Décisions
Cass. 3e civ., 21 novembre 2024, n° 24-10.256
COUR DE CASSATION
Autre
Irrecevabilité
SCIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 21 novembre 2024
Irrecevabilité du déclinatoire de compétence
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 669 FS-B
Pourvoi n° U 24-10.256
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 NOVEMBRE 2024
La société Energie renouvelable du Languedoc, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° U 24-10.256 contre l'arrêt rendu le 7 décembre 2023 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre, section A), dans le litige l'opposant :
1°/ à l'Association pour la protection des paysages et ressources de l'Escandorgue et du Lodèvois (APPREL), dont le siège est [Adresse 5],
2°/ à l'association Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), dont le siège est [Adresse 3],
3°/ à l'association Vigilance patrimoine paysager et naturel (VPPN), dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Abgrall, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la société Energie renouvelable du Languedoc, de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de l'Association pour la protection des paysages et ressources de l'Escandorgue et du Lodèvois, de l'association Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France et de l'association Vigilance patrimoine paysager et naturel, et l'avis de Mme Vassalo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 5 novembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Abgrall, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, MM. Pety, Brillet, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, Me Alice Meier-Bourdeau, Me Ambroise Marlange et Mme Maréville, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. La société Energie renouvelable du Languedoc (la société ERL) a édifié sept aérogénérateurs et un poste de distribution au lieu-dit « [Localité 4] », sur le territoire de la commune de [Localité 6], en exécution d'un permis de construire délivré le 24 avril 2013 par le préfet de l'Hérault.
2. Le 27 juillet 2018, l'association Vigilance patrimoine paysager et naturel (VPPN) et l'Association pour la protection des paysages et ressources de l'Escandorgue et du Lodèvois (APPREL), ont assigné la société ERL devant le juge judiciaire, principalement, en démolition de ce parc éolien sur le fondement de l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme, après avoir obtenu l'annulation définitive du permis de construire par une décision du Conseil d'Etat du 8 novembre 2017.
3. Par arrêt du 11 janvier 2023 (3e Civ., pourvoi n° 21-19.778), la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 3 juin 2021 qui avait rejeté les demandes.
4. Par arrêt du 7 décembre 2023, la cour d'appel de Nîmes, statuant sur renvoi, a confirmé le jugement du 19 février 2021 qui avait condamné la société ERL à remettre les lieux en leur état antérieur par la démolition des éoliennes et de toute installation y attachée ou nécessaire à l'exploitation et a fait courir une astreinte à l'expiration d'un délai de quinze mois à compter de la signification de l'arrêt.
5. La société ERL a formé le 9 janvier 2024 un pourvoi contre cet arrêt et, par mémoire distinct, a saisi la Cour de cassation d'une question prioritaire de constitutionnalité.
6. Par décision du 25 avril 2024, la Cour a dit n'y avoir lieu de transmettre cette question au Conseil constitutionnel, en énonçant qu'il relevait de l'office du juge, saisi d'une demande de démolition sur le fondement de l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme, de vérifier si, à la date à laquelle il statuait, la règle d'urbanisme dont la méconnaissance avait justifié l'annulation du permis de construire était toujours opposable au pétitionnaire et, le cas échéant, si celui-ci n'avait pas régularisé la situation au regard de celle qui lui était désormais applicable.
7. Par lettre parvenue au greffe de la Cour de cassation le 19 juillet 2024, le préfet de l'Hérault a présenté un déclinatoire de compétence au visa de l'article 13 de la loi du 24 mai 1872 relative au Tribunal des conflits dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, et du décret n° 2015-233 du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles.
Sur la recevabilité du déclinatoire contestée par les associations
Vu l'article 13 de la loi du 24 mai 1872 relative au Tribunal des conflits, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, et l'article 22 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015 :
8. Aux termes du premier de ces textes, lorsque le représentant de l'Etat dans le département ou la collectivité estime que la connaissance d'un litige ou d'une question préjudicielle portée devant une juridiction de l'ordre judiciaire relève de la compétence de la juridiction administrative, il peut, alors même que l'administration ne serait pas en cause, demander à la juridiction saisie de décliner sa compétence.
9. Selon le second, si le jugement a rejeté le déclinatoire, le préfet peut élever le conflit par arrêté dans les quinze jours suivant la réception du jugement, le conflit pouvant également être élevé si le tribunal a, avant expiration de ce délai, passé outre et jugé au fond. Si une partie fait appel du jugement ayant admis le déclinatoire, le préfet peut saisir la juridiction d'appel d'un nouveau déclinatoire et, en cas de rejet de celui-ci, élever le conflit dans les mêmes conditions qu'en première instance.
10. Il en résulte que la procédure de conflit positif, qui n'est prévue que devant les juridictions de première instance et d'appel, ne peut être engagée devant la Cour de cassation.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
Déclare irrecevable le déclinatoire de compétence présenté par le préfet de l'Hérault ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé le vingt-et-un novembre deux mille vingt-quatre, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
JL
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 21 novembre 2024
Irrecevabilité du déclinatoire de compétence
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 669 FS-B
Pourvoi n° U 24-10.256
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 NOVEMBRE 2024
La société Energie renouvelable du Languedoc, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° U 24-10.256 contre l'arrêt rendu le 7 décembre 2023 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre, section A), dans le litige l'opposant :
1°/ à l'Association pour la protection des paysages et ressources de l'Escandorgue et du Lodèvois (APPREL), dont le siège est [Adresse 5],
2°/ à l'association Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), dont le siège est [Adresse 3],
3°/ à l'association Vigilance patrimoine paysager et naturel (VPPN), dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Abgrall, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la société Energie renouvelable du Languedoc, de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de l'Association pour la protection des paysages et ressources de l'Escandorgue et du Lodèvois, de l'association Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France et de l'association Vigilance patrimoine paysager et naturel, et l'avis de Mme Vassalo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 5 novembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Abgrall, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, MM. Pety, Brillet, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, Me Alice Meier-Bourdeau, Me Ambroise Marlange et Mme Maréville, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. La société Energie renouvelable du Languedoc (la société ERL) a édifié sept aérogénérateurs et un poste de distribution au lieu-dit « [Localité 4] », sur le territoire de la commune de [Localité 6], en exécution d'un permis de construire délivré le 24 avril 2013 par le préfet de l'Hérault.
2. Le 27 juillet 2018, l'association Vigilance patrimoine paysager et naturel (VPPN) et l'Association pour la protection des paysages et ressources de l'Escandorgue et du Lodèvois (APPREL), ont assigné la société ERL devant le juge judiciaire, principalement, en démolition de ce parc éolien sur le fondement de l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme, après avoir obtenu l'annulation définitive du permis de construire par une décision du Conseil d'Etat du 8 novembre 2017.
3. Par arrêt du 11 janvier 2023 (3e Civ., pourvoi n° 21-19.778), la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 3 juin 2021 qui avait rejeté les demandes.
4. Par arrêt du 7 décembre 2023, la cour d'appel de Nîmes, statuant sur renvoi, a confirmé le jugement du 19 février 2021 qui avait condamné la société ERL à remettre les lieux en leur état antérieur par la démolition des éoliennes et de toute installation y attachée ou nécessaire à l'exploitation et a fait courir une astreinte à l'expiration d'un délai de quinze mois à compter de la signification de l'arrêt.
5. La société ERL a formé le 9 janvier 2024 un pourvoi contre cet arrêt et, par mémoire distinct, a saisi la Cour de cassation d'une question prioritaire de constitutionnalité.
6. Par décision du 25 avril 2024, la Cour a dit n'y avoir lieu de transmettre cette question au Conseil constitutionnel, en énonçant qu'il relevait de l'office du juge, saisi d'une demande de démolition sur le fondement de l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme, de vérifier si, à la date à laquelle il statuait, la règle d'urbanisme dont la méconnaissance avait justifié l'annulation du permis de construire était toujours opposable au pétitionnaire et, le cas échéant, si celui-ci n'avait pas régularisé la situation au regard de celle qui lui était désormais applicable.
7. Par lettre parvenue au greffe de la Cour de cassation le 19 juillet 2024, le préfet de l'Hérault a présenté un déclinatoire de compétence au visa de l'article 13 de la loi du 24 mai 1872 relative au Tribunal des conflits dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, et du décret n° 2015-233 du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles.
Sur la recevabilité du déclinatoire contestée par les associations
Vu l'article 13 de la loi du 24 mai 1872 relative au Tribunal des conflits, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, et l'article 22 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015 :
8. Aux termes du premier de ces textes, lorsque le représentant de l'Etat dans le département ou la collectivité estime que la connaissance d'un litige ou d'une question préjudicielle portée devant une juridiction de l'ordre judiciaire relève de la compétence de la juridiction administrative, il peut, alors même que l'administration ne serait pas en cause, demander à la juridiction saisie de décliner sa compétence.
9. Selon le second, si le jugement a rejeté le déclinatoire, le préfet peut élever le conflit par arrêté dans les quinze jours suivant la réception du jugement, le conflit pouvant également être élevé si le tribunal a, avant expiration de ce délai, passé outre et jugé au fond. Si une partie fait appel du jugement ayant admis le déclinatoire, le préfet peut saisir la juridiction d'appel d'un nouveau déclinatoire et, en cas de rejet de celui-ci, élever le conflit dans les mêmes conditions qu'en première instance.
10. Il en résulte que la procédure de conflit positif, qui n'est prévue que devant les juridictions de première instance et d'appel, ne peut être engagée devant la Cour de cassation.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
Déclare irrecevable le déclinatoire de compétence présenté par le préfet de l'Hérault ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé le vingt-et-un novembre deux mille vingt-quatre, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.