vides ou quasi et situées dans des fosses bétonnées ; la présence de plusieurs fûts, divers contenants, huile moteur, bidons de diluant, lubrifiant, sans bac de rétention ;
- à l'extérieur des bâtiments : une dizaine de tracteurs et des engins agricoles sont garés ; des stockages présentant un risque majeur de pollution, bidons éventrés, traces d'hydrocarbures sur le sol, carcasses de véhicules, tas de pneus.
Il préconise, dans son rapport du 13 septembre 2017 :
'La société locataire du site doit impérativement mettre tout en oeuvre pour d'une part, stocker réglementairement les produits dans les bâtiments, cas de rétention ou autre, et d'autre part, supprimer dans les plus brefs délais l'ensemble des stockages situés à l'extérieur des bâtiments. Concernant les cuves situées en sous-sols, l'étanchéité des fosses bétonnées devra être vérifiée afin de se prémunir d'une évnetuelle remise en service des stockages ces prochaines années'.
Si la présence des cuves dans le bâtiment ne peut être imputée à faute à la société MAM SATENA puisqu'il résulte du rapport du SIAEP que ces cuves étaient déjà présentes avant la conclusion du bail, en 2003 (page 2 du rapport du SIAEP : 'En 2003, il avait été recensé 2 cuves (...) et 2 cuves (...)', et étaient vides lors de la visite, il est en revanche démontré que la société MAM SATENA a entreposé sur le site non seulement divers véhicules, engins agricoles et carcasses de véhicules mais également, divers fûts, bidons et contenants de produits chimiques, à l'origine d'une pollution des sols. Les photographies versées aux débats montrent d'ailleurs des véhicules laissés dehors, à l'état d'abandon.
La société MAM SETEMA a de ce fait commis des fautes à l'égard de la société HB41 en entreposant dans les bâtiments et sur le terrain de la société HB41des matériaux à l'origine d'une pollution de ce terrain.
La société HB41 sollicite la condamnation de la société MAM SATEMA à remettre en état son terrain, en procédant aux opérations de dépollution destinées à supprimer les non conformités décrites par le rapport du SIAEP le 13 septembre 2017 et en libérant ensuite le lot de toute occupation.
Il résulte du rapport du 7 février 2024 que la préfecture a déjà fait procéder, compte tenu de l'urgence, à une partie des travaux de nettoyage du site puisque la nappe a été pompée et 95% des fûts du site ont été évacués. En revanche, outre qu'il reste 5% des fûts à évacuer, il ne résulte pas de ce document que les véhicules, engins agricoles et autres carcasses de
véhicules stockés sur le terrain, qui constituent également une source de pollution, ont été enlevés. Il convient dès lors de condamner la société MAM SATENA à enlever du terrain appartenant à la société HB41 l'intégralité des les matériaux,véhicules, engins agricoles, carcasses de voiture, bidons, fûts qui y sont entreposés dans un délai de deux mois à compter de la présente décision, et à le laisser libre ensuite de toute occupation, le contrat de bail signé entre la société PIV et la société MAM SATEMA n'étant pas opposable à la société HB41 qui n'y était pas partie et qui n'a jamais consenti à l'utilisation de son terrain à des fins de stockage et de stationnement.
Compte tenu de l'inertie de la société MAM SATEMA, il convient d'assortir cette condamnation d'une astreinte provisoire de 300 euros par jour de retard, pendant un délai d'un mois, et de dire que faute pour la société MAM SATEMA de libérer la parcelle de tous les matériaux et véhicules qui s'y trouvent dans un délai de trois (3) mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, la société HB41 pourra faire procéder elle-même à l'enlèvement de l'ensemble des matériaux et véhicules entreposés sur sa parcelle par une entreprise tierce, à charge pour la société MAM SATEMA d'en supporter le coût, in solidum avec les sociétés PIV et Tiercelin-Brunet, sur présentation des justificatifs.
Sur la demande au titre des indemnités d'occupation
Moyens des parties
La société HB41 sollicite également de la société MAM SATEMA l'indemnisation de la privation de jouissance qu'elle subit, en raison de l'impossibilité dans laquelle elle se trouve, compte tenu de l'occupation de son terrain, d'en jouir. Elle sollicite le versement d'une indemnité d'occupation de 20 000 euros par an, du 1er janvier 2015 jusqu'à la libération effective des lieux.
Réponse de la cour
La société MAM SATEMA était autorisée par le contrat de bail à utiliser le terrain objet du lot n°03 à des fins de stockage et de stationnement.
Elle n'a donc pas commis de faute à l'égard de la société HB41 en utilisant le terrain à cette fin puisqu'elle avait un titre l'autorisant à utiliser ce terain.
De plus, l'occupation de ce terrain avait pour contrepartie le paiement d'un loyer, fixé en considération de ce droit de stockage.
Elle ne saurait donc être tenue au paiement d'une indemnité d'occupation à l'égard de la société HB41.
La société HB41 sera déboutée de sa demande à ce titre à l'égard de la société MAM SATEMA.
III - Sur l'appel en garantie de la société PIV à l'égard de la société Tiercelin et Brunet
Moyens des parties
La société PIV souligne que le notaire avait une parfaite connaissance de l'étendue de la servitude et a, en toute connaissance de cause, rédigé un acte accordant au locataire des droits dont le bailleur ne disposait. Elle précise :
- que c'est la même étude notariale qui a rédigé l'acte de vente du 17 décembre 1991 qui prévoyait un droit de circulation et de passage sur le lot n°1 au profit de la société PIV, et le bail commercial des 15 et 23 février 2005, octroyant un droit de stockage et de stationnement. - qu'elle a préalablement à l'établissement de l'acte sollicité l'autorisation du propriétaire du terrain pour insérer dans le bail une clause accordant un droit de stockage, et n'a pas hésité, alors même que la société Calpont n'a pas donné son accord, à insérer ladite clause dans l'acte.
Elle ajoute que contrairement à ce qu'indique l'étude notariale, elle n'a jamais été alertée de l'occupation et de la pollution.
La société Tiercelin et Brunet s'oppose à cette demande. Elle fait valoir que la société PIV savait parfaitement que la propriété du lot n°2 ne lui conférait qu'un droit de passage sur le terrain alentour, et a laissé la société MAMA SATEMA outrepasser ce droit depuis 2005. De plus, elle a nécessairement été informée des diligences effectuées par les autorités administratives en 2017, sans toutefois intervenir auprès de son locataire.
Réponse de la cour
Le notaire avait en l'espèce une parfaite connaissance de l'étendue des servitudes dont bénéficiait le lot n°2 sur le terrain qui l'entourait, puisque non seulement l'acte de vente du lot n°1 à la société Calpont, en date du 17 décembre 1991, qui prévoyaitun droit de circulation et de passage sur ce lot au profit du lot n°2, avait été rédigé par la même étude notariée, mais que surtout le courrier du 3 février 2005, dans lequel il écrit à la société Calpont'Aujourd'hui,un ayant-cause de la société PIV souhaite réaliser sur le terrain un dispositif de lavage de véhicules, avec les canalisations entrantes et sortantes réglementaires. Ce projet n'étant pas expressément prévu dans le texte de la servitude, je vous serais reconnaissance de m'indiquer si votre société consentirait dans un acte à étendre la clause insérée dans l'acte de 1991 pour permettre l'opération ci-dessus' démontre qu'il avait une parfaite connaissance de l'étendue des servitudes grevant le terrain au profit des bâtiments.
Il a néanmoins rédigé un contrat de bail accordant au locataire un droit de stockage et de stationnement, droit dont il savait parfaitement que le bailleur ne disposait pas, au mépris des droits du propriétaire du terrain.
Le notaire a donc manqué à son obligation d'assurer l'efficacité de l'acte qu'il instrumente et a donc commis une faute qui a contribué à la survenance du préjudice de la société PIV.
Toutefois, celle-ci, qui avait parfaitement connaissance tant de l'étendue de la servitude dont elle bénéficiait que du contenu du contrat de bail qui n'était pas conforme à celle-ci, a elle-même commis une faute qui a contribué à la survenance de son préjudice dans une proportion qu'il convient de fixer à 50%, de sorte que la société Tiercelin et Brunet ne sera condamnée à garantir la société PIV des condamnations mises à sa charge qu'à hauteur de 50%.
V - Sur les mesures accessoires
La société PIV, la société Tiercelin et Brunet et la société MAM SATEMA seront tenues in solidum aux dépens de première instance et d'appel.
Les circonstances de la cause justifient de condamner in solidum la société MAM SATEMA, la société Tiercelin et Brunet et la société PIV à verser à la société HB41 une somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et de rejeter les demandes de la société PIV et de la société Tiercelin et Brunet à ce titre.
PAR CES MOTIFS
Statuant par mise à disposition au greffe, publiquement, par défaut et en dernier ressort,
INFIRME en toutes ses dispositions critiquées le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
CONDAMNE la société MAM SATENA à enlever du terrain cadastré ZW145 commune de [Localité 15] appartenant à la société HB41 l'intégralité des matériaux, véhicules, engins agricoles, carcasses de voiture, bidons et fûts qui y sont entreposés dans un délai de deux mois à compter de la présente décision et à le laisser libre ensuite de toute occupation, sous astreinte provisoire de 300 euros par jour de retard pendant un délai d'un mois ;
DIT que faute pour la société MAM SATEMA d'exécuter cette condamnation dans un délai de trois (3) mois à compter de la signification de l'arrêt, la société HB41 sera autorisée à y faire procéder elle-même par une entreprise tierce, à charge pour les sociétés MAM SATEMA, Plastiques industriels de [Localité 12] (PIV) et Tiercelin et Brunet d'en supporter in solidum le coût sur présentation des justificatifs des dépenses engagées par la société HB41 ;
REJETTE la demande de la société HB41 en paiement d'une indemnité d'occupation contre la société MAM SATEMA ;
CONDAMNE in solidum la société Plastiques industriels de [Localité 12] (PIV) et la société Tiercelin et Brunet à payer à la société HB41 une somme de 51 250 euros à titre d'indemnité d'occupation pour la période du 1er août 2019 au 31 décembre 2022, outre une somme de 15 000 euros par an à compter du 1er janvier 2023 et jusqu'à la libération des lieux ;
CONDAMNE la société Tiercelin et Brunet à garantir la société Plastiques industriels de [Localité 12] à hauteur de 50% des condamnations prononcées à son encontre ;
CONDAMNE in solidum la société Plastiques industriels de [Localité 12], la société Tiercelin et Brunet et la société MAM SATEMA à verser à la société HB41 une somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE in solidum la société Plastiques industriels de [Localité 12] (PIV) , la société Tiercelin et Brunet et la société MAM SATEMA aux dépens de première instance et d'appel.